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Suite au succès du Livre "VIH, Hépatites virales, Santé sexuelle" - plus de 3000 téléchargements - l'AFRAVIH s'est lancée dans l'AFRAPEDIA, un livre multimédia à destination du grand public averti qui présente l'état des connaissances sur le VIH, les hépatites virales, la santé sexuelle et les infections virales chroniques ou émergentes.
Vous y trouverez des repères sur les thématiques clés de l'AFRAVIH, sous forme écrite mais aussi en vidéo.
VIHL’AFRAVIH est l’Alliance francophone des Acteurs de santé contre le VIH et les infections virales chroniques ou émergentes. Elle œuvre depuis plus de 10 ans à renforcer, dans les pays francophones, la mobilisation des acteurs et professionnels de santé des différentes communautés engagées dans la lutte contre le VIH et les infections virales chroniques.
Les auteurs et l'équipe AFRAPEDIA - VIH
Le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH), de type 1 (VIH-1) ou de type 2 (VIH-2), est un rétrovirus, c’est-à-dire un virus dont le matériel génétique (génome) est un ARN (comme le virus de la grippe ou les coronavirus). C’est aussi un virus capable de copier son ARN en ADN.
Ces possibilités, spécifiques à cette classe de virus, en font un prédateur doté de qualités hors pair. D’une part, il possède les qualités d’un attaquant de la cellule grâce à son ARN entraînant une forte multiplication de plusieurs milliards de virus chaque jour, qui détruisent des milliards de lymphocytes. D’autre part, grâce à sa transformation en ADN, il s’intègre au cœur du noyau de la cellule qu’il infecte pour y rester caché et silencieux et constituer ce que l’on appelle le réservoir viral. Cette persistance du VIH au sein de l’ADN des cellules infectées explique que l’infection VIH ne peut être aujourd’hui éradiquée, car on ne sait actuellement ni repérer les cellules réservoirs, ni désintégrer l’ADN viral qu’elles contiennent.
Les copies du VIH sont sphériques et entourées d’une enveloppe. Le VIH a été identifié pour la première fois en 1983 par une équipe française et initialement appelé LAV (Lymphadenopathy Associated Virus). En 1986, la découverte d’un deuxième virus différent du premier a conduit à une nouvelle classification définissant les VIH de type 1 (VIH-1) et de type 2 (VIH-2).
Les virus VIH-1 sont actuellement classés en quatre groupes : le groupe M (major, responsable de la pandémie mondiale), le groupe O (outlier), le groupe N (non-M non-O) et le groupe P, selon la chronologie de leur découverte. Les virus VIH-2 sont classés en neuf groupes (A à I) (figure 1).
Tous les VIH dérivent de virus de l’immunodéficience du singe (dits SIV). Cependant, les différents types et groupes de VIH dérivent de SIV présents chez différentes espèces de singes, parfois assez éloignées les unes des autres. Alors que les VIH-1 groupe M et N sont proches du SIVcpz (infectant une sous-espèce de chimpanzés dits Pan troglodytes troglodytes), les VIH-1 groupe O et P sont proches des SIVgor (infectant les gorilles) et le VIH-2 est plus proche des SIVsmm (infectant les sootey mangabey, petits singes d’Afrique de l’Ouest) (figure 2).
Ainsi, chaque groupe de VIH-1 et VIH-2 représente une introduction séparée d’une souche de SIV à l’homme. Le passage des différentes souches de SIV du singe à l’homme est expliqué par le fait que les singes ont été chassés, et sont parfois encore braconnés, comme gibier (chimpanzé, gorille, sooty mangabey) ou comme animal de compagnie (sooty mangabey).
La répartition géographique des différents VIH-1 diffère selon l’ancienneté de l’épidémie dans le pays, l’effet fondateur dans le groupe d’individus considéré et les migrations de population.
Dans les pays du Nord, le sous-type B est prédominant et il est responsable de l’épidémie initiale dans les pays industrialisés, en particulier l’Amérique du Nord et l’Europe de l’Ouest, dont la France.
En revanche, à l’échelle mondiale, les VIH-1 non-B représentent au moins 85 % des virus circulants. Les sous-types prédominants sont :
le sous-type C, responsable de 47 % des infections, principalement en Afrique du Sud et en Inde,
le sous-type B (12 %) en Amérique du Nord et en Europe,
le sous-type A (10 %) en Europe de l’Est, Asie centrale et Afrique de l’Est,
le CRF02_AG (7,7 %) en Afrique de l’Ouest et le CRF01_AE (5,3 %) en Asie du Sud-Est (figure 3).
La proportion de virus recombinants est de 23 %. En Afrique centrale, circulent tous les sous-types du groupe M et la majorité des formes recombinantes. Contrastant avec l’extraordinaire diffusion des VIH-1 du groupe M aboutissant à une pandémie, les infections par les VIH-1 non-M restent localisées en Afrique centrale, principalement au Cameroun.
Le VIH dispose d’une capacité très importante de muter, de faire varier son apparence et son contenu, en se reproduisant mais jamais complètement à l’identique, en mutant notamment sur ses enzymes. Sa diversité génétique est grande ; on dit qu’il est très variable.
Le facteur le plus contributif à la diversité génétique du VIH est le taux d’erreur de l’enzyme virale Transcriptase Inverse (TI), quand elle recopie le génome viral au cours du cycle de réplication. Cette introduction de mutations à une fréquence élevée, associée à un taux élevé de réplication virale (entre 109 et 1010 nouveaux virus produits par jour chez une personne infectée) en absence de traitement, génère une quantité importante de variants viraux par jour, appelés quasi-espèces.
À ces deux facteurs s’ajoutent les phénomènes de recombinaison entre deux génomes viraux, phénomène habituel entre virus qui s’échangent ainsi du matériel génétique.
Cette variabilité des VIH leur confère la possibilité de :
développer des mutations de résistance aux médicaments antirétroviraux,
échapper à l’action des anticorps produits par le système immunitaire en réaction à l’infection virale.
Le VIH a une structure sphérique d’environ 100 nm de diamètre, avec une enveloppe composée d’une bicouche lipidique d’origine cellulaire et de la glycoprotéine d’enveloppe.
Le VIH est un virus à ARN dont le génome comprend environ 10 000 paire de bases. Deux brins d’ARN viral sont présents dans la particule virale.
L’enveloppe virale est constituée de deux parties : une sous-unité transmembranaire (TM) et une sous-unité de surface (SU). La capside (dite antigène p24 car protéine d’un poids moléculaire de 24 kDa) va entourer le génome viral (figure 4).
Les cellules cibles du VIH portent à leur surface le principal récepteur du VIH : la molécule CD4. Ces cellules sont les lymphocytes T CD4+, en moindre proportion les macrophages, cellules chargées d’éliminer les éléments pathogènes intrus et les cellules dendritiques, chargées quant à elles d’apporter aux ganglions lymphatiques, piliers du système immunitaire, la particule virale à éliminer. Mais ce faisant, ces cellules circulantes vont contribuer à la dissémination du virus dans tout l’organisme.
L’entrée du virus dans la cellule cible se fait en trois étapes consécutives :
Attachement de la glycoprotéine de surface virale au récepteur cellulaire CD4 ;
Liaison de la glycoprotéine de surface à un corécepteur qui est une molécule insérée dans la membrane cytoplasmique de la cellule cible. Il existe deux principaux corécepteurs : (i) CCR5, principalement présent sur les monocytes-macrophages, et (ii) CXCR4, principalement présent sur les lymphocytes T ;
Fusion entre l’enveloppe virale et la membrane cellulaire, réalisée par la glycoprotéine transmembranaire de surface qui permet l’introduction de la particule virale à l’intérieur de la cellule.
Par une opération complexe, la TI va synthétiser un double brin d’ADN viral à partir du génome viral à ARN. La TI doit, de façon répétée, s’attacher et se détacher de l’ADN et de l’ARN viral, et c’est à cette étape que survient le risque d’erreur par dérapage à chaque ré-attachement et donc l’introduction de mutations. Or, ces erreurs ne peuvent pas être corrigées car la TI du VIH ne possède pas de propriété de « relecture ».
Cet ADN double brin est ensuite importé dans le noyau de la cellule lymphocytaire au sein d’un complexe de pré-intégration, puis intégré dans le génome humain par l’intégrase virale. Il est alors appelé ADN proviral.
Une partie de cet ADN VIH intégré dans le noyau du lymphocyte CD4, niché dans ses chromosomes, va rester en sommeil. L’autre partie va refabriquer de l’ARN, se multiplier et produire de nouveaux virions (nouvelles copies du virus).
Une fois dans le cytoplasme, l’ARN doit refabriquer les protéines structurelles du VIH. Ainsi, les gènes constitutifs du VIH (Gag et Pol), via l’action de la protéase virale, vont conduire à la fabrication des nouveaux virus. Une étape de maturation va permettre que soient libérés des virions.
La durée d’un cycle viral est très rapide, de l’ordre de 14 heures, et la production de virus par un sujet infecté est de l’ordre de un à dix milliards par jour !
La connaissance de ce cycle et des différentes étapes médiées par les enzymes constitutives du virus est évidemment un élément clé pour pouvoir imaginer, construire les parades à cette machinerie que sont les médicaments antirétroviraux (ARV) (Voir le Chapitre 12).
Corollaire d’importance, les ARV ne peuvent agir que sur un virus qui se multiplie mais pas sur un virus « dormant » dans le noyau et parfaitement silencieux. Les ARV n’agissent donc pas sur le réservoir.
L’intégration du génome viral dans le génome cellulaire entraîne une persistance du VIH dans l’organisme humain, ce qui empêche actuellement toute éradication virale. On distingue :
des réservoirs anatomiques, représentés par les organes et tissus dans lesquels le VIH persiste au cours du traitement ARV en raison de la mauvaise pénération de ces médicaments dans ces compartiments,
des réservoirs cellulaires principalement constitués par les lymphocytes T CD4+ mémoires, retrouvés surtout dans les organes lymphoides.
Le VIH-2, découvert en 1986, est très proche du virus de l’immunodéficience simienne du sooty mangabey. Le génome du VIH-2 ne partage que 40 à 50 % d’homologie nucléotidique avec le génome du VIH-1.
On estime entre 1 et 2 millions le nombre de personnes vivant avec le VIH-2 ; la majorité vit en Afrique de l’Ouest (Sénégal, Côte d’Ivoire, Mali, Guinée-Bissau, Burkina Faso, Cap-Vert) et, en Europe, dans deux pays ayant des liens historiques avec cette région : la France, où le VIH-2 représente 1,8 % des nouveaux diagnostics d’infection VIH, et le Portugal.
L’infection VIH-2, considérée comme une infection rétrovirale dite « atténuée » en comparaison avec l’infection par VIH-1, est caractérisée par :
une progression plus lente, avec une pente de décroissance des lymphocytes CD4 plus faible ;
un taux moindre d’événements sida ;
un taux de mortalité cinq fois plus faible ;
un niveau de réplication plus faible : 60 à 70 % des personnes vivant avec le VIH-2 ont une charge virale plasmatique spontanément indétectable en l’absence de traitement ARV ;
Le VIH-2 présente une résistance naturelle ou une sensibilité diminuée à plusieurs ARV, ce qui limite fortement les possibilités thérapeutiques. Ainsi, le VIH-2 est naturellement résistant à l’ensemble des INNTI, à l’inhibiteur de fusion enfuvirtide et à certains IP (seuls le lopinavir et le darunavir sont actifs). Les INI sont actifs.
Le VIH, le virus du sida, est présent dans tous les liquides biologiques de l’organisme des personnes vivant avec le VIH. Mais tous les liquides du corps humain n’ont pas le même pouvoir de transmission.
Le virus est en quantité trop faible dans la salive, la sueur, les larmes, les vomissures ou l’urine pour être transmis.
Par contre, le sang, le sperme, le liquide séminal (liquide transparent qui s’écoule au début de l’érection), les sécrétions vaginales, le liquide anal (rectal) et le lait maternel peuvent transmettre le VIH.
Il existe trois modes de transmission du VIH :
Il n’y a pas de risque pour la personne qui reçoit une fellation. La personne qui donne une fellation peut être infectée par le VIH car il y a une présence de liquide séminal (liquide qui apparaît pendant l’excitation). Le risque augmente lorsqu’il y a éjaculation dans la bouche, le sperme étant un liquide plus contaminant que le liquide séminal. Le risque vient de micro-lésions dans la bouche qui sont des « portes d’entrée » pour le virus. Exemples : petites plaies, abcès, boutons de fièvre sur les lèvres, etc…
Si vous pratiquez des fellations non protégées, même sans éjaculation, avec différents partenaires, vous multipliez donc les risques d’une transmission par fellation.
Pour éviter tout risque, le meilleur moyen est donc d‘utiliser . Il existe des préservatifs aromatisés! Dans le cas d’une fellation sans préservatif, il est déconseillé de se brosser les dents avant ou après une fellation, il est également déconseillé de boire de l’alcool (irritation des gencives).
D’autres sont, pour leur part, très facilement transmissibles lors d’une fellation. C’est le cas de l’herpès, la gonorrhée, le HPV, la chlamydia, l’hépatite B et la syphilis.
Il existe un risque de transmission :
Lors du partage de seringues et/ou d’autre matériel (coton, cuillère, garrot, eau,…) entre usagers de drogues par voie intraveineuse.
Lors d’une plaie accidentelle survenue, par piqûre ou par coupure provoquée par du matériel infecté, essentiellement chez les travailleur.euses de la santé (risque faible).
Lors de la transfusion de sang provenant d’une personne infectée par le VIH. Cette situation a disparu dans nos pays.
Il y a un risque de contamination de la mère séropositive à son enfant durant la grossesse (contamination par voie sanguine), l’accouchement (par voie sanguine et par les secrétions vaginales) et l’allaitement (par le lait maternel). Heureusement, aujourd’hui, grâce à un accompagnement médical adapté et la prise d’un traitement, les mères séropositives peuvent donner naissance à un enfant non contaminé.
Merci à la Plate-Forme Prévention Sida pour cette page sur les modes de transmission du VIH !
Sauf mention contraire, l'ensemble des contenus de l'AFRAPEDIA sont disponibles sous licence Creative Commons Attribution 4.0 International (CC BY 4.0).
Pour plus d'informations :





























un taux de transmission plus faible par voie sexuelle, de l’ordre de 10 fois moins ;
un taux de transmission par voie materno-foetale plus faible : 1-4 % pour VIH-2 vs 20-25 % pour VIH-1.

Les soins dentaires, le piercing et le tatouage sont également sans risques si les règles d’hygiène sont respectées et que le matériel est stérile et/ou à usage unique.















Si l’épidémie, devenue pandémie, de sida a été officiellement reconnue au début des années 1980, on sait aujourd’hui que le virus responsable est apparu chez l’Homme au tout début du XXe siècle, en Afrique centrale, par transmission à partir du singe. Le VIH s’est adapté et a circulé à bas bruit sur le continent africain, notamment au Congo, ainsi que chez des voyageurs et des colons, puis s’est propagé vers Haïti dans les années 1960 via des travailleurs haïtiens travaillant au Congo. Haïti étant à cette époque une destination de tourisme sexuel pour les gays américains, il est probable que le virus ait été introduit ainsi en Amérique du Nord, avant de disséminer dans le monde entier.
Les repères historiques présentés ici concernent les grandes étapes de l’évolution de l’épidémie depuis 1981, de l’acquisition des connaissances sur le (les) virus en cause, de la lutte contre l’infection et des progrès dans la prise en charge des malades, ainsi que des mobilisations communautaires, médicales, institutionnelles très riches qui ont émaillé cette histoire.
- Le 5 juin 1981, le CDC (Centers for Disease Control), agence fédérale américaine de surveillance épidémiologique, publie dans sa revue hebdomadaire une recrudescence anormale, survenue en quelques mois à Los Angeles, de cas de pneumonie appelée pneumocystose : en effet cinq jeunes hommes, homosexuels, ont été hospitalisés pour cette infection peu fréquente, qui ne survient habituellement que chez des personnes immunodéprimées.
- Puis, le 3 juillet, un article du New York Times fait état de plusieurs dizaines de cas d’un cancer rare, le sarcome de Kaposi, diagnostiqués, fait très inhabituel, chez des hommes jeunes, homosexuels, vivant dans la baie de San Francisco ou à New York.
À partir de ces premières alertes, les découvertes de cas se multiplient.
- Cette maladie d’origine inconnue, qui associe amaigrissement important, infections graves et cancers rares, se révèle gravissime, toujours fatale. Elle va connaître diverses appellations : « gay pneumonia », « gay cancer », GRID (Gay-Related Immune Deficiency) … jusqu’à la mise en évidence du point commun à tous les cas, un déficit de l’immunité qui semble acquis.
- Fin 1981, des cas sont signalés chez des utilisateurs de drogues injectables, ainsi que chez des personnes hémophiles ou transfusées.
- Une première théorie des origines du sida émerge, la nommant « maladie des 4H », pour héroïnomanes, homosexuels, hémophiles et Haïtiens.
- Les malades sont d'emblée stigmatisés et discriminés, et les peurs que la maladie suscite alimentent toutes sortes de suppositions sur son mode de transmission : la sueur, l’air, la vaisselle partagée, les brosses à dents…
- En 1982, cette maladie prend le nom du désordre immunitaire majeur qu’elle induit : un déficit profond de l’immunité, du jamais vu chez des sujets jeunes et auparavant en bonne santé. Le sigle AIDS, pour Acquired Immunodeficiency Syndrome, est désormais utilisé aux États-Unis. Dans les pays francophones, ce sera le SIDA (syndrome d’immunodéficience acquise), devenu sida, nom commun.
- On découvre que la maladie peut être transmise par voie sexuelle aux femmes. Des cas similaires sont repérés en Afrique.
- L’hypothèse d’une origine infectieuse, et même virale, se renforce, en raison des modes de transmission alors identifiés (sanguin et sexuel).
- Une équipe de l’Institut Pasteur de Paris (Françoise Barré-Sinoussi, Luc Montagnier, Jean-Claude Chermann) isole d’un ganglion lymphatique d’un malade suivi par le Dr Willy Rozenbaum un rétrovirus inconnu, qu’ils baptisent LAV (pour Lymphadenopathy Associated Virus).
- Cette même année, preuve est faite que ce virus est bien la cause du sida. Sa cible principale est une catégorie de cellules très importantes du système immunitaire, les lymphocytes T porteurs du marqueur CD4, dont le taux sanguin est effondré chez les malades. La destruction des T CD4+ explique en grande partie le déficit immunitaire : leur numération dans le sang devient un marqueur majeur permettant d’évaluer l’importance de ce déficit et son évolution.
- Fin 1983, les trois principaux modes de contamination sont connus, validés par les premières études épidémiologiques : rapport sexuels, transmission par le sang (partage de seringues, transfusion non sécurisée) et transmission mère-enfant (pendant la grossesse, au cours de l’accouchement ou lors de l’allaitement).
- débute une surveillance globale de la maladie, repérée dans de nombreux pays désormais.
- Une équipe nord-américaine dirigée par Robert Gallo revendique à son tour l’identification de ce nouveau virus et le baptise HTLV-III. Après des années de controverse franco-américaine, il est finalement reconnu par la communauté scientifique internationale que l’équipe française est bien le véritable découvreur du virus responsable du sida. Le nom de VIH (virus de l’immunodéficience humaine) lui sera officiellement donné en 1986, et le prix Nobel de médecine attribué à F. Barré-Sinoussi et L. Montagnier en 2008.
- L’épidémie de sida s’étend en Afrique, en population générale, principalement par transmission hétérosexuelle.
- En France, l’association Aides est créée, avec pour objet : « identifier et faire connaître les besoins sociaux des malades du sida ; créer des réseaux de soutien aux malades ; diffuser une information scientifique dans les milieux à haut risque et auprès du public ; encourager la recherche sur le sida par des interventions publiques et un soutien financier ; organiser des campagnes d'information, de prévention, de financement, de défense de l'image et de la dignité des malades. »
Très tôt - dès 1981 aux États-Unis - face à l’impuissance de la médecine à soigner, face au rejet et aux discriminations dont les personnes atteintes sont l’objet, des associations et groupes de pression communautaires se mobilisent fortement pour agir, interpeller les pouvoirs publics, les élus, les chercheurs, les laboratoires pharmaceutiques, les sociétés d’assurance. Activistes, ils vont profondément impacter les relations entre pouvoir, médecine et droits des patients. Revendiquant une expertise basée sur leur expérience (« malades experts »), ils joueront et continuent de jouer un rôle majeur dans la lutte contre l’épidémie, la mise à disposition des traitements (activisme thérapeutique), la reconnaissance des droits des malades etc.
- Mise au point des premiers tests sérologiques (ELISA) permettant le diagnostic de l’infection à VIH. On découvre que des personnes peuvent être porteuses du VIH pendant des années sans être (encore) malades, mais peuvent le transmettre : on parle alors des « séropositifs », et aujourd’hui plutôt de « PVVIH » (pour personnes vivant avec le VIH).
Dépister, informer, prévenir deviennent des priorités, mais aussi l’objet d’intenses débats éthiques et sociétaux, notamment sur un dépistage, obligatoire ou volontaire, son ciblage, le respect de l’anonymat des personnes dépistées et la confidentialité du résultat du test.
- Le risque transfusionnel, pleinement compris, est mieux pris en compte. Il l’était déjà dans plusieurs pays depuis 1983-1984 mais en France, l’organisation de la sécurité transfusionnelle (dépistage du VIH chez les donneurs de sang, inactivation par chauffage dans des produits issus du plasma) a été plus tardive et mal mise en œuvre pendant plusieurs mois, conduisant au « scandale du sang contaminé » résultant de la poursuite de transfusions de produits non sécurisés, malgré l’alerte.
- La 1ère Conférence internationale sur le sida se tient à Atlanta aux États-Unis, pays où 23 000 personnes sont atteintes et où on compte déjà 12 500 morts.
- Le premier test sanguin de détection du VIH/sida est breveté par la Food and Drug Administration (FDA) aux États-Unis et mis sur le marché.
- Un virus un peu différent, le VIH-2, est isolé. Il est très proche du virus de l’immunodéficience simienne du singe sooty mangabey, et la très grande majorité des personnes infectées par ce virus se trouve en Afrique de l’Ouest. La maladie qu’il provoque est dite « atténuée » en comparaison avec celle due au VIH-1.
- Le tout premier médicament antirétroviral actif, l’AZT ou zidovudine, est commercialisé : c’est un inhibiteur nucléosidique de la transcriptase inverse qui, un temps, donnera l’illusion d’un bénéfice mais se révèlera trop peu efficace et trop mal toléré en monothérapie à fortes doses pour renverser le pronostic extrêmement péjoratif de la maladie.
- 1987 : l’OMS lance, en mai, une stratégie mondiale de lutte contre le sida, régulièrement renouvelée depuis.
- Le sida est la première maladie faisant l’objet d’un débat à l’assemblée générale des Nations Unies.
- L’activiste Larry Kramer fonde Act Up aux États-Unis. Ce groupe, dont le modèle essaimera dans plusieurs autres pays (surtout occidentaux), sera particulièrement actif dans la lutte pour l’accès précoce aux traitements, dans la défense des droits des minorités et dans l’information sur la prévention.
- 1988 : un sommet mondial des ministres de la Santé de 148 pays se tient à Londres pour élaborer une stratégie commune de lutte contre le sida.
- Le 1er décembre est déclaré par l’OMS Journée mondiale contre le sida, et l’est encore chaque année.
- 1989 : Création d’Act Up Paris
- La 5e Conférence internationale sur le sida a lieu à Montréal en juin 1989, avec pour la première fois la participation active de malades et de personnes infectées (« patients experts »).
- 1991 : le ruban rouge devient le symbole international de sensibilisation au sida.
- 1994 : création d’, programme conjoint des Nations Unies exclusivement dédié à la lutte contre le VIH/sida. Sa collecte de , actualisée chaque année, est précieuse pour suivre l’évolution de la situation. Insérer LOGO
- L’AZT est officiellement recommandé aux femmes enceintes, des études ayant montré dès 1992 que son administration en fin de grossesse réduit de deux tiers le risque de transmission du VIH de la mère à l’enfant.
- Une nouvelle famille de médicaments antirétroviraux - les inhibiteurs de protéase (IP) - vient renforcer l’arsenal thérapeutique. Combinés aux inhibiteurs nucléosidiques INTI (classe dont fait partie l’AZT et qui s’est enrichie d’autres molécules comme stavudine, didanosine, lamivudine), les IP, actifs sur les virus résistants aux INTI utilisés jusqu’à présent, vont permettre en trithérapie de réduire drastiquement la quantité de virus, de renverser l’immunodépression et donc d’améliorer considérablement le pronostic des patients.
Cependant, et ceci reste vrai actuellement, toutes les molécules développées jusqu’à maintenant sont inactives sur le VIH intégré au cœur du noyau cellulaire. Le VIH persiste dans les cellules, à l’état latent, dans les réservoirs.
- L’OMS estime qu’environ 18 millions d’adultes et 1,5 million d’enfants ont été infectés par le VIH depuis le début de la pandémie.
- Une troisième classe de médicaments antirétroviraux est mise sur le marché : les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI).
- L’utilisation systématique des trithérapies (HAART - highly active antiretroviral therapy) marque un tournant majeur dans la prise en charge de l’infection au VIH. Il est enfin possible d’obtenir un contrôle de la multiplication du virus et d’observer une restauration immunitaire, avec une remontée du taux sanguin des lymphocytes CD4. Le risque de survenue du sida chez les personnes infectées traitées s’effondre, passant de 20% sur un an à 2-3%.
- Une première en virologie clinique : le VIH va pouvoir être directement quantifié par la technique PCR (polymerase chain reaction) d’amplification de l’ARN viral, une technique toute nouvelle à l’époque et qui a fait son chemin depuis ! Ceci permet de mesurer la quantité de virus circulant dans le sang (charge virale) et d’évaluer ainsi l’efficacité des nouveaux traitements antirétroviraux à maintenir cette charge virale très basse, voire indétectable. Disposer de cette charge virale comme marqueur va aussi contribuer à accélérer le développement des antirétroviraux.
- La thérapie HAART, qui deviendra cART (combined antitretroviral therapy) est adoptée comme traitement standard dans les pays riches, mais reste inaccessible au Sud, en raison de son coût élevé. Pourtant, la très grande majorité des malades est en Afrique subsaharienne. Une mobilisation internationale débute pour réparer cette injustice, mais la réponse à l’épidémie en Afrique subsaharienne va devoir pendant encore plusieurs années se focaliser uniquement sur la prévention.
- On voit enfin s’infléchir nettement la courbe des décès dus au sida (-47% entre 1996 et 1997 aux États-Unis, par exemple).
- ONUSIDA estime que 30 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde, et que 16 000 nouvelles infections surviennent chaque jour.
- La 13e Conférence mondiale sur le sida à Durban (Afrique du Sud), mi-juillet 2000, est centrée sur les enjeux politiques, démographiques et économiques de l'épidémie. La géographie de l’épidémie est sans appel : plus de 70% des personnes infectées dans le monde vivent en Afrique subsaharienne, sans accès aux traitements. L’Afrique du Sud est le pays le plus touché au monde, avec environ 10% de sa population infectée.
- Au même moment, la revue Nature publie la « Déclaration de Durban ». Plus de 5 000 médecins et scientifiques, dont onze prix Nobel, y affirment que les preuves montrant que la cause du sida est bien le VIH sont claires, exhaustives et non équivoques. La responsabilité du VIH dans le sida est en effet contestée publiquement par certaines personnalités politiques ou religieuses, notamment le président sud-africain de l'époque, Thabo Mbeki.
- En juillet aussi, ONUSIDA, l’OMS et d’autres organismes internationaux annoncent l’ouverture de négociations avec cinq firmes pharmaceutiques afin d’obtenir des antirétroviraux à prix réduits pour les pays à ressources limitées.
- Création de la , financeur important de la recherche sur le VIH/sida, ainsi que sur la lutte contre l’épidémie dans les pays du Sud.
- Mars 2001 : à Pretoria (Afrique du Sud) s’ouvre un procès crucial, intenté par trente-neuf firmes pharmaceutiques au gouvernement sud-africain contre une loi autorisant l’importation des médicaments antirétroviraux génériques à bas prix, et qui met en place un mécanisme de contrôle des prix. Les industriels estiment que cette loi viole les règles commerciales internationales protégeant les brevets. Une campagne très efficace de mobilisation de l’opinion publique mondiale conduit les firmes à retirer leur plainte. Les droits des malades sont reconnus face au droit du commerce.
- Fin juin, une session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies élabore un .
- L’infection par le VIH devient la première cause de mortalité chez les 15-59 ans dans le monde.
- 2002 : Création du , qui appuie son action sur des partenariats associant autorités publiques, société civile, institutions techniques, secteur privé et personnes touchées par les maladies.
- 2003 Lancement du PEPFAR (United States President’s Emergency Plan For AIDS Relief), plan d’aide d’urgence des États-Unis à l’intention des pays les plus affectés par l’épidémie.
- 1er décembre 2003, l’OMS annonce l’initiative « 3 by 5 », qui vise à mettre sous traitement 3 millions de personnes dans le monde d’ici 2005.
- L’Organisation mondiale du commerce autorise temporairement les pays en développement à importer ou fabriquer des médicaments génériques en cas d’urgence sanitaire. Cet accord sera rendu pérenne en 2005.
- 2004 : ONUSIDA lance la « Coalition mondiale sur les femmes et le sida », regroupement informel d’organisations œuvrant à atténuer l’impact du VIH/sida chez les femmes et les filles.
- 2006 : Création d’, organisation internationale centralisant les achats de traitements médicamenteux afin d'obtenir les meilleurs prix possibles, en particulier à destination des pays en voie de développement. UNITAID est financé par une taxe de solidarité sur les billets d'avion, adoptée par plusieurs pays à l’initiative des présidents brésilien Lula da Silva et français Jacques Chirac.
- 2006 : l’OMS et ONUSIDA recommandent « la circoncision masculine à tout âge comme stratégie additionnelle dans la lutte contre le VIH », après la démonstration par une étude menée au Kenya d’une réduction de plus de 50% du risque de transmission du VIH lors d’un rapport hétérosexuel en cas de circoncision. Des programmes seront mis en place dans 14 pays d’Afrique australe ou de l’Est, où cette pratique est peu fréquente et le VIH très présent.
- 2008, création de : il s’agit d’un réseau d’organisations communautaires de lutte contre le sida, dont l’action se déploie dans plus de 50 pays en matière de dépistage communautaire, renforcement de l’offre en santé sexuelle, réduction des risques…
- Entre 2010 et 2015, plusieurs essais cliniques vont démontrer l’efficacité majeure de la prise orale d’antirétroviraux par des personnes séronégatives, avec une quasi disparition du risque d’acquisition du VIH grâce à la prise de la combinaison fixe TDF/3TC prise régulièrement lors de rapports homosexuels comme hétérosexuels : la prophylaxie pré-exposition (PrEP) est en marche.
- En parallèle, un essai permet de montrer que l’utilisation lors des rapports sexuels d’un gel vaginal microbicide contenant 1% de ténofovir (médicament antirétroviral), peut réduire de 40 à 50% le risque d’infection au VIH chez les femmes.
- 2013 : l’OMS recommande de commencer le traitement antirétroviral lorsque le compte de CD4 descend sous 500/mm3.
- 2014 : dans l’objectif de mettre fin à l’épidémie, l'ONU fixe de nouvelles cibles pour le traitement du VIH : d’ici 2020, 90% des personnes vivant avec le VIH devront être diagnostiquées, 90% des cas diagnostiqués seront traités, et 90% des cas traités auront une charge virale indétectable (cible 90-90-90).
- 2015 : l’essai START démontre que l’initiation du traitement antirétroviral précoce, dès le diagnostic d’infection au VIH et même au-dessus de la limite de 500 CD4/mm3, réduit de moitié la progression de l’infection VIH avec une réduction des comorbidités graves, comme les maladies cardiovasculaires, certains cancers ou la tuberculose. Ainsi nait le concept de traitement universel pour tous les PVVIH, sans limite de niveau de lymphocytes CD4.
- TASP (treatment as prevention) : les résultats les plus récents des études HPTN 052 et PARTNER confirment que le traitement antirétroviral et une charge virale indétectable chez un partenaire infecté par le VIH conduisent à ne plus transmettre le VIH, pour les rapports sexuels anaux et vaginaux.
- 2016 : De nouvelles lignes directrices de l’OMS recommandent de traiter toutes les personnes vivant avec le VIH, quel que soit leur taux de CD4.
- Le slogan U=U (Undetectable=Untransmittable), en français I=I (Indétectable=Intransmissible), de l’organisation américaine Prevention Access Campaign est repris et largement diffusé.
- En 2019, l’OMS met à jour ses recommandations sur la PrEP : la PrEP à la demande est préconisée en remplacement de la PrEP orale quotidienne pour les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes.
- La nouvelle maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) est déclarée pandémie par l’OMS, avec un impact sur les définitions des priorités sanitaires à l’échelle mondiale, ainsi que sur l’organisation des services de lutte contre le VIH et leurs prestations, impact dont on ne peut pas encore mesurer l’ampleur.
- Les vaccins contre la COVID-19 sont reconnus efficaces et sûrs pour les personnes infectées par le VIH dont la réplication est contrôlée.
- À la suite du succès de son vaccin à ARN messager contre le SARS-CoV2, la firme Moderna entame les essais de phase I pour un vaccin du même type contre le VIH.
- L’objectif 90-90-90 de l’ONU, établi pour 2020, n’a pas été complètement atteint, en particulier le 1er objectif de dépistage et le 3e d’une infection maitrisée au plan virologique (avec une charge virale indétectable). Il faut maintenant viser 2025, avec des objectifs portés à 95-95-95.
- La recherche a permis le développement des molécules « longue durée », capables d’agir après une prise pendant plusieurs semaines et même mois. Celles-ci sont évaluées autant dans le traitement que dans la prévention pour imaginer un monde sans sida.
L’agent causal du sida, le VIH, est découvert en 1983. Faire le diagnostic de la maladie va constituer la première étape majeure de sa prise en charge. On ne sait pas détecter le virus dans le sang de façon directe : la mesure du virus dans le sang par PCR n’apparaitra qu’en 1995. Par contre, on peut dès 1985 dépister les anticorps fabriqués par l’organisme quand il est infecté, au moyen de tests sérologiques.
Les activités prioritaires du dépistage vont être dans un premier temps :
celles qui relèvent de la sécurité transfusionnelle (don du sang) pour dépister le sang contaminé ;
celles de la surveillance épidémiologique, pour renseigner sur l’épidémie et identifier les populations les plus exposées.
L’hépatite B est une infection virale qui touche des millions de personnes dans le monde. Elle peut s’avérer particulièrement dangereuse en cas de transmission de la mère à l’enfant. L’objectif de ce chapitre est de fournir, à l’attention des parents, des informations importantes sur l’hépatite B et les moyens d’éviter sa transmission aux nourrissons.
Nous parlerons de la transmission mère-enfant de l’hépatite B, de l’efficacité de la vaccination contre l’hépatite B dès la naissance, de la couverture vaccinale actuelle, des défis pour assurer une vaccination dans les meilleurs délais, ainsi que d’autres moyens de prévention de la transmission mère-enfant.
Asepsie : absence de micro-organismes sur une personne, un objet ou dans un lieu, susceptibles d'entraîner l'apparition d'une infection.
Carcinome hépatocellulaire : représente 90 % des cancers primitifs du foie. Il tient son nom des cellules du foie à partir desquelles il se développe, les hépatocytes. Le plus souvent le carcinome hépatocellulaire apparaît sur un foie endommagé par une maladie.
Cellules de Leydig : Cellule située dans le tissu interstitiel testiculaire, qui élabore la testostérone et forme des petits amas au contact des vaisseaux, entre les tubes séminifères. Son cytoplasme éosinophile contient des vacuoles lipidiques en quantité variable.
Cellules Natural Killer : les cellules natural killer (NK) sont des grands lymphocytes granuleux qui appartiennent au système immunitaire inné. Elles participent à l'immunosurveillance tumorale et au contrôle précoce des infections microbiennes.
Charge virale : la charge virale, c'est la quantité de VIH qu'il y a dans le sang d'une personne séropositive. Quand le VIH entre dans le corps, il se multiplie pour attaquer de plus en plus le système immunitaire (le système de défense du corps).
Cirrhose : la cirrhose est une maladie grave du foie qui endommage irréversiblement cet organe digestif. La consommation d'alcool en est la cause principale. Elle peut aussi survenir à la suite d'une hépatite virale chronique, d'une stéatose hépatique (foie gras non alcoolique) ou d'une maladie rare.
Corps jaune : glande endocrine qui se développe dans l'ovaire, de façon temporaire et cyclique après l'ovulation, et qui sécrète de la progestérone.
Cytokines : molécule sécrétée par un grand nombre de cellules, en particulier les lymphocytes (globules blancs intervenant dans l'immunité cellulaire) et les macrophages (cellules de défense de l'organisme chargées d'absorber des particules étrangères) et impliquée dans le développement et la régulation des réponses immunitaires.
Cytoplasme : partie de la cellule qui entoure le noyau.
Endocytose : l'endocytose est le mécanisme de transport de molécules, voire de particules, vers l'intérieur de la cellule.
Fibrose : la fibrose est la formation d'une quantité anormalement abondante de tissu cicatriciel dans le foie. Elle se produit quand le foie essaie de se réparer et de remplacer des cellules endommagées.
Fist-fucking : le fist-fucking (terme argotique anglais signifiant « foutre avec le poing ») est une pratique sexuelle consistant à pénétrer (fuck) le vagin ou le rectum avec le poing (fist).
Gonades : Organe sexuel qui produit les gamètes. Gonade femelle : ovaire ; gonade mâle : testicule.
Hépatocytes : Les hépatocytes (ou cellules hépatiques) sont des cellules constituant la grande majorité des cellules du foie.
Infection iatrogène : Se dit d'une manifestation pathologique due à un acte médical, spécialement à un médicament.
Lymphocytes T : les lymphocytes T cytotoxiques (CTL) sont des cellules tueuses essentielles dans la réponse immunitaire contre les virus et les cancers.
Macrophages : les macrophages résidents et recrutés orchestrent la défense du foie contre les infections. Les macrophages sont des cellules clés de l'immunité innée. Par la phagocytose – capture et ingestion d'éléments à détruire – ils participent à la défense des tissus de l'hôte contre l'infection.
Myélinisation : Formation d'une gaine de myéline autour des fibres nerveuses pendant le développement du système nerveux. La myéline, la gaine isolante qui entoure les prolongements de nos neurones, est indispensable à la bonne conduction de l'influx nerveux et au bon fonctionnement des neurones.
Stéatose hépatique : accumulation de graisses dans les cellules du foie. La stéatose est l'accumulation de graisses à l'intérieur de cellules qui, normalement, n'en contiennent pas ou peu. Le foie, qui comporte très peu de graisses lorsqu'il est sain, peut être le siège de cette concentration.
Transaminase ALAT : les transaminases (ASAT et ALAT) sont des bons marqueurs des maladies du cœur et du foie d'où leur recherche possible lors d'une prise de sang.


En 1987, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à travers son Programme spécial de lutte contre le sida, va tenir à Genève une réunion sur les critères relatifs aux programmes de dépistage du VIH. Le rapport de cette réunion éclaire les enjeux posés par le dépistage dès les débuts de la réponse.
« Il importe toutefois de bien penser l’utilité de tels programmes par rapport aux effets pervers qu’ils risquent d’avoir.
Les programmes de dépistage du VIH soulèvent de vastes problèmes allant au-delà de la simple reconnaissance des individus infectés. En raison des modes de propagation extrêmement limités du VIH, du caractère intime du comportement généralement impliqué dans la transmission et de l’absence actuelle de moyens de lutte spécifique, l’institution de programmes de dépistage doit s’entourer de la plus grande prudence. De tels programmes risquent de constituer une ingérence dans la vie privée, d’être coûteux et inefficaces et de mobiliser des ressources humaines, matérielles, financières au détriment des programmes d’éducation dont on sait qu’ils constituent la principale et la plus efficace des mesures de prévention qui existent à l’heure actuelle.
[…]
En l’absence d’un traitement efficace contre les infections à VIH, l’institution de programmes de dépistage du VIH a pour justification sur le plan de la santé publique que l’identification des sujets infectés doit contribuer à la réduction de la transmission du VIH. »
Le comité d’experts va émettre une série de recommandations qui vont faire du dépistage du VIH un dépistage « exceptionnel » par rapport à d’autres pathologies.
En premier lieu, un conseil individualisé pré- et post-test est essentiel, tant pour l’annonce d’un résultat positif que pour éduquer les personnes dépistées afin de favoriser l’adoption de comportements à moindre risque.
« Il est donc impératif d’informer les sujets avant de pratiquer l’épreuve [de recherche du VIH] et d’accompagner de conseils l’annonce des résultats à l’intéressé ; dans tous les cas où cela sera possible, les résultats seront communiqués personnellement par un conseiller qualifié. »
Le consentement éclairé et la confidentialité des données constituent deux autres prérequis essentiels au dépistage.
« Le fait d’être la cible d’un programme de dépistage peut avoir pour les intéressés […] des conséquences sociales adverses graves, notamment l’isolement social, des pertes économiques, l’annulation de contrats d’assurance et la discrimination sur le plan de l’emploi, des études, du logement, des soins de santé et des services sociaux. Ces conséquences potentiellement destructives donnent une urgence spéciale aux problèmes de consentement éclairé du sujet et de la confidentialité des données. »
Ainsi, le dépistage du VIH s’est inscrit très tôt dans une perspective de respect des droits de l’Homme.
« Le droit de toute personne au respect de sa vie privée peut être violé si des renseignements concernant les résultats de la sérologie du VIH (ou même simplement le fait que cet examen a été prescrit ou demandé) sont divulgués sans l’autorisation de la personne concernée ou sans que ce soit pour des raisons évidentes de santé publique. Pour respecter les droits de l’Homme, il convient d’utiliser les mesures les moins inopportunes qui permettront d’atteindre les objectifs de santé publique visés. »
Enfin, dans un contexte où certains gouvernements envisageaient la mise en place de programmes de dépistage obligatoires, le comité d’experts réunis par l’OMS a insisté sur le caractère volontaire que devait avoir le dépistage du VIH.
« Le contrôle universel des donneurs de sang ou de produit sanguins et de cellules/tissus/organes se justifie tout à fait. […] Comme les autres modes de transmission […] sont la conséquence de comportements d’ordre privé, l’efficacité de programmes de santé publique complémentaires dépendra largement de la participation volontaire et d’un effort d’éducation visant à susciter une modification des comportements dangereux.
Les participants à la réunion ont été d’avis que des services de conseil et de recherche des anticorps anti-VIH facilement accessibles, assurés sur une base volontaire, ont plus de chance que le dépistage obligatoire de susciter des modifications de comportement qui contribueront à […] la réduction de la propagation du VIH. Il y a des mesures de prévention plus efficaces, moins importunes et moins coûteuses que le dépistage universel obligatoire. »
Dans plusieurs régions du monde, des programmes de dépistage obligatoire vont être envisagés voire mis en œuvre par certains gouvernements. En 1992, l’Assemblée mondiale de la santé va se positionner contre le dépistage obligatoire :
« Aucune considération de santé publique ne peut légitimer des mesures de lutte contre le sida attentatoires aux droits des individus et notamment des mesures tendant à l’instauration d’un dépistage obligatoire. »
Une consultation sur le dépistage de l’infection à VIH sous l’égide de l’OMS en novembre 1992 va préciser cela.
« Le test obligatoire et autres types de test sans consentement éclairé n’ont pas leur place dans un programme de lutte contre le sida. »
Est promu un dépistage volontaire qui doit :
faire partie d’un programme de conseil complet (pré- et post-test) ;
laisser l’individu entièrement libre de faire le test ou non ;
être confidentiel ou anonyme ;
être techniquement irréprochable.
En France, des consultations de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) vont être mises en place dès 1988. Le dépistage reposant sur des examens réalisés en laboratoire, il y a un délai entre la première consultation (où le conseil pré-test est réalisé et une prise de sang effectuée) et la remise du résultat (à l’occasion d’une seconde consultation), de l’ordre de 5 à 7 jours. L’attente du résultat est souvent source de stress et d’anxiété conduisant certains à ne pas venir retirer leurs résultats.
En Afrique subsaharienne, les tests de dépistage du VIH ne sont disponibles dans un premier temps que dans le cadre de la surveillance épidémiologique, de la sécurité transfusionnelle et de la confirmation diagnostique des personnes présentant des signes évocateurs de sida. Les personnes désireuses de connaître leur statut VIH n’avaient alors d’autres choix que de se rendre à leurs frais dans un laboratoire privé ou bien de donner leur sang pour bénéficier d’un test gratuit. Cette dernière pratique a eu pour effet d’augmenter le risque de contamination des poches de sang.
Progressivement, vont s’ouvrir des services de dépistage volontaire, notamment sous la forme de centres de dépistage volontaire (CDV). Les piliers du dépistage volontaire (confidentialité, conseil et consentement éclairé) seront repris dans les différents documents normatifs de l’OMS, parfois sous l’appellation des « 3 Cs » introduite en 2005, plus récemment étendue à « 5 Cs » en 2015 (consent, confidentiality, counselling, correct results and connection) par l’ajout de la fiabilité du résultat et du lien vers les soins.
L’arrivée des inhibiteurs de la protéase en 1996 et des fameuses « trithérapies » va changer la donne. Des traitements efficaces existent dès lors et des réponses en termes de prise en charge peuvent être offertes aux personnes diagnostiquées séropositives au VIH.
La perspective d’un traitement relance la nécessité de développer des programmes de dépistage, à tout le moins dans les pays du Nord.
En Afrique subsaharienne, les traitements resteront encore plusieurs années difficilement accessibles et limités à une « poignée » de patients. Avec la création du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en 2002 et du President’s emergency plan for AIDS relief (Pepfar) en 2003, l’accès gratuit aux traitements antirétroviraux va devenir progressivement une réalité dans nombre de pays africains à partir de 2004.
Afin d’identifier les personnes à prendre en charge, les programmes de dépistage vont se développer en parallèle. Ainsi, dans un pays comme la Côte d’Ivoire, le nombre de centres de dépistage volontaire va augmenter de 85 à 549 entre 2004 et 2009. Cependant, le retard pris en matière de dépistage est massif. En 2003, seuls 0,2 % des adultes des pays à faibles et moyens revenus avaient eu accès à des services de conseil et dépistage du VIH. Au niveau mondial, en 2005, l’Onusida estimait que seuls 12 % des personnes souhaitant se faire dépister avaient été en capacité de le faire.
À partir de 2007, l’OMS et l’Onusida vont proposer un changement de paradigme, avec le développement du conseil et dépistage à l’initiative des prestataires de santé ou CDIP. Alors que le dépistage volontaire repose une démarche des personnes devant se rendre dans une structure dédiée et pour lesquelles un consentement explicite au dépistage est demandé (approche dite opt-in), le CDIP repose sur une routinisation du dépistage dans des structures de santé, avec une proposition de test effectuée directement par le soignant aux patients venus consulter pour d’autres raisons. Dans le cadre du CDIP, un consentement éclairé est suffisant, dès lors que le patient n’a pas exprimé un refus explicite (approche dite opt-out). Les recommandations stipulent néanmoins que la possibilité de pouvoir refuser doit être mentionnée explicitement au patient.
L’OMS et l’Onusida recommandent la mise en œuvre du CDIP pour les patients présentant une infection opportuniste ou fréquemment associée au VIH (par exemple les infections sexuellement transmissibles), ou appartenant à une population particulièrement exposée (en substance les populations dites clés comme les travailleuses du sexe, les hommes ayant des rapports avec des hommes ou les usagères et usagers de drogue), lors du suivi prénatal pour les femmes enceintes (dans le cadre des programmes de prévention de la transmission mère-enfant) et, de manière plus large, dans les pays à épidémie dite généralisée (prévalence >1 % en population générale) à tout patient, quel que soit le motif de consultation.
En quelques années, la majorité des pays africains ont intégré le CDIP dans leur politique de dépistage du VIH, augmentant ainsi de manière importante l’accès au dépistage. Cependant, les succès du CDIP sont mitigés selon le type de structures de santé. Si, dans la très grande majorité des cas, les patients acceptent le dépistage du VIH quand il leur est proposé, la proposition d’un test par les soignants varie fortement. Un dépistage du VIH est plus souvent proposé aux patients lorsque le CDIP est organisé avant ou pendant la consultation. Le manque de temps, la charge additionnelle de travail, la crainte des soignants d’une réaction négative des patients, ou encore la mauvaise coordination entre les services sont des obstacles bien documentés à la proposition de dépistage.
Certaines études ont montré que le dépistage du VIH proposé et réalisé avant la consultation médicale par un personnel dédié était le modèle organisationnel le plus pertinent, du fait qu’il ne nécessite ni temps d’attente supplémentaire pour le patient ni temps de consultation supplémentaire pour les professionnels de santé. Les modèles organisationnels qui réfèrent les patients vers le dépistage à la fin de la consultation vers un autre service ou une autre structure de santé doivent être évités afin de maximiser le nombre de patients testés. Le dépistage du VIH proposé et réalisé avant ou pendant la consultation est à privilégier.
L’offre de dépistage est plus élevée lorsque le dépistage est en quelque sorte « normalisé », routinisé. C’est notamment le cas dans les consultations prénatales où, avec le développement des programmes de prévention de la transmission de la mère à l’enfant, le dépistage est le plus souvent proposé en routine lors de la première consultation de suivi pendant la grossesse.
À la fin des années 1990 et au début des années 2000, vont se développer des tests de dépistage dits « rapides ». Il s’agit de dispositifs simplifiés qui ne nécessitent pas d’équipement lourd (laboratoire, eau, électricité). Le résultat est disponible en moins de trente minutes et ils ne nécessitent qu’une simple goutte de sang qui peut être prélevée au bout du doigt. Ils peuvent donc être réalisés par des non professionnels de santé après avoir suivi une formation courte. Avec la baisse de leur coût, ces tests rapides vont se révéler parfaitement adaptés aux contextes des pays à ressources limitées. Surtout, ils vont constituer une opportunité pour développer de nouvelles stratégies de dépistage.
En premier lieu, des agents communautaires, déjà engagés dans des programmes de sensibilisation et de prévention, vont pouvoir être spécifiquement formés à la réalisation du test rapide et ainsi « décharger » les professionnels de santé, dans une perspective de délégations des tâches. Cela concerne en premier le dépistage dans les structures de santé : certaines d’entre elles vont accueillir des agents communautaires pour réaliser le dépistage directement dans les structures sanitaires. Surtout, les tests rapides vont être l’occasion de développer des stratégies de dépistage « hors les murs », en dehors des structures de santé et au plus près des populations. Ces campagnes de dépistage en dehors des structures de santé peuvent être menées directement par des associations communautaires et autres organisations non gouvernementales.
En Afrique australe et orientale, où l’on prend conscience du caractère massif de l’épidémie (dans certaines régions, la prévalence du VIH, c’est-à-dire la proportion de personnes infectées, peut dépasser 30% chez les adultes), des campagnes de dépistage de masse vont être lancées grâce à des cliniques et des équipes mobiles, en porte-à-porte à domicile, sur des marchés, des lieux de socialisation, des places publiques, des églises… Il s’agit des prémisses des approches de dépistage universel qui commenceront à être favorisées dans ces régions dans les années 2010.
En Afrique de l’Ouest et du centre, notre compréhension des épidémies change au milieu des années 2000. Avec la mise en place d’enquêtes épidémiologiques en population générale, on réalise que l’on avait surestimé les épidémies et que la prévalence du VIH en population générale se situe plutôt sous les 5%. Des premières enquêtes seront menées auprès d’homosexuels masculins et l’on réalise que cette population, longtemps non considérée en Afrique subsaharienne, est particulièrement touchée par le VIH. Une attention nouvelle est portée aux travailleuses du sexe qui avaient été quelque peu oubliées dans les programmes. Plus récemment, des enquêtes ont été menées auprès des usagères et usagers de drogue.
Dès lors, vont se développer des stratégies de dépistage communautaires auprès des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, des travailleuses du sexe et, plus récemment, des usagères et usagers de drogues. Les tests rapides vont permettre la mise en œuvre d’interventions directement sur les sites prostitutionnels, les espaces de socialisation homosexuels et les lieux de consommation de drogues. D’autres groupes de population vont également être visés selon les pays : hommes en uniformes (policiers et militaires), conducteurs de camion, chauffeurs de taxi, coiffeuses et petites marchandes, prisonniers… Les stratégies de dépistage vont ainsi être de plus en plus ciblées.
Au cours de la dernière décennie, notamment en lien avec la philosophie du new public management et la volonté accrue des grands bailleurs internationaux de mieux contrôler l’utilisation et la performance des fonds accordés, les programmes de lutte contre le sida ont adopté des stratégies avec un ciblage populationnel de plus en plus fin. Or, de telles approches produisent également des effets pervers. Devoir vérifier si les personnes rencontrées sur le terrain relèvent bien d’une des cibles du programme nécessite du temps. Surtout, face à des pratiques socialement réprouvées, il est possible que cela amène à ne pas inclure des personnes qui ne reconnaissent pas avoir de telles pratiques alors qu’elles font partie, en fait, des cibles visées.
De nombreux outils d’évaluation des « risques » se sont développés. Il s’agit le plus souvent de courts questionnaires sociocomportementaux visant à établir le « niveau de risque » des personnes interrogées afin de déterminer si un dépistage du VIH doit leur être proposé. Ces outils permettent d’augmenter le « rendement » du dépistage, c’est-à-dire les taux de positivité, en étant plus sélectifs dans le dépistage. En contrepartie, cela exclut également du dépistage des personnes qui auraient bénéficié à connaître leur statut.
La recherche de performance peut ainsi avoir des effets délétères entravant l’augmentation de la couverture. Surtout, cela revient à ne considérer les bénéfices du dépistage qu’en matière de nouveaux diagnostics, alors qu’il s’agit également d’une opportunité de réengager vers les soins des personnes se sachant déjà séropositives, mais n’ayant pas initié ou ayant abandonné un traitement, et de proposer des services de prévention aux personnes dépistées séronégatives, opportunité récemment rappelée début 2022 dans le cadre d’une consultation de haut niveau sur le futur du dépistage organisée par la International AIDS Society.
Au cours des années 2010, vont être développés de nouveaux tests rapides pouvant être réalisés directement par les personnes elles-mêmes : les autotests de dépistage. L’autodépistage du VIH est un processus par lequel la personne prélève elle-même un échantillon (salive ou sang), effectue un test simple et rapide pour le VIH, puis interprète le résultat, quand et où elle le souhaite. Lorsque le test est réalisé en présence d’un professionnel de santé ou d’un pair-éducateur, l’autodépistage est qualifié d’autotest assisté. L’autodépistage est non-assisté lorsqu’il est réalisé par la personne seule.
C’est un outil innovant qui donne du pouvoir aux utilisatrices et aux utilisateurs (empowerment) et rend le dépistage plus confidentiel. Depuis 2016, l’OMS recommandait l’autodépistage comme approche additionnelle de dépistage. Cette recommandation a été renforcée dans les lignes directrices de 2019 sur le dépistage du VIH. À cette occasion, l’OMS recommande également, en particulier pour les populations clés, les approches basées sur les réseaux sociaux et la simplification du conseil prétest : « Il n’est pas recommandé d’offrir des services de conseil avant le dépistage. […] Au contraire, d’après les données probantes, il vaut mieux communiquer une information et des messages de courte durée avant le dépistage, qui proposent et encouragent le dépistage. »
En France, les autotests de dépistage du VIH sont autorisés à la vente en pharmacie depuis 2015. En Afrique australe et orientale, l’autodépistage du VIH (ADVIH) a commencé à être massivement déployé à partir de 2015 à travers l’initiative STAR (HIV Self-testing Africa Initiative) financée par Unitaid. En Afrique de l’Ouest, le premier programme d’envergure a été le programme ATLAS (AutoTest VIH, Libre d’Accéder à la connaissance de son Statut), également financé par Unitaid, et qui a démarré ses activités en 2019 en Côte d’Ivoire, au Mali et au Sénégal.
Plusieurs études ont montré que l’ADVIH offrait aux utilisateurs plus de discrétion et d’autonomie et améliorait l’accès au dépistage. L’autodépistage est bien accepté, notamment par les populations clés et par celles et ceux que ne se dépistent pas régulièrement. L’ADVIH est une stratégie acceptable, faisable et dont les performances diagnostiques sont bonnes.
L’ADVIH n’augmente pas les comportements à risque. Au contraire, il peut même augmenter le recours au préservatif. Plus généralement, il est associé à de meilleurs comportements de santé. Enfin, certains travaux suggèrent que l’ADVIH n’augmenterait pas les conséquences sociales négatives ni les événements et comportements non désirés.
Une stratégie de distribution primaire correspond à la situation où les autotests sont remis, par des professionnels de santé ou des pairs-éducateurs, directement aux personnes contactées pour leur propre usage. La distribution secondaire, quant à elle, consiste à remettre des kits d’ADVIH aux contacts primaires pour qu’ils les redistribuent à leur entourage, par exemple les partenaires des HSH, les clients des travailleuses du sexe ou encore les partenaires de femmes enceintes.
Les résultats des recherches menées dans le cadre du programma ATLAS montrent que l’autodépistage est une offre complémentaire de dépistage permettant d’atteindre des personnes qui ne s’étaient encore jamais dépistées avec les offres conventionnelles de dépistage. La stratégie de distribution secondaire est faisable et acceptable. Elle a le potentiel d'atteindre, au-delà des populations-clés elles-mêmes, d’autres populations périphériques et vulnérables au VIH.
Vidéo : présentation des principaux résultats ATLAS en décembre 2021 au Symposium AFRAVIH lors de la conférence ICASA
Le dépistage du VIH reste l’une des clés de voûte de la lutte pour la maitrise de l’épidémie. Il s’agit de la première étape du parcours de soins pour les personnes infectées. Pour les personnes séronégatives, c’est une opportunité de les orienter vers des services de prévention. Au niveau mondial, encore trop de personnes ne connaissent pas leur statut sérologique et le délai entre infection et diagnostic reste trop long.
À l’heure du U=U (undetectable= untransmittable : les personnes sous traitement ne transmettent pas le virus), il est essentiel de communiquer sur les dernières avancées pour inciter toutes et tous à se faire dépister. D’une mise en place exceptionnelle - et à raison - au début de l’épidémie, il est de temps de banaliser et routiniser le dépistage. Toute personne ayant une activité sexuelle doit se poser la question de son statut vis-à-vis des infections que l’on peut acquérir « silencieusement » par voie sexuelle.
L’hépatite B se transmet essentiellement par contact avec du sang ou des fluides corporels infectés. Quand la mère est infectée par le virus de l’hépatite B (VHB), celui-ci peut se transmettre à l’enfant pendant la grossesse, lors de l’accouchement et après l’accouchement. Ce risque est le plus élevé lorsque la mère a une infection active avec une réplication virale élevée.
Heureusement, il existe un vaccin extrêmement efficace capable de protéger les nourrissons de l’hépatite B. Il est fondamental que ce vaccin soit administré dans les 24 heures suivant la naissance. On appelle cette injection la « dose de vaccin à la naissance. Ce vaccin contient des petits fragments inoffensifs du virus de l’hépatite B qui vont aider le système immunitaire à reconnaître et à combattre le virus grâce à la production d’anticorps anti-VHB. Administrer le vaccin aussitôt que possible après la naissance permet une protection rapide du nourrisson, comme l’ont montré plusieurs études.
Malgré l’efficacité démontrée de la dose de vaccin à la naissance, celle-ci n’est malheureusement pas administrée partout dans le monde. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2019, seuls 43 % des nourrissons à l’échelle mondiale avaient reçu ce vaccin à la naissance. Cela implique que beaucoup de nourrissons échappent à cette protection vitale. Le taux de couverture vaccinale varie selon les pays et les régions : certains arrivent à des taux optimaux alors que d’autres peinent à atteindre les niveaux recommandés.
Plusieurs facteurs expliquent cette couverture vaccinale basse dès la naissance. L’accès limité aux soins et aux professionnels de santé qualifiés, surtout dans les zones reculées du monde, rend difficile l’administration de ce vaccin à la naissance. La faible sensibilisation du personnel soignant et des familles sur l’importance de la vaccination immédiate, dès la naissance , y contribue également. Des croyances culturelles, des perceptions erronées ainsi que la réticence à la vaccination ne font qu’augmenter les obstacles à la couverture optimale.
Pour éviter la transmission de l’hépatite B de la mère infectée à son enfant, il est fondamental que le vaccin soit administré dans les 24 heures suivant la naissance.
S’assurer que les nourrissons reçoivent la dose de vaccin à la naissance reste un défi majeur. En effet, cette vaccination s’avère particulièrement compliquée lorsque l’accouchement a lieu en dehors d’un hôpital ou d’une clinique. Dans certains endroits reculés ou peu dotés de personnel soignant, les mères peuvent accoucher chez elles ou en l’absence de médecins ou d’infirmiers, rendant difficile l’administration du vaccin dès la naissance.
Pour surmonter ce défi, il faut que les femmes enceintes porteuses du VHB soient diagnostiquées avant la naissance, et qu’elles aient accès à des établissements de santé à l’approche de l’accouchement. La proximité du personnel de santé qualifié favorise l’administration de la dose de vaccin à la naissance.
Des défis logistiques ainsi que des problèmes de chaîne d'approvisionnement peuvent aussi retarder la livraison des vaccins dans les zones plus reculées.
Afin de maintenir l’efficacité du vaccin, il est important de le garder à la bonne température. Or, ceci peut s’avérer difficile dans des endroits où la réfrigération est limitée. C’est là que le transport sous température contrôlée intervient, permettant de s’affranchir du respect strict de la chaîne du froid pendant quelques jours sans compromettre la qualité des vaccins. Ce dispositif offre une solution temporaire pour des zones avec un accès limité à la réfrigération, permettant le transport et l’administration du vaccin y compris dans les zones reculées.
Assurer un approvisionnement constant en vaccins reste cependant essentiel afin d’empêcher les pénuries et les occasions vaccinales manquées au moment opportun. En relevant ces défis logistiques et en améliorant l’approvisionnement en vaccins, nous pourrons augmenter les chances que chaque nourrisson reçoive la dose de vaccin contre l’hépatite B dès la naissance, peu importe son lieu de naissance.
Enfin, les professionnels de santé ne sont pas toujours suffisamment informés de l’importance de la dose de vaccin à la naissance, et comment l’administrer. Renforcer les systèmes de soin, approfondir les connaissances ainsi que le niveau de formation du personnel soignant, sensibiliser les communautés constituent des étapes primordiales afin de relever ces défis et s’assurer que les nourrissons soient vaccinés dans les temps.
En complément de la dose de vaccin à la naissance, il existe d’autres moyens de prévention de la transmission mère-enfant de l’hépatite B. Un traitement antiviral pendant la grossesse permet aussi de réduire le risque de transmission du virus. En effet, lorsqu’administrés à la femme enceinte avec une charge virale élevée, ces traitements empêchent la réplication du virus de l’hépatite B, réduisant ainsi le risque de transmission au nourrisson.
Une autre stratégie est l’administration d’immunoglobulines contre l'hépatite B (HBIg) aux nourrissons nés de mères avec une charge virale élevée. Les HBlg offrent une immunité temporaire au nouveau-né, le protégeant du virus jusqu’à ce que son propre système immunitaire puisse réagir au vaccin.
La sensibilisation des femmes enceintes et de leurs familles au sujet de l’hépatite B, de ses modes transmission et de l’importance de la vaccination est primordiale. Ainsi les familles peuvent prendre des décisions en connaissance de cause et rechercher une prise en charge adéquate.
Protéger les nourrissons de l’hépatite B est vital pour leur santé à long terme. La dose de vaccin à la naissance est très efficace pour prévenir la transmission mère-enfant de l’hépatite B, dès lors qu’elle est administrée suffisamment tôt. Mais des défis persistent pour assurer la couverture vaccinale de tous les nourrissons dans les temps. Parmi ces défis, on compte l’accès limité aux soins, un manque de sensibilisation ainsi que des difficultés logistiques.
En complément de la vaccination, un traitement antiviral pendant la grossesse et l’utilisation d’immunoglobulines contre l'hépatite B peuvent réduire davantage le risque de transmission. La sensibilisation des femmes enceintes et de leurs familles au sujet de l’hépatite B est également essentielle, pour qu’elles soient en capacité de prendre des décisions en connaissance de cause.
Relever ces défis, améliorer les systèmes de santé et sensibiliser le public nous permettront de protéger davantage les nourrissons de l’hépatite B et d’offrir à tous la possibilité de vivre en meilleure santé. Rappelons-nous que la vaccination dans les temps peut sauver des vies et assurer le bien-être de nos petits.


























L’infection VIH conduit en une dizaine d’années à une perte massive des défenses immunitaires contre les agents infectieux mais aussi contre les cancers, créant cette maladie constamment mortelle que l’on appelle SIDA. Bien que le virus n’infecte qu’une part minime des cellules du système immunitaire, il cible les lymphocytes CD4, cellules chefs d’orchestre de ces défenses immunes en se fixant sur leur membrane à la molécule CD4, conduisant à la destruction et à la désorganisation du système de défense.
Ces défenses sont organisées en deux grandes lignes de bataille comme une armée :
Une première ligne de défense, l’immunité innée, est exercée par des patrouilles circulant dans tout le corps, comprenant notamment les cellules appelées macrophages portant la molécule CD4. Ce sont les sentinelles du corps. Ils résident dans tous les tissus pour surveiller l’invasion éventuelle d’agents étrangers et exercer immédiatement un premier contrôle en les amenant aux casernes de la deuxième ligne de défense.
La deuxième ligne de défense est composée de casernes spécialisées reliées par des canaux. Ce sont : les ganglions, la rate et les parois de l’intestin et des bronches composent les tissus lymphoïdes emplis de cellules appelées lymphocytes.
Ces lymphocytes sont chargés des défenses « intelligentes », adaptées à chaque agent infectieux : on parle d’immunité adaptative. Les lymphocytes se répartissent en deux groupes ou corps d’armée: le premier, les lymphocytes T, travaillent directement de cellule à cellule, comme des fantassins ; la moitié porte à leur surface la molécule CD4 et a pour rôle de commander à toutes les autres cellules immunes de se mettre en ordre de bataille.
D’autres lymphocytes T, appelés CD8+, sont chargés de détruire les cellules infectées dans les tissus malades. Le second corps d’armée, les lymphocytes B, agit comme des artilleurs et produit des anticorps envoyés partout dans le corps pour le protéger contre les microbes. En situation normale environ 2% de tous ces lymphocytes circulent dans le sang : la moitié est composée de lymphocytes CD4+ et un quart de lymphocytes CD8.
Ainsi, le taux normal de lymphocytes CD4+ sanguins est en moyenne autour de 1000/mm3. On évalue également le bon fonctionnement du système immunitaire avec le rapport CD4/CD8 qui est normalement égal ou supérieur à un. Les taux de l’ensemble des lymphocytes sanguins reflètent non seulement les lymphocytes T CD4+, représentant habituellement entre 35 et 60% des lymphocytes, mais aussi les lymphocytes T CD8+, entre 15 et 35%, les lymphocytes B et les lymphocytes NK, chacun entre 5 et 10%.
Ces taux restent constants jusqu’à des âges très avancés. C’est la moelle osseuse et le tissu lymphoïde qui produisent en permanence tout au long de la vie de nouvelles cellules immunes et des lymphocytes afin de garder des stocks constants. Chez l’enfant, les nombres de lymphocytes circulants sont très élevés (5000/mm3 ou plus) jusqu’à cinq ans pour leur permettre de constituer leurs défenses contre tous les nouveaux microbes rencontrés depuis la naissance.
Les deux lignes de défense innée et adaptative, dépendent toutes deux des lymphocytes CD4+, véritables chefs d’orchestre, et sont très spécialisées contre certains agents infectieux :
Les macrophages de la première ligne avalent (on dit phagocytent) et détruisent certains microbes, surtout des bactéries comme le BK, responsable de la tuberculose, et des champignons microscopiques comme le candida.
D’autres cellules de cette première ligne, appelées globules blancs polynucléaires, détruisent d’autres types de bactéries comme les pneumocoques, responsables de pneumonies et méningites, ou des parasites microscopiques comme le toxoplasme.
Une autre famille de cellules de première ligne, les lymphocytes NK (pour Natural Killer) peuvent tuer spontanément toute cellule infectée par un virus ou une cellule cancéreuse. Cette première ligne peut agir seule mais son activité et donc son efficacité dépendent des lymphocytes CD4+.
Dans la deuxième ligne, les lymphocytes CD4 s’activent et se multiplient et envoient des ordres spécifiques aux autres cellules, notamment aux lymphocytes CD8+, pour les faire se multiplier, maturer et devenir capables de tuer les cellules infectées par un virus ou des cellules tumorales, et aux lymphocytes B pour qu’ils produisent des anticorps contre tout agent infectieux. Ces lymphocytes B et CD8 de deuxième ligne ne peuvent agir que sur ordre des lymphocytes CD4+ et il leur faut entre une à plusieurs semaines pour fabriquer des défenses optimales.
Juste après la bataille, lorsque l’infection est maîtrisée, un grand nombre de ces lymphocytes T et B, épuisés et devenus inutiles, meurent ; les moins épuisés survivent et gardent en mémoire toute cette activation et cette maturation. Ces lymphocytes T et B mémoire persistent des dizaines d’années et seront capables de produire immédiatement à tout moment des défenses adaptées lorsque le même agent infectieux se représentera.
Le VIH touche le cœur du système immunitaire et paralyse l’ensemble des défenses en ciblant les macrophages et les lymphocytes. Le VIH infecte les cellules CD4+ en fixant fortement son enveloppe, par la molécule gp120, sur la molécule CD4. La gp120 doit ensuite se fixer sur un deuxième récepteur membranaire, le CCR5, pour injecter le virus dans la cellule. La paroi du lymphocyte CD4 se comporte comme une porte blindée avec deux serrures que la clé gp120 doit ouvrir successivement : d’abord la gp120 puis le CCR5.
Une fois le virus pénétré à l’intérieur de la cellule, il produit une copie d’ADN, le provirus, qu’il va envoyer dans le noyau de la cellule où ce provirus s’intégrera dans le code génétique de la cellule. Cette étape est irréversible.
A ce jour, aucun traitement ne peut éliminer ce provirus intégré. Neuf cellules infectées sur dix sont des lymphocytes CD4 et le reste, un sur dix, sont des macrophages.
La majorité des contaminations se fait par voie sexuelle. Le VIH pénètre donc le plus souvent par des brèches dans les muqueuses ; il est immédiatement détecté par les macrophages CD4+ auxquels il se colle ou qu’il infecte immédiatement. Comme le rôle des macrophages est d’apporter les fragments d’agents infectieux aux ganglions voisins, ceux-ci vont, très rapidement, diffuser le VIH aux lymphocytes CD4+ situés dans les ganglions. Quelques lymphocytes CD4 intra-ganglionnaires, contenant le VIH s’échappent dans le sang, disséminant alors l’infection dans la totalité de l’organisme en quelques heures (24-36H). Lors d’une infection par voie sanguine, le processus est encore plus rapide.
La quasi-totalité du virus (90-95%) se trouve dans les lymphocytes T CD4 qui recirculent en permanence dans l’organisme ; les 5-10% restants sont des macrophages, les cellules sentinelles patrouillant dans les tissus. Et à l’intérieur du compartiment de lymphocytes T CD4, le virus va infecter plus facilement les lymphocytes T CD4+ mémoire qui co-expriment les deux récepteurs CD4 et CCR5 et s’activent plus rapidement.
L’ADN de celui-ci est intégré dans le noyau de la cellule qui l’héberge. Or, pour se répliquer le VIH a besoin que la cellule CD4+ s’active : ainsi l’activation de défenses immunes contre n’importe quel agent infectieux ou vaccin déclenchera fatalement la production de VIH. C’est le phénomène de la « belle au bois dormant » : à tout moment il y aura deux types de cellules CD4+ infectées : les cellules dormantes au repos, non activées et incapables de produire du virus, et des cellules CD4+ qui ont reçu un signal d’activation, se réveillant au contact du baiser du prince charmant mais produisant alors automatiquement du VIH. Comme nous le verrons plus loin, le VIH des cellules dormantes n’est pas sensible aux antirétroviraux et constitue le réservoir latent du virus pouvant se maintenir durant des dizaines d’années.
En détruisant les cellules CD4+, le VIH altère profondément le fonctionnement du système immunitaire et conduit au syndrome d’immunodéficience acquise ou SIDA. Sans macrophages CD4+ et surtout sans lymphocytes CD4+, le système immunitaire est paralysé. Cette destruction est lente et se produit sur environ 10 ans conduisant à la disparition des lymphocytes T CD4+ ou lymphopénie CD4 caractéristique du SIDA. Cette destruction est aggravée par une paralysie du système immunitaire empêchant toute nouvelle défense immune.
Le taux de lymphocytes T CD4+ baisse inéluctablement en l’absence de traitement antirétroviral. La surveillance du taux de lymphocytes T CD4+ dans le sang permet d’estimer la gravité et l’ancienneté de l’infection VIH. On décrit 3 phases dans cette lymphopénie CD4 :
Baisse rapide du taux de lymphocytes T CD4+ lors de la primo-infection, due à la production majeure de VIH et pouvant descendre jusqu’à 200 CD4+/mm3, puis se redressant partiellement mais restant inférieur aux valeurs normales ;
Décroissance lente entre 500 et 200 lymphocytes T CD4+/mm3 sur une longue période de 8 à 10 ans correspondant aux phases de production plus faible de VIH ;
Décroissance rapide et inéluctable sous le seuil de 200 CD4+/mm3, définissant le SIDA. Un taux de lymphocytes T CD4+ en dessous de 50/mm3 signale généralement un risque élevé de mort par SIDA dans les 6 mois.
A cette lymphopénie CD4 s’ajoute une augmentation des taux de lymphocytes T CD8+, impliqués dans la lutte contre le VIH. Il s’en suit une inversion du rapport normal entre les taux de lymphocytes T CD4 et CD8, passant en-dessous de 0.9 après la primo-infection pour arriver à des valeurs inférieures à 0,1 en phase terminale de SIDA.
La lymphopénie T CD4+ chez les enfants est plus difficile à évaluer en cas d’infection par voie maternelle. En effet les taux normaux de lymphocytes T CD4+ étant proches de 4000/mm3, les seuils d’alerte observés pour l’adulte ne sont pas valables. On utilise alors le pourcentage de lymphocytes T CD4+, et le seuil d’alerte devient un taux inférieur à 20% des lymphocytes sanguins.
De façon tout à fait exceptionnelle, chez certaines personnes, cette lymphopénie CD4 ne se produit pas ou très lentement et leur système immunitaire parvient à contrôler fortement et durablement le VIH, grâce à des gènes très particuliers. On parle de non progresseurs ou de Contrôleurs (HIV Controllers) mais ceux-ci représentent moins de 1% de l’ensemble des personnes infectées par le VIH.
Plusieurs mécanismes interviennent dans cette perte de lymphocytes T CD4+ :
Destruction des cellules CD4+ infectées par le virus lui-même et par les défenses immunes
Les cellules CD4 produisant activement du VIH sont détruites par le virus (c’est l’effet cytopathogène) et meurent en 1,2 jours en moyenne alors que leur durée de vie normale s’étale entre 2 semaines et une dizaine d’années.
Mais paradoxalement, le système immunitaire se défend contre le VIH tant qu’il y a encore suffisamment de lymphocytes T CD4+. Ceux-ci activent les lymphocytes CD8 tueurs et B producteurs d’anticorps qui détectent des fragments de VIH à la surface des cellules CD4+ produisant du virus et les détruisent avant même que le VIH ne les détruise. Ainsi les lymphocytes T CD4+ déclenchent un véritable suicide collectif.
Destruction des cellules CD4+ non infectées par l’inflammation et l’épuisement
Cependant la grande majorité des cellules CD4+ qui meurent chaque jour ne sont pas infectées. Ce phénomène étonnant résulte de l’activation massive et permanente des défenses immunitaires et de l’inflammation qu’induit la réplication non contrôlée du VIH. La réplication du VIH i, produisant en moyenne chaque jour entre 10 000 et 1 milliard de particules virales pendant 10 ans, produit une inflammation chronique extrèmement prolongée qui conduit à la mort progressive par épuisement des lymphocytes CD4+ non infectés, et à un moindre degré l’ensemble des cellules immunes
Perte des capacités de production de lymphocytes T CD4+
Le renouvellement normal des stocks de lymphocytes T CD4+, ne suffit pas à compenser ces pertes. Comme en temps de guerre, la moelle osseuse et le tissu lymphoïde produisent plus mais, finalement s’épuisent du fait de la durée extrèmement prolongée de l’infection VIH.
De plus l’activation permanente des lymphocytes CD4 mémoires non infectés conduit à un épuisement les rendant incapables de se multiplier.
Perte des fonctions de défense et maladies opportunistes
Cette lymphopénie T CD4+ désorganise toutes les lignes de défense immune, elles-mêmes altérées par l’inflammation et l’épuisement chronique.
Ces lignes de défense ne peuvent plus contrôler les agents infectieux que nous hébergeons tous en permanence et avec lesquels nous co-existons pacifiquement en situation normale. Au cours du SIDA ces agents infectieux profitent de la désorganisation de ces défenses pacifiques et prolifèrent, développant des infections que l’on appelle « opportunistes » car elles profitent de l’opportunité du déficit immun pour se développer. Ainsi apparaissent d’abord des infections à champignons, les candidats, à parasites comme les pneumocystis jirovecii source de pneumocystose, ou le toxoplasma gondii, source de toxoplasmose, ou à virus EBV source de lymphomes, ou virus CMV source de cécité, ou virus HHV8 source de cancers, et toute sorte d’autres pathogènes opportunistes.
A ces infections opportunistes s’ajoutent la perte de défenses contre les agents infectieux « étrangers » à notre organisme, au premier rang desquels vient le BK et la tuberculose, mais aussi des défenses contre des virus sources de cancers comme le virus de l’hépatite B ou C responsables de cancers du foie, ou le papillomavirus responsable de cancers ano-génitaux.
Non seulement le déficit immunitaire causé par le VIH provoque ces multiples infections et cancers mais celles-ci induisent encore davantage d’inflammation, aggravent l’épuisement des défenses et creusent davantage le déficit immunitaire.
L’inflammation croissante altère également l’ensemble du métabolisme et épuise physiquement le patient qui maigrit inexorablement : c’est la « slim disease ».
A partir du moment où les 1eres infections et cancers opportunistes apparaissent le déclin est inévitable et conduit à la mort du patient.
Ces altérations mortelles ne sont pas définitives. L’arrêt de la réplication virale sous antirétroviraux permet au système immun de se reconstituer, de renouveler les stocks de lymphocytes T CD4+ qui ne sont plus détruits par le VIH, et de restaurer des défenses immunes efficaces contre tous les agents infectieux et les cancers. L’inflammation elle aussi se réduit bien que plus lentement.
Les courbes de déclin des lymphocytes T CD4 s’inversent et retournent lentement mais surement vers des valeurs normales tant que le VIH reste contrôlé. Les infections opportunistes et les cancers deviennent plus faciles à traiter et disparaissent progressivement. De plus le contrôle du VIH réduit les taux de lymphocytes T CD8+ et le rapport CD4/CD8 se normalise progressivement de par la combinaison de l’augmentation des CD4+ et de la diminution des CD8+.
Cependant cette restauration immune peut prendre des années. La récupération quantitative peut ne pas être totale et les lymphocytes CD4 peuvent rester bas (< 350/mm3)
Les fonctions immunitaires et en particulier les défenses contre certains cancers peuvent rester impactés si le déficit immunitaire a été profond (< 200 CD4/mm3) ce qui peut expliquer en partie la prévalence plus fréquente de certains cancers en particulier liés aux virus HPV, HBV, HCV.
Le dépistage et le diagnostic de l’infection à VIH sont des enjeux majeurs de la lutte contre l’épidémie, pour les individus comme pour la collectivité. L’enjeu, pour les individus, réside dans la prescription rapide d’un traitement antirétroviral (ARV) qui va réduire, voire supprimer, les complications et le risque de mortalité liés au VIH.
Au niveau de la collectivité, le traitement ARV précoce, conséquence bénéfique directe du dépistage, contribue à diminuer le risque de transmission du VIH par le contrôle de la réplication virale et, donc, à mieux contenir la diffusion de l’épidémie.
Le dépistage représente un outil important dans les stratégies de prévention en permettant, en cas de positivité du test, de débuter le traitement et renforcer les conseils pouvant éviter une transmission ou, en cas de test négatif, en proposant notamment une prophylaxie adaptée (préservatif, prophylaxie préexposition / PrEP, traitement post-exposition / TPE).
La temporalité d’apparition des marqueurs virologiques et immunologiques (figure 1) permet de comprendre les indications et les limites des différents tests de dépistage. Après la contamination, une période d’environ dix jours, dite d’« éclipse » ou « fenêtre virologique », est caractérisée par l’absence de tout marqueur détectable. L’ARN VIH plasmatique est le marqueur virologique le plus précoce, qui peut être détecté dans un délai médian de dix jours après la contamination.
L’antigène p24, protéine de capside du VIH, est détectable à partir du quinzième jour. La réponse anticorps spécifique du VIH (IgM et IgG) apparaît à partir de vingt et un jours en moyenne. Le délai à partir duquel ces anticorps peuvent être détectés va dépendre de la sensibilité des différents tests utilisés. La période sans détection possible d’anticorps est appelée fenêtre sérologique.
Les tests biologiques de détection du VIH sont de deux types :
Tests indirects, ou sérologiques, visant à détecter dans le sang les anticorps produits par le système immunitaire contre les antigènes du virus ;
Tests directs, reposant sur la mise en évidence du virus (détection d’un composant du virus comme l’antigène p24 ou l’ARN génomique).
Le choix des tests dépend de l’âge du sujet testé : chez l’adulte et l’enfant de plus de dix-huit mois, le dépistage et le diagnostic de l’infection à VIH se font à l’aide des tests sérologiques ; chez l’enfant de moins de dix-huit mois, ils font obligatoirement appel aux tests de détection directe du virus. L’enfant né d’une mère séropositive aura les anticorps de sa mère sans pour autant être infecté. Cas particuliers : en cas de suspicion d’infection très récente, on préfèrera un test vital direct en raison du risque de négativité des anticorps (fenêtre sérologique).
Le principe des tests immuno-enzymatiques anticorps (dit « de 3e génération ») consiste à utiliser des peptides immunogènes ou des protéines recombinantes du VIH-1 (groupe M et O) et du VIH-2 sur un support solide pour capter les anticorps spécifiques présents dans le sang. Les tests de 3e génération détectant les IgG et IgM spécifiques du VIH sont positifs en médiane vingt-trois jours (interquartile 25-75 % : 18-29 jours) après la contamination.
Les tests ELISA dits de 4e génération permettent de détecter également l’antigène p24 du VIH-1. Ces tests sont dits mixtes, car ils détectent les anticorps anti-VIH-1 et anti-VIH-2, et combinés car ils détectent aussi l’Ag p24. Ils sont plus sensibles pour dépister une infection récente (dix-huit jours en médiane après la contamination). Ils sont très fiables (précision supérieure à 99 %), automatisables et peu coûteux.
Les TROD sont des tests de détection des anticorps anti-VIH-1 et anti-VIH-2. Ce sont des tests réalisés à l’unité, à lecture visuelle subjective, de réalisation simple et donnant un résultat en moins de trente minutes (figure 2).
Les TROD sont pratiqués sur du sang total, du sérum, du plasma ou de la salive. L’échantillon est déposé sur le support du test et s’il contient des anticorps anti-VIH-1 et/ou anti-VIH-2, ceux-ci vont se fixer aux antigènes VIH-1/2 présents sur le support (antigènes recombinants du VIH-1, du VIH-2 et du VIH-1 du groupe O et d’un peptide de synthèse du VIH-2). C’est ce complexe antigène-anticorps qui sera révélé par l’apparition d’une bande (ou d’un point) coloré(e) sur le test ; une autre bande (ou point) correspondant à la réaction ≪ contrôle ≫, permettant de s’assurer que le test n’est pas défectueux et a été bien réalisé, devra également être positif(ve).
La sensibilité des TROD est très bonne en phase chronique de l’infection, mais faible en cas d’infection récente (entre 65 et 85 % des TROD se positivent en médiane trente jours après la contamination).
Ces tests peuvent être négatifs en cas de primo-infection ou d’utilisation chez des personnes sous traitement ARV.
Le taux de faux positifs est estimé entre 1 et 5 % et rend indispensable l’utilisation d’un second test de dépistage (test ELISA).
Les autotests sont des tests rapides, réalisés sur le sang total (sang du bout du doigt) ou sur la salive, qui exploitent la même technologie que les TROD. Ils sont destinés à être utilisés dans un environnement domestique par des utilisateurs profanes. Le prélèvement et l’interprétation sont effectués directement par l’intéressé.
Le Western Blot est un test de confirmation réalisé après la découverte d’une sérologie ELISA positive (figure 3). Il permet de mettre en évidence les différents anticorps dirigés contre les différentes protéines du VIH.
Le Western Blot VIH-1 est considéré comme positif quand le sérum du sujet contient des anticorps contre au moins deux bandes d’enveloppe parmi les suivantes (gp160, gp120, gp41) et une autre bande correspondant à une réactivité contre une protéine gag ou pol.
Elle se fait par technique ELISA. Son intérêt essentiel est le diagnostic d’une primo-infection VIH avant l’apparition des anticorps, car l’antigène p24 est détectable environ quinze jours après la contamination, alors que les anticorps sont présents seulement vingt-et-un à vingt-six jours après. Les tests ELISA combinés de 4e génération (antigène-anticorps) remplacent la recherche isolée de l’antigène p24.
Lorsqu’apparait l’épidémie en 1981 ou même lorsque le VIH est découvert, la virologie clinique est balbutiante. Seule la quantification de l’antigénémie VIH, imparfaite mesure de quantification, sera disponible au début des années 1990. Il faudra attendre 1995 pour que la mise au point des techniques PCR (Polymerase Chain Reaction) en routine puisse permettre de quantifier la production virale. C’est une technologie de biologie moléculaire très sensible qui mesure directement la production de virus.
Actuellement, le suivi virologique est un élément clé pour évaluer l’efficacité d’un traitement ARV, déterminer si le virus est contrôlé (succès virologique) ou si persiste la réplication (échec virologique) et pouvoir confirmer la non-transmission.
L’ARN VIH dans le plasma (charge virale) est quantifié par des technologies d’amplification des acides nucléiques (reverse transcriptase-polymerase chain reaction [RT-PCR]). La première étape consiste en l’extraction de l’ARN, puis se déroule une étape d’amplification des quantités plus ou moins importantes d’acides nucléiques viraux qui vont être ciblées à l’aide d’amorces et de sondes spécifiques du génome viral VIH-1 (figure 4).
Les seuils de quantification sont compris entre 10 et 200 copies/mL de plasma selon les kits commerciaux et l’étendue d’amplification peut atteindre 108 copies/mL.
Les techniques de quantification permettent d’amplifier les différents groupes de VIH-1. En revanche, très peu de techniques commercialisées amplifient spécifiquement le VIH-2.
La charge virale (CV) peut se mesurer dans différents liquides biologiques : sang, sperme, secrétions vaginales, lait, liquide céphalorachidien pour apprécier la production de virus au niveau cérébral.
La quantification de la réplication virale est un marqueur pronostique de l’évolution de l’infection sans traitement et permet de mesurer l’efficacité du traitement. La quantification de la CV est devenue une recommandation forte de l’OMS pour toutes les personnes vivant avec le VIH.
L’ARN viral est détectable dès sept à dix jours après la contamination. La PCR remplace de plus en plus l’antigénémie p24 en cas de suspicion de primo-infection.
La mesure de la CV est aussi indispensable à la prise en charge d’un patient sous traitement ARV. La réplication virale sous traitement mesurée par la CV a des conséquences importantes sur l’émergence de résistance aux ARV, ainsi que sur la transmission du VIH.
Dans les pays à ressources limitées, le nombre restreint de laboratoires spécialisés aptes à pratiquer ces tests de biologie moléculaire a conduit au développement d’approches alternatives pour permettre l’accès plus large à la CV.
Sang séché sur buvard ou dried blot spot (DBS)
Le sang total est déposé directement sur un buvard, séché à l’air libre puis conservé au froid (-20°C), Après préparation simple pour fixer le prélèvement, la CV peut être quantifiée avec des kits commerciaux comme NucliSENS EasyQ. HIV-1 v. 2.0, Abbott m2000rt Real Time™ HIV-1 assay et Generic HIV Charge virale®. Le seuil de détection reste cependant assez élevé, environ 800-1 500 copies/mL.
Système de charge virale en point of care (POC)
Ces techniques pourraient favoriser l’expansion nécessaire des tests de CV au niveau des sites décentralisés et pallier les contraintes de transport des échantillons et des DBS. De plus, elles permettent d’effectuer la CV à proximité du point de prise en charge du patient. De nombreux systèmes sont développés, incluant les étapes d’extraction et d’amplification en temps réel avec un rendu en moins de deux heures.
La résistance du VIH aux ARV est liée à la sélection de mutations au niveau des gènes qui codent les enzymes cibles des ARV. Cette résistance ne se développe qu’en cas de réplication virale persistant sous médicaments ARV.
Ceci peut être lié à :
Des médicaments ARV insuffisamment pris (défaut d’observance) ;
Des médicaments ARV présents en quantité insuffisante dans le sang en raison d’interactions avec d’autres médicaments qui font baisser leur concentration sanguine, les rendant moins efficaces sur le VIH ;
Des médicaments ARV insuffisamment puissants face à un virus déjà résistant.
Toute réplication sous traitement ARV « non suppressif », c’est-à-dire ne parvenant pas à rendre la CV indétectable, conduit habituellement au développement de la résistance (figure 5).
Cette sélection est rendue possible par la grande diversité génétique du VIH chez un même individu. Ainsi, chaque jour, sont générés des virus portant des mutations à chacune des positions du génome, notamment au niveau des gènes cibles des ARV. Les mutants résistants sont donc préexistants à l’instauration de la thérapeutique, en proportion minoritaire parmi les copies présentes dans l’organisme. Les mutations entraînent des modifications de structure des enzymes cibles dont l’interaction avec les ARV correspondants est perturbée, empêchant ainsi les ARV de se fixer à leur cible, donc de l’inhiber. Ainsi, les virus avec des mutations sélectionnées par les ARV sont capables de se multiplier en présence de l’ARV mais au prix d’une capacité réplicative virale diminuée.
La barrière génétique à la résistance est définie par le nombre de mutations de résistance nécessaires pour induire la résistance à un ARV donné et par la rapidité à laquelle ces mutations sont sélectionnées en cas de réplication virale sous cet ARV. La résistance à certains ARV, névirapine ou lamivudine par exemple, est liée à la présence d’une seule mutation dans le gène de la transcriptase inverse. On parle alors de faible barrière génétique à la résistance (figure 6). Chez des individus qui n’ont jamais reçu ces ARV, avec une CV VIH plasmatique de 10 000 copies/mL, un génome viral portant déjà cette mutation peut être présent.
Si la multiplication virale est mal contrôlée chez un patient traité par l’un de ces ARV, les mutants résistants vont donc pouvoir être rapidement sélectionnés et devenir, en quelques jours, la population virale prédominante. Pour la classe des inhibiteurs de protéase (IP), la résistance ne survient que lorsque plusieurs mutations se sont accumulées, de sorte que les mutants résistants émergent plus lentement. On parle ainsi d’une barrière génétique élevée à la résistance.
Il existe une notion plus globale qui est la barrière thérapeutique à la résistance : cette notion concerne la combinaison ARV utilisée et comprend à la fois la puissance anti-rétrovirale de la combinaison, des critères virologiques (barrière génétique à la résistance) et pharmacologiques (demi-vie des ARV).
Les tests génotypiques d’analyse de la résistance aux ARV sont très largement utilisés pour la prise en charge thérapeutique des patients. Ils sont recommandés au moment du diagnostic avant l’initiation du traitement afin de rechercher une possible transmission de résistance, détectée dans environ 10% des nouvelles infections, et bien évidemment en cas d’échec sous traitement ARV.
Les tests génotypiques analysent les séquences des gènes de la transcriptase inverse, de la protéase et de l’intégrase en comparaison de celles d’un virus sauvage de référence afin de mettre en évidence les mutations associées à la résistance ; ils peuvent être réalisés par des techniques commerciales ou des protocoles dits « maison » (figure 7). Les tests commerciaux fournissent réactifs, programmes informatiques pour l’alignement des séquences et leur interprétation à l’aide d’algorithmes devant être régulièrement mis à jour.
Leur réalisation dans le contexte d’un échappement thérapeutique doit se faire alors que le patient est toujours sous médication ARV ou, si cela n’est pas possible, le plus précocement dans les semaines qui suivent l’arrêt du traitement. Les tests génotypiques doivent être effectués en cas d’échec virologique (CV > 50 copies/mL, confirmée sur deux mesures consécutives).
Les séquences génotypiques sont interprétées à l’aide d’algorithmes définissant le virus comme « sensible », « résistant » ou « résistant possible » aux différents ARV en fonction des mutations mises en évidence (figure 8). Les algorithmes de l’ANRS I MIE, Stanford et Rega sont les plus utilisés, publiquement accessibles et régulièrement mis à jour.
__,
L’interprétation des tests de résistance doit se faire en concertation entre cliniciens, virologues et pharmacologues, examinant ensemble l’histoire du traitement du patient, l’évolution de la CV et du nombre de lymphocytes T CD4+, les éventuels problèmes d’observance, d’intolérance et d’interactions médicamenteuses.
Dans les centres de prise en charge, les réunions de discussion de dossiers (RCP) sont importantes et doivent prendre en compte l’ensemble des génotypes de résistance disponibles au cours de l’histoire thérapeutique du patient (génotype de résistance dit « cumulé »).
Deux génotypes de résistance interprétés selon l’algorithme ANRS :
Les pays du Sud souffrent d’un manque de ressources adaptées à ces techniques de biologie moléculaires disponibles en routine.
Le prélèvement de sang séché sur papier buvard (DBS, dried blood spot en anglais) est relativement facile à réaliser, stocker et transporter. Contrairement au sang total et au plasma, les contraintes liées à la chaîne du froid et au risque biologique sont réduites. Selon l’OMS, le DBS est un prélèvement fiable et adapté à la surveillance des résistances dans les pays du Sud. Les séquences obtenues sur DBS ont une bonne similarité comparée au plasma. La sensibilité (> 5 000 copies/ml) est cependant limitée en raison du faible volume de sang testé. Ce support de prélèvements permet d’effectuer les analyses de résistance de façon centralisée et élargissent aujourd’hui l’accès aux tests de résistance.
La taille du réservoir viral est estimée par la quantité d’ADN VIH présent dans les cellules cibles du VIH. L’ADN VIH dans les cellules sanguines cibles peut être détecté et/ou quantifié par PCR en copies par million de cellules sanguines mononuclées(PBMC).
Il est possible de détecter les virus résistants archivés dans le réservoir cellulaire par génotype. Ainsi, dans le cadre d’un changement de traitement (allègement thérapeutique par exemple) chez une personne présentant une CV plasmatique indétectable, un test de résistance peut être réalisé à partir de l’ADN VIH dans les cellules cibles.
Attention : l’absence de détection de mutations de résistance dans l’ADN proviral ne signifie pas que la mutation n’est pas archivée, elle peut être présente en proportion minoritaire ou dans un autre réservoir.
Lors de l’infection par le VIH le système immunitaire n’est pas encore malade ou paralysé par le virus. Il va donc lancer toutes ses lignes de défense pour répondre à l’attaque du VIH.
L’activation de la 1ere ligne de défense de l’immunité innée se met en place dès l’entrée du virus et va agir à plusieurs niveaux, localement et dans l’ensemble du corps.
Dans les cellules infectées où la pénétration virale déclenche la production intracellulaire d’un puissant composé antiviral : l’interféron alpha qui va bloquer le cycle de réplication du virus.
Au site d’entrée du virus où l’activation immédiate de ces cellules « patrouilleuses », les macrophages et cellules dendritiques vont s’activer immédiatement. Celles-ci vont absorber des particules virales libres et détruire de premières cellules infectées ; elles alertent aussi toutes les défenses de l’organisme par la sécrétion immédiate et abondante de facteurs solubles qui diffusent rapidement localement et dans l’ensemble du corps : les cytokines et chimiokines.
Parmi ces cytokines on retrouve l’interféron alpha produit en grandes quantités par certaines cellules dendritiques spécialisées. Ces interférons-alpha diffusent largement dans les tissus et le sang et exercent leur puissant effet antiviral à distance du site d’entrée. De plus, ces interférons vont favoriser la capacité de reconnaissance des cellules infectées en activant notamment une autre catégorie de lymphocytes nommés NK. Ceux-ci participent à cette première ligne de défenses en détruisant rapidement les cibles infectées et en secrétant à leur tour des cytokines et chimiokines antivirales.
Enfin, macrophages et cellules dendritiques produisent également d’autres composés qui ont pour but d’attirer les cellules immunitaires au foyer infectieux : les chimiokines. Parmi ces dernières, trois chimiokines, RANTES et MIP-1a et MIP-1b, jouent un effet anti-VIH direct en se fixant sur le co-récepteur principal du virus le CCR5, bloquant ainsi la pénétration du virus dans les cellules CD4+.
Cette production abondante de cytokines et chimiokines crée une importante réponse inflammatoire qui peut parfois devenir excessive (on parle d’« orage cytokinique ») et qui se prolonge quelques jours voire quelques semaines. C’est cette réponse inflammatoire au VIH qui induit des signes cliniques de maladie virale avec de la fièvre et de la fatigue.
L’activation locale des ganglions de cellules immunitaires va malheureusement avoir pour conséquence de faciliter leur infection et conduire comme on l’a vu à une amplification rapide du nombre de cellules infectées. Ainsi, si cette première puissante ligne de défense ralentit efficacement la progression du virus, elle crée aussi d’inévitables dégâts collatéraux, en grande partie responsables des symptômes de la primo-infection.
Malheureusement, ces défenses ne peuvent pas éliminer le virus. D’abord, il infecte les cellules qui seraient chargées de son élimination, comme c’est le cas avec d’autres infections virales. D’autre part, sa nature même de rétrovirus, le VIH, rapidement intégré sous forme quiescente, échappe à cette première ligne de défense. A ce stade, les défenses innées deviennent incapables de contrôler davantage l’infection, cependant elles restent très utiles en permettant la mise en place de la seconde ligne de défense de l’immunité adaptative.
Cette 2e ligne de défenses contre le VIH se met en place dès la 1ere semaine après la pénétration du virus dans l’organisme. La particularité de cette 2e ligne est qu’elle est spécifique du VIH et résulte d’un enchainement très précis d’ordres et de contacts entre les cellules dendritiques de 1e ligne et les acteurs des défenses adaptatives dotés de récepteurs capables de reconnaitre spécifiquement le VIH :
Les LT CD4+, chefs d’orchestre des réponses immunitaires, puis les LT CD8+, les « nettoyeurs » chargés de détruire les cellules infectées, et les lymphocytes B, les « artilleurs » chargés de produire des anticorps.
Cette réponse se met en place dans les ganglions. Les cellules dendritiques patrouilleuses, chargées de collecter au site de l’infection les particules de VIH pénétrant dans l’organisme, migrent vers le ganglion le plus proche et présentent ces fragments de VIH, qu’on appelle les antigènes, aux LT CD4+. Ceci permet d’activer les lymphocytes T CD4+ qui sont capables de reconnaitre spécifiquement ces fragments de VIH. Cette activation des LT CD4+ anti-VIH leur fait sécréter à leur tour des cytokines qui vont permettre aux LT CD8+ anti-VIH de maturer en cellules tueuses et aux lymphocytes B anti-VIH de maturer en cellules productrices d’anticorps. Cette aide ou « Help en anglais » à l’ensemble du système immunitaire fait dénommer ces LT CD4+ auxiliaires ou helpers.
Il faut environ une semaine à ces LT CD8+ anti-VIH pour acquérir les propriétés dites cytotoxiques les autorisant à aller détruire dans l’ensemble de l’organisme toute cellule infectée par le VIH et répliquant activement celui-ci. Dès la fin de la première semaine de l’infection, les cellules T CD8+ cytotoxiques, ou CTL, deviennent détectables et leur nombre s’amplifie progressivement jusqu’à atteindre 5 à 10 % de l’ensemble des LT CD8+. Ces LT CD8+ jouent un rôle majeur dans le contrôle de la réplication virale, pendant la primo-infection puis pendant l’infection chronique, en détruisant par cytotoxicité les cellules infectées, en produisant les mêmes chimiokines (RANTES, MIP-1α, MIP-1β) que celles produites par les macrophages afin de bloquer la capacité du virus à infecter de nouvelles cellules. La réponse T CD8+ anti-VIH persiste de façon importante tout au long de l’évolution de la maladie
Les lymphocytes B anti-VIH, eux vont agir en plusieurs temps. Ils produisent et sécrètent en grande quantité des anticorps malheureusement de qualité médiocre, les immunoglobulines M ou IgM. Celles-ci se diffusent dans tous les tissus, se fixent sur les particules de VIH, aident à leur destruction par les cellules de la 1e ligne comme les macrophages, et agglutinent ces particules virales pour les ramener aux ganglions. Ce renvoi de particules virales aux ganglions contribue à renseigner les lymphocytes B sur la nature précise du VIH et permet de produire des anticorps plus adaptés, les immunoglobulines G ou IgG dès la 2e semaine d’infection. Mais il faudra plusieurs mois pour arriver à produire des anticorps très actifs contre le VIH, les anticorps neutralisants. Ces derniers sont capables de se fixer sur la glycoprotéine d’enveloppe du virus et de neutraliser la capacité du VIH à infecter de nouvelles cellules en empêchant sa fixation sur les récepteur CD4 et corécepteur CCR5 ou CXCR4. D’autres anticorps anti-VIH sont produits contre tous les constituants viraux mais avec peu de fonctions protectrices.
Au cours de la primo-infection on décrit une séquence précise de production d’anticorps contre l’enveloppe, la capside et les autres constituants, permettant de dater avec une relative précision la contamination gràce aux stades « Fiebig ». Généralement la réponse anticorps est complète au bout d’un mois mais sa capacité neutralisante n’apparait le plus souvent qu’après 3 mois.
Cette activation puissante des lymphocytes se diffuse à l’ensemble des ganglions en 2 à 3 semaines environ et s’accompagne d’une augmentation importante du nombre des LT CD8+ sanguins et de la production intense de cytokines par les lymphocytes. Ces phénomènes accentuent l’inflammation générale et participent au tableau clinique aigu de la primo-infection, avec l’augmentation de volume des ganglions enflammés et douloureux (la polyadenopathie) traduisant la mise en place des défenses immunitaires spécifiques. Cette phase est associée a une forte réplication virale (virémie) qui traduit la dissémination générale du virus.
Ainsi on décrit :
La phase d’incubation dite phase d’»éclipse » de 8 à 10 jours pendant laquelle pas ou peu de virus est détecté et pas encore de réponse immune spécifique
La phase de dissémination où le virus est produit en grandes quantités et que l’on peut découper en stades Fiebig :
I et II de 10 à 15 jours pendant lesquels seul le virus est détecté et pas ou peu de LT et d’IgG anti-VIH,
Ces puissantes défenses spécifiques vont permettre de contrôler partiellement seulement, le pic de réplication virale initial, sans toutefois assurer son éradication [2].
Unique en son genre, prédateur « génial », le VIH échappe en grande partie à tout contrôle malgré le foisonnement de défenses immunitaires.
Certes, après la primo-infection, le niveau de réplication virale diminue de façon importante et le taux de LT CD4+ sanguins remonte, signant l’efficacité partielle du système immunitaire à limiter l’infection. Pourtant la réplication virale persiste indéfiniment à plus bas niveau. Deux propriétés essentielles du VIH lui permettent d’échapper aux capacités de détection du système immunitaire du fait de de ce virus :
D’une part, sa nature de rétrovirus, qui grâce à la transcriptase inverse va transformer son « ARN » viral en ADN viral lui permettant de se cacher sous forme de provirus latent intégré dans le code génétique des cellules infectées. En effet le virus dépend de l’activation de la cellule qui l’héberge pour déclencher son cycle reproductif. En l’absence d’activation, le VIH reste à l’état latent, ses protéines ne sont pas produites et les défenses immunes n’ont aucun moyen de détecter la cellule infectée, véritable Belle au bois dormant, tant qu’elle ne produit pas activement du virus. Toute activation relance la production de virus ;
la variabilité majeure de ce virus à ARN, liée à l’instabilité de la transcriptase inverse, l’enzyme clé de ce rétrovirus, qui fait des erreurs de rétro-transcription à chaque cycle de réplication virale. On estime qu’en l’absence de tout traitement, il apparait chaque jour environ 100 000 variants lors de la phase chronique de l’infection. Ces mutations surviennent au hasard mais sont très problématiques lorsqu’elles surviennent dans les fragments antigéniques détectés par les LT et les LB qui ne peuvent alors plus reconnaitre le VIH.
Il s’en suit une course-poursuite entre les réponses protectrices, médiées par les LT CD8+ et les anticorps, et les variants viraux. Cette apparition rapide de virus mutants échappant aux défenses oblige le système immunitaire à s’adapter, grâce à l’immense répertoire de LT et LB, sorte de gigantesque clavier dont dispose le système immunitaire.
Chaque jour il faudra donc stimuler de nouveaux LT et enfoncer de nouvelles touches du clavier. Cette adaptation nécessite, à chaque fois, le lourd travail de réadaptation du système immunitaire à ces nouveaux variants, comme lors de la primo-infection et l’intervention de la chaine complexe de communications intercellulaires entre CD, LT CD4+, LT CD8+ ou LB. Et ceci doit se produire tout au long de la phase asymptomatique de l’infection, c’est-à-dire tant que les LT CD4+ auxiliaires sont encore présents en nombre suffisant et avec des propriétés fonctionnelles suffisantes pour aider cette perpétuelle activation de nouveaux clones T CD8+ cytotoxiques et de nouveaux clones B producteurs d’IgG neutralisantes.
Chaque jour de nouvelles cellules CD8+ et de nouveaux anticorps anti-VIH s’accumulent, d’où des taux élevés de LT CD8+ sanguins et d’anticorps anti-VIH. Mais cette accumulation traduit l’inefficacité de ces défenses, chaque jour en retard par rapport aux nouveaux variants.
De plus comme le VIH détruit en parallèle les LT CD4+, ceux-ci ne peuvent plus aider la maturation des nouveaux LT CD8+ ou LB adaptés aux nouveaux variants. Enfin l’activation permanente de nouveaux lymphocytes T et B épuise ces deux compartiments de défenses. A ce cercle infernal s’ajoute une inflammation croissante et généralisée qui retentit à son tour sur l’ensemble des défenses immunitaires.
Ainsi au bout de quelques années de course du système immunitaire derrière les variants viraux, les poursuivants – LT CD8+ et LB – émergent de plus en plus lentement et à des taux de plus en plus faibles jusqu’à perdre toute efficacité de contrôle sur le VIH : 8 à 10 ans après la primo-infection, le VIH a définitivement réussi à échapper à toute défense immune et peut s’acharner sur les derniers LT CD4+.
Au bout du compte l’infection par le VIH aura sollicité tous les acteurs essentiels du système immunitaire, mais la destruction des LT CD4+, la rapidité d’évolution et d’échappement du virus et l’activation généralisée du système immunitaire qui s’ensuit conduisent les réponses immunitaires spécifiques anti-VIH à l’échec. C’est le SIDA, où le système immunitaire a perdu toute capacité de contrôle non seulement contre les agents infectieux mais aussi contre le VIH lui-même.
Les traitements antirétroviraux sont la seule façon de briser ce cercle infernal en arrêtant la réplication du VIH.L’effet bénéfique majeur Ceci a pour effet de mettre les défenses immunes au repos. A la reconstitution des stocks de LT CD4+ s’ajoute une diminution progressive des taux d’anticorps et de LT CD8+ anti-VIH, d’où découle une normalisation progressive du rapport CD4/CD8.
Si le traitement est interrompu et que la réplication virale redémarre, ces défenses T et B se remettent immédiatement en place et la même course-poursuite reprend.
Exceptionnellement, peut survenir spontanément une évolution plus favorable chez les sujets non-progresseurs à long terme grâce aux capacités de leurs défenses anti-VIH à assurer un rôle protecteur plus puissant dès la primo-infection et surtout plus durable. Ceci est rendu possible par un terrain génétique particulier dicté en grande partie par certains gènes du système immunitaire, les gènes HLA d’une part, notamment B27 et/ou B57 ou B58, permettant des réponses T CD4, T CD8 et NK de forte intensité, ou des mutations des gènes des corécepteurs, limitant la sensibilité des cellules CD4+ à l’infection.
Le déficit immunitaire induit par le VIH, s’il aggrave un grand nombre d’infections particulièrement sévères sur ce terrain, réduit aussi les capacités de réponse aux vaccins.
Cependant, vacciner les personnes vivant avec le VIH est essentiel pour prévenir ces infections ou en limiter la sévérité.
Il est difficile de vacciner efficacement des patients non traités au stade de SIDA. cCeci reste problématique sous traitement lorsque les taux de lymphocytes T CD4 sont inférieurs à 200/mm3, ou si le nadir des CD4 est inférieur à 200/mm3, et ce même avec des taux de CD4 supérieurs à 250/mm3, ou si le virus n’est pas contrôlé. Sous traitement antirétroviral toutefois la capacité de réponses aux vaccins se rétablit mais nécessite de renforcer les doses de vaccins. En outre, la vaccination en activant le système immunitaire peut déséquilibrer le contrôle du VIH et provoquer des blips transitoires de réplication virale même sous traitement, et il est souhaitable de surveiller la charge virale après vaccination.
Il est donc recommandé de vacciner en renforçant les schémas d’immunisation par des doses supplémentaires de vaccin chez tout sujet vivant avec le VIH.
De plus si l’utilisation de vaccins vivants atténués est généralement contre-indiquée chez des personnes ayant un déficit de l’immunité :
Les vaccins vivants atténués sont contre-indiqués : cependant certains aménagements sont possibles en fonction du taux de CD4 et de l’âge pour des vaccins essentiels tels que le BCG, le vaccin contre la rougeole ou contre la fièvre jaune. En outre, si la charge virale est indétectable sous traitement ARV, ces vaccinations doivent être considérées au cas par cas en fonction du rapport bénéfice-risque. Trois vaccins vivants atténués sont particulièrement importants:
Le BCG : Le BCG (Bacille Calmette-Guérin) est un vaccin vivant atténué protégeant les jeunes enfants contre les formes graves de tuberculose. Dans les pays à forte prévalence de tuberculose, l’OMS recommande la vaccination systématique à la naissance et chez le nourrisson asymptomatique de moins de trois mois né de mère infectée par le VIH, quel que soit le taux de CD4 de l’enfant et sans attendre de savoir si l’enfant est infecté. Il n’y a pas plus de complications chez les enfants et non infectés par le VIH que chez les enfants non infectés et cette vaccination est sûre.
Rougeole : la rougeole est sévère chez le patient atteint de SIDA et la vaccination anti-rougeole est essentielle. Deux doses de vaccin doivent être injectées à 12 mois et 16 -18 mois chez tout enfant infecté par le VIH sans symptômes ou en fonction du pourcentage des CD4 (qui doit être utilisé au lieu du nombre des CD4/mm3 chez le petit enfant) : s’il est supérieur à 25 % jusqu’à 1 an ou à 20 % jusqu’à 3 ans. Dans les régions à forte incidence de VIH et de rougeole, une 1e injection peut-être réalisée à 6 mois chez les enfants nés de mère infectée non traitée, suivie des 2 doses du programme de vaccination. Dès que l’enfant peut être traité par ARV, une dose supplémentaire est proposée 6 à 12 mois après le début du traitement.
Les vaccins inertes (inactivés ou sous-unitaires) n’ont pas de contre-indication et sont fortement recommandés chez les personnes vivant avec le VIH avec des schémas renforcés par une injection supplémentaire.
Deux vaccins sont particulièrement importants du fait du risque de co-infection et de la gravité des hépatites B et du risque élevé de cancer liés aux virus HBV et HPV chez les personnes infectées par le VIH :
Hépatite B : nécessaire chez tout PVVIH séronégative pour le VHB : 3 injections à double dose à 1 mois d’intervalle suivies d’une 4e double dose 6 mois plus tard et du contrôle des anticorps anti-HBs apres vaccination et une fois par an. Un rappel doit être effectué si ce taux d’anticorps anti-HBs est bas (< 10 mUI/ml). Ni la grossesse ni l’allaitement ne sont des contre-indications à la vaccination contre l’hépatite B. Chez l’enfant il faut pratiquer 2 injections à dose normale à 1 mois d’intervalle et un rappel 6-12 mois après. De plus les nouveau-nés de mères positives pour l’AgHBs il faut prévenir la gravité de la maladie par l’injection d’immunoglobulines anti-HBs suivie de la vaccination.
HPV : à tout PVVIH de 11 à 26 ans, filles et garçons : en suivant un schéma a 3 doses avec le vaccin nonavalent.
D’autres vaccins sont également importants du fait du risque de gravité de ces infections parmi lesquels le vaccin anti-pneumocoque qui comprend non seulement une vaccination initiale renforcée par le vaccin conjugué 13-valent mais aussi une vaccination supplémentaire par le vaccin 23-valent.
En conclusion, le déficit immunitaire induit par le VIH ne contre-indique pas les vaccinations mais au contraire renforce leur importance tout en imposant des règles plus strictes de vaccination.
Plus de quarante ans après le début de l’infection VIH, aucun vaccin anti-VIH n’a pu être mis au point, alors que de nombreux autres vaccins sont apparus, notamment contre le papillomavirus, l’Ebola ou le SARS-CoV2. Pourquoi tant de retard ? Ce n’est pas par manque de recherches ni de financements, mais simplement du fait des extraordinaires capacités d’échappement du VIH à tout contrôle par nos défenses immunes.
Les obstacles aux vaccins anti-VIH sont de plusieurs ordres:
la nature même du VIH : un rétrovirus s’intégrant dans notre code génétique et s’y cachant, sans que l’on puisse en guérir, avec ou sans traitement. D’une manière générale aucun vaccin puissamment efficace n’est disponible contre des infections dont on ne peut guérir spontanément.
La vitesse de diffusion du VIH à l’ensemble de l’organisme : Comme nous l’avons vu plus haut, le VIH pénètre au cœur même du système immunitaire et diffuse quasi-instantanément. Pour qu’un vaccin soit capable de protéger instantanément et à tout moment contre le VIH, il faudrait donc que ce vaccin induise des taux d’anticorps élevés de façon permanente.
La variabilité incroyable du VIH : Si on le compare au virus de la grippe, le vaccin antigrippal doit être changé chaque année pour faire face au nouveau variant annuel. Si on le compare au coronavirus un vaccin contre la premier souche de SARS-COV2 apparue en 2019 protège encore, certes moins bien, contre plusieurs variants 2 ans plus tard. Mais dans le cas du VIH, c’est chaque jour qu’un patient infecté doit renouveler ses défenses immunes contre les variants. Cependant tous les composants du VIH ne mutent pas en même temps ni avec la même intensité, et il devrait être possible de trouver des fragments stables avec lesquels construire un vaccin. Mais ces régions du VIH conservées sont soit cachées dans les replis de l’enveloppe virale, comme le site de liaison au CD4, soit ne sont pas bien ciblées par les défenses immunes les plus protectrices comme les anticorps.
Si ces anticorps neutralisants sont si difficiles à faire, d’autres anticorps non neutralisants peuvent être produits plus facilement mais n’ont pas la capacité protectrice des anticorps neutralisants et n’agissent que tardivement. On a vu aussi que les lymphocytes T CD8 tueurs pouvaient détruire les cellules infectées ; mais ils n’agissent que sur des cellules déjà infectées. S’ils ne peuvent empêcher l’infection, ils peuvent néanmoins, comme les anticorps non-neutralisants, réduire l’infection et restent importants pour les vaccins.
Ces recherches ont débuté dès 1984, après la découverte du VIH, en utilisant les méthodes classiques de développement de vaccins mais aucune de celles-ci ne s’est avérée efficace.
Les vaccins vivants atténués sont les premiers vaccins inventés par Jenner et Pasteur contre la variole ou la rage et sont remarquablement efficaces. Mais dans le cas du VIH cette solution n’est pas utilisable car il n’est pas possible d’atténuer de façon fiable ce virus qui pourrait revenir à tout moment à son niveau de virulence normale.
L’autre approche classique est celle des vaccins inactivés mis au point par Pasteur. L’excellent vaccin anti-Hépatite A fait partie de cette famille. Néanmoins, des études chez le singe ont été très décevantes. De plus, malgré toutes les précautions possibles, il ne parait pas possible de garantir absolument l’inactivation totale des particules de VIH qui seraient contenues dans un tel vaccin.
Une autre approche classique consiste à injecter le fragment cible des réponses immunitaires sous forme de protéine soluble. C’est l’approche suivie pour les vaccins anti-hépatite B ou anti-papillomavirus dont l’efficacité est remarquable. Mais dans le cas du VIH, toutes les tentatives d’injecter la glycoprotéine d’enveloppe sous forme soluble, ont été des échecs, même en association avec des adjuvants. Ces échecs sont liés à l’impossibilité d’accéder au site de liaison au CD4, enfoui à l’intérieur de ces enveloppes.
Au cours des années 1990 ces échecs répétés ont conduit à développer des méthodes innovantes de vaccins anti-VIH, celles-là mêmes qui ont conduit aux succès des vaccins anti-Ebola et SARS-COV2. Devant l’immense difficulté à induire des anticorps neutralisants, il a été proposé de construire des vaccins induisant des lymphocytes T tueurs ou des anticorps non-neutralisants. Pour cela un nouveau concept a été inventé, consistant à prendre un virus inoffensif pour l’homme comme l’adénovirus, virus du rhume, ou le virus de la vaccine du canari, capables d’infecter l’homme mais non de créer une maladie. On introduit alors dans ces virus qui servent de vecteurs, le ou les gènes codant pour l’enveloppe ou d’autres fragments du VIH : ce sont les vecteurs viraux recombinants. Ce procédé a depuis été utilisé avec succès contre Ebola et SARS-CoV2. Dans le cas du VIH, ces vecteurs se sont révélés tout à fait capables d’induire des lymphocytes tueurs et des anticorps anti-enveloppe mais ces anticorps ne sont pas neutralisants. Les essais cliniques utilisant des vecteurs adénovirus recombinants seuls ont d’abord été couronnés d’échecs (comme celui de l’Essai STEP arrêté pour futilité). Puis l’association de vecteur canarypox et de protéine d’enveloppe du VIH a pour la première fois montré une capacité certes modeste mais significative à limiter de 30% le taux d’infection par VIH dans un très grand essai clinique de 16500 personnes en Thailande, l’essai RV144. Ce premier succès a relancé l’optimisme général et conduit à renforcer et diversifier cette approche combinée dite de prime-boost qui s’est cependant révélée globalement décevante dans deux nouveaux grands essais cliniques également arrêtés pour futilité.
Lors des dix dernières années des efforts redoublés ont été menés pour inventer des vaccins permettant d’induire ces fameux anticorps neutralisants anti-VIH, le graal de toute vaccination efficace. D’importantes recherches physico-chimiques ont permis de produire des formes semi-ouvertes de glycoprotéine d’enveloppe du VIH qui permettent d’induire quelques anticorps neutralisants et génèrent des résultats prometteurs dans les modèles animaux. Mais un seul vaccin ne suffit pas puisqu’il faut exposer le système immunitaire à une dizaine de variants pour arriver à élargir le rayon d’action des anticorps neutralisants. C’est là que les nouveaux vaccins à ARNm pourraient être particulièrement utiles. Il est aisé de construire rapidement de nouveaux vaccins à ARNm contre de nouveaux variants. Par leur facilité de production, leur remarquable capacité à activer à la fois les lymphocytes T et les anticorps, et leur bonne tolérance, ils faciliteront sans aucun doute le développement de vaccins efficaces anti-VIH.
Mais la difficulté ne s’arrête pas à la construction de vaccins efficaces, il faut aussi prouver leur efficacité. Celle-ci doit être démontrée par leur capacité dans de larges essais cliniques à diminuer de façon très significative le nombre d’infections chez des volontaires vaccinés exposés au virus par rapport à des volontaires ayant reçu un placebo. Pour des raisons éthiques évidentes, ces essais sont de plus en plus difficiles à mettre en place, alors que des traitements antirétroviraux existent et peuvent être utilisés à titre préventif dans la PrEP. L’OMS et les diverses institutions gouvernementales et non gouvernementales réfléchissent aux modalités de futurs essais cliniques de vaccins anti-VIH.
En conclusion la capacité d’échappement du virus aux défenses immunitaires explique l’échec de celles-ci à contrôler durablement l’infection chez un patient infecté et l’échec de toutes les tentatives vaccinales à ce jour. Cependant l’utilisation de vaccins à ARNm pourra peut-être permettre de progresser dans le développement de nouveaux vaccins anti-VIH.
Spontanément, la « santé sexuelle » est associée à des dimensions médicales : infections sexuellement transmissibles, dysfonctions érectiles, dépistages, etc.
Or, cette notion est en fait insuffisante. En effet, la santé sexuelle recouvre des enjeux, outre ses aspects « maladies ou dysfonctionnement », liés à la conjugalité, aux droits humains, aux mobilisations collectives ou encore à la libre disposition de son corps. La définition officielle qu’en donne l’Organisation mondiale de la santé reflète bien l’ampleur de ces différentes dimensions (voir encadré).
Si la santé sexuelle telle que nous la connaissons a été fortement modelée par la réponse globale au VIH/sida depuis plus de quatre décennies, elle trouve ses racines dès les années 1960 et 1970 dans les mobilisations autour de la planification familiale, de la santé reproductive et en faveur du droit des femmes à disposer librement de leur corps et de leur sexualité. Progressivement, sa définition s’est institutionnalisée et intégrée à une vision plus générale de la promotion de la santé au sein des organisations internationales et à l’échelle des Etats.
L’irruption du VIH/sida au début des années 1980 marque un tournant majeur dans la manière d’appréhender et de penser la santé sexuelle. Le virus VIH, parce qu’il est mortellement sexuellement transmissible, met en effet en lumière un certain nombre d’impensés et d’injustices dans la prise en charge de la sexualité humaine.
Ainsi, les minorités sexuelles et de genre sont en première ligne face au VIH. L’absence de reconnaissance sociale et légale de leurs réalités (droits pour les couples, lutte contre les discriminations) et les lois discriminatoires vont très vite être identifiées comme un déterminant majeur du risque infectieux. Il apparaît aussi que l'homophobie et la transphobie peuvent également éloigner les personnes du soin. C’est la raison pour laquelle, dès les années 1980, les leaders communautaires, scientifiques et médicaux ont mis en avant la nécessité de penser conjointement lutte contre le sida et promotion des droits humains.
C’est aussi très clair si l’on s’intéresse aux interventions, programmes et politiques de prévention du VIH et des IST. Jusqu’aux années 1980, les approches dominantes dans ce domaine privilégiaient encore une forme de paternalisme, ou au mieux, de vision descendante (« top-down »), très axée sur les risques.
Grâce à la mobilisation des premiers concernés, soutenus par les associations communautaires, une autre voie s’est ouverte, promouvant des messages de prévention positifs, axés sur le plaisir et le choix des outils de protection.
On le voit, la santé sexuelle s’accorde mal avec les préjugés et les rôles préconçus. Il s’agit à l’inverse d’envisager les personnes dans leur complexité et la diversité de leurs besoins.
La santé sexuelle est aujourd’hui largement structurée par la réponse aux infections sexuellement transmissibles, mais elle ne s’y réduit plus. Au cours des dernières années, les thématiques, les interventions et les approches de santé publique se sont largement diversifiées, autour du combat pour les droits humains, de la notion de consentement, des enjeux de consommation de drogues en contexte sexuel, des dimensions liées à l’estime de soi et à la santé mentale ou de médicalisation des outils de prévention (avec la PrEP - prophylaxie pré-exposition - en particulier).
Cette diversification est prometteuse, car elle permet véritablement d’approcher la définition large et ambitieuse que l’OMS donne de la santé sexuelle. Mais elle ne va pas sans poser de nouveaux défis :
Les acteurs et actrices de la santé sexuelle sont pluriels : pouvoirs publics, professionnels de santé, associations, médiateurs communautaires… Cette pluralité est une richesse, mais pose aussi la question de la formation et de l’appropriation de dimensions parfois complexes de la santé sexuelle, comme la PrEP ou le TasP (treatment as prevention, … c'est-à-dire le fait de ne plus transmettre le VIH quand l’infection est contrôlée par un traitement), ou la notion de consentement. Dans ce domaine, la mise à jour des connaissances et la formation continue sont indispensables à la pérennité des interventions.
Qu’on le veuille ou non, la sexualité demeure imprégnée par les normes sociales et morales de nos sociétés. Développer des approches de santé sexuelle positives, respectueuses et émancipatrices implique nécessairement de penser les contextes dans lesquels on les implante. Cela prend du temps, demande des compétences de dialogue et de formation, et surtout un travail étroit avec les communautés concernées, pour s’assurer que les interventions de santé sexuelle répondent à leurs besoins.
La santé sexuelle résulte de combats anciens pour la santé reproductive, pour les droits des minorités, pour la libre disposition de son corps et de sa sexualité. L’appréhender dans sa complexité est un formidable défi, mais aussi la promesse de la possibilité pour chacun et chacune d’une sexualité plus épanouie et agréable.
La santé sexuelle fait référence à un état de santé et de bien-être global, physique, émotionnel, mental et social, tant pour les individus que pour les couples. Elle ne signifie donc pas seulement absence de maladies, de dysfonctionnements ou d’infirmité et ne concerne pas exclusivement la reproduction.
La santé sexuelle est donc un concept qui promeut une approche positive et non dangereuse de la sexualité et de l’accès au plaisir sexuel, sans négliger bien sûr la dimension de prévention. Elle intègre l’ensemble des champs concernés, qu’il s’agisse de respect, de consentement, de discrimination ou de harcèlement.
L’accès à une contraception efficace est d’ailleurs un des progrès majeurs qui ont permis de dissocier sexualité et reproduction. Cette bonne santé a un impact dans différents domaines, familial, social ou encore économique.
Comprendre et respecter l’orientation sexuelle de chacun, à savoir l’attirance affective et sexuelle pour une autre personne, fait partie intégrante de la santé sexuelle et permet de lutter efficacement contre l’homophobie qui, loin de disparaître, fait aujourd’hui le lit de discriminations et de réactions d’une rare violence.
Quant à l’orientation sexuelle d’une personne, elle n’est pas nécessairement figée et peut éventuellement évoluer tout au long de la vie. Elle ne peut en aucun cas être imposée et chacun est libre de se définir comme il le souhaite, indépendamment de ses pratiques.
La grande banalisation des images pornographiques a malheureusement un impact particulièrement délétère sur la santé sexuelle des jeunes (et des moins jeunes), en montrant une sexualité violente et irréelle, souvent plus proche d’un viol que d’une relation consentie. Le porno met en scène des hommes dont les capacités sexuelles et l’anatomie sont très exagérées, source de honte chez les garçons qui ne peuvent s’identifier. Quant aux filles, leurs corps sont retouchés et elles semblent parfois si jeunes qu’on ne peut s’empêcher d’y voir une promotion de la pédocriminalité.
Parler de santé sexuelle implique de faciliter l’accès à toutes les informations utiles sur l’ensemble de ces sujets, qu’il s’agisse de la connaissance de son corps ou des ressources indispensables (lieux, professionnels). Promouvoir cette bonne santé implique également de développer des programmes d’interventions éducatives et préventives en santé publique.
L'éducation à la sexualité est une démarche éducative qui vise à :
apporter aux élèves des informations objectives et des connaissances scientifiques
identifier les différentes dimensions de la sexualité : biologique, affective, culturelle, éthique, sociale, juridique
développer l'exercice de l'esprit critique
favoriser des comportements responsables individuels et collectifs (prévention, protection de soi et des autres)
Alors qu’une attention particulière a été accordée aux dangers liés à l’activité sexuelle (grossesses non désirées, maladies sexuellement transmissibles) et que les jeunes sont informés dans leur cursus scolaire des différents modes de contraception féminine ou de l’effet protecteur du préservatif, les questions concernant les émotions, le désir ou le consentement ne sont que rarement abordées.
Or ces dimensions sont essentielles à transmettre aux lycéens et collégiens, dont l’éducation à ces questions repose le plus souvent sur des échanges entre pairs parfois tout aussi ignorants qu’eux, ou encore sur des contenus pornographiques dont la facilité d’accès est préoccupante au regard des messages délétères qu’ils transmettent.
La question du plaisir sexuel fait encore l’objet d’ignorance et de tabous.
L’anatomie du clitoris et ses compétences spécifiques en matière d’accès au plaisir féminin ont intégré depuis peu les manuels scolaires.
La dimension très patriarcale de notre société, qui valorise la domination masculine et la victimisation des femmes, rend la diffusion de cette éducation problématique. La plupart des cultures diffusent des messages de culpabilité vis-à-vis de la sexualité, sauf dans un contexte de procréation. Il est donc urgent d’élaborer des programmes cohérents et de mettre en œuvre une politique volontariste pour les déployer au sein des institutions. En effet, l'éducation à la sexualité en milieu scolaire contribue à l'apprentissage d'un comportement responsable, dans le respect de soi et des autres. Son ouverture à l’ensemble des parents en début d’année scolaire est un formidable outil de dialogue et d’apaisement.
En France, la loi de 2001 prévoit trois cours d’éducation à la vie affective et sexuelle chaque année, dans chaque classe. Elle n’est malheureusement que très rarement appliquée pour des raisons diverses liées à différentes pressions et résistances, des enseignants peu formés, des parents parfois réticents, la prudence des directeurs d’établissement parfois sommés de les supprimer du programme par des parents inquiets de leur impact sur leurs enfants.
Or l’expérience des interventions scolaires montre que les jeunes ont besoin d’informations factuelles et dénuées de tout jugement, et qu’elles sont parfois la seule opportunité qui leur permet d’évoquer des difficultés ou des violences subies.
Elle permet de décliner une politique nationale de prévention et de réduction des risques tels que grossesses précoces non désirées, mariages forcés, infections sexuellement transmissibles, VIH/sida. Elle offre des pistes pour lutter contre les comportements homophobes ou sexistes et contre les violences sexuelles. Enfin, elle promeut l’égalité entre les femmes et les hommes.
Ressources
Site Santé publique France :
La première fois en 10 questions :
Le plaisir sexuel c’est quoi la recette ?
Que faire quand le sexe ça marche pas ?

Les hépatites chroniques virales B et C ont une histoire naturelle relativement semblable. Cette histoire naturelle est dynamique, complexe, et les différentes phases ne sont pas nécessairement séquentielles. Après contamination par l’un des deux virus, une inflammation intra-hépatique se développe. Celle-ci induit alors une fibrose hépatique qui peu à peu, après plusieurs années, peut conduire à une cirrhose. C’est là toute la gravité. Il existe cependant quelques différences entre les dynamiques de ces deux infections.
L'infection aiguë par le VHB est habituellement asymptomatique lorsque la contamination a lieu dans la petite enfance. En revanche, elle entraîne un ictère, c’est-à-dire une jaunisse, chez 30 à 50% des personnes contaminées à l'âge adulte. La durée de l'ictère est d'environ deux à trois semaines au cours desquelles l'activité des enzymes du foie appelées transaminases est constamment élevée, dépassant habituellement dix fois la normale. Puis les symptômes régressent, sauf dans 1% des cas où l’hépatite aiguë B symptomatique va évoluer vers une hépatite fulminante, gravissime, mortelle le plus souvent et requérant une greffe de foie.
Les hépatites chroniques virales B et C ont une histoire naturelle relativement semblable. Après contamination par l’un ou l’autre de ces 2 virus, une inflammation se développe dans le foie. Celle-ci induit alors une fibrose – tissu cicatriciel, non fonctionnel - qui peu à peu, après plusieurs années, peut provoquer une cirrhose. Il existe cependant une différence majeure entre ces deux hépatites : les hépatites chroniques virales B peuvent se compliquer de cancer (on parle alors de carcinome hépatocellulaire ou CHC) à n’importe quel moment de l’évolution de la maladie, tandis que les hépatites chroniques virales C ne se compliquent d’un CHC que lorsqu’il y a une cirrhose sous-jacente.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit comme population pédiatrique les personnes de moins de 15 ans. En France, les services de pédiatrie prennent en charge les patients de moins de 18 ans, en accord avec le concept de mineur.
Environ 1,8 million d’enfants de moins de 15 ans dans le monde vivent avec le VIH. On compte 180 000 nouvelles contaminations par an chez les moins de 15 ans, et 310 000 si on inclut tous les moins de 18 ans.
La grande majorité de ces enfants et adolescents vivent en Afrique subsaharienne. La première cause de ces contaminations est la transmission de la mère à l’enfant, qui peut survenir pendant la grossesse (essentiellement le dernier trimestre), l’accouchement ou
L’hépatite virale est une atteinte inflammatoire diffuse du foie consécutive à une infection par des virus dont la cible principale est la cellule hépatique (hépatocyte) : on parle de virus hépatotropes. Les lésions hépatocytaires sont essentiellement liées à un mécanisme immunitaire.
L'hépatite est dite aiguë lors du premier contact de l'organisme avec le virus. Dans de rares cas, l’hépatite peut être fulminante et conduire à une destruction massive du foie, ce qui nécessite une transplantation hépatique. Si le virus n’est pas éliminé, l’hépatite devient
Introduction
Devant l’importance du poids des complications et de la mortalité liées aux infections par les virus des hépatites virales et grâce aux avancées dans les domaines de la prévention et du traitement antiviral, l’Organisation Mondiale de la santé (OMS) a conseillé dans ses dernières recommandations de mettre en place des stratégies visant à l’élimination des hépatites virales comme problème de santé publique majeur d’ici 2030. Ces stratégies comportent des volets de traitement à grande échelle très ambitieux pour atteindre les cibles de réduction de la mortalité liée aux hépatites virales de 65% et de l’incidence de ces infections de 90%.
Pour cibler l’élimination des hépatites virales d’ici 2030, des objectifs spécifiques doivent être atteints.Ils sont décrits dans la figure, et comprennent aussi bien des éléments liés à la prévention, qu’au dépistage et au traitement des hépatites virales.
Cette figure montre qu’à côté des actions visant à mieux prévenir les infections (vaccination, sécurité transfusionnelle et des injections, réduction des risques pour les usagers de drogues), le diagnostic de l'hépatite occupe une place très importante avec une marge de progression conséquente entre 2015 et 2030.
Mais l’accès au traitement qui doit faire suite au dépistage est la composante qui jusqu’à ce jour a été la plus difficile à améliorer : moins de 10% des personnes éligibles au traitement ont effectivement été traitées.
C’est le cas également si l’on se penche sur la diversité des représentations et des pratiques sexuelles selon les pays, les cultures et les normes sociales et morales qui encadrent la sexualité. Les homosexualités ont longtemps été réduites à des enjeux d’identité (s’affirmer gay ou lesbienne, par exemple). On voit pourtant que les pratiques sexuelles entre personnes du même sexe existent partout, dans tous les milieux sociaux, même si les termes pour les définir et les stratégies d’affirmation peuvent varier. L’épidémie de sida a agi comme un véritable révélateur social et, dans plusieurs pays, a permis d’obtenir de nouveaux droits comme la reconnaissance des couples de même sexe.
C’est enfin évident si l’on s’intéresse aux dynamiques de genre dans la sexualité, les relations femmes/hommes, mais aussi entre hommes et entre femmes. Longtemps la santé sexuelle des femmes a été avant tout cantonnée aux enjeux de procréation, délaissant les autres dimensions de leurs sexualités. De leur côté, les femmes lesbiennes ont longtemps été perçues comme à l’écart de la santé sexuelle et reproductive, quand bien même elles sont, pour certaines, mères.
La multiplicité des thématiques ne doit pas faire oublier les notions fondamentales de plaisir et d’épanouissement. La santé sexuelle risquerait alors de se limiter à un ensemble de techniques et de recommandations, détachées de l’expérience sensible et subjective. Promouvoir une santé sexuelle « grand angle » implique d’associer la pluralité des points de vue, des professionnels de santé, des acteurs communautaires et des personnes concernées.



faire connaître les ressources spécifiques d'information, d'aide et de soutien dans et à l'extérieur de l'établissement.












Fiebig V où l’ensemble des anticorps IgG sont détectés contre tous les constituants viraux
Fièvre jaune : Le vaccin peut être proposé aux personnes infectées par le VIH asymptomatiques dont le taux de lymphocytes CD4 est supérieur à 200/mm3, ainsi qu’aux enfants de plus de 8 mois infectés par le VIH et asymptomatiques ou selon les mêmes critères que la rougeole. Le dépistage du VIH n’est pas obligatoire avant de procéder à la vaccination. Le vaccin est contre-indiqué chez la femme enceinte, sauf en cas d’épidémie ou si elle doit se rendre dans un pays d’endémie lorsque ce voyage ne peut être évité ou différé.
La faible efficacité des anticorps anti-VIH : certains anticorps sont indispensables pour bloquer la pénétration du virus et doivent être induits pour obtenir un vaccin réellement efficace. Pour cela il est nécessaire de cibler la surface du virus, c’est-à-dire la glycoprotéine gp160 du VIH. Pour reprendre la comparaison avec les vaccins si efficaces contre le SARS-CoV2, ceux-ci induisent sans peine des anticorps neutralisants qui ciblent la région de surface du virus capable de se lier à son récepteur sur la cellule. De même pour le vaccin anti-Ebola. Dans le cas du VIH, le site de liaison au récepteur CD4, seule région non variable de l’enveloppe, est enfoui et difficilement accessible aux anticorps. De plus l’enveloppe du VIH est entourée d’une sorte de bouclier de sucres contre lesquels les anticorps ont peu de prises. De plus pour être neutralisants ces anticorps doivent avoir, on l’a vu plus haut, une conformation tout à fait particulière résultant de l’exposition à de nombreux variants viraux. Ainsi il faudrait injecter successivement 8 à 10 variants de vaccins anti-VIH pour arriver à induire ces anticorps capables de neutraliser presque tous les VIH.


La principale complication de l'hépatite aiguë B est le passage à la chronicité. Le diagnostic est fait devant la persistance, six mois après l'infection aiguë, des principaux marqueurs de cette infection : AgHBs, AgHBe et un taux élevé d'ADN du VHB.
La résolution spontanée de l’infection par le VHB est la règle lorsque l’infection survient à l’âge adulte, alors qu’elle est rare chez les enfants. On estime que plus de 90% des adultes avec une infection VHB aiguë parviennent à une infection résolutive, pour seulement 5 à 10 % des jeunes enfants. Ceci explique pourquoi les enfants contaminés à la naissance ou durant l’enfance sont très nombreux parmi les patients avec une infection chronique.
Dans les formes chroniques de l’infection HBV, on peut se débarrasser du virus (on parle de clairance du virus). Mais cet événement est finalement peu fréquent puisque la fréquence cumulée de la clairance spontanée de l’AgHBs s’élèverait à 4% à 5 ans, 8% à 10 ans et 18% après 15 ans d’évolution.
L’infection chronique par le VHB est une maladie dynamique qui évolue en plusieurs phases reflétant les interactions entre le virus et la réponse immunitaire de l’hôte. L’histoire naturelle peut être divisée en 4 grandes phases caractérisées par la présence ou non de l’antigène HBe (AgHBe), une protéine produite par le virus quand celui-ci se réplique intensément, le niveau de réplication virale (ADN du VHB), le taux de transaminase ALAT et la présence de lésions histologiques d’inflammation ou de fibrose au niveau du foie (Figure 1).
Pour plus de simplicité, l’European Association for the Study of Liver disease - EASL a proposé une classification des infections par le VHB (Figure 2).
Anciennement dénommée « phase d’immunotolérance », elle est plus fréquente et plus longue chez les sujets infectés durant la période périnatale, chez qui elle peut durer 10 à 30 ans. Cette phase est généralement plus courte ou absente chez les sujets infectés pendant l’enfance ou à l’âge adulte. Le taux de perte spontanée de l’AgHBe est très faible durant cette phase et les patients sont hautement contagieux du fait du niveau élevé de réplication virale.
C’est la phase de réactivité immunitaire, caractérisée par une progression de la fibrose plus rapide que dans la phase précédente. L’évolution est variable : chez la plupart des patients une séroconversion HBe avec un arrêt de la réplication virale est obtenue, traduisant le passage à la phase suivante d’infection chronique HBe négatif. Dans certains cas, la maladie reste active pendant plusieurs années, avec un risque élevé de progression vers la cirrhose.
Anciennement dénommée phase de « portage inactif », cette phase résulte d’un contrôle immunitaire de l’infection réduisant considérablement le risque d’évolution vers la cirrhose et le cancer du foie (carcinome hépatocellulaire - CHC). Cependant, l’évolution vers une hépatite chronique AgHBe négatif est possible. On observe une séroconversion HBe spontanée chez 2 à 15% des cas par an. La perte de l’AgHBs et la séroconversion HBs spontanée sont rares, elles surviennent dans 1 à 3% des cas par an.
Cette phase est caractérisée par une fibrose souvent présente et un faible taux de rémission spontanée. La plupart de ces patients ont des variants du VHB qui altèrent ou abolissent l’expression de l’AgHBe. L’augmentation de la prévalence mondiale de l’hépatite chronique AgHBe négatif (80-90% des patients AgHBs positif deviennent AgHBe négatif/anti-HBe positif) reflète probablement le vieillissement des porteurs chroniques du VHB. Les patients souffrant d’hépatite chronique B AgHBe négatif sont souvent plus âgés et davantage susceptibles d’avoir une cirrhose au moment du diagnostic.
La fréquence des complications varie selon les régions.
Dans les régions à faible prévalence de l’infection, la survenue de complications hépatiques chez les patients non traités est faible, estimée entre 1 et 2% après 16 ans d’évolution.
Au contraire, la fréquence des complications augmente dans les zones de forte prévalence (Afrique sub-Saharienne), où une cirrhose survient chez 13% à 38% des patients AgHBe positifs. Parmi ces patients, 15% verront leur cirrhose décompensée au bout de 5 ans. Le risque de survenue à 5 ans d’un cancer du foie (CHC) est aussi plus élevé en zone de forte prévalence, allant de 3% chez les patients sans cirrhose à 17% chez les patients cirrhotiques. Les facteurs influençant la progression de la fibrose hépatique sont indiqués dans la figure 3.
La grande majorité des patients ayant une hépatite C aiguë vont évoluer vers une hépatite chronique avec une progression de la fibrose variable d’un patient à l’autre. Les anticorps contre le VHC se développent dans le cadre d'une infection aiguë et persistent tout au long de la vie.
L’hépatite C chronique est souvent asymptomatique, même si une proportion significative de patients présente des symptômes généraux et non spécifiques (fatigue chronique, troubles du sommeil). Après 20 ans d’évolution, on estime la progression vers la cirrhose à 10-20 % des cas. Le risque de cancer du foie chez les personnes atteintes de cirrhose est d'environ 2 à 4% par an (Figure 4). La disparition de l'infection, qu'elle soit spontanée ou qu'elle résulte d'un traitement antiviral, n'offre pas de protection durable contre la réinfection.
Les facteurs d’aggravation de la fibrose hépatique sont nombreux (Figure 5). Ils doivent être évalués lors de la prise en charge d’un patient : âge, sexe masculin, consommation d’alcool et/ou de tabac et/ou de cannabis, syndrome métabolique (surpoids ou obésité, diabète, hypertension artérielle, dyslipidémie), co-infection non contrôlée avec le VIH ou le VHB. Certains sont modifiables..
Pour évaluer une consommation excessive d’alcool, les questionnaires adaptés au diagnostic du mésusage peuvent être utilisés (AUDIT, CAGE, DSM-V). La consommation excessive d’alcool est définie par l’Organisation Mondiale de la Santé par une consommation de plus de 21 verres par semaine chez l’homme et de plus de 14 verres par semaine chez la femme, ou plus de 6 verres en une seule occasion. Les patients alcoolo-dépendants doivent être adressés en consultation d’addictologie.
En cas de syndrome métabolique, il faut définir et proposer un parcours de soins complémentaire (consultation diététique, de diabétologie, de cardiologie...).
Les hépatites chroniques B et C ont un potentiel spontané évolutif sévère vers la fibrose du foie, conséquence d’une inflammation chronique, et le cancer. Elles doivent détectées et prises en charge pour éradiquer le virus VHC ou contrôler le VHB chez les personnes avec une atteinte inflammatoire ou fibrotique.
les trois chapitres du livre manifestations hépatiques et extra-hépatiques, respectivement VHB (1 chapitre) et VHC (2 chapitres)
L'incidence du CHC a été estimée à 0,02 pour 100 personnes-années chez les patients avec infection chronique par le VHB à antigène HBe négatif (porteurs inactifs), à 0,3 pour 100 personnes-années chez les patients atteints d’hépatite chronique virale B sans cirrhose, et à 2,2 pour 100 personnes-années chez les personnes atteintes de cirrhose compensée.
En Afrique subsaharienne, le CHC est une cause majeure de décès liés au cancer : la deuxième cause de décès chez les hommes et la quatrième chez les femmes en 2020, avec des taux de mortalité selon l'âge de 8,2 et 4,2 pour 100 000 personnes/an, respectivement. Dans cette région, le CHC se manifeste dans des groupes d'âge plus jeunes, avec un taux de survie médian d'environ 3-4 mois.
Plusieurs facteurs liés à l'hôte (sexe masculin, âge plus avancé ou durée plus longue de l'infection, diabète et antécédents familiaux de CHC), au virus (Ag HBe positif persistant, ADN VHB élevé persistant, génotype VHB ou co-infection VIH, VHC et VHD), au foie (élévation persistante de l'ALAT et maladies hépatiques concomitantes) et au mode de vie (tabagisme et alcool) augmentent les risques de cirrhose et de CHC (Tableau 1).
Le CHC lié à l’infection chronique par le VHB est souvent diagnostiqué tardivement et son taux de mortalité est élevé. De nombreux modèles ont été développés pour prédire le risque de CHC afin de guider les décisions de traitement et d'évaluer le besoin de surveillance (Tableau 2).
Chez les patients asiatiques non traités, la plupart des modèles incluent l'âge, la cirrhose et le taux d'ADN du VHB avec une précision bonne à excellente pour la prédiction du CHC sur 5-10 ans.
Chez les patients caucasiens, le score qui comprend des variables très simples (âge, sexe, taux de plaquettes), permet d’évaluer le risque de CHC à 5 ans chez des patients traités par entécavir ou ténofovir.
La surveillance du CHC par échographie (et mesure optionnelle de l’alpha-fœtoprotéine) tous les 6 mois doit être effectuée chez les patients présentant un risque accru de CHC, à savoir les personnes atteintes de cirrhose, les personnes avec des antécédents familiaux de CHC, les hommes asiatiques de moins de 40 ans, les femmes asiatiques de plus de 50 ans et les hommes africains de moins de 40 ans.
Ces recommandations pour la surveillance du CHC découlent de données montrant une incidence plus élevée et un âge plus précoce de survenue du CHC chez les patients asiatiques et africains, ce qui est probablement lié à l'âge plus précoce de l'infection, bien que d'autres facteurs, tels que les génotypes du VHB ou les carcinogènes environnementaux, puissent également contribuer.
Les recommandations de la Société Française d’Hépatologie (AFEF), publiées en 2020, sont les suivantes :
Il est recommandé de dépister le CHC chez tous les patients atteints d’hépatite B au stade de cirrhose. De plus, il est recommandé de dépister périodiquement un CHC chez les patients sans cirrhose :
• avec antécédent familial de CHC de premier degré,
• en l’absence d’antécédent familial de CHC, chez :
– les hommes à partir de 40 ans (à partir de 30 ans si le taux de plaquettes est inférieur à 100 000/mm3),
– les femmes à partir de 70 ans (à partir de 60 ans si le taux de plaquettes est inférieur à 100 000/mm3).
Puisque l'alcool et le tabac sont associés à un risque accru de CHC et qu'il a été montré qu'une stéatose hépatique concomitante accélère la progression vers la cirrhose, il faut conseiller de limiter la consommation d'alcool, d'éviter de fumer, de maintenir une alimentation saine et de faire régulièrement de l'exercice physique.
Dans de nombreux pays, l’infection à VHC est la première cause de CHC, avec une incidence de 1 à 3 % par an chez les patients cirrhotiques.
Les autres facteurs de risque sont : l’âge élevé, le sexe masculin, le diabète, l’obésité, le tabac, le génotype viral 3, la consommation élevée d’alcool et la co-infection VIH-VHB et VIH-VHC.
Chez les patients ayant une hépatite chronique par le virus de l'hépatite C (VHC), le traitement par antiviraux à action directe (AAD), en éradiquant le virus, réduit le risque de CHC. Cependant, ce risque de CHC persiste chez de nombreux patients, même après disparition du virus. Au cours des deux prochaines décennies, la plupart des cas de CHC liés au VHC devraient survenir chez des personnes guéries virologiquement.
La cirrhose est le facteur de risque le plus important pour le CHC.
Cependant, même parmi les patients atteints de cirrhose, le risque de CHC n'est pas uniforme. Cela peut s'expliquer en partie par la variation du degré de régression ou de progression de l’atteinte du foie (fibrose) au fil du temps. Plusieurs facteurs démographiques (par exemple l'âge), cliniques (par exemple le diabète ou l'obésité) et comportementaux (par exemple la consommation d'alcool ou le tabagisme) peuvent également influencer le risque de CHC.
Les recommandations de la Société Française d’Hépatologie (AFEF) sont les suivantes :
Après réponse virologique post-traitement hépatite C, les patients avec hépatopathie chronique avancée doivent bénéficier de la poursuite du dépistage semestriel du carcinome hépatocellulaire même si le risque de carcinome hépatocellulaire diminue par rapport aux patients sans réponse virologique soutenue. La durée de ce dépistage n’est pas définie, certaines études montrant la persistance d’un risque de carcinome hépatocellulaire plusieurs années après la réponse virologique soutenue.

La réduction de la réplication virale maternelle par la prise de traitement antirétroviral (ARV) réduit drastiquement le risque de transmission à l’enfant. On estime à 85 % la proportion de femmes enceintes dans le monde ayant accès à un traitement préventif, mais ce chiffre tombe à moins de 60 % pour les femmes enceintes séropositives en Afrique de l’Ouest et du Centre.
Il a été démontré qu’il n’y avait pas de transmission aux enfants de mères prenant un traitement ARV depuis la conception jusqu’à l’accouchement, ayant une charge virale indétectable et n’ayant pas allaité. De même, quand la charge virale est indétectable, les femmes peuvent accoucher normalement par voie basse, la césarienne n’étant indiquée qu’en cas de charge virale non contrôlée ou pour des raisons obstétricales.
L’allaitement maternel induit un risque de contamination additionnel, via des virus libres ou des virus intégrés dans des cellules présentes dans le lait, ce qui le rend contre-indiqué à ce jour dans les pays où l’allaitement artificiel peut être pratiqué sans risque. Par contre, dans les pays où un accès à de l’eau propre et des conditions d’hygiène optimales ne sont pas garantis, la balance bénéfices-risques penche pour un allaitement maternel exclusif par une mère sous traitement ARV, éventuellement complété par une prophylaxie du bébé lui-même tant qu’il est exposé.
Les infections diagnostiquées aujourd’hui chez des nourrissons concernent pour la moitié des enfants infectés pendant la grossesse, et pour l’autre moitié pendant l’allaitement ; dans l’immense majorité des cas leurs mères n’étaient pas sous traitement ARV, que ce soit parce que leur statut n’était pas connu, parce qu’elles ont été contaminées pendant la grossesse ou l’allaitement alors qu’elles étaient séronégatives en début de suivi prénatal, parce que le traitement ARV n’était pas prescrit ou pas disponible, ou parce que la mère avait interrompu son traitement.
En France, les progrès majeurs des stratégies de prévention ont permis de réduire ce risque de transmission de la mère à l’enfant de 25% au début des années 1990, puis à moins de 2 infections pour mille grossesses en 2020 lorsque la mère est dépistée séropositive au VIH avant ou pendant celle-ci. De ce fait, la majorité des contaminations qui surviennent aujourd’hui résultent de transmissions tardives, le plus souvent méconnues, en fin de grossesse ou pendant l’allaitement, de femmes qui étaient séronégatives en début de grossesse et ont été contaminées à leur insu ultérieurement. D’où l’importance cruciale pour toute femme enceinte de connaitre le statut VIH de son partenaire, ce qui peut le cas échéant être proposé au sein du suivi prénatal (bilan pris en charge à 100% par la sécurité sociale en France).
Entre 2010 et 2020, en France, l’Institut de veille sanitaire a estimé entre 100 et 120 le nombre d’infections diagnostiquées par an avant l’âge de 18 ans. Pour les personnes dont le mode de contamination a pu être identifié, on estime à 41% celles qui ont été infectées par transmission de la mère à l’enfant et à 54% celles l’ayant été par voie sexuelle, ce qui souligne aussi l’importance de ne pas abandonner les actions de prévention en milieu scolaire.
Il se pose essentiellement dans trois circonstances :
le suivi des bébés nés de mères séropositives pour le VIH,
le dépistage des enfants lorsqu’un parent est diagnostiqué porteur du VIH, ou devant une symptomatologie compatible avec ce diagnostic,
le dépistage d’un adolescent en rapport avec une circonstance de sa vie sexuelle.
Chez l’enfant de plus de 2 ans, le diagnostic de l’infection au VIH est, comme pour l’adulte, basé sur la pratique d’un test dépistant les anticorps (sérologie VIH).
Chez un nourrisson, ce diagnostic est entravé par la présence résiduelle des anticorps maternels. On se basera donc sur la mise en évidence directe du virus par les techniques de biologie moléculaire (PCR ADN ou ARN/mesure de « charge virale »).
Lors du suivi d’un bébé de mère séropositive non allaité, cette recherche virologique est effectuée à la naissance, puis à 1 mois, 3 mois et 6 mois. On peut affirmer la non-contamination de l’enfant lors du bilan des 3 mois. Le suivi biologique se termine avec l’obtention d’une sérologie négative entre 18 et 24 mois. En cas d’allaitement, il faut poursuivre le suivi virologique par PCR jusqu’à 3 mois après la fin de celui-ci pour affirmer l’absence de contamination.
Le suivi d’un bébé « exposé au VIH » et de sa mère permet aussi d’offrir une prise en charge multidisciplinaire, et notamment psychologique et sociale, aux mères souvent vulnérables, et d’évaluer la sécurité et la tolérance pour l’enfant des traitements ARV auxquels il a été exposé in utero et après la naissance.
Tout diagnostic d’infection par le VIH justifie un contrôle systématique sur un 2e prélèvement, ainsi que l’évaluation de la réplication virale et de l’état immunitaire.
L’appréciation du déficit des défenses immunitaires doit aussi tenir compte de l’âge. En effet un nourrisson, en dehors de toute infection, a un chiffre de lymphocytes plus élevé qu’un adulte ; un taux de CD4 à moins de 500 /mm3 avant 5 ans, ou inférieur à 750 /mm3 avant 1 an, signe un déficit sévère correspondant généralement à un pourcentage de lymphocytes CD4 inférieurs à 15 %.
Quoiqu’il en soit, l’indication de traitement se justifie dans tous les cas.
Dans la situation d’un bébé né de mère séropositive, le diagnostic est posé le plus souvent chez un bébé qui n’a que peu voire aucun symptôme visible. Les premiers signes sont souvent des ganglions multiples, une augmentation de la taille du foie ou de la rate à l’examen médical.
Lorsque l’enfant développe une forme sévère précoce, il peut y avoir des troubles neurologiques graves avec un retentissement majeur sur les capacités motrices (s’asseoir, marcher, déglutir ), des diarrhées chroniques, des infections pulmonaires graves, des retards de croissance.
Chez un enfant plus grand, les symptômes seront plutôt des problèmes infectieux répétés ou atypiques (comme un zona ou une tuberculose par exemple), des problèmes de peau, une augmentation de volume des ganglions et là encore un retard de croissance.
Mais l’enfant peut aussi ne présenter aucun symptôme visible et se développer normalement, c’est ainsi que certaines infections d’origine materno-foetale ne sont diagnostiquées qu’au-delà de 15 ans.
En France, un enfant ou un adolescent séropositif bien pris en charge ne doit présenter aucun signe visible de la maladie et avoir des capacités d’apprentissage normales. Par contre, chez les jeunes patients nés avec le VIH en Afrique, la prise en charge souvent tardive associée à des carences nutritionnelles fréquentes peut laisser des séquelles durables sur la motricité, les capacités cognitives, l’état cutané, la croissance en taille, voire le développement pubertaire.
Dans la grande majorité des cas, l’annonce sera faite aux parents, à la mère ou à l’adulte responsable, selon la situation familiale.
Cette annonce est un choc, en raison de la gravité de ce que cela représente pour l’enfant, mais aussi parce qu’elle justifie, si la séropositivité maternelle n’était pas connue, d’effectuer un test sérologique des parents, voire d’autres membres de la famille, avec possible découverte et annonce d’infection alors que la stigmatisation de cette pathologie reste très forte.
Dans les cas de contamination sexuelle d’adolescents de plus de 15 ans, l’annonce leur sera faite directement mais en s’assurant de la présence soutenante d’un accompagnant majeur de plus de 18 ans si la situation ne permet pas, au moins dans un premier temps, que les parents soient informés.
Le principe du traitement est le même que chez l’adulte, reposant sur l’association de trois molécules (« trithérapie ») Le choix des molécules disponibles à l’usage pédiatrique est globalement réduit par rapport à l’éventail des traitements accessibles chez les adultes, surtout avant l’âge de 12 ans.
Avant 12 ans, le traitement repose donc sur des formes buvables administrées le plus souvent en deux prises par jour, le traitement pouvant se simplifier par l’utilisation de formes solides (comprimés ou gélules) après l’âge de 6 ans. Beaucoup de ces traitements ne sont pas faciles à prendre du fait du goût des formes liquides ou de la taille des formes solides, souvent non sécables. Un travail d’accompagnement à la prise de ces traitements est indispensable. Ainsi, la place des traitements injectables (antirétroviraux ou anticorps monoclonaux), encore au stade d’essais cliniques, n’est pas définie.
En pédiatrie, comme chez l’adulte, la disponibilité du dolutégravir (inhibiteur d’intégrase) est un progrès en terme d’efficacité, de tolérance et de galénique avec la possibilité de comprimés dispersibles et la simplicité d’une prise unique quotidienne.
Les effets secondaires des ARV sont globalement moins fréquents chez l’enfant que chez l’adulte. Les plus classiques sont la diarrhée avec les antiprotéases (notamment le lopinavir/ritonavir : Kalétra®), la fatigue et les difficultés d’apprentissage avec l’éfavirenz (Sustiva®). Les incertitudes concernant une diminution de l’ossification du squelette et une possible toxicité rénale à long terme incitent à la prudence dans l’utilisation du ténofovir et à lui préférer le TAF (ténofovir alafénamide).
Enfin, les problèmes d’inobservance plus fréquents en pédiatrie conduisent à proposer plutôt des médicaments dits à barrière génétique élevée (ayant moins de risque de faire émerger des souches de virus résistants au traitement).
En cas de déficit immunitaire important (taux de CD4 < 15 %), il est indispensable d’assurer une prévention vis-à-vis de deux infections opportunistes : la toxoplasmose et la pneumocystose, par la prise quotidienne de Bactrim® (sulfaméthoxazole-triméthoprime) qui permet aussi la réduction des infections communautaires banales (rhinopharyngites, bronchites, etc.).
Les vaccins sont indispensables, sauf le BCG qui ne doit pas être réalisé ; les vaccins contre la rougeole ou la fièvre jaune sont effectués lorsque les défenses immunitaires sont satisfaisantes.
Elle est difficile chez l’enfant et le succès virologique est moins souvent obtenu en pédiatrie que chez les adultes, particulièrement en ce qui concerne les nourrissons, les petits enfants et les adolescents.
L’échec virologique est avant tout en rapport avec une observance thérapeutique insuffisante.
Le petit enfant est totalement dépendant de l’attitude de sa mère (ou de l’adulte responsable de lui) vis-à-vis du traitement.
Pour une proportion notable des enfants qui se trouvent nouvellement infectés alors que leur mère se savait séropositive pendant la grossesse, c’est le déni de la pathologie ou l’incapacité de la mère à prendre son traitement qui a entrainé la contamination de l’enfant et cette vulnérabilité psychologique se traduit par une incapacité à donner de façon régulière et adaptée le traitement à l’enfant.
À l’adolescence, l’inobservance thérapeutique est constatée dans toutes les maladies chroniques et le VIH ne fait pas exception. Plusieurs mécanismes y concourent : la lassitude d’un traitement au long cours, à ce jour à vie, dont la prise fait penser à la maladie, qui marque une différence avec les autres, l’absence d’une connaissance complète de leur pathologie, de visibilité de la maladie, l’absence de conséquences visibles sur leur état de santé en cas d’inobservance, la survenue d’éventuels effets secondaires comme des nausées lors de la reprise du traitement…
Le développement du fonctionnement cérébral adolescent explique les prises de risque, l’impulsivité, l’intensité des réactions émotionnelles, le besoin de tisser des liens avec les pairs. La maturation plus tardive du cortex cérébral permet de prendre des décisions, d’anticiper les conséquences de ses actes.
L’importance des groupes de pairs est marquée, la proposition de groupes de parole ou d’activités collectives développant l’autonomie et l’estime de soi est très appréciée et utile.
Il est important, même avec un enfant petit, de s’adresser à lui et de lui signifier qu’on lui prescrit un traitement pour le soigner, pour améliorer sa santé.
Chez un enfant ou un adolescent en âge de comprendre, l’information initiale sera le plus souvent une information partielle et progressive, où le virus ne sera pas nommé mais où son effet sur les défenses immunitaires et le mécanisme du traitement sur le contrôle de la réplication virale seront expliqués.
Au cours du suivi régulier, on restera attentif aux besoins de l’enfant pour avancer dans des explications plus précises.
L’annonce du diagnostic complet à l’enfant est une nécessité incontournable, indispensable pour un traitement bien suivi, garant d’une espérance de vie proche de celle de la population générale. Néanmoins, cette annonce se heurte à une forte stigmatisation sociale liée à la représentation mortifère du sida et aux modes de transmission du VIH, ainsi qu’au problème posé par la révélation de la pathologie maternelle qui peut en résulter.
Plusieurs études ont montré le bénéfice de la connaissance du diagnostic sur la santé mentale et la qualité du suivi et, a contrario, le caractère délétère des annonces tardives à l’adolescence, voire à la majorité, entraînant des arrêts de traitement et de suivi durables pouvant aller jusqu’au décès de l’adolescent.
Le consensus actuel, validé par l’OMS, suggère une information complète à l’enfant vers l’âge de 10-12 ans, où le virus sera nommé (VIH, le virus qui peut causer le sida). Cette préparation à l’annonce puis l’annonce elle-même, peuvent être individuelles ou avoir lieu au sein de groupes d’éducation thérapeutique.
Il faut rester attentif, dans les suites d’une annonce complète, aux émotions et questionnements, voire aux changements de comportement qui peuvent survenir. Le plus souvent, ce partage d’information permet ensuite une meilleure communication au sein de la famille, ainsi allégée du poids du secret.
Si l’adolescent est bien portant, on insistera sur le fait que sa bonne santé est réelle, fruit d’une observance régulière passée qui doit être poursuivie dans le futur. En cas de complication révélatrice, on peut s’appuyer sur les circonstances du diagnostic pour aller assez vite à une information complète, en expliquant à l’enfant que l’on connaît bien la cause de ses problèmes et que les traitements seront très actifs pour guérir de la complication et, progressivement, améliorer son état de santé.
Toute information, même complète, devra être reprise périodiquement, en fonction de l’évolution de ses besoins.
À l’adolescence, l’information sur la pathologie sera complétée, reprise, en rediscutant les aspects pertinents pour ses questionnements (sexualité, future vie de couple, enfant à venir, orientation professionnelle,...). Il faut inlassablement redire qu’il n’y a pas de transmission sexuelle quand le jeune prend bien son traitement et a une charge virale indétectable, que le préservatif reste intéressant et utile pour protéger des infections sexuellement transmissibles et des grossesses non désirées ; que l’on peut faire presque tous les métiers (sauf l’armée encore à ce jour…), vivre en couple ou fonder une famille avec des partenaires séro-différents, que l’on peut avoir des enfants qui ne porteront pas ce virus.
La prise en charge des adolescents doit tenir compte de leurs besoins, en s’adaptant autant que possible aux horaires et impératifs des calendriers scolaires, en proposant un accès aux soins de santé sexuelle dans une approche bienveillante.
Puis vient le moment où se discute le passage vers le suivi en médecine adulte. C’est un processus que tout adolescent porteur de maladie chronique ainsi que sa famille doivent traverser, et auquel les services de pédiatrie et de médecine adulte doivent s’adapter pour limiter, à cet âge de forte vulnérabilité psychique, les risques de rupture de traitement et de suivi avec risques d’aggravation de la maladie engendrés par la discontinuité.
Cette modification profonde de la prise en charge doit être anticipée, préparée et accompagnée, tant sur un plan organisationnel, par la mise en place d’un dispositif de transition avec une ou plusieurs consultation(s) de transition précédant le transfert, que sur un plan individuel.
La préparation consiste d’abord en l’appui au développement de l’autonomie (globale, sociale et en santé) : connaître sa maladie, son traitement et les moyens de se le procurer, savoir solliciter les services adéquats en cas d’urgence ou encore savoir prendre des rendez-vous et les respecter.
C’est ensuite un dialogue sur le sens, la nécessité et le choix du moment propice pour cette transition.
Les modalités d’organisation peuvent être diverses : consultation de médecin d’adulte en pédiatrie, seul ou en binôme avec le pédiatre ou, à l’inverse, consultation dédiée aux adolescents un jour donné au sein d’un service de médecine adulte, passage via un service ou une unité dédiée aux adolescents, accompagnement par un pair-éducateur, organisation de rituels de transition…
La prise en charge ultérieure en service adulte doit s’appuyer sur des référents stables, disponibles, formés aux spécificités de l’adolescent et disposant d’une transmission des informations utiles par écrit ou au moyen de staffs communs.
Elle ne doit pas négliger la nécessité de l’accompagnement psychologique au long cours. Il est également indispensable de mettre en place des systèmes visant à repérer et rechercher les éventuels perdus de vue.
La situation sur le plan pédiatrique s’est considérablement améliorée en France ces 20 dernières années, permettant de quasiment éliminer la transmission de la mère à l’enfant et d’améliorer la santé physique et la qualité de vie des enfants nés avec le VIH. Il n’en est pas de même dans de nombreux pays, au Sud en particulier.
Les enjeux en rapport avec le secret et la stigmatisation restent encore un poids important au quotidien pour les familles concernées et le suivi des bébés de mères séropositives ne peut être banalisé, même si les contaminations sont devenues exceptionnelles.
L’accueil en services de médecine adultes d’adolescents et de jeunes adultes vivant avec le VIH doit faire l’objet d’une vigilance toute particulière pendant les premières années suivant le passage pour éviter les arrêts de suivi et la dégradation de leur état de santé, notamment en accordant une attention importante à la prise en charge de leur santé mentale.
Les recommandations de prise en charge de l’enfant et de l’adolescent (en cours de révision en 2022 ; document attendu pour fin 2022, les dernières datent de Février 2018)
Réseau EVA/Expertise France : Guide Pratique Prise en charge des enfants vivant avec le VIH ; 2016
Grandir/ SIDACTION : Guide de prise en charge de l’infection à VIH chez l’enfant et l’adolescent
Grandir/ SIDACTION : Guide sur l’annonce à l’enfant et à l’adolescent
Expertise France, Initiative 5%, SIDACTION : Ados et jeunes vivant avec le VIH, guide pour pratiquer la Pair Education
Il existe cinq principaux types de virus de l’hépatite, appelés A, B, C, D et E.
Les hépatites A et E ont de nombreux points communs. Ce sont des virus à ARN, sans enveloppe, très résistants aux agents physico-chimiques.
Ces virus se transmettent essentiellement dans des conditions d’hygiène précaires, par l’eau ou les aliments contaminés. On les retrouve dans les selles de personnes infectées, d’où la notion de transmission féco-orale. La transmission du VHA peut aussi avoir lieu lors de rapports sexuels en cas de contact bouche-anus (anulingus). Pour le VHE, la transmission transfusionnelle est possible, ainsi qu’une transmission par don d’organe.
Les infections par ces virus sont essentiellement aiguës, guérissant spontanément au bout de quelques jours/semaines. Elles se caractérisent par une inflammation hépatique aiguë et de courte durée, conduisant à la destruction d’une partie des cellules du foie. Les capacités régénératrices du foie permettent, en général, de recouvrer complètement des fonctions hépatiques normales. En revanche, l’hépatite fulminante A ou E est possible.
Les virus des hépatites B, D et C ont en commun d’être des virus avec une enveloppe et transmissibles par le sang. Pour ces 3 virus, l'infection peut évoluer sous une forme chronique.
Le VHD présente la particularité, pour se multiplier, d’être sous la dépendance du VHB, dont il emprunte l’enveloppe. Le VHD n’est donc infectieux qu’en présence du VHB. Ces virus partagent certains modes de transmission comme :
Par voie sanguine
La transmission se fait par contact avec du sang ou des dérivés sanguins contaminés (transfusion sanguine, chirurgie, hémodialyse, acupuncture etc.), par l’usage de drogues par voie intraveineuse ou intra-nasale, par la pratique du tatouage ou du piercing (en particulier pour le VHC) et lors d’un accident avec exposition au sang (AES). Alors, VHB (et VHD) se transmet principalement par voie sexuelle et périnatale.
Par voie sexuelle
L’hépatite B est une infection sexuellement transmissible (IST). La transmission du VHB se fait par le sperme et les sécrétions cervico-vaginales. Elle reste idem pour le VHD mais est moins fréquente pour le VHC.
Transmission de la mère à l’enfant (transmission verticale)
Ce mode de transmission concerne le VHB, en particulier au moment de l’accouchement lorsque le sang de la mère contient beaucoup de virus (on parle de charge virale élevée) mais aussi au cours de l’allaitement. Une infection à la naissance ou dans la première année de de vie conduit dans plus 90% des cas à un portage chronique du VHB, alors que chez l’adulte le passage à la chronicité concerne moins de 10 % des cas. Cette transmission de la mère à l’enfant est prévenue par le traitement de la femme enceinte et la vaccination de l’enfant à la naissance.
Transmission horizontale (le plus souvent intra-familiale)
Le virus se transmet chez les contacts proches d’un sujet infecté par le VHB par contact direct ou par le partage d’objets contaminés (brosse à dent, rasoir...).
Les virus de l’hépatite se multiplient dans les cellules du foie (hépatocytes) et les cellules de Kupffer, des cellules chargées de la protection du foie (macrophages). Après une infection virale, comme pour tout type de microbe, deux types de réaction immunitaire se mettent en place successivement.
La première est dite innée, c’est-à-dire qu’elle appartient à tout être humain ; elle est immédiate et n’est pas spécifique de l’agent pathogène infectant. Dans un second temps, une réaction immunitaire dite adaptative, mise en place par le système immunitaire en réaction à l’agression par le pathogène, est dirigée spécifiquement vers le virus.
Pour pénétrer dans l’organisme, le virus se lie à des récepteurs à la surface des hépatocytes et y pénètre, par un processus appelé endocytose, au moyen de récepteurs spécifiques. L’activation de ces récepteurs déclenche la production de diverses cytokines, principalement des interférons (IFN) comme les IFN α et β. Après une période de six à huit semaines, le système immunitaire apprend à mieux reconnaître les virus et lance alors une réponse plus ciblée. Certaines des cellules immunitaires (appelées cellules B) commencent à fabriquer des anticorps capables d’identifier et de se lier au virus. Les médiateurs immunitaires recrutent diverses cellules du système immunitaire comme certains globules blancs ou les lymphocytes T cytotoxiques ou les cellules Natural Killer (NK) qui vont détruire les hépatocytes infectés et produire d’autres cytokines, comme l’IFN-γ, possédant un rôle immunosuppresseur dans la production de nouveaux virus.
Dans le cas des hépatites virales, notamment l’infection au VHB, la réplication du virus en elle-même n’est pas toxique pour la cellule. Les lésions hépatiques sont surtout la conséquence de la destruction, par notre système immunitaire, des cellules infectées. En effet, les cellules immunitaires détruisent les cellules hépatiques infectées par le virus et cela déclenche une réponse inflammatoire dans le foie.
Le diagnostic virologique des hépatites virales repose très largement sur la détection des anticorps induits par la présence du virus. On parle de test sérologique. Au début de l’infection ce sont les anticorps type IgM qui sont retrouvés. Ils témoignent donc d'une hépatite aiguë. Une infection ancienne est attestée par la présence des anticorps IgG.
On peut aussi détecter le virus directement dans le sang à l’aide de la technique PCR spécifique de chacun des virus.

Les stratégies de traitement diffèrent à ce jour entre le VHC et le VHB.
La guérison de l’hépatite C étant définitive quand elle est acquise (sauf en cas de réinfection car une infection antérieure n’entraîne pas d’immunité à vie), il est recommandé de traiter toutes les personnes présentant une charge virale positive dans le sang.
il existe aujourd’hui plusieurs combinaisons orales de médicaments antiviraux qui permettent une guérison chez plus de 95% des patients après 2 à 3 mois de traitement. Mais malgré les avancées extraordinaires sur le plan des modalités et de l’efficacité des traitement contre le VHC, de réels progrès sur le plan global ne seront possibles qu’avec une réduction importante du prix de ceux-ci. Même si l’accès aux médicaments génériques est garanti dans certains pays à faible revenu, cela n’est pas le cas pour la plupart des pays d’Afrique sub-Saharienne.
Pour l’hépatite B, c’est différent : même quand la charge virale est indétectable, il persiste du virus dans les cellules du foie, et un déséquilibre du système immunitaire peut entraîner une réactivation du virus. Comme le traitement est la plupart du temps sans durée limitée pour éviter cette réactivation, il a donc été nécessaire de déterminer qui devait être traité avant d’instaurer ce traitement à vie. Devant le nombre extrêmement élevé de personnes porteuses d’une hépatite B chronique dans le monde et de la forte contrainte budgétaire que cela engendre, des critères de traitement ont été définis. Ainsi, seulement 10 à 15% des personnes porteuses de l’AgHBs qui signe la chronicité de l’hépatite B se retrouvent en général éligibles au traitement. En effet, même si le ténofovir disoproxil fumarate (TDF), qui constitue le traitement antiviral du VHB de première ligne, est disponible dans tous les pays dans le cadre des programmes nationaux de lutte contre le VIH, le coût de celui-ci reste à la charge du patient pour le traitement du VHB en l’absence d’une infection VIH. Le prix élevé du traitement et la couverture insuffisante du dépistage du VHB expliquent que moins de 10% des personnes ayant besoin d’un traitement antiviral contre le VHB y ont accès.
Le traitement universel de l’hépatite C est devenu la norme dans le monde entier. Cela signifie que toutes personnes qui sont dépistées avec des anticorps anti-VHC positifs dans le sang et qui présentent une charge virale du VHC par détection de l’ARN-VHC positive doivent être traitées par une association d’antiviraux directs. Il n’y a plus de raison d’ajouter de la ribavirine ou du peg-interferon.
Le bilan biologique à prévoir avant de débuter le traitement est très simple.
Les potentielles interactions médicamenteuses avec le traitement habituel du patient sont identifiées en se référant au site internet HEP Drug Interactions : https://www.hep-druginteractions.org/. Une enquête alimentaire doit ensuite être menée afin d’identifier tout risque de prise de jus de pamplemousse, orange sanguine, millepertuis ou médecines « naturelles », sources d’interaction médicamenteuses importantes.
Puis un bilan de base est réalisé, comprenant une numération formule sanguine avec desplaquettes, une évaluation de la fonction rénale par un dosage de la créatininémie, un dosage des enzymes hépatiques et une quantification de l’ARN (afin de vérifier qu’il n’y a pas eu de guérison spontanée avant traitement). Il n’est plus nécessaire de faire une recherche du type de virus VHC.
En revanche, il est important de faire le diagnostic de cirrhose car si elle est présente, il faudra adresser le patient à un spécialiste des maladies du foie pour diagnostiquer d’éventuelles complications et adapter le traitement. L’attitude sera la même en cas d’échec d’une première ligne de traitement antiviral direct. En revanche, si le patient a déjà reçu un traitement contenant du peg-interferon, il pourra être traité comme s’il était naïf de traitement.
Sur le plan biologique, aucun suivi particulier n’est à programmer pendant les 8 à 12 semaines de traitement, sauf en cas de potentielles interactions médicamenteuses. Selon les situations bien identifiées lors de la consultation du site HEP Drug Interactions https://www.hep-druginteractions.org/ (qui concernent principalement des interactions augmentant la concentration des molécules, avec un risque possible de toxicité rénale ou hépatique), on peut être amené à effectuer un bilan comportant une mesure de la créatinine plasmatique et un dosage des enzymes hépatiques 4 semaines après l’introduction du traitement.
Il n’est plus nécessaire de quantifier l’ARN-VHC au cours du traitement (sauf éventuellement 4 semaines après son introduction, comme moyen d’appui à l’observance). L’évaluation de la réponse au traitement a lieu 12 semaines après la fin du traitement, par une quantification de l’ARN du VHC (réponse virologique soutenue à 12 semaines = RVS12).
A ce jour, deux associations d’antiviraux directs sont recommandés : velpatasvir / sofosbuvir (Epclusa®) en 1 comprimé par jour pendant 12 semaines ou pibrentasvir / glecaprévir (Maviret®) 3 comprimés par jour pendant 8 semaines.
Les recommandations de traitement de l’hépatite B datent de 2015 pour l’Organisation Mondiale de la Santé et de 2017 pour l’Europe. Elles seront mises à jour en 2024.
Pour comprendre de façon simple qui doit être traité, l’algorithme ci-dessous propose une prise en charge basée sur les variables suivantes : présence ou pas d’une cirrhose, taux d’ALAT, charge virale du VHB, positivité de l’AgHBe, évaluation de la fibrose par marqueurs non invasifs (élastométrie impulsionnelle, score biochimique de fibrose). On diagnostique la présence d’un niveau modéré de fibrose quand le score de fibrose est supérieur à F2 (7.2kPa en élastométrie impulsionnelle).
Dans tous les cas, il faudra effectuer une échographie hépatique tous les ans pour rechercher le cancer du foie, voire tous les 3 à 6 mois si le patient est cirrhotique.
S’il n’y a pas d’indication au traitement, dans ce cas, le suivi clinique et biologique dépend de la présence ou pas de l’AgHBe :
S’il est présent, le patient doit bénéficier d’un dosage des ALAT tous les 3 mois, d’une évaluation de la charge virale VHB tous les 6 à 12 mois et d’une évaluation de la fibrose couplée à une échographie hépatique tous les ans.
S’il l’AgHBe est négatif, il faut se baser sur le niveau de réplication du VHB pour déterminer le rythme des examens :
Si la charge virale est < 2000UI/mL, il faudra mesurer les ALAT tous les 6 à 12 mois, doser la charge virale et évaluer la fibrose tous les 2 à 3 ans.
Si la charge virale est ≥ 2000UI/mL, le rythme de mesure des ALAT est tous les 3 à 6 mois, tandis que la charge virale VHB et la fibrose devront être évaluées tous les ans
Le traitement de l’hépatite B repose principalement sur l’utilisation des analogues nucléosidiques ou nucléotidiques de la transcriptase inverse du VHB.
Les trois molécules recommandées sont le tenofovir disoproxyl (245mg ou 300mg selon le conditionnement), 1 comprimé par jour, le ténofovir alafénamide 25mg, 1 comprimé/jour ou l’entécavir 0.5mg, 1 comprimé par jour. Chez les patients ayant déjà été exposés à la lamivudine, la posologie de l’entécavir doit être doublée à 1mg par jour.
La tolérance clinique de ces trois molécules est excellente. Quelques cas exceptionnels de cytopathie mitochondriale ont été rapportés avec l’entécavir et de rares cas de néphropathie tubulaire proximale avec le tenofovir disoproxil, encore plus rares mais possibles sous tenofovir alafenamide.
La surveillance de la tolérance biologique du traitement repose sur l’évaluation de la clairance de la créatinine pour les patients sous tenofovir disoproxil. Toute altération de la fonction rénale (clairance < 60ml/min) doit faire envoyer le patient à un néphrologue pour faire la part entre une toxicité du traitement ou une autre pathologie intercurrente.
Il n’est pas recommandé d’utiliser une molécule comme la lamivudine ou l’adéfovir (retiré du marché en Europe).qui génère de la résistance . A ce jour, il n’y a pas non plus d’indication à utiliser une bithérapie associant lamivudine + tenofovir.
La durée de traitement est à vie.
Si le patient perd l’AgHBs et que des Ac antiHBs apparaissent, on peut envisager d’arrêter le traitement. Dans tous les autres cas, il vaut mieux ne pas interrompre le traitement à cause du risque de réactivation avec parfois des décompensations hépatiques qui vont conduire au décès en absence de transplantation hépatique. Certains spécialistes considèrent l’arrêt des antiviraux devant la perte de l’Ag HBe (pour les patients avec AgHBe positif en début de traitement) et au bout d’une certaine période de négativation de la charge virale. Cependant, ces décisions ne doivent prises que par des spécialistes à cause du risque important de réactivation virale.
Dans de rares cas (homme jeune, pas ou peu de fibrose, charge virale peu élevée, transaminases élevées), on peut envisager d’utiliser le peg-interferon α2A à la posologie de 180µg/semaine. Mais son utilisation doit faire recourir à un spécialiste pour le suivi clinique et biologique qui est plus complexe que sous traitement oral.










Le développement des médicaments ARV a connu un développement spectaculaire depuis près de 30 ans. Les progrès ont concerné d’abord l’efficacité avec une puissance plus grande (du simple au triple), la simplicité des prises - on est passé de plusieurs gélules plusieurs fois par jour à un traitement en une prise une fois par jour ! enfin la robustesse vis-à-vis de la résistance. Le défi en cours est celui des molécules longue durée, actives pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois. Ces médicaments récents ont permis de faire évoluer les stratégies thérapeutiques.
Traiter l’infection VIH : les stratégies thérapeutiques antirétroviralesL’histoire de la thérapeutique anti VIH débute à partir de 1986. Le VIH/SIDA a déjà commencé sa course mortifère avec la mort inéluctable des patients diagnostiqués à un stade d’immunodépression majeure . Si on arrive à traiter quelques-unes des infections opportunistes qui caractérisent le sida, l’impuissance à contrôler la production de milliards de virus VIH par jour conduisait habituellement au décès en moins de 2 ans.
A cette époque, les traitements antiviraux existent à peine ; on dispose tout juste de l’aciclovir contre les herpes virus qui justifieront un prix Nobel en 1988 pour la virologue biochimiste nord-américaine Gertrude Elion.
Avec son pronostic impitoyable, incontestablement le VIH/SIDA va donner une impulsion majeure au développement des médicaments antiviraux qui se prolongera par la fantastique mise au point des médicaments anti hépatite C, infection que l’on guérit aujourd’hui complètement.
En matière de VIH, la 1 ère classe utilisée est celle des INTI avec la zidovudine partir de 1986, une molécule qui avait été évaluée sans succès dans un autre contexte. Sur son modèle, seront fabriquées d’autres molécules de la même classe. En parallèle, on constate que l’AZT utilisé seule (on parle de monothérapie) ne suffit pas face aux charges virales énormes qui caractérisent les patients que l’on traite dans ces années 1990.
Ce sera ensuite l’ère des bithérapies d’INTI. Puis, même si les bithérapies font un peu mieux que les monothérapies, on se rend compte sur la mesure de la charge virale , technique qui fait son apparition au milieu des années 90 , que la résistance se développe avec un virus incomplètement contrôlé. Viendra à partir de 1996 la révolution de la trithérapie composée d’un "socle" de 2 INTIs et d’un 3eme médicament appartenant à la classe des IP ou INNTI.
Depuis 30 ans, le développement des médicaments anti rétroviraux (actif sur les rétrovirus VIH) s’est poursuivi dans le sens d’une moindre toxicité, d’une plus grande simplicité de prise, d’une plus grande efficacité sur des virus résistants. Il existe actuellement 8 classes de médicaments et plus de 20 médicaments ont été développés au cours du temps.
La nécessité d’un traitement à vie, sans interruption puisque le VIH ne peut être éradiqué à orienter, la recherche médicamenteuse vers la mise au point de médicaments à longue durée d’action, permettant des prises espacées de plusieurs semaines voire plusieurs mois par voie injectable. Une nouvelle ère commence à la fois pour le traitement du VIH mais aussi la prévention.
Les antirétroviraux (ARV) sont des molécules chimiques qui vont empêcher le déroulement du cycle du VIH () en empêchant (inhibant) les enzymes qui activent une ou plusieurs étapes du cycle ce qui conduit à l’arêt de la production de nouveaux virus.
Plusieurs molécules / médicaments peuvent avoir la même action inhibitrice sur une enzyme. Tous les médicaments ayant la même action sur une enzyme appartiennent à la même classe. Les classes de molécules utilisées aujourd’hui en routine sont :
Les INTI : inhibiteurs nucléosidiques ou nucléotidiques de la transcriptase inverse
Les INNTI : inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse
Les IP : inhibiteurs de la protéase
Les INI : inhibiteurs d’intégrase
Le site de l’European Medicines Agency (EMA) permet d’accéder aux dernières informations à jour sur les médicaments concernés.
En 1986, la zidovudine (ZDV) a été le premier ARV à démontrer un bénéfice clinique, seul critère d’évaluation à l’époque. La charge virale plasmatique ne deviendra le marqueur d’évaluation des ARV que dix ans plus tard. Jusqu’en 1996, les INTI ont été les seuls ARV disponibles : didanosine (ddI), stavudine (d4T), didéoxycytidine (ddC) et lamivudine (3TC). Au début des années 2000, sont mis sur le marché abacavir (ABC), emtricitabine (FTC) et ténofovir disoproxil fumarate (TDF), permettant l’abandon progressif des INTI les plus toxiques (ddI, d4T et ddC), puis en 2016 le ténofovir alafénamide (TAF).
Cette classe de médicaments, la plus ancienne dans l’arsenal thérapeutique, reste le socle de toutes les trithérapies d’ARV : deux INTI associés par paire (TDF/FTC ou TAF/FTC, ABC/3TC), plus un troisième agent d’une autre classe.
Les INTI sont des molécules de petite masse molaire (<300 g/mol), ce qui permet qu’ils soient aisément co-formulés. Dérivés des nucléosides naturels, ils bloquent l’enzyme permettant la synthèse d’ADN complémentaire à partir de l’ARN viral, avant son intégration dans le génome de la cellule infectée. Ces composés sont actifs sur le VIH-1 et le VIH-2.
Les INTI sont des médicaments modérément puissants, qui réduisent la charge virale VIH d’en moyenne 1 log10 soit un facteur 10 (3TC) jusqu’à 1,5 log10 (ABC, TDF, TAF).
Une puissance ARV de 1 log10 fait passer une charge virale de 100 000 copies ARN/mL à 10 000 cp/mL, 2 log de 100 000 cp/mL à 1000 cp/ml.
Outre leur activité sur VIH, le TDF, le TAF et la lamivudine sont très efficaces sur le virus de l’hépatite B (VHB) ;
Tout patient co-infecté VIH et VHB doit bénéficier d’un traitement ARV comportant TDF/FTC ou TAF/FTC.
Au sein de la classe des INTI, la barrière génétique à la résistance est assez élevée pour TDF ou TAF, faible pour 3TC, intermédiaire pour les autres.
Les INTI de première génération (AZT, d4T, ddI, ddC) se sont révélés mal tolérés, avec la survenue d’effets secondaires en lien avec leur toxicité mitochondriale (baisse des globules sanguins avec anémie pour l’AZT, troubles digestifs, douleurs musculaires, perte de la graisse avec creusement des joues, neuropathie des membres inférieurs). Pour ces raisons, ils ne sont plus recommandés.
La lamivudine (3TC) et l’emtricitabine (FTC), deux molécules « cousines », ont un excellent profil de tolérance qui en fait des partenaires de choix, en association avec un autre INTI, pour constituer le socle (backbone) de nombreuses trithérapies, ou avec un ARV d’une autre classe pour construire une bithérapie (par exemple : darunavir/ritonavir + 3TC ou dolutégravir + 3TC).
L’abacavir (ABC) est bien toléré ; cependant, il ne doit pas être utilisé chez les patients porteur du marqueur génétique HLA B57-01, compte tenu d’un risque d’hypersensibilité grave avec survenue, dans les 6 premières semaines, de fièvre et d’éruption cutanée. En outre, ABC a été associé dans certaines études à un sur-risque d’évènement cardio-vasculaire, et il parait prudent d’envisager des alternatives thérapeutiques chez les patients à haut risque cardio-vasculaire.
Les ténofovir (TDF ou TAF) sont de loin les INTI les plus utilisés, combinés à 3TC ou FTC Leur tolérance clinique est bonne. Cependant, dans de rares cas (moins de 2%), le TDF peut endommager la fonction rénale (il faut surveiller la créatinine dans le sang). Par ailleurs, le TDF est associé à une déminéralisation osseuse plus importante que les autres ARV, sans qu’un risque plus élevé de fracture osseuse ait été clairement démontré. Ces inconvénients sont bien moins importants avec le TAF.
Trente ans après le début de l’ère des traitements antirétroviraux hautement actifs, les INNTI restent l’une des quatre classes majeures de l’arsenal thérapeutique dans l’infection à VIH.
Il s’agit, par ordre d’ancienneté d’apparition dans l’arsenal thérapeutique, de la névirapine (NVP), l’efavirenz (EFV), la rilpivirine (RPV), l’étravirine (ETV) et la doravirine (DOR).
Ces INNTI sont disponibles sous forme :
de comprimés à une seule molécule :
NVP (Viramune®)
EFV (Sustiva®)
RPV (Edurant®)
ETV (Intelence®)
DOR (Pifeltro®)
de comprimés en combinaison avec certains INTI (TDF, TAF, 3TC) :
TDF/3TC/EFV (Atripla®)
TDF/3TC/NVP (Triomune®)
TDF/FTC/RPV (Eviplera®)
TAF/FTC/RPV (Odefsey®)
TDF/3TC/DOR (Delstrigo®)
de comprimés en association avec dolutégravir : DTG/RPV (Juluca®)
la rilpivirine existe sous forme injectable (Rekambys®) administrée en intramusculaire tous les 2 mois.
Les INNTI sont de puissants antirétroviraux (réduction virale de plus de 1 log10). En revanche, ils ne sont pas actifs sur VIH-2.
Tous les INNTI, sauf la doravirine, induisent des interactions médicamenteuses, c’est-à-dire qu’administrés en même temps que d’autres médicaments :
leur concentration sanguine peut augmenter et exposer alors à un risque de toxicité ;
ou bien eux-mêmes peuvent diminuer les concentrations des médicaments associés et donc en réduire l’efficacité.
Leurs effets secondaires sont liés à une hypersensibilité, rare, qui apparait précocement (premières semaines du traitement) et qui doit conduire à leur interruption. D’autres effets concernent des troubles de la sphère neuropsychique : troubles du sommeil, rêves anormaux, troubles de l’humeur, dépression. En revanche, ils n’entrainent pas d’effets délétères rénaux, lipidiques et métaboliques ni une modification du poids, et sont adaptés à la prise au long cours.
La barrière génétique des INNTI est faible à l’exception d’étravirine ou doravirine, les plus récemment développés. En cas de réplication persistante, des mutations de résistance émergent rapidement avec névirapine, efavirenz et rilpivirine notamment. Etravirine et doravirine peuvent perdre de leur efficacité en cas de mutations à névirapine, efavirenz, rilpivirine.
En 1996, l’arrivée de la classe des inhibiteurs de la protéase du VIH, puissants et actifs sur les virus résistants aux INTI, a marqué le début de l’ère des Highly Active Antiretroviral Therapies (HAART ou cART) et a révolutionné la thérapie. En 2022, cette classe d’ARV occupe toujours une place importante même si elle n’occupe plus le devant de la scène thérapeutique.
Les IP gardent l’immense avantage d’une barrière génétique à la résistance très élevée avec la persistance d’une activité durable. Leur chef de file, le darunavir (DRV) est très précieux en cas d’échec des premières lignes de traitement ou en cas de résistances multiples.
Les IP bloquent la phase tardive de la maturation virale : la protéase ne pouvant plus cliver les précurseurs, les nouveaux virus seront donc immatures et non infectieux.
Ils sont actifs sur les VIH-1 et 2.
Les concentrations sanguines des IP sont très variables. Aussi, pour permettre une plus grande stabilité des concentrations et minimiser les prises quotidiennes, les IP nécessitent d’être pharmacologiquement renforcés (boostés), soit par le ritonavir, soit par le cobicistat.
Ils induisent des interactions avec de nombreux médicaments, dont certains ARV. Il est important de vérifier les interactions potentielles avec les IP.
Les IP les plus anciens tels que indinavir (Crixivan®), saquinavir (Invirase®), nelfinavir (Viracept®) ne sont plus utilisés. Lopinavir/ritonavir (LPV/r), longtemps chef de file des IP car plus efficace et mieux toléré que les premières générations, est moins utilisé actuellement, sauf dans les pays du Sud où il est parfois plus facilement disponible que le darunavir.
Atazanavir (Reyataz®) peut s’utiliser avec ou sans boost. Combiné à des INI tels que RAL ou DTG, il permet d’augmenter la concentration de ces derniers par 2. Ceci est très utile en pratique pour s’assurer d’une concentration élevée d’INI, en particulier en cas de résistance.
Darunavir (DRV) : chef de file de la classe, DRV est l’IP le plus utilisé dans les pays sans restriction d’accès, en raison de son efficacité et de sa barrière génétique à la résistance particulièrement élevée.
Il peut s’utiliser en une prise quotidienne en l’absence de résistance ou en deux prises en cas de résistance aux IP.
Les IP peuvent occasionner des troubles digestifs (diarrhées, embarras gastrique), une augmentation du cholestérol et des triglycérides, un subictère (« jaunisse »).
Les IP ont tous une barrière à la résistance élevée, c’est-à-dire une capacité importante à résister à la « résistance ». D’une part, l’acquisition de mutations par le virus est relativement lente en comparaison des INNTI ou des INTI. D’autre part, il faut plusieurs mutations pour impacter négativement leur efficacité.
Même s’ils ont souvent perdu leur place de troisième agent préféré en initiation de traitement au profit des INI, les IP, et en particulier DRV, constituent une classe très solide d’ARV, indispensables partenaires d’un traitement antirétroviral qui doit assurer une charge virale indétectable toute la vie. Leur robustesse virologique, leur souplesse pharmacologique avec l’utilisation possible de dosages plus faibles, leur efficacité dans des stratégies allégées en bithérapie IP + 3TC, constituent des atouts pour aller vers une adaptation plus grande des traitements ARV à l’individu.
Le développement des inhibiteurs de l’intégrase du VIH (INI), une classe nouvelle d’ARV avec un mécanisme d’action innovant l’inhibition de l’intégration du VIH dans le noyau de la cellules infectée, débuté à la fin des années 1990 avec le raltégravir commercialisé en 2007, a permis de franchir une étape majeure dans la thérapeutique Actuellement, les INI constituent une classe majeure de l’arsenal thérapeutique et ont fait leur entrée dans toutes les recommandations mondiales, de l’initiation aux lignes ultérieures.
Il existe cinq médicaments actifs sur VIH-1 et VIH-2, par voie orale ou injectable (« Long Acting » en intramusculaire), en composé simple comme en combinaison fixe, en bi- ou mono-prise quotidienne, associés soit avec des INTI en bi- ou trithérapie soit avec un INNTI en bithérapie :
raltégravir (Isentress®)
elvitégravir /cobicistat combiné à TDF/FTC (Genvoya®)
dolutégravir (Tivicay®), ABC/3TC/DTG (Triumeq®), DTG/3TC (Dovato®), DTG/RPV (Juluca®)
Les INI entraînent une décroissance rapide de la charge virale plasmatique, conduisant plus rapidement à son indétectabilité que les INNTI ou les IP.
Ils n’entrainent pas d’interactions majeures ni avec les autres ARV ni avec les médicaments associés.
Les INI de première génération (RAL et EVG) ont une faible barrière génétique à la résistance. Les molécules de deuxième génération comme DTG ou BIC ont une barrière génétique élevée à la résistance avec très peu voire pas de résistance en cas d’échec à DTG chez les patients naïfs d’ARV. La barrière génétique à la résistance de CAB semble intermédiaire entre celles des INI de première et de deuxième génération.
Les INI sont bien tolérés avec peu (moins de 5%) d’effets secondaires nécessitant leur interruption. Des troubles neuropsychiques sont possibles : insomnie, cauchemars, troubles de la concentration, vertiges, maux de tête.
Des prises de poids parfois notables (entre 5 et 10 kg) ont été observées sous INI, en particulier avec DTG et BIC, moins avec RAL et peu avec EVG chez des patients en initiation de traitement. Ce phénomène est moins net chez des patients contrôlés virologiquement chez lesquels est introduit l’INI. Initialement impliqué dans des anomalies fœtales neurologiques chez les femmes enceintes, le DTG n’est maintenant plus contre-indiqué chez la femme enceinte compte tenu d’un ratio bénéfice /risque important.
Les inhibiteurs de l’entrée du VIH dans les cellules cibles humaines se répartissent en plusieurs classes de molécules, chacune ayant un mécanisme de blocage spécifique d’une étape des différentes interactions entre constituants de l’enveloppe virale et de la surface cellulaire. Ce processus d’entrée complexe peut être divisé en trois étapes :
attachement de la protéine d’enveloppe gp120 du VIH-1 au récepteur CD4 de la cellule cible,
liaison de la gp120 à un corécepteur CCR5 ou CXCR4,
ancrage du peptide de fusion de la protéine d’enveloppe gp41 du VIH-1 dans la membrane cellulaire et repliement de la gp41, aboutissant à la fusion des membranes virales et cellulaire.
Schéma des étapes d’entrée du VIH et des cibles des inhibiteurs d’entrée
Enfuvirtide (ENF ou T20)
L’enfuvirtide (Fuzeon®) est un peptide synthétique qui se fixe à la gp41, bloquant ainsi la fusion du VIH à la membrane du lymphocyte. ENF est administré par injection sous-cutanée, à raison de deux injections par jour. Sa puissance est de 1,5 à 2 log10 copies/ml. Si la tolérance générale d’ENF est bonne, la nécessité d’injections biquotidiennes a conduit à réserver ce médicament en association chez des patients en multi-échec en situation d’attente de nouvelles molécules ou en cas de besoin d’un traitement par voie injectable.
Maraviroc (MVC)
Le MVC (Celsentri®) est un inhibiteur du corécepteur CCR5. Il n’est actif que sur les souches de VIH dont le récepteur est le CCR5. Ce test de tropisme se fait sur l’ARN ou sur l’ADN VIH. La puissance antivirale de MVC est d’environ 1.5 log10. Il s’administre par voie orale et est bien toléré.
Fostemsavir
Récemment commercialisé, le fostemsavir (Rukobia®) agit au niveau de la gp120, glycoprotéine d’enveloppe du virus, et bloque la fixation du VIH sur le récepteur CD4, empêchant ainsi son entrée du VIH dans la cellule. Sa puissance antivirale est d’environ 1 log10. Il s’administre par voie orale. Son indication est réservée aux patients ayant une infection VIH-1 multi-résistante sans option de suppression virologique avec les traitements ARV courants.
Ibalizumab
Ibalizumab (Trogarzo®) est un anticorps monoclonal, indiqué en association avec d’autres ARV chez des patients en échec du fait d’une multi-résistance. Il empêche la fusion et l’entrée du VIH dans la cellule CD4.
Il s’administre par voie intraveineuse avec une dose de charge initiale (2 g) puis une perfusion toutes les 2 semaines (800 mg). Sa puissance est de 0,5 à 1,7 log10 copies/ml. Sa voie d’administration et son coût limitent son utilisation.
La recherche en matière d’ARV continue fort heureusement de se développer, avec un focus essentiel sur les médicaments dits à longue durée.
Le plus avancé est un inhibiteur de capside de longue durée, le lenacapavir, actif sur VIH-1 et qui devrait l’être aussi sur VIH-2.
Le lenacapavir est un médicament puissant (>1,5 log10), actif sur les virus résistants aux autres ARV. Son avantage majeur est de pouvoir être administré en injection sous-cutanée tous les six mois après une phase courte d’administration orale.
Si son efficacité et sa bonne tolérance se confirment dans les essais en cours, de nouvelles perspectives de prise en charge seront ouvertes, tant en traitement qu’en prévention de l’infection VIH.
Les médicaments antirétroviraux disponibles permettent d’obtenir le contrôle de la réplication virale chez tous les patients vivant avec le VIH.
Ils doivent être pris à vie car aucun d’entre eux ne permet d’éradiquer le VIH.
Dans le monde, les problèmes de santé mentale ont un retentissement important sur l’existence des personnes en termes de souffrance psychique, de retentissement sur la vie affective et professionnelle, d’augmentation des addictions, voire de la survenue de suicides. Cette situation a été aggravée par la pandémie de COVID-19, qui a contribué à une dégradation de l’état psychique des populations. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) rapporte une augmentation significative des problèmes de santé mentale dans la population générale au cours de la première année de la pandémie. En 2020, les cas de troubles dépressifs majeurs et de troubles anxieux ont augmenté respectivement de 27,6% et 25,6% dans le monde. Le jeune âge, le sexe féminin et les problèmes de santé préexistants sont des facteurs de risque souvent signalés.
Découvrir sa séropositivité au VIH aujourd’hui reste un événement majeur, avec d’importantes conséquences dans sa vie quotidienne et dans la modification du lien aux autres. Être chroniquement atteint peut être bien supporté ou au contraire difficilement accepté. À l’extrême, il peut exister des problèmes d’observance des traitements, voire un déni de l’atteinte.
Selon que l’on habite dans les pays du Sud ou ceux du Nord, que l’on dispose d’un accès aux soins aisé ou non, que son orientation sexuelle est acceptée ou pas, les conséquences ne seront pas les mêmes. Pour certains, le poids de cette découverte va entrainer des répercussions psychiques douloureuses, dépression, anxiété, voire idées suicidaires. Ces troubles psychiques sont l’une des plus importantes comorbidités dans le cadre de l’infection par le VIH et leur prévalence est supérieure à celle retrouvée dans la population générale.
Certains découvrent aujourd’hui leur séropositivité sur un mode traumatique, lors d’un bilan pratiqué au début d’une grossesse ou au décours d’un parcours migratoire difficile. D’autres sont informés de leur atteinte à un stade tardif, à l’occasion d’une infection opportuniste ou d’une altération de leur état de santé. L’annonce de la séropositivité à certains migrants convoque chez eux des représentations de la maladie telle qu’elle est vécue dans leur pays. Les phénomènes de stigmatisation et de discrimination restent très présents, et l’ignorance concernant le VIH croit d’année en année, surtout chez les plus jeunes.
Certains HSH (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes) l’apprennent lors d’un test de dépistage de routine alors même qu’ils pensent n’avoir « presque » pas pris de risques. Certes, l’usage de la prophylaxie pré-exposition (PrEP), principalement utilisée dans cette population, a changé la donne mais elle reste sous-employée. En France, elle n’est utilisée que par environ 15% des personnes éligibles à son usage.
Lorsqu’un patient est bien informé et pris en charge, l’amélioration des traitements, la restauration de l’immunité et l’acquisition d’une charge virale indétectable permettent assez rapidement un suivi allégé. Les liens avec l’hôpital (toujours vécu comme le lieu de la maladie grave) se distendent et les médecins de ville prennent le relais, ce qui contribue à banaliser l’infection. La prise d’un traitement quotidien vient rappeler la présence du VIH, mais cette contrainte existe aussi dans bien d’autres maladies chroniques.
Pour certains cependant, tous ces éléments positifs ne font pas sens. Le signifiant « sida » vient recouvrir leur vie de son ancien poids mortifère. L’idée qu’en arrêtant le traitement la mort serait rapide reste communément répandue et contribue au maintien de la perception d’une maladie « dangereuse ».
De facto, les conséquences de l’atteinte sur la vie privée sont importantes : comment le dire au partenaire, à l’entourage, à la famille ? Lors de la découverte, quel est le statut sérologique du partenaire, des enfants ? Aujourd’hui, beaucoup de personnes séropositives ne divulguent leur infection qu’à très peu de gens, craignant aussi bien la stigmatisation que la compassion ; en conséquence, l’infection devient de plus en plus invisible et anonyme.
La recherche d’un partenaire est pour certain(e)s un « parcours du combattant » qui peut entrainer un arrêt de la vie amoureuse et sexuelle. Il est important de rappeler le bénéfice majeur du contrôle de l’infection par le traitement, à savoir la non-transmissibilité du VIH, qui va rendre la vie sexuelle plus souriante.
Les fréquentes difficultés sociales et les conditions de vie, en particulier des patients immigrés, rendent malaisée la construction d’une famille. L'importance de la crise économique fragilise encore davantage les personnes en difficultés d'insertion.
Pour la plupart des migrants, le retour au pays d’origine devient impossible, tant les systèmes de soins locaux sont, la plupart du temps, défaillants ou vécus comme tels. Les liens familiaux sont altérés par l’éloignement, les familles sont souvent décomposées/ recomposées.
Aujourd’hui, les représentations sociales sont très paradoxales : il existe d’un côté un discours rassurant de « villes » ou de « pays » « sans sida », alors que pendant encore des dizaines d’années, les personnes atteintes vont devoir vivre avec le VIH. Ce discours accentue le fossé entre le Nord et le Sud, où l’on parle à présent de 4e épidémie.
La dépression a été classée par l’OMS, en 2015, comme le plus grand contributeur mondial à l'incapacité : elle représente 7,5% de toutes les années vécues avec une incapacité (AVI). Les répercussions globales sont également coûteuses : l’OMS estime que le trouble dépressif caractérisé serait dès 2020 au premier rang de l’ensemble des maladies en termes de dépenses globales, directes et indirectes pour la société.
Les troubles psychiatriques ont de lourdes conséquences sur la qualité de vie et l’observance (oubli des prises de traitements, des consultations…). Ils entrainent une consommation plus fréquente de substances (licites ou illicites) telles l’alcool ou de substances psychoactives, dont les psychotropes. Ils peuvent engendrer une augmentation des prises de risques, avoir un retentissement sur la sexualité, des répercussions sur la vie affective, familiale, sociale et professionnelle, et une altération des capacités de travail. Enfin, les troubles dépressifs peuvent avoir des répercussions négatives en majorant les risques de discrimination à l’égard du patient (les troubles mentaux sont très stigmatisés) et en augmentant l’isolement et/ou la précarité.
Le dépistage passe avant tout par l’écoute du patient et le repérage précis des symptômes. Pendant la consultation, on recherche par exemple la tristesse de l’humeur, l’idée d’un avenir sombre, les troubles de la concentration, ou au contraire l’exaltation voire des idées délirantes. On interroge aussi le patient sur le retentissement des troubles dans la vie personnelle : vie affective, familiale, professionnelle… L’interrogatoire recherche également les antécédents, les épisodes antérieurs (prises en charges, traitements). Le dépistage des prises de toxiques et des addictions est fondamental.
Dans la population générale, la fréquence des troubles dépressifs est élevée. Leur dépistage est négligé, la sensibilisation et la formation des personnels soignants est souvent insuffisante. L’absence de spécificité des signes cliniques (absence d’appétit, fatigue, troubles du sommeil, disparition de la libido…) rend le diagnostic difficile. De surcroit, au cours de l’infection par le VIH, ces signes peuvent avoir une cause somatique ou être liés aux effets indésirables des traitements antirétroviraux.
La dépression comporte une diversité de symptômes mais requiert des critères diagnostiques précis : une humeur dépressive avec un sentiment de tristesse, de vide, une perte d’intérêt et de l’abattement. Cette humeur dépressive est associée à une douleur morale profonde, une perte de l’estime de soi et un pessimisme majeur, parfois associé à des idées de culpabilité inappropriées. S’y ajoute une perte d’intérêt et du plaisir à l’égard des activités quotidiennes, même celles qui étaient habituellement plaisantes et, à l’extrême, des idées suicidaires. Des troubles cognitifs peuvent être associés, avec concentration et attention réduites, des troubles de l’aptitude à penser, ainsi que des manifestations physiques : ralentissement psychomoteur, perte d’énergie, troubles du sommeil, de l’appétit…
On estime que près d’un Français sur 5 (19% des Français de 15 à 75 ans, soit près de 8 millions de personnes) ont vécu ou vivront une dépression au cours de leur vie. Il est bien établi que les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) souffrent davantage de dépression que la population générale, à tous les stades de l’infection, même précoce. Si les études montrent une amélioration de l’état psychique (toutes symptomatologies confondues) chez la moitié des patients depuis la mise en place des traitements par multithérapie antirétrovirale, il reste de nombreux facteurs comme l’isolement ou les problèmes socio-économiques qui rendent la dépression fréquente.
Dans une étude de 2015 reprenant les données d’une vingtaine de publications, la prévalence moyenne de la dépression chez les PVVIH est estimée à 42%, le double de celle retrouvée en population générale].
Le taux de dépression est élevé dans des populations spécifiques. En dehors même de la séropositivité, les jeunes HSH (16-25 ans) sont les plus susceptibles de présenter un état dépressif et d’avoir des comportements sexuels à risque. Une étude italienne a diagnostiqué une dépression majeure chez 36,2% des injecteurs de drogues séropositifs examinés, à comparer avec une fréquence de 15,7% chez la même population séronégative pour le VIH. La pauvreté, l’absence de domicile jouent également un rôle important.
Les effets de la dépression sur l’activité sexuelle chez les PVVIH peuvent prendre deux formes : un accroissement de la libido accompagné d’une désinhibition des conduites sexuelles, ou une abstinence initiale suivie d’un réengagement dans une sexualité comportant éventuellement des prises de risque.
Une étude camerounaise rapporte qu’un patient sur 5 (20%) suivis dans un hôpital de jour de Bamenda présente des critères de dépression majeure et que 7% ont déjà souffert d’une dépression majeure l’année précédente. Mais seuls 33% des patients ont parlé de dépression avec leurs soignants et seulement 12% ont bénéficié d’un traitement efficace. Une telle fréquence de la dépression la situe proche de celles de la tuberculose et de l’hépatite B et suggère que sa prise en charge devrait être incluse dans les guides de l’OMS.
Aux États-Unis, les femmes noires PVVIH (les afro-américaines sont touchées de manière disproportionnée par le VIH au regard d’autres populations nord-américaines), vivant quotidiennement les micro-agressions racistes, la discrimination liée à la race et au VIH, souffrent pour 24% d’entre elles de dépression majeure.
Les PVVIH âgées souffrent particulièrement de dépression. Une étude effectuée à New York dans le cadre de la Research on Older Adults with HIV (ROAH) avec 914 séropositifs âgés de 50 ans (ou plus) a montré que 39,1% des participants présentaient des symptômes de dépression majeure. Celle-ci était significativement associée à la stigmatisation associée au VIH, à une solitude accrue, à une atteinte cognitive et à de bas niveaux d’énergie.
Leur intensité va de l’anxiété diffuse à l’attaque de panique. Les troubles anxieux graves regroupent six entités cliniques : le trouble anxieux généralisé (TAG), le trouble panique avec ou sans agoraphobie, le trouble anxiété sociale, la phobie spécifique, le trouble obsessionnel compulsif (TOC) et l’état de stress post-traumatique (ESPT).
En population générale, la prévalence du TAG est de 5,1%, deux fois plus fréquent chez les femmes que chez les hommes. Être âgé de plus de 24 ans, être séparé, veuf, sans emploi sont des facteurs significativement associé au TAG. Ce trouble s’associe dans 90% des cas avec d’autres troubles psychiatriques. La majorité des patients rapporte un impact important sur leur vie, en particulier dans le domaine professionnel et la consommation de médicaments. Les symptômes comprenant des troubles somatoformes (sécheresse de la bouche, sensation de tension interne, de « souffle coupé », d’étouffement, paresthésies, éruptions dermatologiques), ou encore des symptômes allant de difficultés de concentration à l’idée de mort imminente. Certains symptômes évoquent une pathologie cardiaque (douleur ou gêne thoracique), gastrique (diarrhées, vomissements, nausées ou gênes abdominales), neurologique (sensation de vertige, d’instabilité, de tête vide, tremblements, impression d’évanouissement) ou encore psychiatriques (déréalisation ou dépersonnalisation).
Les troubles anxieux peuvent être présents avant la séropositivité. Dans une étude sud-africaine portant sur 485 PVVIH, un tiers souffrait d’anxiété ou de troubles dépressifs avant même le test.
L’amélioration de l’état clinique des PVVIH dans les pays développés s’accompagne d’une diminution des états anxieux. Le trouble anxieux reste de 1,5 à 2 fois plus fréquent chez les PVVIH que dans la population générale. À Abidjan (Côte d’Ivoire), l’anxiété est retrouvée chez 31,5% des PVVIH et la dépression chez 9,7%.
Avec plus d’un million de décès chaque année, le suicide est la 14e cause de mortalité dans le monde, et ce chiffre devrait augmenter de 50% pour en devenir la 12e cause d’ici 2030. Les trois quarts des suicides ont lieu dans les pays à faible revenu et à revenus intermédiaires. La plupart surviennent dans le contexte d’un trouble psychiatrique, en particulier la dépression. En population générale, on estime que le risque de suicide est multiplié par 30 au cours de l’épisode dépressif et que 10 à 20% des personnes souffrant de cette maladie meurent par suicide.
Le choc de l’annonce de la séropositivité VIH et le poids de la maladie chronique entrainent chez certains patients le désir de mourir. Passer à l’acte leur apparaît alors comme une solution, une délivrance. Dépister ces pensées de mort, les idées suicidaires et des antécédents de tentatives de suicide, est donc un enjeu majeur, même si ce sujet reste souvent difficile à aborder pour les patients mais aussi pour les soignants.
Certaines populations clés, marginalisées ou discriminées, appartenant à des minorités sexuelles sont particulièrement à risque. Une étude récente menée dans les systèmes de santé de la communauté LGB (Lesbian, Gay, Bisexual) rapporte que 20% des personnes appartenant à l’une de ces minorités sexuelles ont essayé de se suicider au cours de leur vie.
Cette question est étudiée depuis quelques années en Afrique, bien que le suicide y soit souvent caché, voire condamné. Les facteurs de stress les plus répandus sont le manque de soutien social, la peur de la divulgation/stigmatisation et les pressions socio-économiques. Comme souvent, la présence de troubles cognitifs est signalée dans le passage à l’acte suicidaire dans une étude sud-africaine. Le taux de prévalence des tentatives de suicide y est de 67,2 pour 100 000 avec un risque accru de tentatives de 13,33% à 18,87%.
La prise en charge doit être pluridimensionnelle, associant traitement médicamenteux et psychothérapie. L’accès aux soins reste inégal car, dans de nombreux pays, il n’y a pas d’aide, ou très peu, pour les personnes ayant des troubles de santé mentale. Même dans les pays à revenu élevé, près de 50% des personnes ayant une dépression ne sont pas traitées, en particulier les personnes les plus démunies et les étrangers en situation précaire.
Le choix du traitement médicamenteux sera guidé par l’intensité des symptômes, l’état physique du patient, l’efficacité ou l’échec de traitements antérieurs, les effets secondaires des molécules.
On distingue ainsi les composés tricycliques, qui demeurent une référence, mais présentent des effets cholinergiques et une toxicité cardiaque ; les antidépresseurs de nouvelle génération, comme les inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine ou ISRS, sont d’un maniement plus facile. Interviennent dans le choix, la forme galénique de la molécule (formes injectables, comprimés ou formes buvables), son coût journalier et les habitudes personnelles du prescripteur.
Mais la principale difficulté réside dans les interactions nombreuses des psychotropes avec les traitements antirétroviraux, particulièrement les inhibiteurs de protéase boostés, le ritonavir ou les INNTI. Seront privilégiées les stratégies utilisant des INI. On s’assurera auprès du médecin en charge du traitement antirétroviral de l’absence d’une interaction entre les antirétroviraux et les traitements antidépresseurs et anxiolytiques.
Vidéo : dialogue entre Christine Kafando et Françoise Linard
La PrEP correspond à l’utilisation de médicaments antirétroviraux à titre préventif chez des personnes séronégatives pour le VIH, mais à haut risque d’acquisition. La présence d’antirétroviraux avec une concentration suffisante au niveau des différentes portes d’entrée du virus (muqueuses génitales et anales) empêche l’infection.
Deux schémas thérapeutiques ont été évalués en tant que PrEP orale : une prise continue ou une prise à la demande. La PrEP en continu consiste en la prise quotidienne à heure fixe d’un comprimé de PrEP. Il faut attendre 7 jours avant d’être considéré comme étant protégé contre le VIH. La PrEP à la demande nécessite la planification des rapports sexuels et consiste en la prise de : deux comprimés de PrEP 2 à 24 heures avant le rapport, puis un troisième comprimé 24 heures (± 2 heures) après la première prise et un quatrième et dernier comprimé 48 heures après la première prise. Si un rapport sexuel supplémentaire sans préservatif survient pendant cette période de trois jours, il faut continuer à prendre un comprimé par jour jusqu’à 48 heures après le dernier rapport sexuel à risque. La PrEP à la demande n’est recommandé que pour les hommes ayant des rapports sexuels entre hommes. Elle n’est pas possible chez les femmes, ni chez les hommes qui sont porteurs du virus de l’hépatite B (et qui devront obligatoirement prendre la PrEP de façon continue).
À l’heure actuelle, le seul médicament autorisé en France pour la PrEP est un comprimé qui associe deux antirétroviraux contre le VIH : l’emtricitabine (FTC) et le ténofovir disoproxil (TDF). Cette association de deux médicaments antirétroviraux a été initialement commercialisée sous la marque Truvada®. Elle est désormais disponible en versions génériques, produites par différents laboratoires. Dans d’autres pays du monde, d’autres combinaisons peuvent être utilisées comme le ténofovir (TDF) avec la lamivudine (3TC).
Les premiers essais de PrEP ont été menés dans les années 2000. En 2010, les résultats de l’essai international Iprex qui concernait des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes et des personnes transgenres et qui reposait sur une prise quotidienne d’un comprimé de TDF/FTC montraient une efficacité de 44 % pour réduire le risque d’acquisition du VIH par rapport au comprimé placebo. Cet effet modeste s’explique par une observance médiocre : on a détecté des traces de TDF/FTC dans le sang chez seulement 9 % des personnes qui ont été infectées au cours de l’essai. Plus important peut-être, cet essai montrait bien l’existence d’une corrélation forte entre adhésion au traitement et efficacité : quand les composés TDF et FTC étaient détectables dans le sang des participants, le niveau de protection atteignait 92 %.
En 2015, deux autres essais, IPERGAY et PROUD, ont montré une efficacité plus élevée encore, parmi des homosexuels masculins. L’essai PROUD de PrEP en continu et en ouvert, a montré une réduction du risque de séroconversion de 86 %. L’essai IPERGAY comparant la prise de TDF/FTC à la demande versus un placebo chez 400 participants a montré une réduction du risque de séroconversion de 86 %. Suite à la publication de ces résultats, l’OMS a intégré en 2015 la PrEP dans ses recommandations de traitement pour les populations dites « à risque substantiel », à savoir un risque d’infection annuel (incidence) de plus de 2 à 3 % en l’absence de PrEP. L’OMS reconnaît la PrEP comme méthode de prévention efficace contre les infections par le VIH par voies vaginale, rectale et pénienne. La France a décidé d’adopter une politique de mise à disposition de la PrEP dès janvier 2016. Les USA avaient déjà fait de même auparavant, dès juillet 2012. L’utilisation de la PrEP orale a été approuvée par de nombreuses agences sanitaires nationales, comme Santé Canada.
Si le schéma de prise à la demande a été recommandé en France dès 2016 pour les hommes cisgenres ayant des rapports sexuels entre hommes, il faudra attendre 2019 pour que cette recommandation soit reprise par l’OMS sous le nom de schéma de prise « 2-1-1 ». En pratique, pour les homosexuels masculins, les stratégies en continu et à la demande ont une efficacité similaire. Le choix s’effectuera en fonction de la fréquence des rapports à risque et on pourra passer d’une stratégie à une autre en fonction de l’exposition, par exemple saisonnière. En l’absence d’évidence pour d’autres populations, et les données suggérant que la pharmacocinétique du ténofovir est différente dans le tractus vaginal, le schéma à la demande n’est pas recommandé aujourd’hui pour les femmes et les personnes transgenres.
La PrEP par TDF/FTC est globalement bien tolérée avec peu d’effets indésirables. La résistance médicamenteuse au TDF/FTC a été étudiée dans le cadre de stratégies de PrEP. D’abord, de rares cas d’infection par des souches de VIH résistantes au TDF/FTC (résistance primaire) malgré la prise de la PrEP et une bonne observance ont été documentés. Ensuite, des résistances acquises ont été sélectionnées lors d’infections par le VIH malgré la prise de la PrEP : (i) en cas de primo-infection si la PrEP a été initiée pendant la phase de séroconversion et (ii) en cas de mauvaise observance.
L’initiation de la PrEP nécessite donc un interrogatoire et un examen clinique minutieux à la recherche d’une exposition récente au VIH et de signes ou symptômes d’infection par le VIH aiguë. C’est d’autant plus important dans les pays du Sud que le dépistage du VIH y repose encore, le plus souvent, sur l’utilisation de tests rapides de troisième génération (recherche d’anticorps uniquement). L’utilisation de tests de dépistage de quatrième génération (recherche d’anticorps et d’antigènes) devrait être favorisée pour permettre la détection plus précoce d’une infection par le VIH.
Globalement, ce risque de survenue de résistance est faible, estimé à 1/1000 environ. En outre, les modélisations suggèrent que la PrEP impactera peu l’émergence des résistances aux antirétroviraux aussi bien au niveau de la population (grâce aux infections évitées par la PrEP) qu’au niveau des patients (<4 % des infections résistantes).
Globalement, la survenue d’infections sexuellement transmissibles (IST) est augmentée après la mise sous PrEP. En effet, plusieurs méta-analyses ont montré une augmentation modeste à importante des infections à gonocoque, chlamydia et syphilis avec une incidence jusqu’à 40 fois plus importante que chez des HSH ne prenant pas la PrEP. Une augmentation de l’incidence de ces infections a été confirmée de façon prospective chez 2891 HSH suivis pour PrEP en Australie. En revanche, la détection des IST était concentrée (76 %) sur un sous-groupe de 736 individus. Certains facteurs de risque comme un âge jeune, un nombre élevé de partenaires et le sexe en groupe ont été associés à la survenue de ces infections. Ces résultats sont en faveur d’une recherche régulière de ces IST chez les personnes sous PrEP. Par ailleurs, l’incidence des hépatites C aigues est importante chez les HSH sous PrEP, avec notamment des cas de ré-infection par le VHC après un premier épisode guéri, et doit conduire à des conseils réguliers sur la réduction des pratiques à risque et à la recherche régulière du virus de l’hépatite C.
Il importe également de rappeler que la PrEP ne protège pas contre les grossesses non désirées. L’utilisation d’une méthode contraceptive demeure donc fortement recommandée, en complément de la PrEP, aux personnes ne souhaitant pas d’enfant dans l’immédiat.
Lors de tous les essais cliniques, la PrEP était proposée dans le cadre d’un programme de prévention qui incluait dépistage et traitement d’infections sexuellement transmissibles, la vaccination contre le VHB et le VHA (pour les personnes non immunisées), ainsi que la distribution gratuite de préservatifs et un counseling continu sur les comportements à risque.
En pratique, une première consultation comportant un premier bilan de dépistage du VIH et des autres infections sexuellement transmissibles (hépatites A, B et C, syphilis, chlamydia et gonocoque...) avec examen des organes génitaux et de l’anus à la recherche de lésions à HPV est recommandée ainsi qu’un bilan rénal. À réception des résultats, la PrEP peut être initiée chez les personnes non infectées par le VIH, n’ayant pas de contre-indication à la prise de TDF/FTC et donc la clairance de la créatine estimée est supérieure à 60 mL/min. Un suivi régulier avec bilan de dépistage du VIH et des autres infections sexuellement transmissibles et recherche des effets indésirables est réalisé tous les mois, puis tous les 3 et éventuellement tous les 6 mois. Les consultations s’accompagnent d’une évaluation de l’observance et d’un counseling continu sur la réduction des risques. Les personnes porteuses du virus de l’hépatite B pourront bénéficier de la PrEP par TDF/FTC à condition de la prendre en continu, le schéma « à la demande » n’étant pas possible dans ce cas-là.
De nouveaux outils de PrEP à longue durée d’action sont en cours de développement voire même de mise sur le marché en Europe ou aux États-Unis. Leur but est de pouvoir s’affranchir de la prise quotidienne d’un traitement et d’ainsi améliorer l’observance et la qualité de vie.
Concernant les anneaux vaginaux à base de dapivirine, deux essais cliniques contre placebo ont été conduits pour en évaluer l’efficacité et la sécurité d’emploi à long terme : The Ring Study et Aspire. Quelque 4 000 femmes, âgées de 18 à 45 ans, ont accepté de participer à ces essais en Afrique du Sud, au Malawi, en Ouganda et au Zimbabwe. L’utilisation de l’anneau vaginal réduit de 30 % en moyenne le risque d’infection par le VIH, soit bien moins que la PrEP orale dont l’efficacité est supérieure à 90 % en cas de bonne utilisation. Ce chiffre augmente avec la fréquence d’utilisation de l’anneau, sauf au sein du groupe des femmes âgées de 18 à 21 ans, pour lesquelles ce moyen de prévention s’avère inefficace.
Le comité des médicaments à usage humain (CHMP) de l’Agence européenne des médicaments a émis en 2020 un avis positif concernant l’anneau vaginal de dapivirine (25 mg), à renouveler tous les mois, en combinaison avec des pratiques sexuelles à moindre risque, lorsque la PrEP orale n’est pas utilisée, ne peut pas être utilisée ou n’est pas disponible. Par ailleurs, l’OMS recommande cet outil de prévention depuis juin 2021, avec des réserves quant à son efficacité chez les femmes de moins de 21 ans qui sont moins à même d’être observantes, et en soulignant l’importance d’évaluer l’acceptabilité de cet outil chez les femmes des populations clés, telles que les travailleuses du sexe.
Concernant la PrEP injectable à base de cabotégravir (une injection tous les deux mois), deux essais ont montré l’efficacité de cette dernière : l’essai HPTN 083 auprès de HSH et de femmes transgenres dans sept pays à travers le monde et l’étude HPTN 084 auprès de femmes cisgenres aux États-Unis. La PrEP injectable par cabotégravir serait 69 % à 89 % plus efficace que la PrEP orale quotidienne par TDF/FTC, en raison principalement d’une meilleure observance. Cependant, des effets secondaires non négligeables ont été rapportés et, surtout, la longue demi-vie du cabotégravir pourrait éventuellement être une source de problème en cas d’utilisation discontinue et d’injections à intervalles irréguliers. La PrEP injectable par cabotégravir a été autorisée aux États-Unis début 2022.
D’autres molécules à action prolongée sont en développement. A défaut de vaccin, la PrEP est disponible, une attitude positive, un outil majeur de l’arsenal de prévention. Elle doit être intégrée pour ceux et celles qui en ont besoin dans le panier de « biens » en santé sexuelle.
Le site de l’association AIDES dédié à la PrEP :
Le chapitre Prophylaxie préexposition (PrEP) du
Vidéo : mini-lecture présentée à l’AFRAVIH 2020 :
Le genre désigne les processus et rapports sociaux qui divisent, polarisent et organisent l'humanité en différentes catégories de « sexe » et de « sexualité » (masculin/féminin, homme/femme, mâle/femelle, cisgenre/transgenre, intersexe/dyadique, homo/hétéro, etc.).
Le concept de genre est apparu au milieu du XXe siècle pour distinguer ce qui relèverait des dimensions sociales et culturelles dans la division sociale entre les sexes, en opposition à ce qui relèverait du biologique. C’est la fameuse formule « on ne naît pas femme : on le devient » de Simone de Beauvoir (dans son ouvrage Le Deuxième Sexe, publié en 1949).
Si le terme de genre est encore employé en ce sens, cette dichotomie social/biologique a depuis été remise en cause par plusieurs travaux scientifiques. Le genre est aujourd’hui une notion qui relève d’un champ de savoirs pluridisciplinaires : les études de genre.
L’expression « théorie du genre » n’est quant à elle pas utilisée dans le milieu académique. Il s’agit d’une expression popularisée au début des années 2000 par différents mouvements réactionnaires, notamment catholiques, d’opposition au mariage pour tous, à l’homoparentalité et aux transidentités.
Les études de genre constituent un champ de recherche pluridisciplinaire (sociologie, anthropologie, histoire, psychologie, économie, sciences politiques, géographie…) qui étudie les rapports sociaux entre les sexes. Le genre y est considéré comme une construction sociale.
De manière générale, les études de genre proposent une démarche de réflexion, répertorient ce qui définit le masculin et le féminin dans différents lieux et à différentes époques, et s’interrogent sur la manière dont les normes de genre se reproduisent au point de sembler « naturelles ».
Le mot « études » est toujours employé au pluriel pour renvoyer à la diversité des travaux menés dans le domaine. Plusieurs courants de pensées co-existent.
Pour autant, on peut distinguer quatre dimensions analytiques principales, reprises notamment par Laure Bereni, Sébastien Chauvin, Alexandre Jaunait et Anne Revillard dans leur Introduction aux études sur le genre.
Le genre est une construction sociale. Les identités « sexuées » (homme/femme) et « sexuelles » (homosexuel/hétérosexuel) sont le produit non pas de processus biologiques mais la résultante de constructions sociales et culturelles qui varient à travers l’histoire et les sociétés. Ainsi, le genre construit les identités sociales des individus.
Le genre est un processus relationnel. On ne peut étudier ce qui relève des femmes et du féminin sans articuler l’analyse avec ce qui relève des hommes et du masculin, et inversement. Les caractères associés à chaque sexe sont en effet produits socialement dans une relation d’opposition : est considéré comme féminin ce qui n’est pas considéré comme masculin et inversement.
Le genre est un rapport de pouvoir. Il n’existerait pas de dominations naturelles. Les études de genre abordent ainsi les rapports entre hommes et femmes sous l’angle de rapports sociaux d’oppression et d’exploitation, constituant ainsi les individus en groupes dominants et dominés.
Le terme de normes de genre renvoie de fait aux normes dominantes, dans un contexte social et historique donné, qui définissent les rôles masculins et féminins, à savoir ce qu’est censé être/faire un homme et ce qu’est censée être/faire une femme. Les sociétés étant par nature hétérogènes plusieurs normes de genre peuvent simultanément co-exister.
La mise en évidence de rapports d’oppression basés sur le genre ne signifie pas pour autant, de manière simpliste, que tous les hommes sont des oppresseurs et que toutes les femmes sont des victimes. Les normes de genre s’appliquent tout autant aux hommes qu’aux femmes et peuvent être vécues comme une oppression par des personnes des deux sexes. Pour autant, les études de genre permettent de mettre en évidence les dimensions structurelles, sociales, politiques et culturelles des systèmes de domination.
On oppose souvent à la notion de genre celle de sexe biologique qui serait « naturel » et universellement défini. Pour autant, en biologie, il n’y a pas de définition unique du sexe biologique. En 2016, le CNRS titrait dans son journal « Combien y a-t-il de sexes ? ».
De manière synthétique, le sexe biologique est le résultat d’une histoire développemental de l’individu : ses différents niveaux ne se réalisent pas tous à la même période de la vie. On peut distinguer quatre temps forts :
la fécondation, quand un spermatozoïde rencontre un ovule, qui détermine le sexe chromosomique (deux chromosomes X pour les femmes, un chromosome X et un chromosome Y pour les hommes) ;
la vie intra-utérine pendant laquelle se développent les différents organes dont les gonades (ovaires pour les femmes, testicules pour les hommes) qui déterminent le sexe gonophorique ;
la naissance où est examiné le sexe périnéal (la partie visible des organes génitaux) qui va décider du sexe d’état civil ;
Mais tous ces mécanismes sont complexes et il n’y a pas forcément concordance entre ces différentes dimensions. Ainsi il peut exister des situations intermédiaires (par exemple les personnes atteintes du syndrome de Klinefelter peuvent avoir trois chromosomes sexuels : XXY). On parle alors de personnes intersexes.
Décrite chez de nombreux mammifères, l’intersexuation semble concerner de 1 à 2% des naissances dans l’espèce humaine. Ainsi, des millions d’individus ne correspondent pas aux deux formes types, à savoir la forme femelle (deux chromosomes X, des ovaires, une anatomie favorisant la grossesse et le développement fœtal, une poitrine…) et la forme mâle (un chromosome X et un Y, un pénis et des testicules, des canaux internes chargés d’assurer le transport de l’urine et du sperme…).
Les variations sont nombreuses et recouvrent un ensemble de réalités biomédicales diverses. Toutes les formes d’intersexuation ne sont pas forcément visibles. De nombreuses personnes sont ainsi intersexes sans le savoir.
De manière usuelle, l’orientation sexuelle désigne un mode durable d’attirance sexuelle pour les personnes du sexe opposé (hétérosexualité), du même sexe (homosexualité) ou des deux sexes (bisexualité). À cela on ajoute parfois l’asexualité pour désigner l’absence d’attirance sexuelle.
Le plus souvent, les enquêtes sur la sexualité distinguent trois grandes dimensions de l’orientation sexuelle :
l’identité déclarée correspond à la manière dont les individus se décrivent eux-mêmes (Comment vous définiriez-vous ?) ;
le pôle d’activité sexuelle correspond au sexe des partenaires sexuels déclarés sur une période de temps donnée (par exemple les 12 derniers mois ou la vie entière) et rend compte des pratiques des individus ;
l’attirance sexuelle (Êtes-vous attiré·e uniquement par les hommes, principalement par les hommes mais aussi par les femmes, autant les hommes que les femmes, plutôt par les femmes, exclusivement par les femmes ?).
Ces différentes dimensions de l’orientation sexuelle ne se superposent pas. Les pratiques ne correspondent pas forcément aux attirances que l’on a ou à la manière de se définir. De même, ses différentes dimensions peuvent évoluer au cours de la vie.
On distingue parfois attirance sexuelle et attirance sentimentale ou romantique. Le fait d’être attiré sexuellement par un genre donné ne signifie pas pour autant que l’on envisage une vie de couple avec une personne de ce genre. Les personnes asexuelles, celles qui n’ont pas d’attirance sexuelle, peuvent tout à fait avoir une attirance romantique pour autrui.
Dans l’enquête Contexte de la sexualité en France (CSF) conduite en 2003, 3,9% des femmes interrogées et 4,0% des hommes interrogés avaient déclaré avoir déjà eu au moins un partenaire de même sexe au cours de leur vie ; respectivement 0,8% et 1,5% sur les douze derniers mois, et seulement 0,4% et 1,2% disaient avoir eu exclusivement des partenaires de même sexe au cours de la dernière année.
Les personnes ayant déclaré être attirées par des personnes de même sexe sans jamais avoir pratiqué sont relativement nombreuses : 3,7% des femmes et 1,5% des hommes.
Les pratiques sexuelles entre personnes de même sexe ont, de tout temps, existé, sur tous les continents. Dans le contexte africain, par exemple, la question de l’homosexualité est longtemps restée invisibilisée dans la réponse à l’épidémie de VIH. Pourtant, des travaux anthropologiques ont mis en évidence l’existence historique de pratiques homosexuelles, avant la période de colonisation, pendant la colonisation puis après les indépendances. Il faudra attendre le milieu des années 2000 pour que se développent des enquêtes quantitatives sur les homosexuels masculins en Afrique.
La situation légale de l’homosexualité varie grandement d’un pays à l’autre. En France, il faudra attendre 1982 pour que l’homosexualité soit dépénalisée, 1999 pour que soient reconnus les couples des personnes de même sexe avec la création du pacte civil de solidarité (PACS) et 2013 pour que le mariage soit ouvert à tous les couples, quel que soit leur sexe.
En 2023, selon l’ILGA (), l’homosexualité reste illégale dans 64 pays du monde, dont 7 où cela est punissable de mort (Arabie saoudite, Brunei, Iran, Mauritanie, Nigéria, Ouganda et Yemen).
Le genre assigné à la naissance renvoie au genre attribué à un enfant à sa naissance. Il s’agit du genre déclaré à l’état civil et il est basé, le plus souvent, sur le sexe périnéal évoqué plus haut.
L’identité de genre renvoie quant à elle à la catégorie de genre à laquelle la personne estime appartenir, à la manière dont elle expérimente et vit son genre.
Pour une majorité d’individus, identité de genre et genre assigné à la naissance sont alignés : on parle alors de personnes cisgenres. À l’inverse, la transidentité désigne le non-alignement entre identité de genre et genre assigné à la naissance. On parle alors de personnes transgenres.
La transition de genre ne s’accompagne pas systématiquement d’hormonothérapie ou de chirurgie de féminisation ou de masculinisation. Aujourd’hui, la transidentité se définit uniquement par le non-alignement entre identité/expression de genre et genre assigné à la naissance, indépendamment du parcours médical des personnes concernées.
Les femmes trans sont des personnes assignées « homme » à la naissance et qui se définissent comme femmes. De manière symétrique, les hommes trans sont des personnes assignées « femme » à la naissance et qui se définissent comme hommes.
Certains individus ne se définissent ni strictement homme, ni strictement femme, mais entre les deux, un mélange des deux, ou aucun des deux. Plusieurs sous-identités existent (bigenre, pangenre, genderfluid, agenre…) que l’on peut regrouper sous le terme d’identités non binaires. L’expression troisième genre est également employée.
De manière générale, la non-binarité renvoie à un ensemble de conceptions du genre qui n’est pas limité à deux catégories mutuellement exclusives. Si les termes « transgenre » ou « non binaire » sont relativement récents, des cas de changements d'identité sont documentés depuis des milliers d'années et les identités de genre en dehors de la binarité sont fréquentes dans les civilisations non occidentales.
Nous l’avons vu, l’identité de genre des personnes n’est pas forcément alignée avec leur sexe assigné à la naissance, ce dernier pouvant également non aligné avec le sexe anatomique ou biologique, notamment pour les personnes intersexes.
On distingue également l’expression de genre qui renvoie à la façon dont on exprime un genre par sa manière de se comporter ou de s’habiller et la manière dont cela est socialement perçu.
Expression de genre et identité de genre ne sont pas la même chose : par exemple, un homme peut être « efféminé » sans pour autant se définir transgenre.
Identité de genre et expression de genre ne disent rien de l’orientation sexuelle d’une personne, que ce soit en termes d’identités, de pratiques ou d’attirance. Un homme trans peut se définir hétérosexuel, bisexuel ou homosexuel.
Il faut noter néanmoins que les termes homosexuels, bisexuels et hétérosexuels renvoient à une vision binaire du genre, d’où l’émergence du terme de pansexuel. La pansexualité se définit comme l'attirance sexuelle, émotionnelle, romantique ou spirituelle pour d'autres personnes sans considération de leur sexe biologique, de leur identité de genre, de leur expression de genre ou de leur orientation sexuelle.
Ainsi, orientation sexuelle et identité de genre renvoient à de multiples dimensions qui s’expriment chacune sous forme de continuums plutôt que de catégories fixes. De même, ces dimensions sont elles-mêmes des constructions sociales qui varient dans le temps et dans l’espace.
Par exemple, l’acronyme LGBT (lesbiennes, gays, bis, trans) a émergé dans les années 1990 dans les milieux militants pour traduire la pluralité des identités. Avec les différents mouvements d’affirmation (notamment en Amérique du Nord et en Europe), cet acronyme s’est élargi.
On peut par exemple croiser aujourd’hui la version 2SLGBTQQIAAP+ (two spirits, lesbienne, gay, bisexuel, transgenre, queer, questioning, intersexe, asexuel, allié, pansexuel, autre…). Et d’autres sous-groupes identitaires existent.
En 2021, une évolution du rainbow flag (drapeau arc-en-ciel des fiertés LGBT) est apparue, incluant les symboles du drapeau intersexe (rond violet sur fond doré), les couleurs de celui des transidentités (blanc, rose, bleu clair) et deux bandes marrons et noirs symbolisant l’antiracisme.
Enfin, il faut être vigilant, dans un monde globalisé, à ne pas interpréter toutes les identités de genre et d’orientation au prisme de catégories occidentales alors que les constructions identitaires de l’orientation sexuelle et du genre peuvent différer d’un pays à l’autre.
Dans des enquêtes menées en Afrique subsaharienne, la distinction entre expression de genre, identité de genre, rôle sexuel et orientation sexuelle restait floue pour une majorité des personnes interrogées. Dans de nombreux pays d’Afrique, il n’y a pas forcément incompatibilité à se définir comme « gay » ou « homosexuel » tout en se déclarant « femme » à une question sur l’identité de genre, là où dans d’autres contextes, une personne assignée « homme » à la naissance, mais se définissant comme « femme » et attirée par des hommes se définirait plutôt comme « hétérosexuelle » (en référence à son identité de genre).
Dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, les questions sur l’identité de genre auraient plutôt tendance à refléter une orientation sexuelle genrée, c’est-à-dire une distinction du type ibbi/yoos ou woubi/yossi, termes wolofs utilisés pour distinguer respectivement celui censé jouer un rôle féminin (par extension, « passif ») et celui censé jouer un rôle masculin (par extension, « actif ») dans une relation homosexuelle masculine. Cela ne signifie pas pour autant que les identités LGBT n’existent pas en Afrique subsaharienne, les constructions identitaires et les mobilisations associatives étant aussi influencées par les échanges avec les communautés européennes et nord-américaines. Les catégories locales et les catégories globales de la sexualité peuvent tout à fait co-exister.
Les identités de genre et de sexualité sont diverses : elles varient selon les individus, les sociétés et les époques. Pouvoir vivre sereinement sa sexualité selon son/ses identités est une des composantes de la santé sexuelle. Comme le rappelle l’Organisation mondiale de la santé, « la santé sexuelle exige une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles agréables et sécuritaires, sans coercition, ni discrimination et ni violence. » De fait, la reconnaissance des identités de genre et de sexualité fait partie des droits humains fondamentaux. Les droits humains et sexuels de toutes les personnes doivent être respectés, protégés et réalisés.
Empêcher la transmission du VIH d’un individu à un autre est un objectif majeur essentiel et fondamental, dans une maladie où il n’existe pas de vaccination préventive.
La prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant (PTME) a été l’une des premières priorités de la lutte contre l’épidémie de VIH/sida, dans les politiques de santé internationales comme dans les stratégies nationales. Et l’un des évènements majeurs des avancées de la thérapeutique a été, en 1994, la démonstration du bénéfice de l’AZT dans la réduction de cette transmission mère-enfant.
Dans les pays industrialisés, l’utilisation en routine des stratégies de dépistage, de prise en charge thérapeutique des femmes enceintes et le traitement prophylactique des enfants ont réduit drastiquement le taux de transmission mère-enfant (TME) du VIH, l’amenant à moins de 1 %. Ces progrès permettent d’envisager l’élimination de la TME du VIH également dans les pays en développement, même si subsistent encore de fortes disparités dans le monde, alarmantes.






Les inhibiteurs d’entrée
En développement : un inhibiteur de capside
ATV : atazanavir – COBI ou c : cobicistat – DRV : darunavir – LPV : lopinavir – RTV ou r : ritonavir
INI : Inhibiteurs d’intégrase
BIC : bictégravir – CAB : cabotégravir – DTG : dolutégravir – EVG : elvitégravir – RAL : raltégravir
Inhibiteur du CCR5
MVC : maraviroc
cabotégravir oral (un mois) puis IM (Vocabria®)
Le genre est imbriqué dans d’autres rapports de pouvoir. Les rapports de pouvoir basés sur le sexe s’articulent, parfois de manière dynamique et complexe, avec d’autres rapports de pouvoir (classe sociale, âge, origine ethnique, sexualité …). En 1989, l'universitaire afro-américaine Kimberlé Williams Crenshaw a proposé le terme d'intersectionnalité pour parler spécifiquement de l'intersection entre le sexisme et le racisme. Le sens de ce terme s’est ensuite élargi pour inclure les autres rapports de domination.
la puberté où vont se mettre en place différents mécanismes hormonaux, notamment la production d’œstrogènes chez les femmes et de testostérone chez les hommes, qui vont déterminer le sexe hormonal.



Selon les estimations d’ONUSIDA, 37,7 millions de personnes vivaient avec le VIH dans le monde en 2020, dont 1,7 million étaient des enfants de moins de 15 ans et 18 millions des femmes en âge de procréer.
En 2020 ? 1,4 million de grossesses sont survenues ? chez des femmes vivant avec le VIH.
Ceux-ci comportent plusieurs approches /étapes :
le dépistage du VIH chez les femmes en âge de procréer,
les actions de prévention auprès des femmes non infectées,
le suivi médical et psychosocial, ainsi que le traitement antirétroviral (ARV) des femmes infectées,
le traitement prophylactique et le suivi médical des enfants exposés,
le dépistage précoce des enfants exposés et leur suivi jusqu’à la fin de l’allaitement.
Le succès des programmes de PTME est indéniable : on estime que plus de 1,4 million d’infections pédiatriques ont été évitées entre 2010 et 2018, succès favorisé par l’adoption du traitement ARV pour toutes les femmes enceintes indépendamment de leur taux de CD4 (option B+ de l’Organisation mondiale de la santé – OMS, 2015), puis du traitement pour tous en 2016. Le taux de TME est passé, au plan mondial, de 20 % en 2010 à 12,7 % en 2017. Cependant si, au niveau mondial, 77 % des femmes enceintes vivant avec le VIH bénéficient d’un traitement ARV, les disparités régionales restent importantes : 93 % en Afrique de l’Est et du Sud, 48 % en Afrique de l’Ouest et centrale.
Il reste important de ne pas « baisser la garde » en matière de prise en charge de la PTME.
Tableau 1. Données sur les programmes de prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant (PTME) en 2017 dans le monde
Région OMS
Nombre annuel ?? de nouvelles infections VIH
pédiatriques
Proportion de femmes enceintes
sous traitement antirétroviral
Proportion
d’enfants ayant
accès au diagnostic virologique
à 8 semaines
Taux
de transmission mère-enfant
du VIH
Afrique de l’Est et australe
94 000
93 %
63 %
9,9 %
Afrique de l’Ouest et centrale
67 000
48 %
21 %
Les faiblesses des programmes de PTME, en particulier en Afrique de l’Ouest et centrale, résultent globalement :
de la faiblesse des systèmes de santé, qui ne permettent pas l’accès à des services de qualité ;
de l’importance de la stigmatisation liée au VIH qui, indirectement, pourrait être à l’origine de la moitié des contaminations verticales ;
d’un dépistage insuffisant des partenaires, pouvant conduire à des contaminations chez des femmes dépistées négatives en début de grossesse ;
d’une rétention dans les soins faible quand les femmes ont été dépistées pendant la grossesse. Elles se sont souvent astreintes au traitement pendant la grossesse et arrêtent une fois l’accouchement passé. Ceci est vrai au Sud comme au Nord. D’où l’importance de suivre les femmes après la grossesse.
La PTME est un continuum de soins, depuis le dépistage de la mère jusqu’au traitement de l’enfant s’il est infecté. Si la prise en charge des mères s’est améliorée, l’accès au diagnostic et au traitement des enfants exposés reste insuffisant dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest et centrale.
Diagnostiquer précocement l’infection VIH à 4 ou 6 semaines de vie chez les enfants exposés au VIH est essentiel pour permettre leur mise sous traitement le plus tôt possible.
En effet, en l’absence de traitement, les nourrissons infectés pendant la période périnatale sont à haut risque de décès pendant les deux premières années de vie (50 % de décès à 2 ans). Le pic de mortalité liée au VIH chez ces enfants survient vers l’âge de 2-3 mois, laissant une période de temps très courte pour les dépister et les traiter.
Pour faire le diagnostic précocement, les techniques point of care (POC), réalisables rapidement dans les sites cliniques par le personnel soignant, sont recommandés par l’OMS.
La transmission du VIH de la mère à l’enfant peut survenir à trois moments :
pendant la grossesse ;
au cours du travail et de l’accouchement ;
et par l’allaitement.
Sans intervention thérapeutique, le taux de transmission du VIH-1 de la mère à l’enfant est de 15 à 30 % chez les femmes non allaitantes (1/3 pendant la grossesse et 2/3 pendant le travail et l’accouchement). La transmission lors de l’allaitement prolongé jusqu’à l’âge de 2 ans peut augmenter de près de 15 % l’incidence de la TME du VIH.
Une charge virale dans le sang élevée chez la mère, témoignant d’une grande quantité de virus circulant, est un facteur de risque majeur de transmission.
La prise en charge repose sur le dépistage et le traitement ARV précoce, idéalement avant même le début de la grossesse. Le contrôle de la charge virale par un traitement antirétroviral permet de supprimer la TME, ainsi que la transmission sexuelle, et de préserver la santé de la femme elle-même.
Le dépistage avec la sérologie est l’élément clé. Il doit s’accompagner d’une information.
La sérologie VIH doit être prescrite systématiquement en début de grossesse ; le dépistage du partenaire, père de l’enfant à venir, doit être proposé.
L’efficacité de la PTME est liée au contrôle de la réplication virale chez la mère. Il n’y a pas de transmission lorsque le traitement ARV a débuté avant la grossesse et que la charge virale (CV) est inférieure à 50 copies/ml à l’accouchement. Le risque augmente si le traitement commence tardivement et/ou si la CV est mal contrôlée.
Le choix de première intention est actuellement une trithérapie avec INI (dolutégravir, raltégravir). Ils sont particulièrement recommandés en cas de traitement tardif afin d’obtenir une décroissance rapide de la CV. On évitera le dolutégravir, lorsque le choix est possible, au cours du 1er trimestre. Les principaux INTI sont utilisables : abacavir (après recherche de l’allèle HLA-B*5701) ou ténofovir TDF (associé à la lamivudine ou l’emtricitabine).
L’IP de première intention est actuellement le darunavir.
Concernant les INNTI, l’éfavirenz (associé à TDF/FTC) peut être utilisé à partir du 2e trimestre.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) préconise un traitement de première ligne universel, utilisable chez les personnes non enceintes et pendant la grossesse.
L’alerte concernant un risque accru de malformation neurologique lors de l’utilisation du dolutégravir dans les premières semaines de la grossesse a été levée (le dolutégravir est maintenant recommandé y compris en période périconceptionnelle et au premier trimestre de grossesse), l’éfavirenz devenant une alternative. (https://www.who.int/hiv/pub/arv/arv-update-2019-policy/en/).
Toute femme enceinte infectée par le VIH doit bénéficier d’un contact avec un médecin spécialiste du VIH, un obstétricien référent et, si possible, avec le pédiatre qui suivra l’enfant, mais aussi, selon les besoins, avec une sage-femme, une psychologue et une assistante sociale. Le suivi pluridisciplinaire est important, car il s’agit de grossesses à risque d’échappement virologique, de toxicité des ARV et d’accouchement prématuré.
Les professionnels et associations doivent encourager les femmes qui n’ont pas révélé leur séropositivité VIH à leur conjoint à le faire, et les accompagner dans cette démarche. L’autorité parentale partagée signifie que le père a le droit de connaître et de consentir aux traitements et aux soins apportés à l’enfant.
Mais tout doit être mis en œuvre pour que l’accouchement ait lieu dans « une ambiance de non réplication du virus » : charge virale indétectable. Il en est de même pour l’allaitement, source de contamination importante pour l’enfant.
Le seuil de CV au-dessus duquel la césarienne programmée peut être bénéfique n’est pas défini, ce qui explique la divergence entre les diverses recommandations internationales.
En France, les recommandations sont les suivantes :
si CV < 50 copies/ml, un accouchement par voie basse ;
en cas de CV > 400 copies/ml, une césarienne à 38-39 semaines d’aménorrhée (SA) ;
lorsque la CV plasmatique est entre 50 et 400 copies/ml à 36 SA, une intensification du traitement doit être proposée.
En l’absence de traitement ARV pendant la grossesse, ou si la CV est mal contrôlée, la césarienne programmée diminue la transmission, de même que la prophylaxie à l’accouchement et chez le nouveau-né. Les deux ARV qui ont été largement étudiés en prophylaxie per-partum sont la zidovudine (AZT) et la névirapine. Cependant, ces stratégies sont susceptibles d’évoluer.
Les bénéfices nutritionnels, immunologiques et développementaux de l’allaitement maternel, surtout s’il est initié précocement et pratiqué de manière exclusive pendant les six premiers mois de vie, sont incontestables et le font recommander, sur le plan international, comme l’étalon-or de l’alimentation du nourrisson partout dans le monde.
Cependant, l’allaitement est une source de contamination pour l’enfant si le VIH de la mère n’est pas contrôlé : de l’ordre de 15 à 30 %. Ce risque est maintenu pendant toute la durée de l’allaitement. Il est donc important qu’une femme qui allaite ait une CV indétectable dans le sang, ce qui permet le contrôle du VIH dans le lait.
La prise en charge des femmes enceintes vivant avec le VIH et le dépistage des conjoints sont des enjeux majeurs au plan épidémiologique et sociétal.
Tout existe pour un degré zéro de transmission. Manquent pourtant encore, après plus de 30 ans, la mobilisation à tout niveau des structures de santé, l’approvisionnement en tests et traitements, l’empouvoirement des femmes et des familles dans des climats sociétaux souvent stigmatisants qui ne facilitent pas la prise en charge.







Les hépatites virales sont responsables d’environ 1,5 million de décès par an dans le monde. Ce chiffre tend à la hausse, au contraire de la mortalité liée au VIH, à la tuberculose ou au paludisme. La majorité de ces décès est due au virus de l’hépatite B, première cause de cancer du foie sur le plan global. L’hépatite C constitue la deuxième cause de décès, alors que la mortalité liée aux hépatites A et E est nettement moins élevée.
Le poids très important de la mortalité mondiale due à l’hépatites B, pour laquelle existe un vaccin très efficace, ainsi que les avancées scientifiques dans les domaines de la prévention et du traitement antiviral, ont conduit l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à mettre en place des stratégies visant à l’élimination des hépatites virales comme problème de santé publique majeur d’ici 2030. Cet objectif ambitieux implique une réduction de 65% de la mortalité liée aux hépatites virales et une réduction de 90% de l’apparition de nouvelles infections (Figure 1).
L’élimination d’une maladie infectieuse transmissible passe par plusieurs conditions, qui deviennnent des cibles d’actions :
la source de la contamination au niveau de l’individu
le dépistage et le diagnostic
le traitement.
Afin d’espérer l’élimination des hépatites virales d’ici 2030, des objectifs spécifiques doivent être atteints. Ceux-ci sont décrits dans la figure 2, et comprennent aussi bien des éléments liés à la prévention qu’au dépistage et au traitement des hépatites virales.
La partie orange foncé décrit l’état des lieux en 2015, l’année durant laquelle ont été fixés ces objectifs, et la partie orange clair la situation qui est visée pour 2030.
Ainsi , la couverture vaccinale des 3 doses d’immunisation pour le VHB se trouvait déjà au-dessus de 80% en 2015, proche des 90% visés pour 2030. Au contraire, seules 10% des personnes vivant avec le VHB avaient été diagnostiquées en 2015, alors que l’objectif se situe à 90% pour 2030.
De même la proportion des personnes traitées pour le VHB ou le VHC se trouvait encore au-dessous de 10% en 2015, alors que celle-ci devrait atteindre 80% des personnes éligibles en 2030.
La vaccination contre le VHB, disponible depuis 1982, fait partie des armes majeures de lutte contre les hépatites virales. Elle comprend 2 ou 3 doses de vaccin, selon l’âge auquel elle est administrée. Son implémentation à large échelle a été favorisée par son inclusion dans le programme étendu de vaccination (PEV) de l’OMS depuis 1997.
L’efficacité de cette vaccination a été démontrée dans de nombreux contextes, avec une diminution de la prévalence (c’est-à-dire la fréquence) de l’hépatite B chronique. Cela a pour conséquence favorable une réduction importante des complications liées au VHB, notamment de la survenue du cancer du foie qui apparaît, en l’absence de vaccination, après plusieurs années d’infection par le VHB .
La couverture vaccinale, c’est-à-dire la proportion de personnes vaccinées dans une population, s’est progressivement améliorée dans toutes les régions du monde, pour atteindre plus de 85% de la population mondiale en 2020. A la fin de l’année 2019, 189 (97%) pays avaient inclus la vaccination contre l’hépatite B dans leur schéma national de vaccination (Figure 3).
L’exemple le plus marquant est celui de Taiwan, premier pays à mettre en place une stratégie de vaccination universelle – c’est-à-dire celle de tous les individus – en 1984. La proportion des personnes de moins de 20 ans ayant une infection chronique au VHB est passée de 10% à 1% en 10 ans, et reste à moins de 1% depuis le début des années 2000. La survenue de cas de cancer du foie a été divisée par 5 chez les adolescents entre le début des années 1980 et 2004.
Récemment, les premières études provenant du continent africain montrent des avancées similaires. Au Malawi, la vaccination universelle contre le VHB débutée en 2004 a permis une forte réduction de la prévalence de l’hépatite B chronique : elle est passée de 5% chez les adolescents nés avant 2004 à 0,3% chez ceux nés après l’inclusion du vaccin VHB dans le programme national de vaccination.
Dans les pays qui connaissent un fort taux de transmission du VHB de la mère à l’enfant durant l’accouchement, le début de la vaccination du bébé contre le VHB à 6 semaines de vie est insuffisant. Il faut pouvoir vacciner dès la naissance pour diminuer le risque de tranmsission mère-enfant de manière significative, ce qui représente un grand défi pour de nombreux pays à ressources limitées (voir ci-dessous).
Selon l’OMS, la prévalence de l’hépatite B chronique chez les enfants de moins de 5 ans reste élevée dans plusieurs régions du monde, comme indiqué dans la Figure 4. En Afrique, environ 3% des jeunes enfants avaient une hépatite B chronique en 2015, malgré la bonne couverture vaccinale contre le VHB dans la plupart des pays. Ces chiffres indiquent que la transmission a généralement eu lieu avant la vaccination à 6 semaines, notamment lors de l’accouchement. L’élimination des hépatites virales ne pourra donc pas être atteinte si les stratégies de prévention de la transmission mère-enfant du VHB ne sont pas améliorées.
Les interventions cruciales incluent la vaccination à la naissance ainsi qu’un traitement antiviral permettant d’empêcher la multiplication du VHB. On parle de contrôler la réplication virale du VHB pour aboutir à son indétectabilité chez les femmes à haut risque de transmission. L’implémentation d’une stratégie universelle de vaccination à la naissance reste trop embryonnaire dans de nombreux pays. Selon une étude récente, la couverture de la vaccination contre le VHB à la naissance s’élève à 1% des enfants nés en Afrique sub-saharienne.
Quelques pays ont fait des progrès notoires : le Cap-Vert a notamment annoncé une couverture nationale du vaccin contre le VHB à la naissance de 99% en 2019, notant que seuls 4 nouveaux-nés avaient dû attendre plus de 24h pour recevoir le vaccin en 2018.
Malgré le faible coût de cette intervention (moins de 1 dollar par dose), les barrières à la vaccination à la naissance sont multiples :
Accouchement au domicile : dans certains pays africains, une proportion importante des femmes accouchent en dehors des structures de soins, rendant difficile une vaccination le jour de la naissance ;
Acceptabilité : dans certains contextes, le vaccin à la naissance n’est pas compatible avec les représentations culturelles, notamment avec l’idée qu’un nouveau-né est trop fragile pour tolérer un vaccin ;
Volonté politique : bien que le cadre de lutte contre les hépatites virales de l’OMS Afrique pour 2016-2020 insistait sur la nécessité pour chacun des 47 pays d’avoir un plan de lutte contre les hépatites virales, seuls 21 (45%) d’entre eux en avaient établi un en 2021. Alors qu’au moins 25 pays auraient dû implémenter la vaccination à la naissance d’ici 2020, seuls 14 (30%) avaient atteint cet objectif en 2021.
Le progrès des différents pays en termes de stratégie de lutte contre les hépatites virales peut être suivi sur la .
L’accès au dépistage est une deuxième intervention capitale qui fait défaut dans la lutte contre les hépatites virales, malgré la disponibilité de tests de détection rapide.
Dans les pays où la fréquence de l’infection au VHB est très importante (de l’ordre de 10% de la population générale) un dépistage généralisé devrait s’appliquer. Or, moins de 1% des personnes vivant avec une hépatite B chronique en Afrique a pu accéder à un test diagnostique.
Parmi les raisons les plus importantes de cet échec se trouvent le manque de volonté politique et l’absence de prise en charge du coût de ces tests. En dehors du contexte de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH, les tests de dépistage du VHB et du VHC sont à la charge du patient dans la plupart des pays d’Afrique sub-saharienne. C’est ainsi que seule une minorité des femmes enceintes est testée pour le VHB, alors que le risque de transmission mère-enfant reste élevé.
Au Togo, par exemple, seules 35% des femmes enceintes évaluées dans le cadre d’une enquête nationale avaient été testées pour le VHB durant leur grossesse.
Comme souvent, les infections qui ne font pas de bruit cliniquement (asymptomatiques) ne constituent pas une priorité, tant pour la population que pour les gouvernements. L’éducation incessante des personnes et des soignants est essentielle.
La situation du dépistage du VHC est différente, car l’infection touche surtout des populations particulières, comme les usager de drogues injectables qui échangent des seringues contaminées par du sang. Comme l’épidémiologie du VHC est variable d’un contexte à l’autre, et souvent mal connue, la mise en place de stratégies de dépistage ciblé reste difficile.
Le VHB est un virus à ADN qui s’intègre dans le noyau de la cellule hépatique. Son cycle très particulier de multiplication lui permet de persister au sein de celle-ci dans la très grande majorité des cas .
Le tenofovir est un médicament antiviral actif sur le VIH et le VHB. C’est le meilleur agent anti-VHB , puissant et pour lequel il n’existe pas de résistance du VHB .
Si celui-ci est disponible dans tous les pays dans le cadre des programmes nationaux de lutte contre le VIH, son coût reste à la charge du patient pour le traitement du VHB en l’absence d’une infection VIH. Le tenofovir doit être utilisé sans aucun doute en cas de maladie hépatique active et de complications comme la cirrhose.
Le prix élevé du traitement et la couverture insuffisante du dépistage du VHB font que moins de 10% des personnes ayant besoin d’un traitement antiviral contre le VHB y ont accès.
Ce qui complique un peu les choses est que l’intérêt de son utilisation à large échelle chez les personnes VHB positives asymptomatiques n’est pour l’instant pas établi.
Alors que la nécessité de sa prescription chez les personnes ayant une cirrhose ne fait aucun doute, il semble qu’une proportion significative des personnes vivant avec le VHB ne bénéficieraient pas directement d’une mise sous traitement précoce, au vu de la faible activité de leur infection.
Néanmoins, la plupart des données scientifiques à ce sujet proviennent d’Europe et d’Asie, et ne permettent donc pas de tirer des conclusions définitives pour le contexte africain.
Le récent changement de paradigme en Chine, avec la recommandation de traiter la quasi-totalité des personnes ayant une charge virale VHB détectable, remettra certainement à l’ordre du jour la discussion sur l’éligibilité au traitement antiviral.
Le VHC quant à lui ne s’intègre pas dans le noyau de la cellule qu’il infecte. Il suffit donc de bloquer sa multiplication pour l’éliminer. Ainsi, il existe aujourd’hui plusieurs traitements combinant 2 médicaments antiviraux qui permettent de guérir plus de 95% des patients après 2 à 3 mois de traitement.
Mais malgré les avancées extraordinaires sur le plan des modalités et de l’efficacité des traitements contre le VHC, de réels progrès sur le plan global ne seront possibles qu’avec une réduction importante de leur prix. Même si l’accès aux médicaments génériques est garanti dans certains pays à faible revenu, cela n’est pas le cas pour la plupart des pays d’Afrique sub-saharienne.
L’importance d’une communication large et d’une qualité d’information adaptée est souvent négligée dans l’élaboration de stratégies de santé publique. En marge de la , plus de 200 acteurs de santé d’Afrique francophone ont répondu à la question : « Quelle sont les plus grands challenges dans la lutte contre le VHB dans votre pays ? ». Les résultats, décrits dans la Figure 5, montrent que le manque d’information au sein de la population générale, ainsi que le manque de connaissances et de formation des professionnels de santé figuraient parmi les barrières les plus importantes à l’élimination du VHB en Afrique francophone.
Le succès d’une stratégie visant à l’élimination des hépatites virales passe donc par l’élargissement de l’offre de formation spécifique à la prise en charge pour les personnels de santé, ainsi que par l’élaboration de stratégies de communication dans les médias pour informer la population générale. Ces différentes interventions ne sont possibles qu’avec la volonté politique des Etats et le soutien des autorités de santé publique.
Telle que definie par l'OMS la santé sexuelle et reproductive est un état de bien-être physique, affectif, mental et social, concernant tous les aspects de la sexualité et de la reproduction, et pas seulement l'absence de maladie, de dysfonctionnement ou d'infirmité.
La santé reproductive implique la possibilité d'avoir une sexualité responsable, satisfaisante et sûre ainsi que la liberté pour les personnes de choisir d'avoir des enfants si elles le souhaitent et quand elles le désirent.
L’enjeu en matière de contraception est de permettre à chacune et chacun d’accéder à une contraception adaptée à sa situation.
Au contraire des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), l’agenda 2030 en France des Objectifs de Développement Durable (ODD) fait de la promotion de l’égalité femmes-hommes un thème central du développement durable. L’ODD 5 lui est totalement consacré et plusieurs autres objectifs l’intègrent également dans le cadre de leurs cibles.
ODD 5 : Réaliser l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles
Le cinquième objectif est spécifiquement dédié à l’autonomisation des filles et des femmes. Il concerne l’égalité entre les sexes et vise à mettre fin à toutes les formes de discriminations et de violences contre les femmes et les filles dans le monde entier. Les cibles définies concernent : la lutte contre les discriminations et contre les violences faites aux femmes, l’accès des femmes à des fonctions de direction et de décision et l’accès universel aux droits sexuels et reproductifs. Il agit en interrelation avec les 16 autres ODD : il permet la conception et la mise en œuvre de toutes les politiques publiques au prisme du genre et encourage la mise en place de politiques dédiées à la lutte contre les inégalités qui subsistent et nécessitent des mesures positives en faveur des femmes.
Garantir les droits et la santé sexuels et reproductifs (DSSR) : de nombreuses associations féministes tout comme d’autres acteurs de la société civile considèrent les DSSR comme la « clef de voûte » de l’émancipation féminine et du développement durable. Il s’agit d’un concept englobant qui repose sur le droit de disposer de son corps et de pouvoir décider librement pour tout ce qui relève de la sexualité et de la procréation. Il ne se limite donc pas au seul champ de la santé maternelle et recouvre d’autres aspects fondamentaux comme l’information et l’éducation à la sexualité, l’accès à la contraception, la prévention et le dépistage des maladies sexuellement transmissibles, etc.
Une Moitié de l'humanité souvent depourvues de ses droits humains
Violences et pratiques néfastes : au cours de leur existence, on estime que jusqu’à 70% des femmes dans le monde sont confrontées à la violence physique ou sexuelle.
Sur la planète, 1 fille sur 5 est mariée avant ses 18 ans. Dans les pays les moins avancés (PMA), cette proportion atteint 40%.
200 millions de femmes et de filles dans le monde ont subi des mutilations génitales féminines.
La fréquence trop élevée des grossesses non désirées
Dans le monde
Les besoins non satisfaits des populations en matière de santé sexuelle et reproductive demeurent aujourd’hui immenses. Dans les pays en développement, près de 214 millions de femmes désireuses de prévenir une grossesse n’ont toujours pas accès à une contraception efficace ni à des services de qualité.
Ce manque d’accès aux services de planification familiale aboutit chaque année à 89 millions de grossesses non désirées dont plus d’1/4 (25 millions) sont interrompues dans le cadre d’avortements à risque. Ces interruptions de grossesse réalisées dans de mauvaises conditions sont à l’origine de près de 50 000 décès chaque année.
En France
En France, le taux annuel d’IVG, reflet seulement partiel des grossesses non désirées, est de 234 000 en 2022.
Subir une grossesse non désirée a toujours été un drame pour les femmes, motivant la mise en œuvre de nombreuses méthodes souvent folkloriques et peu efficaces pour s’en prémunir. Douches spermicides à base de vinaigre, thé vert, ciguë… Certaines étaient létales, d’autres pouvaient rendre les femmes infertiles. Les Égyptiennes auraient même, 3000 ans avant notre ère, utilisé des ovules spermicides à base de levain et d’excréments de crocodiles ; c’est également en Égypte que l’on trouve les premières références au préservatif masculin.
Les méthodes contraceptives ont évidemment évolué et on peut les classer aujourd’hui en méthodes contraceptives masculines et féminines, hormonales et non hormonales.
Pour les hommes, le préservatif reste la méthode la plus utilisée, mais on peut également pratiquer une stérilisation définitive en ligaturant les canaux déférents (conduits utilisés par le sperme) ou agir sur la synthèse des spermatozoïdes par la prise d’hormones ou le port de slips chauffants.
L’arsenal féminin est plus développé, et la charge mentale de la contraception incombe le plus souvent aux femmes.
Méthodes locales : diaphragme, opérationnel depuis la fin du 19e siècle, préservatif féminin, ovules et éponges spermicides sont les méthodes dites barrières.
Le stérilet, qu’il soit au cuivre ou hormonal, est une méthode mécanique dont le principal effet secondaire est d’augmenter le volume des règles.
La pilule hormonale développée dans les années 1950, déclinée désormais sous de nombreuses formes : normo, mini, ou micro. Il s’agit de comprimés à avaler, avec ou sans oestrogènes ; patchs à coller ; anneaux vaginaux ou encore implants sous-cutanés.
Enfin, tout comme les hommes, les femmes peuvent, en France depuis 2001, bénéficier d’une contraception définitive par ligature des trompes. Cet acte est accessible à toutes les femmes majeures, après un délai de réflexion de 4 mois.
Une bonne connaissance des antécédents des patientes permet de limiter les complications rares et graves de la pilule (embolie pulmonaire, AVC).
Effectivement la pilule hormonale souffre aujourd’hui d’un désamour de la part des jeunes, qui lui reprochent son caractère non naturel et ses complications, notamment ses effets sur le poids et la libido. De nombreuses jeunes femmes pensent qu’une grossesse ne peut survenir à l’occasion du premier rapport sexuel, ou en l’absence de pénétration ce qui est évidemment faux. Une grossesse non désirée peut aboutir à un avortement, source d’opprobre dans certaines familles, ou à une poursuite de la grossesse, sans que la jeune femme ou le jeune couple n’aient pris la mesure de l’impact de l’arrivée d’un enfant sur leurs vies.
Les rapports non protégés, notamment en cas de partenaires multiples, favorisent la transmission de maladies « sexuelles » comme le VIH, les hépatites ou les chlamydiae. Certaines de ces affections requièrent un traitement à vie, d’autres peuvent provoquer une infertilité ou certains cancers tels que le cancer du col de l’utérus. Heureusement, la vaccination des jeunes, filles et garçons, contre les papillomavirus (HPV) permet depuis plusieurs années de faire reculer cette affection.
Le recours à l’avortement est une pratique aussi ancienne que l’usage de la pilule, validé par certains médecins de la Grèce antique tels Soranos d’Ephèse, et c’est bien plus tard que les médecins catholiques ont condamné cet acte au motif que seul Dieu pouvait donner et reprendre la vie.
Cet anathème n’a pas empêché les femmes d’y recourir au risque de leur vie, auprès de matrones « faiseuses d’anges » (car les fœtus qui n’avaient jamais péché ne pouvaient que se retrouver au paradis) dans un premier temps, puis avec le soutien de médecins engagés auprès du MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception) en toute illégalité.
Grâce à la pugnacité de Simone Veil, bien décidée à endiguer l’hécatombe due aux avortements clandestins, l’avortement est autorisé en France depuis la loi Veil de 1975, et les procédures se sont progressivement simplifiées (suppression du délai de réflexion et de l’obligation de rencontrer une conseillère conjugale) tandis que les délais légaux augmentaient. On peut aujourd’hui avorter jusqu’à 14 semaines de grossesse (16 semaines d’aménorrhée), et l’avortement est anonyme pour les mineures qui n’ont pas besoin de l’autorisation de leurs parents mais simplement de la présence d’un adulte de leur choix. L’IVG et tous les examens qui y sont liés sont pris en charge à 100%.
Différentes techniques sont proposées dans les centres d’orthogénie :
Méthode médicamenteuse, qui repose sur l’utilisation de la pilule RU 480 et d’une prostaglandine telle que le Gymiso. Cette méthode est possible à domicile ou en établissement de santé jusqu’au terme de 9 semaines d’aménorrhée
Méthode chirurgicale : elle consiste à aspirer le contenu de l’utérus au moyen d’une canule reliée à un appareil qui produit du vide, et peut être réalisée jusqu’à 16 semaines d’aménorrhée. En fonction du choix de la patiente et de l’organisation du centre, elle peut être réalisée sous anesthésie générale ou locale.
Avorter avec un accompagnement médical est une méthode sûre aux très rares complications. Mais dans les pays où l’avortement est réalisé clandestinement, dans un contexte non médicalisé, la mortalité des femmes reste préoccupante, et environ 30 à 50 000 femmes décèdent chaque année des suites de cet acte.
Avoir du mal à concevoir au sein d'un couple a toujours été une véritable malédiction pour les femmes, qui en étaient rendues responsables. En effet ce n’est que récemment que l’infertilité masculine a commencé à être reconnue, explorée et traitée.
Être infertile pouvait vous valoir d’être répudiée, surtout en l’absence d’héritier mâle. C’est pourquoi de très nombreuses méthodes n’ont cessé de fleurir pour tenter de contrer ce mal : sources miraculeuses, fortifiants, talismans, sorcières…
La médecine a longtemps été très démunie, jusqu’à ce qu’en 1884 la première insémination artificielle avec donneur aboutisse à une naissance aux USA.
Les progrès se sont rapidement enchainés par la suite :
utilisation de sperme congelé et création de banques de sperme à partir de 1970,
début de la fécondation in vitro à la même époque aboutissant à la naissance en 1978 de Louise Brown au Royaume Uni, premier bébé né par cette technique, c’est-à-dire conçu dans une éprouvette à partir d’un ovule maternel et d’un spermatozoïde paternel, puis réimplanté au stade d’embryon dans l’utérus maternel,
nous avons ensuite appris à injecter de force un spermatozoïde dans l’ovule en cas d’infertilité masculine sévère (ICSI), à congeler les embryons, puis les ovocytes, et les résultats de ces techniques n’ont cessé de s’améliorer : 30% de chances de grossesse par tentative en moyenne.
Ces progrès ont également permis de développer le diagnostic pré-implantatoire (DPI) qui permet de détecter des maladies génétiques graves avant de réimplanter un embryon, évitant ainsi de nombreux drames aux futurs parents.
L’assistance médicalisée à la procréation est une avancée médicale spectaculaire, mais pose désormais des problèmes éthiques difficiles à résoudre, notamment en ce qui concerne la gestation pour autrui (GPA), et la greffe d’utérus suscite de nombreux espoirs.
Pour en savoir plus
Pour trouver la contraception la plus adaptée :
Pour savoir que faire en cas d’oubli de pilule :
Le désir, le plaisir et le consentement sont des notions essentielles en matière de sexualité. Quand une personne ressent du désir, consent à une activité sexuelle et en tire du plaisir, l’expérience sexuelle vécue peut être satisfaisante et renforcer l’estime de soi, ainsi qu’une vision optimiste de la sexualité. En revanche, une expérience sexuelle imposée, par la menace ou la contrainte donc en l’absence de consentement, une absence de désir ou de plaisir entravent la possibilité d’une expérience sexuelle agréable et sont sources d’une mauvaise santé sexuelle, à l’origine d’une image de soi potentiellement dégradée.
Aucune définition satisfaisante du désir sexuel ne fait consensus dans la communauté médicale. On peut, simplement, envisager le désir comme l’ensemble des forces qui poussent un individu vers un comportement sexuel, ou comme un appétit, une attirance, ou un état subjectif lié à la perception d’un besoin. Soulignons d’emblée qu’il s’agit bien de « perception d’un besoin » et non de besoin réel, le comportement sexuel humain n’étant pas irrépressible.
La notion de « motivation sexuelle » est parfois évoquée à la place du désir, et désigne les raisons qui nous font aller vers un comportement sexuel. Le désir peut être perçu comme la première étape de cette « motivation », un « starter » entrainant une excitation précédant l’activité sexuelle proprement dite.
Le désir est influencé par une multitude de facteurs, biologiques, psychologiques et sociaux (figure 1).
Les hormones sexuelles
Elles sont souvent citées comme une composante essentielle du désir. S’il est établi qu’un effondrement du taux sanguin de testostérone s’accompagne couramment, chez l’homme comme chez la femme, d’une diminution notable du désir, les liens entre hormones sexuelles féminines et désir sont plus complexes et mitigés par de nombreux autres facteurs.
Chez la femme, la dissociation des activités sexuelles des cycles menstruels est un élément essentiel, distinguant le désir humain du comportement sexuel des mammifères non-primates. En clair, le désir humain s’est affranchi du diktat de la reproduction, et rend toute comparaison avec les comportements sexuels des autres mammifères hasardeuse. De même, la dégradation de l’olfaction chez l’Homme, au cours de l’évolution, rend ce sens moins crucial dans le comportement sexuel humain car notre espèce est moins réceptive aux odeurs déclenchant une motivation sexuelle.
En revanche, le « système de récompense » (ensemble de circuits neuronaux favorisant la répétition de l’action qui l’a activé, donnant l’image d’un hamster qui tourne dans sa roue) et les zones érogènes sont des facteurs neurobiologiques essentiels de la motivation sexuelle chez les hominidés.
Au-delà de ces considérations biologiques, le désir humain est fortement influencé, pour ne pas dire conditionné, par des facteurs psychologiques liés à l’estime de soi, aux émotions, à l’imagination et aux fantasmes, et par des facteurs sociologiques tels que la pression du groupe ou le conformisme (ou la permissivité) de l’entourage. S’ajoutent à ces facteurs les événements de vie, l’état de santé, certains médicaments, ou encore tout élément biographique (sexualité non-consentie par exemple) pouvant avoir des conséquences sur les représentations liées à la sexualité.
Ainsi, le désir sexuel humain est complexe et multifactoriel. Il est aussi très variable au cours du temps, et d’un individu à l’autre. Dans le cadre d’une consultation, tous ces éléments doivent être discutés et évalués, notamment si la personne se plaint d’une baisse ou d’une absence de désir sexuel.
Soulignons enfin qu’un désir sexuel fréquent ou une absence de désir sexuel ne définissent pas, à eux seuls, des entités pathologiques. La souffrance personnelle ou interpersonnelle liée à ces situations orientera, ou non, vers le caractère pathologique de ces états.
En clair, on peut être en très bonne santé sexuelle et ne pas éprouver de désir sexuel, si l’on n’en souffre pas !
Le plaisir sexuel est un sentiment de satisfaction, de contentement qui résulte d’une activité sexuelle. Il peut être atteint de différentes manières, seul ou avec partenaire(s) et peut varier en intensité et en durée.
Le plaisir sexuel est souvent associé à la stimulation des organes sexuels et peut être influencé par des facteurs tels que la confiance en soi, la relation avec le partenaire, les attentes et les expériences passées.
Pour la plupart des individus, l’accumulation des tensions sexuelles au cours d’une activité sexuelle solitaire ou avec partenaire mène au déclenchement de l’orgasme.
L’orgasme est généralement décrit comme une sensation de grand plaisir. On parle parfois de « point culminant du plaisir », ce qui est subjectif car le ressenti dans l’activité sexuelle avant l’orgasme peut être tout aussi agréable, voire plus agréable.
D’un point de vue neurophysiologique, le plaisir sexuel est mal connu car peu étudié. De manière générale, le plaisir implique de nombreuses structures cérébrales, dont les aires corticales orbitofrontale, cingulaire et insulaire, et des structures sous-corticales donc situées « en profondeur » dans le cerveau. Le « système de récompense » est évidemment impliqué au même titre qu’il l’est dans le désir sexuel. Quant à l’orgasme, il se caractérise par une série de contractions rapprochées et rythmées déclenchant le relâchement des tensions neuromusculaires accumulées jusqu’ici.
Au moment de l’orgasme,
chez les personnes ayant un vagin, des contractions involontaires surviennent au niveau de ce vagin et d’autres muscles de la région génitale notamment ceux de l’utérus et de l’anus.
chez les personnes ayant un pénis, l’imminence de l’orgasme est ressentie lorsque l’éjaculation semble inévitable et ne peut plus être retenue. Les contractions qui ont lieu, notamment le long du pénis, entrainent l’expulsion du sperme. L’éjaculation et l’orgasme arrivent au même moment, mais il faut souligner que ces deux phénomènes sont distincts et qu’un orgasme peut être présent sans éjaculation (par exemple chez les hommes ayant subi une ablation de la prostate). Dans tous les cas, l’orgasme s’accompagne d’une accélération du rythme cardiaque.
D’un point de vue sociologique, la quête de l’orgasme alimente les représentations sur la sexualité, et, plus particulièrement, d’un orgasme qui serait simultané pour les partenaires. Cette tendance réduit souvent le plaisir sexuel à l’orgasme, ce qui est une vision très parcellaire de la sexualité humaine.
Le consentement est un élément fondamental de la santé sexuelle. Dans la définition de la santé sexuelle donnée par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), il est bien précisé : « La santé sexuelle exige une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles agréables et sécuritaires, sans coercition, ni discrimination et ni violence. Pour atteindre et maintenir une bonne santé sexuelle, les Droits Humains et Droits sexuels de toutes les personnes doivent être respectés, protégés et réalisés ».
Le consentement sexuel est un accord libre et volontaire donné par toutes les personnes impliquées dans l'activité sexuelle. Le consentement doit être explicite, révocable et donné sans pression, contrainte ou menace.
Ainsi, le consentement ne peut pas être donné si une personne est incapable de comprendre la nature de l'activité sexuelle, comme dans le cas d'une personne en état d'ébriété, sous l'emprise de drogues ou souffrant de troubles mentaux. Ce consentement peut être retiré à tout moment et ce retrait doit être respecté immédiatement. Les partenaires sexuels doivent être attentifs aux signaux de retrait du consentement, explicites et implicites, verbaux et non-verbaux, et être prêts à arrêter ou à modifier l'activité sexuelle en conséquence.
La loi d’un pays fixe généralement l’âge en-dessous duquel un enfant ou un adolescent n’est pas en mesure d’exprimer un consentement.
En France, la loi du 21 avril 2021 « visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste » fixe l’âge de 15 ans en dessous duquel il ne peut y avoir consentement avec un adulte à partir du moment où la différence d'âge dépasse 5 ans. Cet âge passe à 18 ans en cas d'inceste.
Un abus sexuel peut être un attouchement ou un viol (pénétration vaginale, anale ou buccale effectuée par le sexe, les doigts, une autre partie du corps ou par un objet) sans consentement, par menace, surprise (dans ce cas, la victime est trompée par la ruse de l’agresseur), contrainte ou violence.
La prise en charge d’une personne victime d’abus sexuel doit être irréprochable et ne pas ajouter de traumatisme supplémentaire pour la victime. Accueillir et informer la victime, assurer une prise en charge médicale optimale ne répétant pas les examens génitaux, souvent traumatisants, prévenir les risques infectieux et la grossesse, les risques de séquelles psychologiques, préciser les faits afin de rédiger un certificat qui sera un élément clé du fonctionnement judiciaire sont des étapes clés qui requièrent un grand professionnalisme et incitent à la constitution de centres d’accueil par des équipes pluridisciplinaires formées à cet exercice particulier.
Au cours des dernières années, le développement des réseaux sociaux a favorisé l’émergence de nouveaux comportements sexuellement abusifs ayant comme victimes principales les adolescents et les jeunes adultes : la cybermanipulation, la cyberprédation et l’autoproduction, par des personnes mineures, de matériel érotique ou pornographique. Ces situations rendent la question du consentement encore plus complexe, un adolescent pouvant consentir à envoyer une photographie intime à une personne ciblée mais prenant le risque de la voir diffusée à un plus large public sans son consentement.
Aussi, l’éducation sexuelle sur le consentement doit être une priorité pour les enfants et adolescents, pour leur permettre de mieux protéger leur intimité et leur estime de soi.
Vidéo sur le consentement, "Thé et consentement" :
Comment ces notions de désir, plaisir et consentement s’articulent-elles au cours d’un comportement sexuel ?
Les travaux de Masters et Johnson dans les années 1950 reposent sur l’observation systématique de milliers d’actes sexuels et ont permis de décrire le cycle de réponse sexuelle selon un modèle en quatre phases : l'excitation, le plateau, l’orgasme et la résolution (figure 2).
La phase d’excitation commence avec les premières stimulations sexuelles et se caractérise par l’augmentation progressive de la tension musculaire, du rythme cardiaque et de la tension artérielle. La lubrification vaginale ou l’érection du pénis interviennent au cours de cette phase.
La phase de plateau représente la poursuite de l’évolution de la tension sexuelle et des manifestations physiologiques amorcées dans la phase précédente. Plus elle se prolonge, plus elle constitue une source majeure d’excitation et de plaisir. Elle s’inscrit dans la continuité de la phase précédente et s’accompagne d’un gonflement des parois du premier tiers externe du vagin qui se resserrent et constituent la « plateforme orgasmique ». Le pénis maintient, lui, son érection pendant cette phase, avec d’autres manifestations telles l’émission d’un liquide translucide par les glandes de Cowper (ou bulbo-urétrales) et l’augmentation du volume des testicules qui remontent vers le bassin.
La phase d’orgasme a été décrite et est suivie d’une phase de résolution, après les dernières contractions orgasmiques, avec retour à la normale des paramètres physiologiques (notamment rythme cardiaque, pression artérielle, fréquence respiratoire) et des organes génitaux.
Ces phases suivent donc un désir ou une motivation sexuelle et s’accompagnent d’un consentement explicite des personnes engagées dans l’activité sexuelle, consentement qui peut être retiré à tout moment sans justification particulière.
Ce modèle permet d’articuler les notions de désir, plaisir et consentement en insistant sur plusieurs points :
le désir précède la première phase et incite à s’engager dans un comportement sexuel. Il est maintenu pendant l’activité sexuelle pour s’effacer pendant la phase de résolution.
le plaisir est présent, de manière plus ou moins constante ou intense, à toutes les phases de ce modèle, laissant la place à la phase de résolution à un sentiment d’apaisement et de détente.
le consentement des partenaires engagés dans une activité sexuelle peut être retiré à tout moment pendant ces phases. Le retrait de ce consentement doit s’accompagner d’un arrêt immédiat de l’activité sexuelle, sinon il s’agit d’un abus sexuel commis au détriment de la personne qui a retiré son consentement.
Le désir sexuel, le plaisir sexuel et le consentement sont donc interconnectés. Le désir sexuel peut conduire à l'activité sexuelle, qui peut à son tour entraîner du plaisir sexuel. Cependant, le plaisir sexuel ne peut être atteint que si toutes les parties impliquées ont donné leur consentement libre et éclairé. Le consentement est donc une condition préalable à toute activité sexuelle satisfaisante et respectueuse.
Malheureusement, il y a encore de nombreux cas d'activité sexuelle non consentie, tels que le viol et les agressions sexuelles, qui sont souvent motivés par le désir sexuel d'une personne sans tenir compte du consentement de l'autre partie.
Il est également important de comprendre que le désir sexuel, le plaisir sexuel et le consentement peuvent être affectés par des facteurs tels que l’identité de genre, ou l'orientation sexuelle.
Par exemple, un adolescent éprouvant du désir pour des personnes de même sexe pourra être amené à étouffer ce désir, percevant de son entourage qu’une attirance pour le sexe opposé est attendue de lui. Par la suite, il peut avoir des difficultés à cerner son propre désir, ne sachant plus vraiment ce qu’il ressent, même adulte. De même, une adolescente attirée par des personnes de même sexe pourra « lutter » contre son propre désir et s’obliger, par exemple, à avoir des relations avec des personnes de sexe masculin, pour être conforme aux attendus de son entourage. Cette situation risque de brouiller ses repères de consentement, puisqu’elle consent à avoir des relations sans désir. Un dernier exemple concerne le consentement des femmes mariées, qui penseront parfois, par la culture qu’elles ont reçue, qu’elles doivent toujours consentir aux désirs de leur mari et accomplir leur « devoir conjugal », parce qu’elles sont de sexe féminin donc « soumises » à l’homme dans les représentations dans lesquelles elles évoluent. Le mariage n’est pas un « accord pour consentement permanent », et le viol conjugal (rapport sexuel imposé au sein d’un couple marié) est un crime passible d’emprisonnement en France.
Ainsi, les stéréotypes de genre et les attentes sociales peuvent avoir un impact sur la façon dont une personne perçoit son désir sexuel et son plaisir sexuel, ainsi que sur sa capacité à donner ou à recevoir un consentement éclairé.
Pour aller plus loin :
Santé sexuelle par l’OMS :
Médecine sexuelle, fondements et pratiques. Frédérique Courtois, Mireille Bonierbale. Chapitre « Évaluation en médecine sexuelle », Marie-Hélène Colson. Edition Lavoisier, 2016.
Ressources disponibles sur
L’abus sexuel : discussion de la définition, éléments de diagnostic et de prévention.
En juin 2011, le magazine britannique The Economist titrait en une avec une question provocatrice : « The end of AIDS? ». Un long article revenait, trente ans après les premiers cas de sida identifiés, sur les progrès liés aux traitements et à la prévention, en particulier grâce aux antirétroviraux (ARV).
Un an plus tard, Diane Havlir et Chris Beyrer signaient dans la revue médicale The New England Journal of Medicine un éditorial intitulé « The Beginning of the End of AIDS ? ». Les résultats des recherches menées au cours de la décennie précédente, tant dans le domaine de la prévention que du soin, laissaient en effet entrevoir une lumière au bout du tunnel : la fin de l’épidémie devenait, selon ces deux scientifique américains, un objectif envisageable à moyen terme.
De la même façon qu’on considère souvent le VIH/sida comme une maladie exceptionnelle (par sa gravité, sa dimension mondiale, ses implications sociales et politiques), l’histoire de la riposte internationale contre la pandémie est impressionnante : jamais une maladie n’avait provoqué une telle mobilisation sur la scène internationale, jusqu’à la pandémie de Covid-19.
Au-delà de l’analyse des dynamiques locales ou nationales que l’épidémie a suscitées, nous proposons ici de concentrer plus spécifiquement notre attention sur la dimension internationale, voire mondiale de la riposte au VIH/sida.
Après avoir analysé les spécificités de cette riposte, ce qui la caractérise par rapport à d’autres et les grandes étapes qui ont marqué son histoire, nous mettrons l’accent sur deux aspects spécifiques de la lutte contre le sida au niveau international : la façon dont elle s’est progressivement organisée, et son mode de financement.
Vidéo : les grandes périodes de la riposte internationale contre le VIH






La pilule d’urgence, disponible depuis 1999, est une bonne alternative lorsqu’aucune précaution n’a pu être prise en amont, même si son efficacité n’est pas garantie. On peut également insérer un stérilet en urgence dans les 48h qui suivent un rapport non protégé.





zéro transmission du VIH ;
zéro discrimination pour les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) et les populations dites « clés » ;
zéro décès lié au VIH (incluant les décès liés à la co-infection tuberculose-VIH).
La fin de l’épidémie – certains auteurs parlent aussi d’élimination – ne doit pas être confondue avec l’éradication du virus et de l’infection à l’échelle des populations.
En effet, en l’absence d’un traitement curatif et d’un vaccin, le nombre de personnes porteuses du VIH restera toujours de plusieurs dizaines de millions à travers le monde pour les décennies à venir. Par contre, l’épidémie pourrait être considérée comme contrôlée s’il n’y avait plus ou très peu de nouvelles transmissions et si l’infection à VIH devenait une maladie chronique contrôlée virologiquement (la mortalité des personnes infectées ne différant pas ou peu de celle du reste de la population générale). On dirait alors, et c’est la formulation qu’Onusida entend désormais utiliser, que le VIH ne serait plus un problème de santé publique à l’échelle mondiale, et en particulier dans les pays les plus affectés.
L’élimination de la transmission du VIH, à l’échelle d’une population, est souvent définie comme une incidence (taux de nouvelles infections) inférieure à moins de 1 pour 1000 personnes et par an. Elle suppose que l’on arrive à prévenir à la fois la transmission sexuelle, la transmission sanguine et la transmission de la mère à l’enfant.
L’idée que le traitement ARV puisse réduire la transmission du virus n’est, en soi, pas nouvelle. Elle est même au fondement des stratégies de prévention de la transmission de la mère à l’enfant, dès les années 1990. De même, le traitement prophylactique post-exposition (ou TPE, parfois appelé « traitement d’urgence ») repose sur le principe qu’un traitement ARV pris dans les heures suivant une exposition possible au virus permettrait de bloquer une éventuelle infection.
Dès 2000, l’étude populationnelle Rakaï menée en milieu rural en Ouganda avait mis en évidence une corrélation entre charge virale plasmatique et probabilité de transmission (voir figure) puisqu’aucune contamination n’avait été observée dans les couples où le partenaire infecté avait une charge virale VIH indétectable.
Mais avant d’affirmer que les personnes sous traitement ne transmettent pas le virus, il y a un pas que la communauté scientifique n’a pas été prête à franchir jusqu’en 2008, où un groupe de médecins suisses a pris position en déclarant :
« Les personnes séropositives ne souffrant d’aucune autre maladie sexuellement transmissible et suivant un traitement antirétroviral efficace [c’est-à-dire avec une charge virale indétectable] ne transmettent pas le VIH par voie sexuelle. »
Vernazza et al 2008. Cette déclaration est connue sous le nom de Swiss statement. https://www.unige.ch/sciences-societe/socio/files/4814/0533/6055/Vernazza_2008.pdf
Il faudra encore attendre 2011 pour faire évoluer les mentalités médicales et les pratiques, avec la publication des résultats de l’essai international randomisé HPTN 052 réalisé chez 1763 couples hétérosexuels sérodifférents (un partenaire séropositif, l’autre séronégatif pour le VIH), où le partenaire séropositif avait un taux de lymphocytes CD4 supérieur à 350/mm3 de sang. Deux stratégies ont été comparées : traitement ARV immédiat du partenaire VIH+ ou traitement selon les recommandations de l’époque, c’est-à-dire une initiation du traitement une fois le taux de CD4 passé sous la barre des 350 CD4/mm3. Bien sûr, tous les couples recevaient des conseils sur l’usage de préservatifs.
Les résultats seront sans appel : 43 contaminations sont survenues chez les couples non traités comparé à 3 contaminations dans le groupe ayant reçu le traitement ARV, ces dernières ayant eu lieu très tôt après le début du traitement, avant que celui-ci n’ait pu conduire au contrôle de la charge virale, ou après arrêt de celui-ci. Ainsi, le traitement du partenaire séropositif a permis de réduire de 96 % le risque de transmission au sein des couples.
Cette étude majeure a posé les bases du concept « U=U » (undetectable equal untransmittable soit « indétectable égal intransmissible » en français).
Plus récemment, l’étude PARTNER menée en Europe auprès de couples sérodifférents, hétérosexuels et homosexuels, a montré qu’au cours de 1 238 couples-années de suivi, aucune transmission intracouple n’a été observée si le membre séropositif du couple était traité par ARV. Les données PARTNER étant limitées concernant les couples gay masculins, l’étude a été prolongée pour ces derniers (PARTNER 2). Les résultats montrent, encore une fois, que sur 1 561 couples-années de suivi (couples homosexuels masculins exclusivement) aucune contamination intracouple n’a été observée.
Même si en raison de l’incertitude statistique, il n’est pas possible de totalement exclure la possibilité d’une transmission sexuelle du VIH lorsque le partenaire séropositif est sous traitement ARV avec charge virale indétectable, ce risque est considéré aujourd’hui comme « négligeable ».
Chez les patients traités précocement, ayant une virémie contrôlée et un taux de CD4 élevé, l’espérance de vie rejoint celle de la population générale comparable. Ceci est vrai dans les pays industrialisés, où les traitements ont été introduits dès 1996, mais aussi dans les pays à ressources limitées, où leur arrivée a été plus tardive.
Ainsi, en Afrique du Sud, dans une zone rurale du KwaZulu-Natal parmi les plus touchées au monde (un adulte sur trois est infecté), un programme d’accès aux ARV a été mis en place depuis 2004 : même si leur utilisation a été restreinte par les recommandations nationales aux personnes les plus avancées dans la maladie, l’espérance de vie à la naissance a nettement augmenté en population générale. Elle est passée de 49 ans en 2003 à près de 61 ans en 2011, une augmentation extrêmement rapide et rarement observée dans une population humaine dans un autre contexte.
Au début des années 2010, une question majeure était de savoir s’il y avait un bénéfice à démarrer un traitement très tôt, c’est-à-dire avec un taux de CD4 supérieur à 500. En 2015, deux essais cliniques – TEMPRANO (mené par l’ANRS en Côte d’Ivoire) suivi de START (essai international sur 4 685 patients) – vont démontrer la supériorité du traitement précoce à plus de 500 CD4/mm3 : réduction de moitié des maladies sévères (tuberculose, atteintes cardiaques ou vasculaires, rénales …) et des décès.
Ces données majeures vont clore le débat. Dès 2015, suite à la publication de ces deux essais, l’OMS recommandera le traitement universel de toutes les personnes vivant avec le VIH, quel que soit leur niveau de CD4.
D’une maladie systématiquement mortelle, l’infection à VIH est devenue une infection que l’on peut maitriser avec un traitement et empêcher de progresser cliniquement et immunologiquement. Le traitement précoce, le plus tôt possible après le diagnostic, permet de bloquer les phénomènes délétères engendrés par le virus, qu’il s’agisse de la détérioration du système immunitaire, de la progression de symptômes ou d’infections en parallèle.
L’effet préventif du traitement ARV sur la transmission sexuelle, appellé aussi Treatment as Prevention (TasP) en anglais, est aujourd’hui bien établi au niveau individuel. C’est un changement radical pour les personnes séropositives, qui permet d’alléger la peur et la culpabilité associées à la crainte de transmettre le virus. Il permet à des couples sérodifférents de repenser leurs pratiques sexuelles et d’envisager de ne pas utiliser de préservatif, à condition que le partenaire infecté ait un suivi régulier de sa charge virale. Pour de nombreuses PVVIH, la réduction voire la suppression de la crainte de transmettre le virus leur a permis de se réinscrire dans une vie sexuelle rassurée et « normalisée » et dans des projets de vie qu’ils avaient souvent restreints à la seule survie.
Il est à noter que dans les recommandations françaises de 2018 :
« Lorsque le partenaire séropositif prend un traitement antirétroviral et a une charge virale indétectable depuis plus de six mois, le traitement est le moyen de prévention de première intention. »
Pourtant cette notion fondamentale est encore trop peu diffusée. Le contrôle virologique avec l’indétectabilité de la charge virale et tous les bénéfices qui en découlent est l’un des arguments majeurs pour faire adhérer les PVVIH à leur traitement pendant des décennies.
Si le traitement ARV, en contrôlant la charge virale des personnes infectées, supprime le risque de transmission du virus à l’échelle des individus, il devient en théorie possible de réduire le nombre de nouvelles infections à l’échelle d’une population, à une condition : que les personnes infectées soient dépistées et traitées efficacement.
Dès 2009, Reuben Granich et ses collègues ont modélisé cette hypothèse sur des données sud-africaines : selon leurs travaux, un dépistage universel et répété annuellement de l’ensemble de la population ainsi qu’une mise immédiate sous traitement ARV des personnes diagnostiquées pourrait éliminer l’épidémie de VIH (en obtenant une incidence inférieure à 1 pour 1000 personnes-années) dans ce pays au bout de 30 ans. Des travaux comparant plusieurs modèles mathématiques différents ont confirmé que l’élimination était très probablement atteignable, avec un calendrier variable d’un modèle à l’autre entre 2019 et 2060.
La stratégie de santé publique « dépistage et traitement universel » (Universal Testing & Treatment ou UTT) comporte deux composantes principales :
un dépistage dit universel, c’est-à-dire la mise en place d’interventions visant à dépister une grande majorité de la population, incluant des stratégies de référencement efficace des personnes diagnostiquées vers les soins ;
un traitement dit universel, c’est-à-dire l’initiation du traitement ARV chez toute personne dépistée, quel que soit son nombre de CD4. Il faut rappeler qu’en 2009, au moment où cette stratégie a commencé à être formalisée, l’OMS ne recommandait l’initiation du traitement ARV qu’en dessous de 200 CD4/mm3 (ou de tuberculose active ou d’un stade avancé), ce qui impliquait qu’une partie importante des personnes VIH+ suivies étaient en soins dit prétraitement.
La stratégie UTT vise à augmenter, à l’échelle d’une population, la proportion de PVVIH sous traitement et ayant une charge virale indétectable, dans l’objectif de supprimer au maximum la circulation du virus au sein de cette population. Si l’on considère que les échanges sexuels ont majoritairement lieu au sein de ladite population, alors l’augmentation de la suppression virale populationnelle devrait induire une baisse de l’incidence du VIH, c’est-à-dire une réduction des nouvelles infections.
Des données observationnelles publiées en 2013 et provenant de la région du KwaZulu-Natal en Afrique du Sud, suggèrent qu’il y aurait bien une corrélation négative entre couverture du traitement ARV et survenue de nouvelles infections VIH.
Si le traitement ARV est efficace à un niveau individuel pour prévenir la transmission du virus et maximiser le pronostic individuel, encore faut-il qu’une majorité des personnes infectées soit sous traitement efficace pour espérer avoir un impact à l’échelle d’une population. Les hypothèses du modèle de Granich ont été reprises en 2014 comme objectifs de santé publique par l’Onusida, qui souhaitait atteindre le triple objectif 90-90-90 d’ici 2020, à savoir 90 % des personnes infectées diagnostiquées, 90 % des personnes diagnostiquées sous traitement antirétroviral et 90 % des personnes sous traitement ayant une virémie contrôlée (charge virale indétectable). Ceci correspondait au total à 73 % des PVVIH dans une situation de succès pour eux-mêmes et leurs partenaires.
Il s’agissait là d’objectifs très ambitieux alors qu’on estimait, la même année, que seuls 45 % des PVVIH en Afrique subsaharienne connaissaient leur statut et que seuls 29 % avaient une virémie contrôlée. Ces objectifs n’ont pas pu être atteints et pour 2025, l’Onusida les a révisés à 95-95-95.
Des modèles à leur mise en œuvre pratique, de nombreux défis restent à relever. Dans la foulée de la déclaration suisse de 2008 et du modèle de Granich en 2019, quatre essais randomisés de grande envergure ont été développés pour évaluer, sur le terrain en conditions réelles, si une stratégie UTT permettrait de réduire significativement le nombre de nouvelles infections dans les communautés les plus affectées : ANRS 12249 TasP en Afrique du Sud, BCPP Ya Tsie au Botswana, PopART HPTN 071 en Afrique du Sud et en Zambie, SEARCH au Kenya et en Ouganda.
Ces quatre essais ont essentiellement démontré la capacité des approches UTT à avoir, en quelques années seulement, un impact sur la cascade de soins, la réduction de la proportion de PVVIH avec une charge virale détectable et la baisse de l’incidence du VIH, c’est-à-dire du nombre de nouvelles infections.
Le rôle des infections récentes (et en particulier de la période dite de primo-infection) dans la dynamique épidémique constitue un défi majeur. En effet, le taux de transmission du VIH est particulièrement élevé dans les premières semaines suivant une nouvelle infection, compte tenu de l’intensité de la charge virale de plusieurs centaines voire millions de copies.
Dès lors, avant qu’elles soient dépistées, entrent en soins, initient un traitement et atteignent une charge virale indétectable, les personnes nouvellement infectées vont contribuer à l’épidémie en contaminant d’autres personnes. En France, le délai moyen entre infection et virémie contrôlée est estimé à 65 mois. Des modèles appliqués au Malawi estiment que les personnes nouvellement infectées seraient à l’origine de 30 à 40 % de l’ensemble des nouvelles infections.
Les enjeux ne sont donc pas seulement une augmentation importante de la couverture du traitement, mais aussi la réduction du délai entre acquisition du VIH et prise en charge. Or, pour identifier au plus tôt les personnes récemment infectées, il est nécessaire de mettre en place des stratégies de dépistage répété à intervalles réguliers.
Une des difficultés consiste à identifier la fréquence adéquate de ce dépistage et ses modalités, dans chaque contexte épidémiologique, à la fois du point de vue socio-économique mais aussi en termes d’efficacité de santé publique et d’acceptabilité d’une telle démarche pour les personnes concernées.
Une fois les personnes correctement prises en charge, encore faut-il les maintenir durablement dans les soins avec des traitements efficaces et bien tolérées pendant des décennies. Toute interruption de traitement peut conduire à une reprise de la réplication virale et potentiellement à la reprise du risque de la transmission du virus. Une prise en charge efficace au long cours des PVVIH ne sera pas possible sans évolution importante des systèmes de santé, notamment en matière de soins différenciés.
Si le lien entre charge virale et transmission sexuelle du VIH est connu depuis deux décennies, il aura fallu plusieurs années pour que le traitement ARV précoce soit considéré comme une option de prévention et une stratégie de santé publique.
En contrôlant la charge virale, le traitement ARV réduit fortement l’infectiosité des personnes infectées, à tel point que l’on considère aujourd’hui que le risque résiduel de transmission sexuelle du virus est négligeable. Pour les PVVIH, l’initiation précoce d’un traitement apporte à la fois un bénéfice pour soi (réduction de la morbidité et de la mortalité) et un bénéfice pour les autres (en empêchant la transmission du virus). Le traitement comme moyen de prévention (TasP) est une option à disposition des couples sérodifférents qui souhaitent arrêter l’utilisation du préservatif, notamment en cas de désir d’enfant.
En termes de stratégie de santé publique, les stratégies « dépister et traiter » qui consistent à proposer un traitement ARV à toute nouvelle personne récemment diagnostiquée sont pertinentes et efficaces. Les bénéfices tant en termes de mortalité que de prévention sont réels. Mais les essais UTT nous montrent qu’il ne sera pas possible d’atteindre l’objectif du traitement universel sans dépistage universel et sans une entrée en soin effective et rapidement après le diagnostic. Les défis posés ne sont pas seulement médicaux, mais aussi et surtout opérationnels et comportementaux.
Si, aujourd’hui, l’intérêt d’initier un traitement ARV quel que soit le nombre de CD4 ne fait plus débat, la question du dépistage universel et de sa répétition est quant à elle sujet à controverse. Dans un contexte de stabilisation, voire de diminution, des financements consacrés à la lutte contre le VIH, de nombreux bailleurs et programmes cherchent plutôt à « rationnaliser » leurs activités et à ne conserver que des activités de dépistage de plus en plus ciblées.
Le traitement ARV seul ne suffira pas à contrôler les épidémies. Le maintien et le développement d’autres stratégies préventives, d’une part, et de stratégies de dépistage universelles et d’accompagnement vers les soins, pour réduire le délai entre infection et initiation d’un traitement, d’autre part, sont essentiels.
La fin du sida est-elle possible ? par François Berdougo et Gabriel Girard. Textuel 2017, 192 p. ISBN : 978-2845976429
La fin du sida est-elle en vue ? par Joseph Larmarange & François Dabis, Face à face, 2017. https://journals.openedition.org/faceaface/1160 (accès libre)
Onusida, 2021 : Test et connexion universels : brèves considérations. https://www.unaids.org/fr/resources/documents/2021/universal-test-and-connect-brief-considerations
Chapitre Le traitement antirétroviral comme moyen de prévention Livre AFRAVIH
L’histoire internationale de la lutte contre le sida témoigne d’une dynamique globale, collective, très forte. Rapidement, les acteurs ont compris que cette crise sanitaire exceptionnelle appelait une riposte planétaire et qu’une action collective et coordonnée serait bien plus efficace que la somme d’actions menées par chacun des États.
L’infection à VIH est en effet l’une des rares et premières maladies à avoir été considérée comme une véritable pandémie selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui utilise ce terme pour désigner la propagation mondiale d’une maladie. Et si l’Afrique concentre aujourd’hui les deux tiers des personnes infectées par le VIH, l’épidémie affecte l’humanité entière. Selon l’ONUSIDA, plus de quarante ans après la découverte des premiers cas environ 80 millions de personnes ont été infectées par le VIH, et 37 millions sont décédées de maladies liées au sida, sur tous les continents. Aucun pays n’a été épargné.
L’épidémie de VIH/sida a provoqué́ un ébranlement inédit de l’ensemble des pouvoirs en place, qu’ils soient médicaux, scientifiques ou politiques. Jamais dans l’histoire de l’humanité une maladie n’avait provoqué un tel choc. L’épidémie de VIH/sida s’inscrit évidemment dans une histoire mondiale des maladies transmissibles. Elle n’est pas, dans les faits, la première pandémie mondiale. La peste ou la variole pouvaient également être considérées comme telles au Moyen-Âge, par exemple. Mais l’épidémie de VIH/sida est certainement la première à avoir provoqué́ une telle alerte au niveau mondial. Elle marque l’émergence d’une prise de conscience d’un risque planétaire et de la nécessité d’y répondre par une approche mondiale.
On retrouve dans la lutte contre le sida une idée qui sera clairement reprise dans les Objectifs du développement humain (ODD) de 2015 : la multisectorialité des enjeux, c’est-à-dire le constat que des liens forts et interdépendants existent entre les différents secteurs du développement (la santé, l’éducation, l’économie, l’agriculture, ou l’égalité entre les femmes et les hommes, par exemple). Une décision prise dans n’importe lequel de ces secteurs peut avoir des répercussions sur les autres. La création de l’ONUSIDA en 1994 (agence transversale à toutes les agences sectorielles des Nations Unies) et la mise en place de programmes nationaux de lutte contre le VIH/sida directement rattachés au plus haut niveau de l’État (et non plus aux ministères chargés de la santé) dans la grande majorité des pays africains, témoignent de cette approche. Impliquer le ministère de l’Éducation (pour intégrer le sida dans les programmes scolaires), impliquer le ministère des Transports (pour renforcer la sensibilisation des routiers, particulièrement vulnérables) ou impliquer le ministère de la Justice (pour mieux lutter contre la discrimination) a du sens en matière de lutte contre le sida. Il y aurait beaucoup à dire sur l’efficacité́ des programmes mis en place, et beaucoup de leçons à tirer, mais il est important de reconnaitre le caractère précurseur du VIH/sida en matière d’approche multisectorielle.
La deuxième caractéristique de la lutte contre le sida est qu’elle a très vite imposé une approche multidisciplinaire et multi-acteurs.
Si la transmission du VIH est en partie liée aux comportements individuels, la dynamique de l’épidémie dépend beaucoup des environnements dans lesquels les individus évoluent, avec leurs caractéristiques socioéconomiques, culturelles, épidémiologiques, etc. Du fait de toutes les comorbidités et pathologies qui lui sont associées, l’infection à VIH nécessite un travail en commun des multiples professionnels de santé prenant en charge les patients. Lutter efficacement contre le VIH/sida oblige donc à une transdisciplinarité́ au sein des spécialités médicales et des sciences de la santé et, au-delà, vers les sciences humaines. Cette approche transdisciplinaire, nécessaire pour bien d’autres problèmes de santé, a été particulièrement mise en lumière par le VIH : il s’agit de dépasser une approche strictement « biomédicale » de la santé et de considérer l’épidémie dans toutes ses dimensions : sociale, économique, juridique, etc.
De nouveaux interlocuteurs (associations de patients, regroupements de populations particulièrement touchées et vulnérables, organisations non gouvernementales (ONG) locales, etc.) ont progressivement émergé au niveau international, notamment dans les pays à ressources limitées, du fait de l’importance des approches communautaires pour toucher l’ensemble des populations. D’autres acteurs ont émergé sur la scène internationale, venant du secteur privé, notamment les fondations philanthropiques comme des entreprises à but lucratif ou la Fondation Bill & Melinda Gates. Cette multiplicité des acteurs impliqués est très spécifique à la lutte contre le sida.
La troisième caractéristique de la riposte internationale à l’épidémie de VIH est le fait qu’elle s’est souvent faite selon une approche dite « verticale » par rapport aux systèmes de santé existant. Les programmes de lutte contre le sida ont généralement été gérés par des équipes spécifiques, détachées des ministères de la Santé, avec des budgets non intégrés aux finances publiques nationales, selon des modes de gestion différents de ceux qui étaient utilisés jusqu’alors, et en utilisant des critères particuliers de suivi et d’évaluation. D’autres maladies, comme la variole, par exemple, avaient déjà été combattues selon des approches verticales, mais la lutte contre le sida a poussé cette logique à son paroxysme. Si cette approche « verticale » a certainement permis de concentrer les financements sur des interventions ciblées, de maximiser l’impact dans des délais rapides, de faire des économies d’échelle, de toucher des populations difficiles à atteindre et de mesurer plus facilement les progrès accomplis au fil des années, elle a aussi également été l’objet de très nombreuses critiques. De nombreux auteurs ont pointé les effets potentiellement négatifs de l’approche verticale sur la lutte contre le sida elle-même (la non-intégration aux systèmes de santé diminuant la pérennité des services à long terme) mais aussi sur les autres maladies (désorganisation des services, fragmentation des activités, délaissement des autres priorités stratégiques). L’ensemble des acteurs semble aujourd’hui unanime pour appeler à une approche plus intégrée, plus « horizontale » de la riposte au VIH, dans une logique d’intégration des services et de renforcement des systèmes de santé existants.
La quatrième, et peut-être la plus importante caractéristique de la riposte internationale au VIH/sida, est sa dimension éthique : souci du respect des droits des patients, lutte contre la discrimination, attention permanente aux plus vulnérables.
Sous l’impulsion de personnalités fortes comme Jonathan Mann, la lutte contre le sida a réellement fait émerger sur la scène internationale le principe de « démocratie sanitaire », qui prône non seulement la protection des droits individuels (respect de l’anonymat, importance du consentement éclairé, confidentialité du suivi, etc.) mais aussi l’implication des patients et des citoyens dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de santé. Cette idée se retrouve notamment dans ce qu’on appelle le principe « GIPA », apparu dès 1994 (« greater involvment of people leaving with Aids » / « Pour une participation accrue des personnes séropositives » en français), avec la figure importante de ce qu’on appelle le « patient expert », maitrisant largement les aspects techniques de la maladie pour pouvoir discuter d’égal à égal avec les médecins ou les pouvoirs publics.
Une autre dimension importante de la riposte est la lutte contre la discrimination à l’égard des personnes séropositives, bien sûr, mais aussi, plus largement, à l’égard des populations les plus exposées à l’épidémie, souvent marginalisées (professionnels du sexe, hommes ayant des relations avec d’autres hommes, notamment). La criminalisation de l’homosexualité, par exemple, est considérée comme un frein important à l’accès au dépistage et aux soins, alimentant les comportements à risque et participant à la propagation de l’épidémie.
S’ils ont été historiquement portés par la lutte contre le sida, ces principes de démocratie sanitaire et d’« approche par les droits » dépassent aujourd’hui largement la maladie et inspirent bien d’autres politiques sanitaires internationales.
Une nouvelle architecture de l’aide en santé s’est mise en place progressivement pour répondre à la nécessité d’une concertation au niveau mondial, avec la mise en place de programmes et d’agences spécifiquement dédiés au VIH (figure 1).
En 2000, le sida, le paludisme et la tuberculose ont été érigés en priorités par la communauté internationale, qui leur consacre un des 15 Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). La même année, le conseil de sécurité des Nations Unies déclare le sida « menace pour la sécurité internationale » et les économistes tentent de chiffrer l’impact économique de la maladie. Koffi Annan, alors secrétaire général des Nations Unies, interpelle la communauté internationale : « le sida est bien plus qu’une crise sanitaire. Il s’agit d’une menace au développement lui-même ». Cette double reconnaissance du sida comme enjeu sécuritaire et enjeu économique le transforme en enjeu politique. En 2001, une Assemblée générale des Nations Unies est exclusivement dédiée au VIH (c’est la première fois qu’une maladie fait l’objet d’une réunion d’un tel niveau). Le procès de Pretoria, suite à la plainte engagée par 39 firmes pharmaceutiques pour non-respect de la loi sur les brevets en Afrique du Sud, marque un moment de bascule évident, reconnaissant les droits des malades face aux droits du commerce et des brevets, mobilisant l’opinion publique internationale. Les initiatives d’accès aux antirétroviraux se mettent successivement en place dans différents pays d’Afrique de l’Ouest et du centre. L’accès des pays du Sud aux antirétroviraux devient une priorité, et la création du Fonds mondial en 2002, puis du PEPFAR américain en 2003, permettront de mobiliser des moyens financiers importants.
Dans un premier temps, jusqu’à la fin du XXe siècle, il s’agit de dépasser les cadres nationaux de lutte. En 1986, un programme mondial sida est d’abord mis en place au sein de l’OMS, puis l’exceptionnalité du VIH est officiellement consacrée avec la création de l’ONUSIDA en juillet 1994, seul programme conjoint co-parrainé du système des Nations Unies, exclusivement dédié à la lutte contre le sida. Deux autres programmes seront créés dans le même esprit en 1998, contre le paludisme (Roll Back Malaria) et la tuberculose (Stop TB Partnership).
Dans un deuxième temps, avec l’entrée dans le XXIe siècle, la lutte contre le VIH/sida dépasse le système des Nations Unies avec l’avènement des grandes initiatives en santé : le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme en 2002, puis UNITAID en 2006. S’appuyant sur un partenariat public-privé pour le premier et sur des financements innovants comme la taxe de solidarité sur les billets d’avion pour le second, ces deux fonds multilatéraux dédiés aux trois maladies inaugurent une nouvelle ère pour les mécanismes de gouvernance mondiale de la lutte contre la pauvreté. Ils sont emblématiques de la mondialisation dans la mesure où ils marquent l’intrication du public et du privé, en dépassant les modèles « classiques » d’intervention centrés sur l’État et en ouvrant leurs conseils d’administration à d’autres acteurs (ONG, entreprises, syndicats, personnes affectées par les maladies concernées). Renouvelant le modèle de financement de l’aide au développement, ces grandes initiatives seront sources d’inspiration pour des mécanismes du même type dans d’autres secteurs, comme l’environnement (Fonds vert pour le climat) ou l’éducation (Partenariat mondial pour l’éducation). Le VIH/sida, le paludisme et la tuberculose auront donc, à leur manière, inauguré une nouvelle forme de gouvernance mondiale de l’aide.
La riposte internationale au VIH s’est organisée autour de grandes stratégies globales, fondées à la fois sur les évolutions épidémiologiques et les avancées de la science. On retiendra notamment l’« Initiative 3 by 5 » lancée par l’OMS en 2003 pour mettre 3 millions de personnes sous traitement antirétroviral à l’horizon 2005, l’objectif d’« accès universel à la prévention, au traitement, aux soins et au soutien en matière de VIH/sida d’ici 2010 » ou encore la stratégie « 90-90-90 » de l’ONUSIDA, qui fixe des cibles collectives pour 2020. Cette cible a été portée à « 95-95-95 » à l’horizon 2030. S’ils pouvaient sembler irréalistes au niveau mondial, ces objectifs, repris et diffusés par les organisations internationales, ont permis de lancer des dynamiques mondiales, de créer un agenda collectif et de rassembler l’ensemble des acteurs derrière des objectifs communs.
Sur le plan financier, la lutte contre le sida fait l’objet d’une mobilisation financière sans précédent dans l’aide au développement (figures 2 et 3).
L’épidémie devient la première priorité de l’aide en santé à partir de l’année 2003, devant la santé des enfants et des nouveau-nés, la santé sexuelle et maternelle, le paludisme, la tuberculose et le renforcement des systèmes de santé (source : Institute for Health Metrics and Evaluation - IHME), et elle représente encore aujourd’hui presque le quart du budget de l’aide en santé. Au-delà de l’importance des volumes financiers récoltés grâce à cette dynamique mondiale, il est important de noter que le tiers des financements passe par des organisations multilatérales. La circulation des capitaux n’est plus uniquement interétatique, elle ne dépend plus seulement de règles fixées par les États entre eux, elle est devenue « globale » au sens où elle se développe dans un cadre étendu à l’échelle du monde, en incluant des acteurs non étatiques, comme les fondations.
Certainement confortés par le contexte général de croissance économique, les financements internationaux de la lutte contre le sida ont augmenté en moyenne des volumes de 20% chaque année entre 2000 et 2013 (source : IHME). S’ils représentent encore quasiment un quart de la totalité de financements de l’aide en santé en 2020, la « décennie faste » a pris fin peu après le début des années 2010.
Les dépenses liées au sida ont stagné, voir régressé depuis 2013, point culminant de ce financement, qui baissera ensuite de 14% entre 2015 et 2019. L’année 2010 est également marquée par une crise au sein du Fonds mondial : des malversations financières ou de fortes irrégularités sont constatées par le bureau de l’inspecteur général du Fonds mondial dans quatre pays africains (Mali, Mauritanie, Djibouti, Zambie). Une crise de confiance s’installe au sein du Fonds mondial, qui affiche une politique de tolérance zéro face aux malversations. Au nom de la gestion des risques, des mesures de précaution sont mises en place pour rassurer les bailleurs du Fonds mondial. Ces mesures, particulièrement contraignantes à l’égard des acteurs de terrain d’Afrique de l’Ouest, resteront en place et marqueront cette décennie de raréfaction des financements de la lutte contre le sida.
Notons également une autre spécificité de la riposte internationale contre le sida : la mise en place de financements innovants et notamment d’une taxe sur les billets d’avion. Instaurée en 2006 sous l’impulsion des présidents Chirac et Lula, au moment de la création d’UNITAID, cette taxe est appliquée sur le prix des billets délivrés aux passagers des États participant au dispositif (France, Cameroun, Chili, Madagascar, Mali, Maurice, Niger, Maroc et Corée notamment). Elle est devenue une importante source de financement innovant pour la lutte mondiale contre le sida et plus spécifiquement UNITAID, dont elle représente près de la moitié des financements.
Très dépendants du gouvernement américain qui représente à lui seul plus de la moitié du financement mondial, ces financements ne sont pas, selon la commission sida du Lancet, suffisamment importants pour éradiquer le sida comme menace pour la santé publique d’ici 2030. Ils sont par ailleurs concurrencés par d’autres enjeux, comme le climat, dans l’allocation des financements internationaux.
Les experts de la lutte contre le sida craignent une « fatigue des donneurs », anticipant une reprise de l’épidémie si les efforts de la communauté internationale venaient à se relâcher. Pour la première fois, les financements alloués à la lutte contre le sida ont diminué de 20% entre 2013 et 2016, alors même que l’incidence de nouvelles infections VIH a, par exemple, augmenté de 60% entre 2010 et 2016 en Europe de l’Est et en Asie centrale. Malgré l’importance des enjeux et certaines innovations techniques, comme la mise en place des autotests de dépistage, la lutte contre le sida semble stagner.
Conclusion
Sur bien des aspects, on peut considérer que la riposte internationale au VIH a révolutionné les politiques internationales de santé : approche par les droits, dynamiques communautaires, implication de nouveaux acteurs, créations de partenariats publics-privés, mise en place de fonds communs à l’échelle du monde, développement de nouvelles approches de gouvernance, etc.
À sa façon, l’épidémie de sida a été un formidable laboratoire de ce qu’on appelle aujourd’hui la santé mondiale, cette approche selon laquelle les problèmes de santé nécessitent une réponse pensée et coordonnée à l’échelle du monde, avec l’ensemble des acteurs.
Pour en savoir plus
Bekker, L-G, et al. Advancing global health and strengthening the HIV response in the era of the Sustainable Development Goals: the International AIDS Society, Lancet Commission. Lancet, Juillet 2018
Broqua C, éditeur. Se mobiliser contre le sida en Afrique : sous la santé globale, les luttes associatives. Paris : L’Harmattan ; 2018. 372 p. (Collection « Anthropologies et médecines »).
Institute for Health Metrics and Evaluation (IHME). Financing Global Health 2020: Funding Universal Health Coverage and the Unfinished HIV/AIDS Agenda. Seattle, WA: IHME, 2021.
Brücker G, Tchiombiano S, Bourrelly M, Yazdanpanah Y. « VIH et santé mondiale ». Dans : Katlama C, Ghosn J, Wandeler G. VIH, hépatites virales, santé sexuelle. EDP Sciences, 2020, pp. 821-839.
20,2 %
Moyen-Orient
et Afrique du Nord
< 500
22 %
18 %
24,7 %
Amérique latine et Caraïbes
3 500
73 %
46 %
11,4 %
Asie et Océanie
15 000
56 %
25 %
16,9 %
Total
180 000
77 %
43 %
12,7 %






La prévention primaire de l’infection à VIH vise à réduire la transmission du virus d’une personne infectée à un individu non infecté et donc à éviter de nouvelles infections.
La réduction des nouvelles infections est essentielle pour espérer atteindre le contrôle de l’épidémie. En quatre décennies, les moyens de prévention à notre disposition ont fortement évolué.
Ils concernent les différentes voies de transmission du virus :
transmission par voie sanguine ;
transmission de la mère à l’enfant ;
transmission par voie sexuelle.
La transmission sanguine a été fortement réduite grâce (i) aux procédures sécuritaires mises en place dans le cadre du don du sang et, en particulier, le repérage préalable des donneurs à risque et le dépistage biologique systématique des échantillons prélevés ; (ii) au recours à du matériel d’injection à usage unique dans le milieu médical ; (iii) aux programmes de réduction des risques visant les consommateurs de drogue par voie injectable, dont les programmes d’échange de seringues et l’accès à la méthadone.
Concernant la prévention de la transmission de la mère à l’enfant, qui peut avoir lieu pendant la grossesse, l’accouchement et/ou l’allaitement, les antirétroviraux ont permis de réduire le taux de transmission, qui est de plus de 25 % en l’absence de toute intervention, à moins de 1% lorsque les combinaisons d’ARV sont utilisées le plus longtemps possible pendant ces trois périodes à risque.
En Europe, on parle même déjà d’une « élimination virtuelle » de la transmission mère-enfant, comme en Grande-Bretagne où ce taux était inférieur à 0,5 % à l’échelle nationale dès 2010-2011. Cependant, si les outils sont connus et disponibles, leur mise en œuvre dans les pays à ressources limitées reste difficile : bon nombre de mères et d’enfants ne bénéficient pas d’une prise en charge.
Pendant longtemps, la prévention sexuelle a été envisagée principalement sous l’angle des politiques dites ‘ABC’ : Abstinence ; fidélité (Be faithful en anglais) et Condom (préservatif). Il s’agissait donc avant tout de modifier les comportements individuels, et ce de manière durable.
Les programmes centrés principalement, voire exclusivement, sur l’abstinence, en particulier sous l’impulsion du programme gouvernemental américain Pepfar, ont fait l’objet de nombreuses critiques. Leur efficacité n’a pas été démontrée scientifiquement et ils se sont avérés inadaptés aux besoins des populations. Le financement de ces programmes était avant tout motivé par des enjeux moraux et non de santé publique. Au mieux, l’abstinence peut constituer une stratégie à court terme dans certaines circonstances individuelles, mais n’est pas un moyen de prévention à moyen ou long terme pour la très grande majorité de la population en âge d’activité sexuelle et reproductive.
La fidélité, comme stratégie de prévention, ne s’avère quant à elle efficace que dans le cadre d’une relation stable et à condition qu’elle soit appliquée par les deux partenaires. Or, plusieurs travaux ont montré dans différents contextes des contaminations intracouples liées au fait que l’un des partenaires s’était infecté en dehors du couple. Des travaux en Zambie et au Rwanda ont estimé que la majorité des contaminations hétérosexuelles avaient lieu au sein d’un couple marié. Une monogamie unilatérale est inefficiente quand il n’y a pas prise en compte de l’existence de relations concomitantes dans un contexte de réseaux sexuels interconnectés.
Le préservatif, utilisé systématiquement et de manière adéquate, constitue un outil de prévention efficace, comme cela a été démontré très tôt dans l’épidémie. Cependant, son utilisation est rarement parfaite. Une observance de 100% pour le préservatif pour tous les actes sexuels tout au long d’une vie est un enjeu quasi impossible à l’échelle de la planète pour les deux sexes. Les femmes ont rarement l’opportunité de négocier l’usage d’un préservatif.
Outre une acceptabilité limitée dans plusieurs contextes, en particulier quand il s’oppose à un désir d’enfant, la fiabilité du préservatif n’est pas parfaite. Une méta-analyse a estimé que l’efficacité du préservatif était de l’ordre de 80% en comparant, dans différentes cohortes, les taux d’infection observés entre les personnes déclarant utiliser systématiquement le préservatif et celles déclarant ne jamais l’utiliser. Mais si le préservatif a été plutôt bien adopté par certaines populations, comme les travailleuses du sexe ou les jeunes au début de leur vie sexuelle, son utilisation dans les relations stables reste le plus souvent faible.
En théorie, le risque d’acquisition du VIH au sein d’un couple sérodifférent qui utiliserait systématiquement le préservatif serait de moins de 10% au bout de dix ans. Cependant, si l’on considère les taux d’utilisation tels que rapportés dans les enquêtes, ce risque serait de près de 70%.
Au cours des années 2000, la « boîte à outils » de la prévention s’est élargie progressivement, avec le développement de nouveaux outils comme la mise au point, l’évaluation et la diffusion du préservatif féminin, une importance plus grande accordée aux facteurs structurels (contexte légal, stigmatisation sociale, facteurs politiques, organisation du système de soins…) ainsi qu’au conseil et dépistage ou encore au contrôle des infections sexuellement transmissibles (IST).
Dès les années 1990, un lien entre circoncision masculine et moindre transmission du VIH était suspecté. Il faudra attendre néanmoins 2005 pour que la dimension préventive de la circoncision masculine soit démontrée par des essais cliniques contrôlés et randomisés. Trois essais vont aboutir à la même conclusion : la circoncision masculine médicalisée réduit de 50 à 60% le risque de transmission hétérosexuelle du VIH de la femme vers l’homme. Ces résultats conduiront l’Onusida à recommander la mise en œuvre de programmes de circoncision volontaire et médicalisée dans les pays à haute prévalence, principalement en Afrique australe et de l’Est. Le gouvernement américain sera le principal effecteur de cette politique en soutenant très largement ces programmes sous l’égide du Pepfar.
Mais si la circoncision masculine médicalisée peut être acceptable et avoir un impact populationnel démontré sur le moyen et long terme, elle a été l’objet à ses débuts de nombreux débats. En effet, si elle peut constituer un outil de santé publique à l’échelle populationnelle, elle ne représente pas pour les hommes un outil de contrôle des prises de risque au quotidien, à l’échelle de chaque rapport sexuel comme peut l’être le préservatif. Quant aux femmes, elles ne bénéficient du rôle protecteur de la circoncision que par effet « boomerang ».
Les quinze dernières années ont permis la mise au point d’interventions biomédicales d’une très grande efficacité.
- Le traitement post-exposition (TPE) encore appelé « traitement d’urgence ». Il consiste, dans les 48 heures suivant une prise de risque, à prendre un traitement antirétroviral (le plus souvent une trithérapie) pendant un mois. Toutes les structures de prise en charge et les services d’urgence sont à même de fournir cette prestation.
On sait également depuis une dizaine d’années que les personnes séropositives sous traitement antirétroviral et dont la charge virale est indétectable ne transmettent pas le virus. C’est ce qu’on appelle le TasP (treatment as prevention, le traitement comme moyen de prévention en français). Cette stratégie préventive est présentée plus en détail dans le chapitre consacré à la fin du sida.
- La prophylaxie préexposition (PrEP) correspond, quant à elle, à l’utilisation d’antirétroviraux à titre préventif chez des personnes séronégatives pour le VIH. Elle est présentée plus en détail dans un chapitre dédié.
Figure 2. Synthèse de l’efficacité des différentes stratégies de prévention de la transmission sexuelle
Conclusion
On dispose aujourd’hui d’une palette diversifiée d’outils de prévention efficaces. Cependant, aucun d’entre eux ne constitue de solution miracle, adaptée à toutes et tous et à toutes les étapes de la vie.
La notion de prévention combinée, qui consiste à offrir un maximum de choix aux personnes les plus vulnérables, est essentielle si l’on veut espérer pouvoir, un jour, contrôler l’ épidémie de VIH, à condition de ne pas succomber aux sirènes d’un « tout biomédical » et de mesurer pleinement les enjeux programmatiques, opérationnels, sociaux, comportementaux et politiques qui nous font face.
Pour aller plus loin :
Section Prévention du livre AFRAVIH
Site web : prévention du VIH sur le site de Sida Info Service :
Site web : prévention sur le site de l’association AIDES :
Vidéo (re)penser la prévention des populations clés
La puberté désigne l’ensemble des transformations physiques qui permettent l'acquisition des capacités reproductives. Croissance en taille et apparition des caractères sexuels secondaires en sont les signes les plus visibles, mais des changements tout aussi importants se produisent dans la répartition de la masse corporelle, le fonctionnement du cerveau, la minéralisation osseuse.
La sexualisation désigne un processus plus large, initié bien avant la puberté mais qui se trouve au cœur de l’expérience adolescente, en raison des transformations physiques et des bouleversements psychologiques, sociaux et familiaux qui en découlent. Il s'agit véritablement d'une métamorphose, d’une transformation de l’individu qui se situe bien au-delà de la simple croissance.
La puberté marque le début des transformations physiques en rompant la croissance linéaire de l’enfance. La tranche d’âge considérée comme « normale » pour son début s'étend sur un large intervalle, entre 8 et 13 ans chez les filles et 9 et 14 ans chez les garçons, mais sa progression, son rythme et son âge de début varient considérablement selon les individus. Par conséquent, pendant cette période, il conviendra de tenir compte de deux temporalités distinctes : l'âge chronologique d'une part et l'âge développemental d'autre part. Ainsi, une jeune collégienne ayant un aspect physique très « mature » en raison d'une puberté avancée peut donner l'impression d'être plus âgée qu'un jeune garçon déjà lycéen, mais dont la puberté est en retard.
Bien que le déclencheur exact de la puberté soit encore inconnu, il est probable que la génétique joue un rôle prédominant dans la variabilité de l’âge de son démarrage. D'autres facteurs tels que le statut nutritionnel (apport énergétique mais aussi niveau d'adiposité), des facteurs externes (adoption, migrations, traumatismes psychologiques) interviennent également sur son déclenchement.
On incrimine actuellement volontiers l'exposition aux perturbateurs endocriniens dans le déclenchement de la puberté. En fait, ceux-ci semblent davantage associés à un développement précoce des seins chez les jeunes filles qu'à un véritable démarrage pubertaire.
Bien avant la puberté, les glandes surrénales s’activent et augmentent leur sécrétion d’androgènes : ce phénomène se nomme l’adrénarche. Ce sont ces androgènes surrénaliens (et non les hormones sécrétées par les gonades, testicules ou ovaires) qui seront responsables de l’apparition des premiers poils pubiens et axillaires (pubarche) lorsque leur concentration sanguine sera suffisante.
L’androgénisation liée à cette adrénarche conduit parfois à une consultation pour des symptômes incorrectement attribués à une « puberté », en particulier chez les filles : pubarche, modification de l'odeur corporelle, cheveux plus gras, acné légère. La vitesse de croissance prépubère peut également être légèrement augmentée. Dans la grande majorité des cas, l'augmentation physiologique des androgènes surrénaliens suffit à expliquer ces signes. Il s’agit d’un processus normal, bien que ses manifestations puissent varier en termes de moment et d'intensité d'un individu à l'autre (elles sont volontiers plus prononcées en présence d'antécédents familiaux d'hyperandrogénie, tels que le syndrome des ovaires polykystiques).
Il est important de bien différencier cette adrénarche physiologique et les maladies comportant une hyperandrogénie, telles qu'une forme non classique d'hyperplasie congénitale des surrénales ou une tumeur surrénalienne virilisante. Dans ce dernier cas, l'hyperandrogénie se manifeste généralement chez un enfant plus jeune, est plus prononcée et évolue rapidement, avec des signes de virilisation plus marqués.
La « vraie puberté » est liée à l’axe hypothalamo-hypophyso-gonadique. Celui-ci connait trois périodes d’activation : la première a lieu durant la vie intra-utérine, avec un pic vers le milieu de la grossesse suivi d’une décroissance jusqu’à la naissance, la deuxième lors de la première semaine de vie jusqu’à 6-9 mois (la « mini-puberté ») et enfin lors de la puberté.
Les gonadotrophines sont les hormones sécrétées par l'hypophyse (glande endocrine située à la base du cerveau), qui stimule l'activité et la sécrétion hormonale des gonades (ovaires et testicules).
Il existe deux gonadotrophines :
- l'hormone lutéinisante, appelée également lutéotropine ou LH,
- et l'hormone folliculostimulante, connue aussi sous le nom de folliculotropine, ou FSH.
Elles sont identiques chez l'homme et la femme.
La LH agit sur les cellules de Leydig pour favoriser la production de testostérone. La FSH, quant à elle, stimule la production de spermatozoïdes (spermatogenèse). L'augmentation du volume testiculaire est donc le premier signe clinique pubertaire. Ensuite, des changements visibles se produisent au niveau de la peau du scrotum (épaississement, plissement, pigmentation). La verge croît plus tardivement, d’abord en longueur puis en diamètre. Le gland augmente de volume et le prépuce s’élargit.
Les érections spontanées ou provoquées lèvent d’éventuelles adhérences. Les premières éjaculations surviennent en milieu de puberté. Les pédiatres ont l’habitude de coter la puberté selon l’aspect des organes génitaux décrit par Marshall et Tanner (verge et scrotum), 1 étant le stade infantile et 5 le dernier stade, souvent associé au volume testiculaire ou selon le volume testiculaire. Ces deux classifications sont souvent regroupées (figure 1).
L'accélération de la croissance staturale est tardive : le pic de croissance pubertaire se produit au stade IV de Tanner. C'est seulement à ce stade que les garçons développent leur masse musculaire, que leur voix mue et que la pomme d'Adam devient proéminente.
Contrairement aux garçons, elles ne peuvent manquer de remarquer les premiers signes de puberté que sont le développement mammaire et l'accélération de leur vitesse de croissance. L’aspect des seins permet de coter le stade pubertaire selon Tanner (figure 2) de 1 (prépubère) à 4 ou 5 (adultes).
Chez la fille, la FSH favorise la croissance et la maturation des follicules ovariens et la LH stimule la production d'œstrogènes par les cellules folliculaires et joue un rôle essentiel pour l'ovulation et le maintien du corps jaune, indispensable à l’implantation en cas de fécondation.
Les œstrogènes, en particulier l'estradiol, sont responsables du développement des caractères sexuels secondaires féminins, en premier lieu les seins, mais aussi de la modification des organes génitaux (élargissement des petites lèvres, horizontalisation de la vulve, apparition des pertes blanches). Les premières règles surviennent généralement un peu plus de deux ans après l'apparition du bourgeon mammaire, lorsque la vitesse de croissance commence à ralentir (fusion des épiphyses des os longs) : 60 % des filles ont leurs premières règles au stade S4.
La pilosité axillaire et pubienne fait aussi l’objet d’une cotation de 1 à 5 d’après Tanner ; ce stade de développement de la pilosité P ne correspond pas forcément au stade S (filles) ou G (garçons).
Les adolescents gagnent plus de 15% de leur taille et près de 50% de leur masse durant la puberté (environ 20 à 25 cm pour les filles, 25 à 28 cm pour les garçons). Les courbes de croissance des garçons et des filles, qui étaient assez similaires jusqu'à l'âge de 10 ans, divergent à l'adolescence.
Les filles accélèrent leur croissance vers l'âge de 11-12 ans, gagnant jusqu'à 8 cm en un an. La taille adulte n'est pas encore atteinte lors des premières règles et il leur reste environ deux ans pour achever de grandir : la croissance résiduelle moyenne est de 7 cm environ chez les filles réglées à l’âge médian de 13 ans. Ce potentiel de croissance résiduel est inversement proportionnel à l'âge des premières règles : il sera plus important et plus prolongé chez les filles qui ont leurs règles à un jeune âge et plus faible et plus court en cas de ménarche tardive.
Le profil de croissance diffère notablement chez les garçons, qui commencent leur puberté plus tard et connaissent leur pic de croissance pendant la deuxième partie de celle-ci. Ils grandissent donc plus longtemps sur un rythme prépubère, de 4-5 cm par an, avant d’accélérer brutalement et de gagner alors jusqu'à 9 à 11 cm en un an. Ensuite, leur croissance se ralentit et ils cessent de grandir, ce qui les amène à une taille moyenne supérieure de 13 cm à celle des filles.
Cette hétérogénéité de la croissance concerne également le développement du cerveau. D’un point de vue neurobiologique, l'adolescence ne se limite pas seulement à une période de croissance ou à une phase de transition, mais représente une véritable étape spécifique marquée par un fonctionnement cérébral particulier et des changements profonds dans la structure du cerveau. Ces découvertes relativement récentes offrent une contribution supplémentaire pour mieux comprendre l'adolescence, même s’il serait réducteur de résumer des phénomènes psychiques complexes à de simples mécanismes cérébraux ou processus biochimiques ; il faut plutôt considérer que les neurosciences participent à une conceptualisation pluridisciplinaire de la notion d’adolescence.
Le cerveau a déjà atteint son volume maximum (vers 11,5 ans chez la fille et 14,5 ans chez le garçon) : il ne s’agit plus de croître, mais plutôt de maturer. Trois changements majeurs se produisent : l’élagage synaptique, en particulier dans les lobes frontaux (l’adolescent y perd 3 % de sa matière grise), la myélinisation qui débute dans les lobes temporaux et pariétaux puis se poursuit par les lobes frontaux, et la transformation de la neurobiologie de la motivation et des émotions (lobe préfrontal et système limbique). Ces évolutions dépendent de l’âge, du sexe, certaines sont linéaires, d’autres non. Globalement, le cerveau se modifie de bas en haut et d’arrière en avant : les régions les plus archaïques maturent avant les autres.
L'élagage synaptique succède à la deuxième grande période de croissance synaptique, qui s’est produite entre 7 et 11 ans (la première phase ayant lieu au cours des deux premières années de vie). Il débute vers l'âge de 11-12 ans dans le cortex frontal et se termine vers 23-25 ans. Dans le cortex temporal où il commence plus tard, il se poursuit même au-delà de cette période. Ce processus entraîne une destruction massive des synapses, aboutissant à la perte d'environ la moitié d’entre elles pour chaque neurone cortical : l'adolescent détruit environ 30 000 synapses par seconde ! Il semble que cela se joue selon le principe « use it or lose it ». Seules les connexions synaptiques utilisées persistent et se renforcent, ce qui souligne l'importance de l'apprentissage et de l'entraînement à cet âge.
La substance blanche connaît une augmentation de volume grâce à la myélinisation des connexions inter-hémisphériques et cortico-sous-corticales. Ce processus entraîne une multiplication par 100 de la vitesse de transmission de l'influx nerveux, ce qui facilite les opérations cognitives et l'intégration de multiples sources d'information. La myélinisation se termine par le cortex préfrontal, une région traditionnellement associée aux capacités de raisonnement, mais également à l'inhibition de l'impulsivité, à la capacité d'établir des objectifs et de discerner le vrai du faux.
Il subit une réorganisation complète durant l’adolescence. Initialement localisé dans le cortex préfrontal, il devient distribué et intégratif, impliquant une collaboration entre différents systèmes cérébraux. Le cortex préfrontal joue alors un rôle de coordination en régulant les interactions entre les différentes régions impliquées.
Le contrôle du comportement chez l'adulte ne dépend plus d'un système exogène, mais devient endogène. Les connexions entre l'amygdale, l'hippocampe et le cortex frontal augmentent considérablement. Les amygdales intègrent la mémoire émotionnelle et les informations sensorielles, déclenchant ainsi la réponse dite « fight or flight » face au danger. Le striatum ventral, impliqué notamment dans le système de récompense, se développe également assez tôt.
Comme pour les autres changements initiés à la puberté, le développement cérébral est soumis à un fort dimorphisme sexuel, que ce soit en termes de calendrier, de taille (les garçons ont un cerveau environ 10 % plus volumineux que les filles) ou de rythme des différents aspects maturatifs.
Les œstrogènes influencent le développement des cellules de l'hippocampe, le nombre de ramifications dendritiques et la synaptogenèse, tandis que la testostérone agit davantage sur la myélinisation. Chez les garçons, on observe une augmentation de volume de l'amygdale, tandis que chez les filles, c'est l'hippocampe qui se développe de manière préférentielle. La maturation de la substance grise est plus précoce chez les filles, avec une avance d'un à deux ans par rapport aux garçons, tandis que la myélinisation se produit plus rapidement chez ces derniers.
La notion de sexualisation ne concerne pas seulement les caractères « sexuels », mais englobe l'ensemble de la personne. Ce phénomène est progressif, non linéaire et doit être compris comme une dynamique plutôt qu'un acquis ou un statut. Il soulève des questions essentielles d'identité et de normalité, et il contribue à la construction identitaire caractéristique de l'adolescence.
Dans l'expérience de l'adolescent, les modifications pubertaires sexualisantes présentent deux caractéristiques majeures :
elles lui sont imposées, en ce sens qu’il n'a pas le contrôle sur elles, ce qui peut engendrer de l'inquiétude ou le fragiliser ;
par ailleurs, il pressent qu'elles lui ouvriront des potentialités inédites, de nouvelles aptitudes excitantes et, à terme, l’accès à la sexualité génitale et à la capacité de procréation.
Le sentiment de perte de contrôle sur son corps laisse une empreinte durable sur l'adolescent. Il se manifeste via les aléas de la puberté comme les pertes blanches, les règles, les érections inopinées, les éjaculations nocturnes, et par ses conséquences en terme de croissance, d’acné, de modification de l'odeur corporelle, etc.
La perte de maîtrise s'étend également au niveau émotionnel, associant une amplification des émotions et une plus grande visibilité de leurs manifestations. Ainsi, alors que les émotions deviennent plus intenses, le corps perd sa capacité protectrice et a du mal à contenir les émotions et les désirs, ce qui peut se traduire par des rougissements, des bafouillements, une gestuelle maladroite. Cette perte de contrôle est toujours douloureuse, générant des inquiétudes voire de l'angoisse, surtout lorsqu'elle est associée à un fort sentiment d’étrangeté lié à la métamorphose du corps.
De nombreuses questions surgissent chez l’adolescent sur la normalité de ces transformations, des sensations qui en découlent, sur ses émotions, sa capacité à aimer et à être aimé, à désirer et à susciter le désir. Un sentiment d'insécurité sexuelle et corporelle, une pudeur parfois exacerbée, la honte face à certaines pensées ou actions se mêlent à la curiosité, au désir et à l'excitation. Les premières relations amoureuses relèvent volontiers d’une recherche de soi plutôt que d’un regard porté sur l’autre : la notion d’altérité est niée, la personne aimée est considérée comme double ou comme miroir. Ces expériences amoureuses permettent d'explorer son pouvoir de séduction, de prouver sa virilité ou d'affirmer sa féminité, de trouver de l'affection. Elles sont souvent associées au désir de fusion, d'indifférenciation, de dissolution des différences. Ce phénomène est normal et contribue à la construction identitaire inhérente à l'adolescence.
Ainsi, la maturation pubertaire du corps ne représente que le premier mouvement d’une transformation plus vaste qui concerne l’ensemble de l’adolescent. En moins d’une décennie, le grand enfant deviendra jeune adulte ; il aura acquis la maitrise d’un corps nouveau ayant acquis des capacités sexuelles et reproductives, développera ses capacités d’abstraction et son contrôle émotionnel, aura redéfini ses relations avec ses parents, les pairs, le monde extérieur. Cette métamorphose du corps, des pensées et de la vie sociale s’impose à lui, lui ouvre des potentialités inédites mais le contraint aussi à des obligations nouvelles et à une responsabilisation parfois angoissante. Ces ajustements s’exprimeront notamment à travers le comportement sexuel.
Pour comprendre comment se sont organisés le soutien et la prévention auprès des usagers de drogue par voie intraveineuse, il faut revenir brièvement sur une conjonction historique propre aux années 1980 : l’apparition de l’épidémie de sida, la consommation accrue d’héroïne et l’intensification des politiques répressives contre la drogue.
En France, depuis 1970 et la loi qui a pour but « la lutte contre la toxicomanie et la répression du trafic et de l'usage illicite de substances vénéneuses », les usagers de drogues sont dans le même temps considérés comme des malades et des délinquants puisque l’usage simple pouvait valoir une peine de prison.
L’injection de drogue n’entraîne pas par elle-même de contamination, mais le risque va venir d’une pratique courante chez les héroïnomanes : le partage de seringues. En effet, depuis un décret de 1972, la vente de seringues n’est possible qu’en pharmacie et sur ordonnance (ou contre l’enregistrement de l’identité de l’acheteur, ce qui revient ipso facto à déclarer sa toxicomanie). Faute d’être accessibles, les seringues sont donc partagées par les injecteurs de produits. Pendant une décennie, overdoses et contaminations (aux virus du sida et des hépatites) vont toucher en grande partie des personnes jeunes, pauvres, marginalisées et souvent « racialisées ». En France la position est figée, alors que dans d’autres pays, des scientifiques et des décideurs politiques ont déjà passé le stade du constat et des mesures à mettre en œuvre, même si cela ne s’est pas fait sans débats. En Amérique du Nord, en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en Allemagne notamment, une politique dite de « harm reduction » (réduction des risques liés à l’usage de drogue) se met en place en s’appuyant sur des associations d'usagers de drogues, sur l’accessibilité des seringues et sur les traitements de substitution. Il en va tout autrement en France. Deux brochures sont éditées par l’association Aides en 1985 et 1986 pour alerter et informer les usagers de drogue.
Certes, la ministre de la santé Michèle Barzach, elle-même médecin, parvient à faire abroger le décret de 1972 et à libéraliser la vente des seringues en pharmacie. Son décret paraît le 13 mai 1987, après huit mois de lutte contre certains professionnels de santé et une partie de ses collègues ministres. Néanmoins, le texte est adopté à titre expérimental, pour un an. Renouvelé en 1988 pour un an supplémentaire, il est finalement pérennisé en 1989. Il faudra attendre encore six années de plus pour qu’advienne une politique de réduction des risques (RdR). Ce chemin parcouru à pas de tortue a indubitablement coûté bien des vies. Publié en 1995, le rapport de la Commission Henrion affirme que « la politique de lutte contre la toxicomanie, fondée sur l'idée selon laquelle il ne faut rien faire pour faciliter la vie des toxicomanes, a provoqué des catastrophes sanitaires et sociales ». Et de fait, en 1989, le rapport Trautmann sur la lutte contre la toxicomanie et le trafic des stupéfiants n’abordait quasiment pas la question du sida. En décembre 1990, la Délégation générale à la lutte contre la drogue et la toxicomanie n’en dit pas un mot dans sa campagne nationale intitulée « Combat pour la vie ». Entre 1990 et 1992, l’AFLS (Association française de lutte contre le sida) finance toutefois certaines actions de proximité, notamment des campagnes de sensibilisation auprès des pharmaciens et des projets de mise à disposition de matériel en vrac, jusqu’à l’arrivée des premiers Stéribox® en 1991.
Côté associatif, les choses s’accélèrent également. En 1989, trois programmes d’échange de seringues voient le jour, en toute illégalité : à Marseille (géré par l’AMPT, Association Méditerranéenne de Prévention et de Traitement des Addictions, devenue Addiction Méditerranée), à Saint-Denis (repris ensuite par l’association Arcades) et à Paris (par Médecins du Monde). Un projet commun est tout d’abord envisagé avec des spécialistes mais n'aboutit pas et MdM se lance seul dans un programme d'échanges des seringues. La décision provoque d’ailleurs des remous car la distribution de seringues est considérée par certains volontaires de l’association comme une incitation à l’usage de drogues. Au fil des mois, et à la limite de la légalité parfois, d’autres acteurs inventent des moyens d’accueillir les usagers et de mettre du matériel à leur disposition (dans leurs locaux, dans des bus, via des automates). Ils agissent sur fonds propres et, parfois, avec des crédits de l’AFLS ou des directions départementales des affaires sanitaires et sociales. Par ailleurs, suite à la circulaire de 1990 qui modifie le protocole méthadone de 1973, le docteur A. Charles-Nicolas ouvre douze places au Centre Pierre-Nicolle, à Paris.
Mais au-delà de ces engagements épars, c’est en 1992 que s’opère le tournant vers une action collective et concertée. Cette année-là, lors de la VIIIe Conférence internationale sur le sida à Amsterdam, de nombreuses communications font état des différentes politiques de RdR menées à travers le monde : leurs résultats sont encourageants, notamment grâce à l’implication des usagers. Pour l’association ASUD, créée fin 1992, « le principal volet de la réduction des risques repose sur la possibilité pour les usagers de drogue de prendre en charge une partie de leur traitement, ce qui suppose le recours à l’éducation par les pairs ».
Avec le colloque Tri-Villes, organisé en janvier 1993 par le ministre de la santé de l’époque, Bernard Kouchner, la prise de conscience et les échanges s’intensifient entre les acteurs de terrain. Des rencontres informelles, puis des réunions plus organisées, vont aboutir à la création du collectif Limiter la casse. Le 25 mars 1993, « neuf associations avaient été invitées, mais ce collectif était d’abord un rassemblement de personnes avec ses trois composantes : des militants de l’auto-support, des militants de la lutte contre le sida et des acteurs de santé » raconte Anne Coppel. L’assemblée générale constitutive de Limiter la casse se tient le 6 septembre 1993. Quelques jours après, le rapport du Conseil national du sida sur la toxicomanie et le sida est publié : appelant de ses vœux une politique de RdR, il indique clairement que « la priorité des pouvoirs publics doit être la prévention et la protection de la santé publique, et non la répression de l'usage simple de drogues ». Cette recommandation va dans le sens de la IXe Conférence internationale sur le sida qui, comme la précédente, a largement confirmé l’efficacité des expériences de RdR menées à l’étranger. Mais ce message est-il entendu par les responsables politiques français ?
La première étape n’est guère spectaculaire : en effet, c’est l’abstinence et non la prévention des risques infectieux qui est au cœur du plan de lutte contre la toxicomanie de 1993. Le texte prévoit le doublement des lits de post-cure, la création de trois à cinq lits de sevrage dans les hôpitaux et la constitution de réseaux de médecins généralistes ville-hôpital en toxicomanie. Il garantit aussi l’accès aux soins en prison pour les toxicomanes. Mais si le sida est mentionné pour la première fois dans un plan gouvernemental sur la toxicomanie, la Ministre de la Santé Simone Veil a laissé en annexe les mesures applicables à moyen terme : elles posent néanmoins les principes d’une RdR que son ministère pourra déployer administrativement par la suite, de façon autonome. Tactique ou évitement ? La question se pose au regard des précautions avec lesquelles sont évoquées la création de centres d'urgence chargés d’accueillir la « fraction de la population la plus marginalisée » ou le développement de programmes d'échange de seringues et de traitements de substitution.
Déçus par l’inversion des priorités, les défenseurs de la RdR réagissent majoritairement de façon négative, jugeant le rapport « frileux », « pauvre », « insuffisant ». Le 19 octobre, le collectif Limiter la casse publie un appel dans les quotidiens Le Monde et Libération : « Des toxicomanes meurent chaque jour du sida, d’hépatite, de septicémie, par suicide ou par overdose. Ces morts peuvent être évitées, (…), limitons la casse ! ».
Simone Veil, de plus en plus convaincue, doit manœuvrer pour agir sans faillir à sa loyauté gouvernementale. Au 1er mars 1994, elle rend public un premier bilan de son action. Quatre “dispensaires de vie” s'ajoutent aux 2 “boutiques” existantes et 16 programmes d'échange de seringues sont créés. 217 places méthadone avaient été ouvertes en septembre 1993, 256 sont agréées en janvier. Chaque projet, chaque place méthadone a exigé une volonté inébranlable alliée à une connaissance précise des rouages administratifs qui ont permis de surmonter en six mois les obstacles qui exigent habituellement des années ». La pression est pourtant maintenue par le collectif Limiter la casse qui réunit quelques 800 personnes les 4-5 juin 1994, pour les États généraux « Drogue et sida ». Simone Veil vient clôturer la manifestation « pour qu’enfin on passe à la vitesse supérieure dans la politique de réduction du risque vis-à-vis de l’épidémie du sida ».
Le 21 juillet 1994, dix nouvelles mesures budgétisées sont annoncées pour limiter les risques de contamination des toxicomanes. Cela inclut la mise en vente des Stéribox® en pharmacie, le développement d’automates-distributeurs de kits, la légalisation de la mise à disposition des seringues par les associations, la montée en charge des programmes de méthadone à 1 645 places fin 1994, la création de 9 boutiques supplémentaires, de 12 réseaux ville-hôpital-toxicomanie et de 25 programmes d'échange de seringues.
Dix ans plus tard, la loi de santé publique du 9 août de 2004 ancre le dispositif de RdR initié par Simone Veil dans une véritable politique publique, clôturant une (trop) longue période expérimentale. La définition des activités de RdR pour les usagers de drogues est spécifiée par décret en avril 2005 (n°2005-347). Deux types de structures forment les piliers du dispositif français :
les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogue (CAARUD), créés par la loi de santé publique du 9 août 2004 et mis en place dans tous les départements français à partir de janvier 2006,
les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), institués par le décret n°2007-877 du 14 mai 2007. Ils prennent le relais des CSST (Centre spécialisé de soins aux toxicomanes) et accueillent en journée, toute personne, mineure ou majeure, seule ou en famille, confrontée à l’addiction.
En quasiment 25 ans, des premiers cas de sida recensés en 1981 jusqu’à la loi de santé publique de 2004, la RdR a été l’un des combats les plus difficiles à mener. Faute de visibilité sociale d’abord, de réactivité sanitaire ensuite. Au début des années 1990, il y a entre 250 000 et 300 000 usagers de drogues injectables en France. Moins de 20 000 fréquentent régulièrement des institutions de soins. Parmi eux, 30% à 40% sont séropositifs au VIH, et la prévalence du virus de l’hépatite C est évaluée à plus de 70%. En outre, près d’un quart des personnes hétérosexuelles contaminées par voie sexuelle sont des partenaires de toxicomanes. Quant aux transmissions mère-enfant, elles concernent des femmes contaminées lors d’un usage de drogues dans plus de 40% des cas. Six mois après la remise des seringues en vente libre, les contaminations VIH entre usagers de drogues sont réduites de 80%. Entre 1994 et 2004, le nombre de surdoses d’héroïne est divisé par trois, du simple fait de l’accès aux traitements de substitution aux opiacés (TSO). Des inégalités subsistent encore dans l’accès au dispositif, mais la RdR est un succès. Un succès qui repose sur l’adhésion massive des soi-disant “victimes de la drogue”. Les toxicomanes furent les principaux acteurs du système les autorisant à prendre en charge eux-mêmes les actions de prévention. C'est le passage d’une « logique de prise en charge à une logique de santé publique » écrit Anne Coppel ; « Travailler avec et non pour la personne » selon Jean-Pierre Lhomme.
La baisse des contaminations par le VIH, la chronicisation de la maladie et l’arrivée de traitements curatifs pour l’hépatite C ont modifié le paysage. En mieux pour la santé individuelle des usagers de drogue. Pas forcément pour la RdR qui se retrouve noyée dans le concept d’addictologie. C’est une discipline hospitalo-universitaire animée par les nouveaux mandarins du champ, pour la plupart des psychiatres issus de l’alcoologie. Un véritable hold-up qui emprunte à la RdR son rationalisme mais ignore superbement son combat citoyen. À la conduite unique qui était promue par le corps médical et politique avant la RdR (“guérir des drogues”) est venue se substituer une autre conduite, plus compréhensive certes, mais tout aussi unique : être compliant, dans ses consommations de drogues, aux messages portés par la RdR telle qu’elle est définie par le guide technique des Nations unies de 2009. La normativité de la technique prend le pas sur la réflexion politique repoussant aux marges les débats sur les salles de consommation à moindre risque et sur la dépénalisation. Les salles de consommation à moindre risque (SCMR) ont été autorisées par la loi en 2016. Il en existe actuellement deux en France : une à Paris et l’autre à Strasbourg, celle de Marseille est en discussion depuis des décennies sans jamais avoir vu le jour.
L’usage de produits psychoactifs n’est pas réservé aux pays du Nord et, depuis plusieurs années en Afrique, des usagers sont parfois identifiés et leur accompagnement et leur prise en charge commencent à s’organiser. Quelques programmes de substitution ont été mis en place depuis une dizaine d’années en Afrique. Les premiers ont été installés en Afrique anglophone (Kenya, Tanzanie). Depuis le 1er décembre 2014, un centre dédié à la prise en charge des usagers de produits psychoactifs a été ouvert à Dakar (Sénégal) : le CEPIAD. Outre la délivrance de méthadone, c’est la prise en charge ambulatoire globale des personnes dépendantes aux substances psychoactives qui y est mise en avant. Des dépistages (VIH et hépatites) y sont effectués et un programme d’échanges de seringues y est accolé depuis 2011.
Dans la grande majorité des pays d’Afrique, les mesures prises face à l’usage de produits ont été la pénalisation, l’incarcération. Ce choix, qui a montré très rapidement ses limites, a été dénoncé au niveau international par la plupart des experts, qu’ils soient associatifs ou scientifiques. L’incarcération ne fait qu’aggraver les conditions psychologiques et médicales des consommateurs, déjà en grande vulnérabilité en raison de leur usage de produits psychoactifs.
Tout comme ce fut le cas au Nord, il semble indispensable de favoriser la création d’un mouvement communautaire pour que les consommateurs eux-mêmes puissent définir un modèle d’action, de prévention, voire de prise en charge. Des réseaux commencent à voir le jour, comme en 2017 à Grand Bassam (Côte d’Ivoire) où neuf associations de type communautaire ont fondé le Rafasud (Réseau Afrique francophone autosupport des usagers de drogues). Il faut pouvoir construire des réponses adaptées aux habitants des pays sans reproduire à l’identique ce qui a pu se passer en France.
Il faut bien sûr aussi développer des études dans les pays avec les associations et les usagers qui connaissent le terrain et ainsi participer à améliorer la prévention, l’accompagnement et la prise en charges des usagers. Il en est ainsi du travail engagé au Mali qui, après avoir été un site de transit du trafic de drogues, a vu sa population d’usagers augmenter significativement. Pour trouver des solutions, des enquêtes ont été mises en place à la demande des structures locales. L’étude conduite par MdM en 2015 à Bamako auprès de 500 usagers de drogues (essentiellement des hommes) a montré que les deux substances les plus consommées (hors cannabis) étaient l’héroïne (98% des participants) et le crack (70%), et que seuls 8% déclaraient avoir déjà injecté des produits. Ces chiffres ne reflètent pas les dernières informations issues des articles de presse, des données scientifiques récentes et des saisies faites sur le territoire malien où prédominent méthamphétamine et tramadol. Etant donné l’utilisation détournée de ce dernier médicament pour lutter contre la fatigue ou les troubles sexuels et son pouvoir addictogène, lié à son appartenance à la classe des opioïdes, le lien entre usage et pratiques à risque liées à la transmission du VIH et du VHC semble crucial à explorer. De plus, il a été montré que 4 à 6% des personnes qui détournent les opioïdes de leur usage thérapeutique passent graduellement vers l’usage d’héroïne. Si le tramadol est le médicament psychotrope le plus saisi par les douanes, il en existe beaucoup d’autres sur les marchés, souvent contrefaits, et consommés par des groupes variés de la population. La consommation de drogues, particulièrement par voie intraveineuse et surtout chez les porteurs du VIH, aggrave également l’incidence de la tuberculose. Enfin, l’usage de méthamphétamine est connu pour être associé à des pratiques à risque importantes de transmission du VIH. Il apparaît donc crucial d’initier et de consolider une approche de RdR adaptée et efficace qui répondrait aux besoins des usagers. Ces derniers constituent une population protéiforme (injecteurs, travailleur-se-s du sexe, chauffeurs de taxi, vendeurs ambulants, jeunes, femmes, etc.). Ils ont néanmoins en commun, par le fait de pratiques de consommation illégales, d’être soumis à des formes de clandestinité et de stigmatisation qui les tiennent éloignés des services de prévention et de prise en charge, par ailleurs très limités et/ou méconnus dans le pays. Pour évaluer les besoins, et améliorer la qualité de vie des usagers de produits psychoactifs, l’ANRS-MIE a dans ce cadre financé une étude appelée Bé Djé (étude menée par le SESSTIM et Arcad-Santé Plus au sein du CIRSAC (Centre intégré de recherche, de soins et d’action communautaire) de Bamako.
En effet l’Afrique est un passage important pour les drogues à destination de l’Europe et, en se basant simplement sur l’évolution démographique, l’ONUDC affirme dans son Rapport mondial sur la drogue 2021 que le nombre des usagers de produits psychoactifs devrait augmenter de 40% dans les 10 années à venir. Les produits sont assez diversifiés, détournement de médicaments (tramadol), cocaïne, héroïne, cannabis, et les voies d’administration sont elles aussi variées ; l’injection y est retrouvée mais n’est pas forcément majoritaire.
Quelques programmes de prévention et de recherche sont financés. En Afrique comme au Nord, il est capital de dissocier le trafic et l’usage afin de pouvoir réduire les risques infectieux qu’affrontent les usagers de ces produits.
Si les risques infectieux liés à l’usage de produits dans les pays du Nord et en France en particulier ont diminué depuis les années 1990, il faut néanmoins rester particulièrement vigilant en accompagnant les structures associatives communautaires qui sont des sentinelles, attentives aux nouvelles pratiques et qui permettent d’alerter les autorités sanitaires sur de nouveaux risques. Au Sud, la prévention, le soutien, la prise en charge doivent être développés auprès des usagers et l’accompagnement politique et scientifique intensifiés auprès des autorités judiciaires et sanitaires des pays.
Pour en savoir plus
COPPEL Anne, Peut-on civiliser les drogues ? De la guerre à la drogue à la réduction des risques, Paris, Éditions La Découverte, 2002
Olivier MAUREL & Michel BOURRELLY. Une histoire de la lutte contre le sida. Le Nouveau Monde éditions, 2021, 720 p.
O’HARE Pat, « Petite histoire de la réduction des risques, de l’initiative locale à la problématique globale » in MdM (coord. par DEBAULIEU Céline, LUHMANN Niklas & MAGUET Olivier)
Le corps est partout, dans les médias, les publicités, les films, les discussions... Mais les aspects sexuels du corps sont souvent méconnus. Préoccupées par leur apparence physique, la plupart des personnes sont, paradoxalement, peu curieuses de connaître l’anatomie et le fonctionnement de leurs organes sexuels. Elles se reposent sur leurs acquis, maigres connaissances enseignées au collège et lycée ou par leurs parents, informations tirées d’internet et de la pornographie, et parfois quelques articles dans la presse estivale.
L’apprentissage de la sexualité, seul ou avec partenaire, permet d’étendre ce champ de connaissances, de mieux connaître son propre corps, et, dans une moindre mesure, celui des autres.
Mais imagine-t-on se limiter à son propre souffle pour décrire l’anatomie et la physiologie respiratoire ? Ainsi sont véhiculées, de génération en génération, des zones d’ombre et des fausses croyances sur l’anatomie et la physiologie sexuelles. Il est temps de leur tordre le cou !
Dans ce chapitre, nous n’allons pas décrire de manière exhaustive la structure et le fonctionnement du corps sexuel. Déjà, il s’agit du corps entier, chacun ayant ses zones de sensibilité et ses processus d’excitation spécifiques. Une caresse sur le dos, un baiser dans le cou, la vue d’un sein ou des mots murmurés peut faire partie de votre physiologie sexuelle !
Nous allons nous attacher à donner quelques jalons pour mieux connaître les organes sexuels essentiels au désir et au plaisir, et rectifier des idées reçues, qui véhiculent des représentations erronées. Quelques exemples d’idées reçues ? « Le clitoris est tout petit, et extérieur », « chez la femme, il faut distinguer orgasme vaginal et orgasme clitoridien», ou encore « chez l’homme, tous les organes sexuels sont visibles, rien n’est caché ».
Nous adopterons une approche « masculin/féminin », tout à fait critiquable car elle repose sur une vision binaire du genre. Oui, certaines femmes ont un pénis, certains hommes un vagin, et le chapitre sur l’identité de genre le souligne bien.
Aussi, les termes féminin et masculin seront utilisés comme repères biologiques, sans présumer du genre de la personne possédant ces organes.
C’est un choix de parler d’organes sexuels et non de système reproducteur. Désigner les organes de la sexualité par l’une de leur fonction seulement, la reproduction, est un biais cognitif qui attribue à la sexualité une finalité exclusive de reproduction, niant le désir et le plaisir comme composantes essentielles du fonctionnement humain.
Cette planche anatomique montre les organes sexuels féminins conformes à leur description la plus récente. En effet, l’anatomie du clitoris, par exemple, n’a été précisément décrite qu’au début de ce siècle ! De nombreux manuels scolaires présentent encore une description du « système reproducteur féminin » (sic) caduque, avec un clitoris inexistant, réduit à un petit pois, laissant la part belle à l’utérus et aux ovaires, la sexualité féminine étant ainsi clairement présentée comme « destinée uniquement à faire des bébés ». Prenons quelques secondes pour être conscients de ces biais qui orientent, dès notre enfance, la vision de la sexualité, et, au-delà, du genre féminin.
Cheminons à présent d’organe en organe, afin de souligner quelques notions essentielles.
Soulignons d’emblée que la vulve n’est pas le vagin ! La vulve est extérieure et se voit, le vagin est intérieur, nous y reviendrons.
La vulve se compose des grandes et petites lèvres, du capuchon et du gland du clitoris, du vestibule, du méat urinaire, de l’orifice vaginal, de l’hymen et des glandes de Bartholin. Les grandes lèvres referment l’orifice vaginal et le méat urinaire et ont un rôle protecteur. En écartant les grandes lèvres, on découvre les petites lèvres. Le vestibule est la partie comprise entre petites lèvres et orifice vaginal.
L’orifice vaginal n’est pas une ouverture permanente : il s’ouvre dans certaines circonstances, pendant les rapports sexuels, sous l’effet de l’excitation, ou durant l’accouchement.
Au sommet de la vulve, le capuchon du clitoris recouvre le gland du clitoris. Sous le gland du clitoris se trouve le méat urinaire, par lequel sort, évidemment, l’urine.
Les glandes de Bartholin (aussi nommées glandes vestibulaires) se situent de part et d’autre de l’orifice vaginal. Sous l’effet de l’excitation, elles peuvent sécréter un liquide (appelé cyprine) qui participe à la lubrification. Les glandes de Skene, situées près de l’orifice de l’urètre, peuvent également produire un liquide translucide pendant une activité sexuelle. Mais la lubrification vaginale ne se réduit pas à ces deux types de liquide, nous y reviendrons.
Fine membrane accrochée aux parois vaginales, il est plus ou moins épais et élastique, selon les femmes ; doté de trous, il laisse passer le flux menstruel. L’hymen peut se déchirer lors du premier rapport sexuel mais ceci n’est pas un critère de virginité : il peut, souvent, avoir déjà été déchiré, ou son orifice élargi, dans d’autres circonstances. Par exemple une pratique sportive, l’équitation, un peu trop de balançoire ou une manœuvre avec son doigt pour mettre un tampon ou aller explorer cette région.
Cet organe souvent méprisé ou dénigré, réduit à un petit pois c’est-à-dire sa partie émergée (le gland du clitoris, recouvert du capuchon), fait sa révolution depuis une vingtaine d’années. La saga du clitoris, c’est mieux que Star Wars : parfaitement connu au Moyen-Âge, cet organe a été passé sous silence pendant des siècles pour des raisons culturelles, religieuses ou encore médicales (les hommes médecins persuadés que cet organe pouvait poser problème et rendre les femmes « hystériques »). Grâce à une chirurgienne urologue australienne (Helen O’Connell), il a été de nouveau correctement décrit et compris à l’entrée du 21e siècle.
Et c’est loin d’être un petit pois... ! Plutôt un iceberg, dont le gland n’est que la partie émergée. Le tronc du clitoris prolonge le gland à l’intérieur du corps, telle la hampe du pénis. De ce tronc émergent deux racines, les piliers du clitoris, qui renferment les corps caverneux, et les bulbes vestibulaires, telles deux grosses amandes, se trouvant sous le vestibule et contre la paroi vaginale. Il s’agit donc d’un véritable ensemble, appelé parfois organe bulbo-clitoridien ou complexe clitoridien. Bref, le clitoris est un empire, et, excusez du peu, le seul organe humain dont la seule fonction connue est... le plaisir.
Au cours d’une stimulation sexuelle, les corps caverneux se gorgent de sang, ce qui provoque l’érection du clitoris et l’augmentation de son volume. Il est alors plus visible, mais sans présenter une érection complète et droite comme un pénis, car sa structure est différente.
Pour tout savoir sur l’histoire du clitoris, ce merveilleux film de 3 minutes :
Et pour visualiser un clitoris en 3D :
Du latin vagina (« fourreau » ou « gaine »), le vagin est un organe extraordinaire par ses multiples fonctions. Focus en GPS : de profil, le vagin se situe entre la vessie et le rectum, et de face il s’étend de l’orifice vaginal (dans la vulve) au col de l’utérus. A l’état de repos, le vagin est une cavité virtuelle, donc un espace vide. Sous l’effet de l’excitation le vagin s’élargit, mais ne le fait pas bêtement comme un contenant épouse un contenu passivement. Il s’élargit et s’allonge dans sa partie supérieure (près du col de l’utérus), on dit qu’il se «ballonise », l’image est parlante. Quant à sa partie inférieure, elle a tendance à se resserrer pendant un rapport sexuel, enserrant le contenu (pénis, sex toy, doigt...) comme un fourreau. Le vagin prend donc la forme d’une poire à l’envers.
Cette « élasticité intelligente » lui permet de s’adapter avec précision, mais ce n’est pas la seule capacité de cet organe. Tapissé d’une muqueuse (un peu comme l’intérieur d’une joue), sa paroi intérieure est plissée, et ces plis favorisent l’extension et la dilatation du vagin en fonction de son contenu, un peu comme un accordéon.
Le vagin est un milieu humide grâce à son microbiote, c’est-à-dire aux milliards de lactobacilles et autres micro-organismes qui le tapissent et qui doivent être respectés (attention aux « décapages » vaginaux à but hygiéniques qui peuvent perturber l’équilibre de cet écosystème).
La lubrification vaginale, sous l’effet d’une excitation sexuelle, relève d’un mécanisme spécifique : elle est liée à la formation de gouttelettes de plasma, sous l’effet d’une dilatation des petites artères vaginales. En clair, c’est un phénomène comparable à la transpiration sur un front quand il fait chaud. On parle donc de transsudat (comme dans « transpiration »). A ce phénomène s’ajoute la sécrétion des glandes de Bartholin et de Skene, au niveau de la vulve (voir « »).
Pendant une activité sexuelle, vagin et clitoris travaillent de concert pour procurer du plaisir : tels deux acrobates parfaitement synchronisés, ils envoient des messages de plaisir par leur étirement, gonflement, élargissement, allongement...
Pour le vagin, c’est essentiellement le tiers inférieur (donc près de l’orifice vaginal) qui est doté de terminaisons nerveuses transmettant ces sensations voluptueuses, ce qui rassure beaucoup d’hommes complexés par la taille de leur pénis.
N’opposons donc pas vagin et clitoris et ne distinguons pas orgasmes vaginal et clitoridien : c’est ce duo vagin-clitoris qui donne du plaisir, à chaque femme de comprendre ce qui lui plait le plus en termes de stimulations.
C’est un ensemble de muscles qui s’étend du pubis à l’anus et qui soutient, un peu comme un hamac, les organes décrits précédemment. Le périnée joue un rôle clé dans la continence urinaire et fécale, mais aussi dans le plaisir sexuel. Il enveloppe en effet le vagin, et plus ses muscles sont toniques, plus le vagin peut être le siège de sensations agréables pendant une activité sexuelle. Attention cependant, un périnée « trop » tonique peut être contre-productif, tout est dans l’élasticité et la capacité de contrôler ces muscles.
Quelques mots sur des organes moins directement impliqués dans le plaisir sexuel, mais plutôt dans le processus reproductif :
les ovaires, au nombre de deux, produisent les ovules et les hormones féminines (œstrogènes et progestérone).
l’utérus est un organe musculaire creux au-dessus de la vessie. Chaque mois, sous l’effet des oestrogènes, sa muqueuse interne s’épaissit. S’il n’y a pas fécondation, ce « surplus » est détruit, ce sont les règles.
les trompes de Fallope relient les ovaires à l’utérus. Lors de l’ovulation, l’ovule traverse les trompes, qui, grâce aux cils de leur épithélium, le poussent jusqu’à l’utérus.
La planche anatomique ci-dessous permet de repérer les organes sexuels et tord d’emblée le cou à une idée reçue : non, tout n’est pas extérieur et « visible » chez l’homme ! Certes, le pénis, le scrotum jouent un rôle clé dans la sexualité, mais ne négligeons pas, par exemple, la prostate ou les muscles du périnée masculin !
Cet organe joue un rôle bien connu dans les processus du plaisir sexuel, de la reproduction et de l’élimination de l’urine. Très sensible et excitable, il devient plus long et rigide à l’état d’érection qui peut se produire sous l’effet d’une stimulation physique ou psychique, ou spontanément (dans la nuit ou au réveil par exemple).
Quelques informations sur l’anatomie du pénis : on distingue le corps, le gland et la racine.
Le corps du pénis est constitué de trois masses cylindriques : les deux corps caverneux, qui vont de la racine du pénis (à l’intérieur du bassin) jusqu’à la couronne du gland.
Le corps spongieux, lui, présente deux renflements, l’un externe (c’est le gland), l’autre interne, le bulbe du pénis, tout près de l’anus, sous la prostate. Ce corps spongieux est traversé par l’urètre, qui débouche à l’extrémité du gland par un orifice, le méat urinaire. Donc, aucun muscle dans le pénis, il ne sert à rien de vouloir le « muscler » !
Le gland, à l’extrémité du pénis, est arrondi ou conique ; chez les personnes non-circoncises il est couvert d’un repli de peau rétractable appelé prépuce. Il est très sensible aux stimulations, notamment sa base appelée « couronne » (un peu renflée), truffée de capteurs ressentant notamment la pression. La zone du frein, qui relie le prépuce au gland, est souvent décrite comme la plus sensible dans des jeux sexuels.
La prostate est une glande située juste en dessous de la vessie, un peu comme un réacteur sous l’aile d’un avion, et devant le rectum. Elle a la forme et à peu près la taille d’un gros marron.
Cet organe atteste que tout n ‘est pas « extérieur et visible » dans la sexualité masculine. La prostate peut également procurer du plaisir. En effet sa stimulation, en jouant sur les muscles du périnée ou par le rectum, peut procurer des sensations voluptueuses à l’homme.
La principale fonction de la prostate est de produire et de sécréter un liquide appelé le liquide prostatique. Ce liquide constitue une partie importante du sperme, le fluide qui transporte les spermatozoïdes. Le liquide prostatique est libéré dans l'urètre pendant l'éjaculation, où il se mélange aux spermatozoïdes produits par les testicules et aux sécrétions provenant des vésicules séminales.
La prostate agit également comme une valve pour le passage de l'urine et du sperme. Elle entoure l'urètre, le tube qui transporte l'urine de la vessie vers l'extérieur, ainsi que le sperme pendant l'éjaculation. Les muscles de la prostate se contractent pendant l'éjaculation pour expulser le sperme à travers l'urètre.
En outre, la prostate est sous l'influence des hormones masculines, en particulier de la testostérone. Ces hormones sont nécessaires pour le développement et le maintien de la prostate tout au long de la vie d'un homme.
Cependant, la prostate est également sujette à certains problèmes de santé, tels que l'hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) et le cancer de la prostate. L'HBP se caractérise par une augmentation de la taille de la prostate qui peut entraîner des problèmes urinaires. Le cancer de la prostate est l'un des cancers les plus courants chez les hommes et nécessite une surveillance régulière et, dans certains cas, un traitement.
Pour évaluer la santé de la prostate, les médecins peuvent effectuer un examen par toucher rectal ou échographie pour détecter d'éventuelles anomalies ou procéder à des tests sanguins, tels que le dosage de l'antigène prostatique spécifique (PSA).
Le scrotum est un sac de peau lâche et plissée qui contient les testicules.
Les testicules sont de forme ovale et légèrement aplatie et mesurent environ 4 à 5 centimètres de long. Chaque testicule est enveloppé dans une membrane appelée l'albuginée, qui protège et maintient leur forme.
Les testicules ont deux principales fonctions dans le corps masculin : la production de spermatozoïdes et la sécrétion d'hormones sexuelles masculines, en particulier la testostérone.
La production de spermatozoïdes, connue sous le nom de spermatogenèse, se déroule à l'intérieur des testicules dans de minuscules tubules appelés tubules séminifères. Les cellules germinales présentes dans ces tubules subissent plusieurs étapes de développement pour former des spermatozoïdes matures. Les spermatozoïdes sont ensuite stockés dans l'épididyme, une structure en forme de tube attachée à chaque testicule.
Les testicules sont également responsables de la production de testostérone, la principale hormone sexuelle masculine. La testostérone est essentielle au développement des caractéristiques sexuelles masculines, telles que la croissance des poils du visage et du corps, le développement des organes génitaux, la voix, la masse musculaire et la libido.
En matière de sexualité, les testicules jouent un rôle crucial. Ils produisent non seulement les spermatozoïdes nécessaires à la reproduction, mais ils influencent également le désir sexuel et la fonction érectile grâce à la production de testostérone. Un seuil minimal de testostérone est généralement nécessaire pour maintenir le désir et une fonction érectile normale.
Le scrotum, en tant que contenant des testicules, joue un rôle important dans la régulation de leur température. Pour une production optimale de spermatozoïdes, les testicules doivent être maintenus à une température légèrement inférieure à la température corporelle normale. Le scrotum aide à accomplir cela en se contractant ou en se relâchant pour rapprocher ou éloigner les testicules du corps, en fonction de la température ambiante.
Enfin, le scrotum est une zone érogène importante, sensible aux caresses et jouant un rôle clé dans l’excitation et le plaisir.
Rappelons que ce chapitre n’est en aucun cas exhaustif : par exemple, l’anus, les seins, la bouche (chez la femme et chez l’homme) font souvent partie des zones du corps ayant un rôle dans la sexualité.
L’idée n’est pas d’écrire une nouvelle « encyclopédie de la sexualité » mais de souligner un principe essentiel : savoir, c’est pouvoir.
Connaître son corps, aller au-delà des idées préconçues, explorer ses sensations, c’est pouvoir jouir d’une sexualité satisfaisante, seul ou avec partenaires.
La communication (entre partenaires), la sécurité (se sentir serein pendant une activité sexuelle) et les soins de santé sexuelle sont également des aspects importants de la sexualité.
Pour en savoir plus :
Site de l’université de Genève avec des planches anatomiques très documentées :
Prostate, l’organe mystérieux qui vous veut du bien. Patrick Papazian, Edouard Klein, 2018. Editions de l’Opportun.
Chouchoutez votre vagin ! Patrick Papazian, Caroline Michel. Larousse. 2020.
Médecine sexuelle, fondements et pratiques. Frédérique Courtois, Mireille Bonierbale. Edition Lavoisier, 2016.
Manuel de sexologie. Elsevier édition. Patrice Lopès, François-Xavier Poudat. 4e édition, 2021.
Ressources disponibles sur
L’infection HPV est une infection courante, transmise dès les premières relations sexuelles et qui touche 80% de la population générale.
Les HPV sont des virus à ADN qui s’intègrent dans la cellule infectée et vont y persister.
Il existe 40 types d’HPV (chacun porte un numéro) que l’on trouve au niveau des muqueuses : bouche, anus, muqueuses génitales.
La gravité de l’infection est liée à la capacité de certains HPV d’induire des cancers :








Efficacité maximale quand utilisé systématiquement et correctement. De l’ordre de 70 % en conditions réelles parmi des couples déclarants l’utilisant systématiquement.
Interventions brèves visant les changements de comportements
Variable selon les études. Non conclusif.
Conseil et Dépistage
Effet variable selon les études en termes de changements des comportements. Non conclusif.
Incitations financières
Variable selon les études. Non conclusif. Possibilité de passage à l’échelle discutable.
Stratégies séroadaptatives
Moins efficace que le préservatif. Efficacité par rapport à l’absence d’autre stratégie préventive difficilement mesurable.
Interventions biomédicales
Traitement antirétroviral (pour les personnes vivant avec le VIH)
Effet préventif très élevé, dès lors que la charge virale est contrôlée.
Traitement post-exposition TPE
Très efficace, surtout si pris très rapidement avec l’exposition.
PrEP orale continue
Très élevée, fortement dépendante de l’observance.
PrEP orale à la demande
Très élevée chez les homosexuels masculins.
Non recommandée chez les femmes.
PrEP injectable
La PrEP injectable par cabotégravir serait 69 % à 89 % plus efficace que la PrEP orale, en raison principalement d’une meilleure observance.
PrEP sous forme d’implants
En cours d’évaluation
Circoncision
Réduction de 60 % du risque d’infection chez les hommes hétérosexuels. Bénéfice indirect pour les femmes.
Résultats non conclusifs pour les homosexuels masculins.
Dépistage et traitement des IST
Non conclusif.
Anneaux vaginaux
Efficacité de l’ordre de 30 % pour les anneaux vaginaux à base de dapivirine.
Vaccin préventif
Efficacité encore partielle et limitée à ce jour. Pas encore de dispositif utilisable en routine.
Interventions structurelles
Accès à l’éducation
Efficacité préventive difficilement mesurable.
Décriminalisation du travail sexuel, de l’homosexualité, de l’usage de drogues
Efficacité préventive difficilement mesurable.
Programme de réduction des discriminations
Efficacité préventive difficilement mesurable.
Gratuité des soins
Efficacité préventive difficilement mesurable.
Il est dès lors essentiel de penser la prévention du VIH dans une vision plus large de la santé, centrée sur les individus, notamment à travers des approches globales en santé sexuelle et reproductive. Une prévention efficace ne peut être atteinte par une réponse unique, mais en combinant des approches complémentaires, globales et intégrées.
Domaine
Outil / Stratégie
Efficacité
Interventions comportementales
Abstinence
Efficace en théorie. Mais inefficacité des programmes de promotion de l’abstinence.
Fidélité
Efficace en théorie entre partenaires de même statut sérologique. En pratique, contaminations intracouples observées du fait qu’un des deux partenaires était infecté en dehors du couple.
Préservatif masculin
Efficacité maximale quand utilisé systématiquement et correctement. De l’ordre de 80 % en conditions réelles parmi des couples déclarants l’utilisant systématiquement.
Préservatif féminin



Cela provoque l'ouverture des artères et l'augmentation du flux sanguin vers le pénis, tandis que les corps caverneux se gorgent de sang.
Le sang afflue dans les corps caverneux grâce à l'élargissement des artères et est piégé dans les tissus érectiles du pénis, ce qui provoque son gonflement et son durcissement.
Les corps caverneux sont des structures en forme de cylindre qui contiennent de nombreux espaces lacunaires remplis de sang. Lorsque ces espaces se remplissent, ils compriment les veines du pénis, empêchant le sang de s'échapper et maintenant ainsi l'érection.
L'érection peut être maintenue tant que la stimulation sexuelle se poursuit. Lorsque la stimulation sexuelle diminue ou cesse, les muscles lisses des artères se contractent à nouveau, réduisant l'afflux sanguin dans le pénis et permettant au sang de s'échapper des corps caverneux. Cela entraîne le retour à l'état flaccide du pénis.
L’érection est un phénomène complexe qui implique une coordination précise entre le système nerveux, les vaisseaux sanguins et les tissus érectiles. Des facteurs psychologiques, hormonaux et vasculaires peuvent influencer ce processus.
Une préoccupation majeure des hommes : la taille du pénis.
Il existe toutes formes, tailles, types de pénis chez les êtres humains, et les complexes notamment sur la taille en érection ou au repos sont dans l’immense majorité des cas sans fondement. En revanche, une douleur au moment de l’érection ou un angle fait par le pénis en érection rendant toute pénétration compliquée ou douloureuse (pour vous ou la/le partenaire) sont des motifs de consultation.







les HPV à haut risque (HPV 16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56, 58, 59, 68) vont être responsables de cancers situés là où a eu lieu l’infection ;
les autres génotypes dits à bas risque (HPV 6 et 11) sont responsables de condylomes et de verrues.
La plupart des infections par HPV sont transitoires, éliminées par les défenses immunitaires et n’occasionnent aucun symptôme.
Par contre, les infections par HPV à haut risque persistant plus de 12-18 mois peuvent conduire à l’apparition de lésions, d’abord précancéreuses (on parle de dysplasies), puis peuvent évoluer vers des lésions cancéreuses au niveau du col de l’utérus, du vagin, de la vulve, du pénis, de l’anus et de l’oropharynx (en particulier des amygdales et de la langue).
L’infection HPV est habituellement contractée au cours des deux premières décennies de vie. L’infection persistante et les lésions précancéreuses qui en découlent touchent les femmes à partir de 25 ans et, si elles ne sont pas dépistées et traitées, le cancer apparait entre 35 et 45 ans, causant une morbidité et une mortalité inacceptables.
Le cancer du col utérin est le cancer induit par HPV le plus fréquent dans le monde, avec 570 000 femmes atteintes en 2018 dont 51% habitent dans les pays à ressources limitées, les pays de l’Afrique de l’Ouest et Afrique australe étant les plus touchés. En Afrique subsaharienne, le cancer du col est responsable de 33,2% de la morbidité et la mortalité liées au cancer chez les femmes.
Le nombre de décès annuel de 311 000 dans le monde est le fait le plus souvent de diagnostic à un stade tardif.
L’OMS (Organisation mondiale de la santé) a donc lancé un appel à l’action mondiale en 2018, relayé par ONUSIDA, afin d’éliminer le cancer du col via la mise en place de 4 pôles d’action : l’éducation à la santé sexuelle, la vaccination contre HPV, le dépistage du cancer du col et l’accès aux soins curatifs et palliatifs en cas de nécessité.
Depuis ce premier appel, une journée mondiale de sensibilisation au Papillomavirus (« International HPV awareness day ») est organisée chaque 4 mars.
Ce sont principalement des cancers de l’anus et des cancers de la sphère ORL (bouche et pharynx). On estime que 4,5% de tous les cancers sont dus à HPV. Cette proportion monte à 15% chez les personnes vivant avec le VIH en raison de l’immunodépression qui va favoriser la persistance de lésions précancéreuses.
Ces cancers touchent bien sûr aussi les hommes : dans le monde, 30% des cancers dus à l’HPV concernent des hommes. Ce sont principalement les cancers de la sphère ORL (bouche et gorge) et le cancer de l’anus, qui atteint surtout les hommes ayant des rapports avec d’autres hommes (HSH) avec une fréquence beaucoup plus élevée que dans la population générale et une sévérité plus importante, ou encore les femmes ayant eu des lésions (pré)cancéreuses du col.
Les facteurs de risque associés à l’apparition de cancers HPV-induits sont :
le tabagisme,
l’immunodépression cellulaire en lymphocytes CD4, ce qui rend aussi les patients porteurs de greffe d’organe à plus haut risque de cancer induit par HPV.
A l’inverse, le fait d’être traité efficacement contre le VIH réduit le risque d’infection par HPV et d’apparition de lésions associées chez les personnes vivant avec le VIH.
Les HPV à bas risque sont, quant à eux, responsables de condylomes (appelées verrues génitales, crêtes de coq …) qui sont des tumeurs bénignes le plus souvent de la sphère ano-génitale. Ces condylomes peuvent être traités par résection simple ou par application d’un traitement local comme l’imiquimod, mais les récidives sont fréquentes et on observe souvent des répercussions psychologiques chez les personnes qui les ont développés.
L’une des opportunités qui existe en matière d’infection HPV est de pouvoir dépister la persistance des virus à haut risque (par PCR) puis de dépister des lésions dysplasiques (précancéreuses) et donc de les traiter avant le stade de cancer.
Les lésions précancéreuses peuvent être dépistées et traitées :
facilement en ce qui concerne le col de l’utérus,
avec plus de difficultés pour l’anus et à l’heure actuelle pas du tout pour les néoplasies oro-pharyngées.
L’instauration de programmes de dépistage des lésions précancéreuses du col a prouvé depuis plusieurs décennies son efficacité à réduire l’incidence et la mortalité de ce cancer dans de nombreux pays.
Pour les pays à ressources limitées le défi majeur est la mise en place de tels programmes dans des contextes de ressources limitées (humaines et financières).
La première étape est de dépister les HPV persistants, c’est-à-dire ceux qui vont induire des lésions précancéreuses puis potentiellement un cancer.
La détection des HPV à haut risque (HR) par PCR sur un frottis, suivie d’une l’inspection visuelle, est la méthode de dépistage et de traitement la plus efficace, supérieure aux classiques tests cytologiques (frottis du col avec recherche de cellules anormales) et visuels.
Cette détection de l’HPV, pour être la plus efficace, doit être réalisée chez les femmes à partir de 30 ans car elle détecte les infections persistantes alors qu’avant cet âge, les infections par HPV HR sont fréquentes mais transitoires.
Cette approche permet d’avoir un diagnostic dans les 2 heures après l’examen de la patiente et de la traiter le jour même par un traitement local (cryothérapie par exemple).
Depuis 2016, l’OMS recommande ces stratégies dites « Screen-and-treat » (« Dépister-et-traiter ») qui offrent un diagnostic plus rapide et plus précis, associé à un traitement dans le même temps conduisant à une plus grande efficacité et à une diminution des pertes de suivi.
Dans les pays à revenus élevés, après 30 ans le dépistage du cancer du col par la détection directes du virus d’HPV à HR (suivie d’un triage par cytologie ou colposcopie en deuxième intention) chez les femmes à partir de 30 ans est le mode de dépistage actuellement recommandé, notamment en Europe.
Avant 30 ans, compte tenu e dépistage doit être réalisé par cytologie associée à la colposcopie en cas de cytologie anormale. La colposcopie, examen indolore, consiste en l’observation du col de l’utérus avec une loupe grossissante après application de différents colorants qui rehaussent les zones précancéreuses, ce qui permet de repérer les zones suspectes à biopsier.
L’intervalle recommandé entre les dépistages par cytologie varie de tous les 3 ans dans la population générale ou chez les femmes vivant avec le VIH ayant eu une première cytologie normale associée à l’absence d’HPV HR et un taux >500 lymphocytes CD4/µl sous traitement anti-VIH, à tous les 6-12 mois dans les autres cas.
Avec les nouvelles techniques de dépistage par recherche d’HPV HR, le dépistage minimal consisterait en un dépistage à 30 ans puis tous les 10 ans.
Il est important de traiter les lésions précancéreuses compte tenu de leur potentiel évolutif important. En effet, le potentiel d’évolution de lésions précancéreuses de haut grade du col vers le cancer invasif est estimé à 1/80.
Dans la plupart des cas, il est possible de traiter les lésions précancéreuses de haut grade (CIN II et III) en ambulatoire, à l’aide de techniques non invasives, comme la cryothérapie en cas de lésions de petite taille ou la résection à l’anse diathermique qui permet d’éliminer avec succès les lésions précancéreuses dans plus de 90% des cas.
Pour les lésions qui ne peuvent pas être traitées de cette façon, on peut avoir recours à la conisation à froid. Bien que très efficace, celle-ci peut causer des cicatrices du col, qui pourrait alors devenir moins fermé au cours des grossesses ultérieures et entrainer un risque d’accouchement prématuré.
Dans tous les cas, un suivi rapproché après traitement est recommandé.
A la différence des lésions HPV du col utérin, le potentiel d’évolution vers le cancer invasif des lésions précancéreuses de haut grade anales est moindre, estimé à 1/4 000 dans la population générale mais plus fréquent en cas de co-infection par VIH (1/600).
Le dépistage et le traitement des lésions précancéreuses anales a pu prouver son efficacité à diminuer l’incidence du cancer anal, comme c’est le cas pour le cancer du col.
Chez les personnes vivant avec le VIH à haut risque de cancers, un dépistage des lésions précancéreuses anales devrait être proposé à tout homme HSH à partir de 35 ans, et à toute femme présentant d’autres lésions associées à HPV. Cependant, même dans les pays sans limitations économiques majeures, des difficultés techniques et organisationnelles viennent s’ajouter aux questions scientifiques et sont un frein à la mise en place de ce dépistage.
Les dysplasies anales sont souvent asymptomatiques mais elles peuvent donner prurit, irritation, gêne, ou saignement. Un toucher du canal anal peut détecter des cancers de petites tailles donc curables. La cytologie sur frottis est un outil facile d’utilisation à grande échelle mais peut rater jusqu’à 15-25% des lésions de haut grade et est non spécifique ; elle offre pourtant l’avantage d’être indolore, rapide, peu coûteuse et elle peut être réalisée par le patient lui-même, raison pour laquelle elle est utilisée en dépistage primaire. Une examen anuscopique dit de haute résolution est la technique de référence, mais requiert un matériel très spécifique, une formation spécialisée du médecin et une solide expérience pratique. En bref, peu de centres en disposent.
Le traitement des lésions dysplasiques anales de haut grade comporte
soit une application locale d’imiquimod ou de fluorouracile pour des lésions assez larges (lésions externes ou lésions internes multifocales ou touchant plus de 50% de la circonférence du canal anal)
soit par des techniques ablatives si les lésions sont inférieures à 50% de la circonférence (photocoagulation au laser, acide trichloroacétique, radiofréquence, etc.)
Il a également été démontré qu’en cas de lésions précancéreuses dues à l’HPV, promouvoir l’arrêt du tabac et, en cas d’infection par le VIH, assurer un contrôle optimal de l’infection par le traitement VIH sont des actions qui diminuent également le risque de dégénérescence vers le cancer invasif.
Au-delà de la circoncision et de l’usage du préservatif, qui permettent de diminuer les risques de transmission de l’HPV aux partenaires ou son acquisition au niveau pénien, les cancers liés au HPV sont des maladies hautement évitables grâce à la vaccination.
Depuis 2006, plusieurs vaccins prophylactiques ont été développés. Ces vaccins sont à base de pseudovirions (ou virus like particle) synthétiques, qui sont des copies d’enveloppe du virus vide. Ils sont différents pour chaque génotype d’HPV et ne contiennent pas de matériel génétique ; ils sont donc non infectieux.
Trois vaccins ont été commercialisés :
un vaccin bivalent (Cervarix®, GlaxoSmithKline) protégeant contre les HPV 16 et 18, responsables de 70% des cancers du col dans la population générale ;
un vaccin quadrivalent (Gardasil®, Merck and Co) protégeant contre les types 6, 11 responsables des condylomes, et contre HPV16/18 ; ce vaccin quadrivalent n’est actuellement plus fabriqué ;
un vaccin 9-valent (Gardasil9®, Merck and Co), contre les HPV 6/11 et 16/18/31/33/45/52/58, responsables de 90% des cancers du col dans la population générale.
Dans des études qui ont inclus près de 80 000 personnes âgées de 15 à 26 ans (75 000 femmes et plus de 4 000 hommes dont plus de 1 000 HSH), les trois vaccins ont montré leur très haute efficacité (> 80-95%) pour :
prévenir l’infection par les génotypes d’HPV contenus dans les vaccins,
prévenir l’apparition de condylomes,
prévenir les lésions précancéreuses de haut grade induites par les HPV contenus dans les vaccins respectifs, principalement au niveau du col et au niveau anal.
Cependant, ces vaccins ne permettent pas d’empêcher une infection déjà présente, d’où l’importance de vacciner au plus tôt, avant ou au tout début de la vie sexuelle.
Ces vaccins d’abord prescrits chez les filles uniquement dès 9 ans sont aujourd’hui également recommandés chez les garçons avec 2 objectifs :
protéger les futurs hommes qui représentent 30% des personnes qui souffriront un jour d’un cancer HPV-induit
accroître la couverture vaccinale et diminuer la circulation de l’HPV entre hommes et femmes ; à cet âge le taux de réponse est le meilleur
Les résultats de cette vaccination sont spectaculaires dans des pays tels que l’Australie, la Grande-Bretagne et la Suède, qui ont vacciné près de 80% de leur enfants :
une diminution voire une disparition des lésions telles que les condylomes chez les jeunes de moins de 22 ans,
une diminution importante des lésions précancéreuses
une diminution du cancer du col chez les personnes vaccinées.
La tolérance et le profil de sécurité de ces vaccins sont excellents. Certains pays comme la France, où différentes campagnes de propagande contre un vaccin qui doit être donné chez des enfants ou de jeunes adolescents pour une efficacité préventive maximale, un manque d’implication des professionnels de santé ont un retard à rattraper.
Les résultats spectaculaires de la vaccination ont conduit à l’élaboration d’une stratégie mondiale pour accélérer l’élimination du cancer du col de l’utérus (objectif d’incidence < 4/100 000 femmes-année), approuvée par l’OMS.
De nombreuses études ont démontré l’excellente a bonne immunogénicité c’est apacité à produire des anticorps neutralisants après vaccination) des vaccins principalement quadrivalent et bivalent lorsque l’infection VIH est contrôlée sur le plan viral. La tolérance et la sécurité de ces vaccins sont excellentes chez les PvVIH.
L’OMS recommande, depuis décembre 2022, de vacciner enfants et les personnes jusqu’à 20 ans avec une seule dose de vaccin au lieu des 2 ou 3 doses recommandées auparavant.
Chez les PvVIH, les recommandations sont maintenues en 3 doses quel que soit l’âge et jusqu’à 26 à 45 ans compris..
Il est important que le coût du vaccin puisse être largement subventionné ou qu’il soit fourni gratuitement.
Outre la vaccination, rappelons que la prévention doit associer :
le conseil et l’éducation à la santé sexuelle,
la promotion de l’arrêt du tabac,
la distribution de préservatifs aux adolescents sexuellement actifs (filles et garçons).
En conclusion
L’infection à HPV et les lésions cancéreuses associées causent une lourde morbi-mortalité.
La prévention de ces affections hautement évitables passe par la vaccination dès la préadolescence jusqu’à l’âge adulte inclus et par le dépistage actif des cancers du col de l’utérus et de l’anus.
Ces interventions représentent une excellente occasion de sensibiliser les patients et les prestataires de soins de santé au risque des cancers liés au HPV. La vaccination contre le HPV devrait être aussi l'occasion de renforcer les services de santé destinés aux pré-adolescents et aux adolescents, notamment par le biais d'interventions plus nombreuses en milieu scolaire.
Pour en savoir plus
Rapport de l'Organisation mondiale de la Santé : Stratégie mondiale en vue d'accélérer l'élimination du cancer du col de l'utérus en tant que problème de santé publique https://www.who.int/fr/publications-detail/9789240014107
Parce que le VIH se réplique massivement dès sa pénétration dans l’organisme, parce qu’il est constamment délétère et responsable d’un déficit immunitaire progressif, parce que la transmission du VIH est étroitement liée à son niveau de réplication et parce qu’il n’existe pas de guérison spontanée de l’infection VIH, seul le contrôle du virus par des antirétroviraux (ARV) bloquant son cycle de multiplication peut arrêter son processus mortifère.
L’objectif du traitement ARV (TARV) est de contrôler (empêcher) la réplication virale jusqu’à ce que celle-ci ne soit plus détectable par les avec des valeurs sous le seuil de 50 copies/ml. Ce contrôle, ou suppression virologique, permet la restauration de l’immunité et l’arrêt des phénomènes inflammatoires délétères induits par le VIH.
Un bénéfice majeur du TARV est, outre le contrôle du VIH dans le sang, celui de son contrôle dans les secrétions potentiellement contaminantes comme les secrétions sexuelles (sperme, secrétions génitales). Des études contrôlées (essai HPTN 052, PARTNERS) ont de façon convaincante confirmé cette efficacité protectrice du traitement antirétroviral (> 95%) vis-à-vis du partenaire non-infecté.
Le slogan U=U de l’anglais Undetectable = Untransmittable ou en français Indétectable = Intransmissible constitue une révolution majeure. Ceci constitue une profonde évolution de la manière dont se perçoivent et sont perçus les personnes vivant avec le VIH (PVVIH).
Trois décennies de recherche intense ont permis :
D’empêcher durablement la progression du virus en empêchant sa multiplication grâce aux médicaments antirétroviraux.
De démontrer que le traitement ARV devait concerner tout patient infecté par le VIH quel que soit le stade de son infection et son immunité CD4.
Parce que le VIH est intégré dans le noyau des cellules lymphocytaires, intimement mêlé à l’ADN de ces cellules et qu’il y est en partie inactif, il n’est pas possible de l’éliminer de l’organisme. La réplication quotidienne du VIH impose que celui-ci soit en permanence inhibé par les molécules ARV actives.
Dans les années 2000-2010, face à la toxicité et la complexité des traitements, la possibilité de faire des interruptions de TARV a été évaluée dans plusieurs études, avec l’objectif d’envisager des pauses de traitement.
Tous ces essais ont conclu à l’impossibilité d’arrêter le TARV, sous peine d’un rebond viral en une à trois semaines et la perte de tous les avantages du traitement sur l’immunité et la transmission.
Les recommandations de traitement basées sur le niveau des CD4 ont considérablement évolué en trois décennies.
À la fin des années 1980, la mise en évidence d’une certaine activité de la zidovudine et la mortalité très élevée des personnes atteintes ont conduit tout d’abord à envisager un TARV dès que les CD4 baissaient en dessous de 500/mm3. Mais, en 1993-1994, les résultats de l’essai Concorde ne vont pas inciter à administrer précocement la zidovudine chez les adultes asymptomatiques.
À partir de 1996, l’apparition des nouvelles classes d’antirétroviraux, les IP et les HAART (Highly Active AntiRetroviral Therapy) fait reposer la question du meilleur moment pour l’initiation du TARV. Passée la période d’une offensive thérapeutique précoce contre le VIH « Hit Hard, Hit Early », une approche plus prudente est adoptée devant les risques de toxicité cumulée et d’émergence de résistances.
En 2002, les recommandations sont d’initier le traitement ARV au-dessus de 200 CD4/mm3 chez les personnes asymptomatiques.
Il est évidemment important d’apprécier la capacité du patient à débuter le traitement très rapidement : il faut prendre en compte ses connaissances sur le VIH, son état psychologique, évaluer un contexte éventuellement difficile (stigmatisation de l’infection VIH par l’environnement familial, violence domestique ou autre coercition qui risquerait d’influencer négativement les bénéfices du TARV débuté rapidement).
Si le socle classique du TARV () reste la trithérapie composée de deux inhibiteurs nucléosidiques (INTI) et d’un troisième agent soit inhibiteur d’intégrase (INI) ou inhibiteur non nucléosidique (INNTI), voire un IP, l’évolution au cours des cinq dernières années s’est faite progressivement vers un allègement du traitement. En effet, plusieurs stratégies d’allègement se sont révélées efficaces soit en initiation de traitement pour induire l’indétectabilité de la charge virale soit pour la maintenir (stratégies de maintenance).
Plusieurs bithérapies commencent à entrer dans la pratique et figurent dans les recommandations nationales et internationales.
Ainsi, si le dogme intangible du TARV reste l’obtention ou le maintien d’un contrôle maximal de la charge virale, le moyen d’y arriver n’est plus obligatoirement une trithérapie.
Tableau 1 - Stratégies d’antirétroviraux recommandées en initiation pour les adultes infectés par le VIH
Tableau 2 - Stratégies alternatives : recommandations OMS 2021
Source : OMS
Le ténofovir disoproxil fumarate (TDF) ou ténofovir alafénamide (TAF) accompagné par l’emtricitabine, constitue la charpente la plus utilisée des trithérapies. L’abacavir doit être utilisé seulement lorsqu’un test génétique HLA-B*5701 est négatif, en tout cas dans les populations caucasiennes chez lesquelles ce profil génétique est rencontré.
Le choix d’un 3e agent, c’est-à-dire le médicament combiné en trithérapie aux 2INTI, est, selon les recommandations européennes (EACS Octobre 2021 https://www.eacsociety.org/) ou nord-américaines. (DHSS 2021 https://clinicalinfo.hiv.gov/en/guidelines) ou de l’OMS (https://www.who.int/fr) :
- soit un INI
le bictégravir combiné à TAF/FTC (Bictarvy®)
le dolutégravir combiné à TDF/3TC, TAF/3TC ou ABC/3TC (Triumeq®)
- soit un INNTI : doravirine associé à TDF et lamivudine (Delstrigo®) (recommandations européennes)
L’éfavirenz ou la rilpivirine ne sont plus recommandées en médiation de traitement pour des raisons de puissances (rilpivirine) ou de tolérance (éfavirenz). Enfin, l’utilisation d’IP en première ligne de traitement reste une option, notamment si le risque de résistance transmise ou acquise est évoqué, ou si d’autres options sont inadéquates. Dans ces situations, le choix se portera sur le darunavir boosté soit par du cobicistat soit par du ritonavir.
Grossesse : le TARV est une urgence. Le DTG peut maintenant être donné, après une alerte écartée en 2021 sur des anomalies fœtales neurologiques, compte tenu d’un bénéfice important sur la vitesse de suppression virale, particulièrement sensible dans un contexte de découverte de VIH et de grossesse.
Co-infection avec Virus Hépatite B : le traitement doit impérativement associer le TDF ou le TAF, actifs sur VHB.
Tuberculose nécessitant un traitement par rifampicine : la dose de DTG doit être doublée (2 × 50 mg). Aucune nécessité d’adapter la dose de l’éfavirenz.
Seule l’association DTG/3TC (DovatoR) est recommandée en initiation chez des patients non porteurs du VHB.
Les grands essais GEMINI 1 et 2 ont solidement démontré que la bithérapie DTG/3TC était aussi efficace que la trithérapie TDF/3TC/DTG en initiation de TARV. La vitesse de réduction de la CV était similaire, de même que la restauration immunitaire. En outre, aucune mutation de résistance n’était détectée en cas d’échec virologique.
Une stratégie dite « allégée » se définit par rapport à un standard, actuellement une trithérapie composée de trois molécules administrées à un dosage fixe et tous les jours. Les stratégies d’allègement peuvent consister en moins de molécules (bi- ou monothérapies), des dosages moins élevés ou une fréquence de prise moindre (figure 1).
Plusieurs éléments ont conduit à cette évolution thérapeutique :
le traitement universel pour tous les patients, qui conduit à traiter plus tôt, avec des CV plus faibles et des CD4 plus élevés ;
des molécules actuelles plus efficaces et plus robustes ;
la nécessité d’un traitement ARV à vie ;
la prise de conscience qu’aucune molécule n’est exempte d’effets secondaires à long terme.
Ainsi, la tendance actuelle est davantage à l’individualisation du traitement. Le dogme de la trithérapie devrait s’effacer devant celui d’une stratégie de contrôle de la réplication, quelles qu’en soient les modalités, pourvu que ce contrôle soit durable.
L’allègement se définit par une diminution de l’exposition de l’organisme aux ARV. Il ne doit pas être confondu avec une simplification du traitement, qui va comporter moins de comprimés ou moins de prises, comme par exemple avec une combinaison d’ARV en prise unique.
Seules quelques médicaments validés dans des essais cliniques peuvent être utilisés à posologie réduite en trithérapie : l’efavirenz (Sustiva®) 400 mg, le darunavir (Prezista®) 400 mg ou encore l’atazanavir (Reyataz®) utilisé non boosté.
Plusieurs stratégies se sont révélées aussi efficaces que la poursuite d’une trithérapie pour le maintien du contrôle virologique et figurent dans les recommandations européennes :
Bithérapie DTG/3TC (Dovato®) : 1 comprimé /jour
Bithérapie DTG/RPV (Juluca®) : 1 comprimé /jour
Bithérapie CAB/RPV longue durée Vocabria ®, Rekambys ® IM
Bithérapie IP/3TC : DRV/r +3TC ; LPV/3TC ; ATV/3TC.
Ce type de stratégie, dont le but est une réduction de l’exposition aux médicaments, a été évalué dans plusieurs études pilotes. En Afrique du Sud l’essai Breather (cinq jours sur sept) et en France l’essai ANRS 4D vont montrer que des trithérapies comportant des prises quatre jours consécutifs sur sept (lundi-mardi-mercredi-jeudi) et le week-end off permettent de maintenir un excellent taux d’indétectabilité (>90%) (figure 2). Ces résultats vont être validés à plus large échelle dans l’essai comparatif randomisé QUATUOR chez plus de 600 patients, avec des taux de succès virologique équivalents pour la trithérapie quatre jours sur sept comparée à la trithérapie standard sept jours sur sept.
Largement utilisée dans certains centres ou par certains médecins, cette stratégie quatre jours sur sept recueille les faveurs des patients qui disposent d’un long week-end end sans TARV ! Elle réduit de 40% l’exposition aux molécules et le coût de la thérapie sans mettre en péril la suppression virologique.
L’objectif permanent du TARV étant la suppression virologique, avec maintien d’une CV <50 copies/ml dans le sang, il faut impérativement disposer de la mesure de cette CV pour surveiller l’efficacité du traitement.
En initiation de TARV, les objectifs sont les suivants :
À 1 mois du début : la CV doit avoir diminué de 2 log10, soit d’un facteur 100
À 3 mois être < 400 copies /ml
À 6 mois être < 50 copies/ml.
Exemple : Si CV ARN VIH avant traitement de 100 000 copies/mL, objectif attendu à 1 mois de TARV : CV 1 000 cp/mL maximum
Au cours du suivi : une fois acquise l’indétectabilité, mesure de la CV tous les 6 mois dans les pays sans restriction de ressources.
Dans certains cas de CV initiale très élevée, l’indétectabilité peut parfois n’être atteinte qu’au bout d’un an.
La mesure de la restauration immunitaire se fait à 3 et/ou 6 mois en fonction du niveau initial, puis une fois par an.
Alors que les traitements actuellement utilisés permettent de contrôler la réplication virale (> 90% des cas), la proportion de patients en échec de TARV est encore beaucoup trop importante, en particulier dans les pays du Sud.
L’échec thérapeutique doit être prévenu à chaque étape du suivi thérapeutique pour empêcher l’émergence de la résistance et la poursuite de la transmission. Il n’y a pas de prévention possible de l’échec sans accès large à la CV, indispensable outil du traitement. La mesure des concentrations plasmatiques des ARV à l’échec est un outil précieux dont l’usage devrait être développé plus largement.
Les conséquences de l’échec sont nombreuses : échec clinique, échec de la prévention de la transmission, échec avec diffusion de la résistance, échec au plan économique avec un traitement qui coûte et ne fonctionne pas. L’éducation des soignants et des patients, la nécessaire implication des pouvoirs publics pour garantir l’accès aux outils du succès – médicaments efficaces et charge virale – devraient permettre d’atteindre les objectifs parfaitement réalistes de 90 % des patients traités en succès virologique.
L’échec virologique résulte toujours d’une inhibition insuffisante de la réplication virale, due soit :
à un défaut d’observance ;
à une posologie de médicaments inadéquate ;
à des interactions médicamenteuses abaissant les concentrations des ARV ;
à une résistance existante vis-à-vis d’un ou de plusieurs médicaments ARV.
En première ligne de traitement, en dehors d’une résistance primaire du virus, c’est habituellement une observance défaillante qui est à l’origine de l’échec virologique. Plus tard, alors que les résistances s’accumulent, le TARV vient à manquer de puissance et ne peut pas contrôler la réplication, quand bien même le patient est observant.
Si la CV est détectable, il peut s’agir :
soit d’une réponse insuffisante à un traitement de première ligne, devant faire évoquer un défaut d’observance ou une résistance. En cas de CV initiale très élevée, l’obtention de l’indétectabilité au seuil de 50 copies/ml peut nécessiter plus de temps, et une CV habituellement < 200 copies/ml peut perdurer plus de 12 mois ;
soit d’un rebond virologique après une période de succès virologique confirmé sur deux prélèvements consécutifs (à distinguer d’un blip).
C’est une étape essentielle qui doit préciser les différentes molécules reçues avec leur impact respectif en termes d’efficacité virologique, immunologique, leur tolérance et les motifs d’arrêts éventuels. En l’absence de génotype de résistance disponible, cette analyse permet de faire des hypothèses sur les mutations de résistance possibles. L’existence d’un dossier patient informatisé et/ou l’inclusion des patients dans une cohorte, qui permettent de disposer de toutes ces informations cumulées au cours du temps, facilitent cette analyse.
Évaluer l’adhésion et l’observance du patient au TARV est une étape fondamentale. Même si les traitements se sont simplifiés et sont mieux tolérés, la difficulté pour certaines personnes d’accepter leur infection et par là-même leur traitement, la lassitude vis-à-vis d’un traitement à prendre à vie, l’existence de manifestations minimes d’intolérance, mais aussi tous les incidents ou les accidents de la vie (rupture, décès, chômage, voyage…) constituent autant de circonstances qui peuvent à un moment faire basculer un patient dans une rupture de soins. Dans de nombreux pays, au Sud en particulier, les problèmes de stigmatisation sociale, l’absence de partage du statut sérologique avec le partenaire ou l’entourage, l’éloignement des centres de dispensation des médicaments, la précarité sont des facteurs majeurs de non-observance. Le rôle du médecin en consultation ou de tout autre professionnel de santé est de savoir dépister de telles difficultés.
Cette mesure des concentrations plasmatiques des molécules ARV permet d’identifier si un sous-dosage peut expliquer dans l’échec virologique : des concentrations inexistantes ou extrêmement basses permettent d’affirmer la non-prise des médicaments ; des concentrations basses peuvent, outre une mauvaise observance, être liées soit à une interaction avec un autre médicament soit une prise inadéquate.
Les tests de résistance dits génotypiques vont permettre de faire le bilan des mutations de résistance sur les virus présents dans le sang (cf. chapitre « Résistance du VIH aux antirétroviraux »).
Schématiquement, l’ARN viral plasmatique est séquencé et « observé » à la loupe de la biologie moléculaire pour identifier s’il existe des mutations vis-à-vis des médicaments ARV les rendant partiellement ou entièrement résistants.
Ces tests requièrent une expertise en biologie moléculaire ; coûteux, ils ne sont pas, en pratique, accessibles dans de nombreuses régions du monde.
L’analyse de l’échec permet d’envisager les actions suivantes :
En cas de défaut d’observance (si possible attesté par le dosage des ARV) :
Sans intolérance : reprendre l’éducation du patient vis-à-vis du TARV ;
Par intolérance à un médicament : identification et arrêt du médicament en cause pour le remplacer, soit dans la même classe thérapeutique, soit dans une classe nouvelle.
Si pas de défaut d’observance, attesté par dosage des médicaments dans le sang :
En fonction du génotype de résistance, idéalement un TARV doit comporter au moins deux molécules pleinement sensibles. En l’absence de pression médicamenteuse d’une classe donnée, des mutations acquises dans le passé peuvent ne pas être retrouvées dans le génotype ARN VIH réalisé au moment de l’échec. Il faut considérer les données cumulées des génotypes interprétés selon l’algorithme et/ou l’histoire immuno-viro-thérapeutique pour estimer le profil de la résistance accumulée ;
Cas particulier de la lamivudine : malgré la présence de mutations de résistance (M184V), le 3TC garde une certaine efficacité et peut-être maintenu dans le traitement ultérieur.
La gestion d’une situation d’échec est généralement plus difficile au Sud : l’accès à la CV y est plus difficile, avec des délais de réalisation des examens fluctuant selon la disponibilité des appareils, des réactifs, des ressources humaines, et avec une faible accessibilité au génotype de résistance. Pourtant, les enjeux sont les mêmes : obtenir le statut d’indétectabilité qui garantit la qualité de vie, la non-transmission et limite l’émergence de résistance. Moins on a de molécules disponibles, plus elles sont précieuses et doivent être préservées. Seule la CV accessible et disponible rapidement assure une telle sécurité.
Les stratégies ARV recommandées permettent le contrôle de la réplication virale dans plus de 90% des cas si elles sont adaptées au virus du patient, accessibles et prises de façon adéquate par le patient.
Le monitorage de leur efficacité ne peut se faire qu’avec la mesure de la charge virale.
Les violences basées sur le genre englobent tous les actes, comportements ou attitudes violents commis à l’encontre d’une personne en raison de son identité de genre, réelle ou supposée. Elles sont le plus souvent dirigées à l’encontre des femmes, du fait de normes de société qui perpétuent les inégalités entre les sexes et de la persistance de traditions néfastes.
Cependant des violences s’exercent aussi sur les personnes transgenres : 85% des personnes transgenres en sont victimes. Les femmes trans en sont les principales victimes. SOS Homophobie rapporte que les agressions transphobes ont augmenté de 27% par rapport à 2021. Rapport de l'observatoire des violences et discriminations 2022 - 2023 (association Acceptess-T) :
Ces violences peuvent prendre différentes formes :
Violences physiques : il peut s’agir de coups, blessures, morsures, brûlures, fractures, sans oublier leur forme ultime qui aboutit au décès, le plus souvent par arme à feu, arme blanche ou strangulation. On parle désormais de féminicide, mot entré depuis peu dans le vocabulaire courant et qui a le mérite de mieux comptabiliser les décès en lien avec le sexe de la victime.
On peut en rapprocher les foeticides de filles, à savoir le fait d’éliminer un fœtus fille dans le ventre de sa mère parce que l’échographie a montré qu’’il était de sexe féminin, et que dans de nombreuses cultures, avoir une fille est une mauvaise nouvelle. Ou encore les infanticides de filles, tuées à la naissance à cause de leur sexe.
Le législateur reconnait aujourd’hui une nouvelle forme de féminicide en lien avec des violences : il s’agit du suicide forcé lorsque la victime, totalement broyée par la violence de son agresseur, ne voit pas d’autre issue pour y échapper que la mort. Cette reconnaissance aboutit à tripler le nombre de décès attribuables à la violence d’un conjoint, puisqu’on estime qu’il y a en France environ 130 féminicides par an et 250 suicides forcés.
Violences verbales : ces violences visent à humilier la personne et à lui ôter toute estime d’elle-même, par des remarques qui la rabaissent, des insultes, des crachats. Les victimes estiment que ces violences, invisibles car elles ne laissent aucune trace, sont plus difficiles à supporter que les violences physiques car personne ne peut les voir et de ce fait, les victimes n’osent pas en parler et sont difficilement crues.
Violences psychologiques : elles précèdent en général les violences physiques et sont les plus fréquentes. Elles conduisent à détruire la personnalité de la victime, à la faire douter d’elle-même, à se croire folle et stupide, incapable par exemple de s’occuper de ses enfants. C’est une forme de manipulation à laquelle on peut rattacher le harcèlement sous toutes ses formes, notamment le cyber harcèlement qui s’appuie sur les nouvelles technologies pour augmenter son impact : installer un logiciel espion dans le téléphone de sa conjointe, surveiller ses mails, l’humilier au travers des réseaux sociaux ; mais aussi lui envoyer des messages et photos à caractère sexistes (dick pics, photos du pénis) ou diffuser des images intimes d’elle sans son consentement.
Le contrôle coercitif est une forme de violence, où tout est mis en place pour contrôler la vie de la victime, ses déplacements, ses choix, ses dépenses, sa tenue, son maquillage, et même sa contraception.
Violences sexuelles : qu’il s’agisse de harcèlement sexuel, d’agressions sexuelles ou de viols, les victimes en sont le plus souvent des filles ou des femmes.
On différencie les agressions sexuelles des viols qui impliquent une pénétration, qu’elle soit vaginale, anale ou buccale. Rappelons que le viol est un crime, qui se juge au pénal.
Le fait de subir des violences sexuelles dans un cadre familial, censé sécuriser et protéger les personnes, est un élément aggravant, et le viol conjugal est reconnu depuis 2010.
L’inceste occupe une place à part, notamment du fait de la découverte ces dernières années de son caractère massif et parfois transgénérationnel. Les statistiques révèlent que les garçons sont plus touchés que les filles par cette violence.
Enfin, les mutilations sexuelles féminines peuvent s’observer aujourd’hui dans toutes les régions du monde, du fait des migrations.
Les traditions néfastes et les pratiques discriminatoires implantées de longue date, au point que certaines cultures et sociétés finissent par les considérer comme acceptables et ne les remettent jamais en question, font le lit de multiples violences. Elles reflètent des valeurs profondément ancrées et une perception des filles comme étant inférieures aux hommes, ce qui les dévalorise et bafoue leur liberté de disposer de leur vie et de leur corps. Qu’il s’agisse de mariage forcé, de mutilations génitales, de repassage ou de bandage des seins, d’injonctions à se reproduire ou de crimes d’honneur, ce sont les filles qui payent le plus lourd tribut.
Une évolution sociétale, partout dans le monde, est indispensable. L’éducation des garçons est essentielle car la violence basée sur le genre la plus banale dont sont victimes les garçons est incontestablement le modèle de virilité, que l’on qualifie aujourd’hui de masculinité toxique, qui leur est imposé. Ce modèle qui les oblige à être forts, les coupe de leurs émotions et leur fait croire qu’ils ont un droit de vie et de mort sur leurs compagnes contribue très largement à pérenniser les violences faites aux femmes.
L’obligation d’arrêter les pratiques néfastes est explicitement mentionnée dans plusieurs traités internationaux de droits de l’Homme. La Convention sur les droits de l’enfant établit l’obligation pour les Etats de “prendre les mesures appropriées et efficaces en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants.”
De même, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes établit que les Etats doivent “prendre toutes les mesures appropriées, y compris des mesures législatives, pour modifier ou abolir les lois actuelles, les règles, coutumes et pratiques qui constituent une discrimination à l’égard des femmes”.
Le cinquième objectif pour le développement durable établi par les Nations Unies prévoit l’égalité des sexes à l’horizon de 2030. Nous ne serons certainement pas au rendez-vous !
Il est important de savoir que de nombreuses idées reçues persistent dans nos sociétés au sujet des violences sexuelles. Voici les principales :
La majorité des viols ou agressions sexuelles sont commis par un inconnu, durant la nuit, dans un lieu public et sous la menace d’une arme.
Attention : il ne suffit pas de parler, encore faut-il être entendue (cf film d’information : la conspiration des oreilles bouchées)
Dans le monde, on estime que 736 millions de femmes - soit près d’une sur trois - ont subi au moins une fois des violences physiques et/ou sexuelles de la part d’un partenaire intime, et/ou des violences sexuelles de la part d’une autre personne (30 pour cent des femmes de plus de 15 ans). Ce chiffre ne tient pas compte du harcèlement sexuel. Les taux de dépression, d’avortement et de contamination par le VIH sont plus élevés chez les femmes ayant subi ce type de violence, par rapport aux femmes qui ne l’ont pas subi, ainsi que d’autres problèmes de santé qui peuvent durer encore longtemps après que les violences ont cessé.
La plupart des violences contre les femmes sont perpétrées par le mari ou le partenaire intime actuel ou passé. Plus de 640 millions de femmes âgées de plus de 15 ans ont été confrontées à la violence perpétrée par leur partenaire intime (26 pour cent des femmes âgées de 15 ans et plus).
Il existe des premières preuves d’une intensification de la violence contre les femmes et les filles à travers le monde pendant la pandémie de Covid-19. Les données des rapports d’utilisation des services dans différents pays ont montré une augmentation importante des cas de violence domestique signalés aux lignes d’écoute, aux refuges et abris pour femmes et à la police. Les appels aux lignes d’écoute ont quintuplé dans certains pays. D’autres pays, cependant, ont observé une diminution du nombre d’incidents de violence domestique signalés, soulignant les défis en termes d’accessibilité et de disponibilité pendant les confinements et autres mesures de distanciation sociale.
Moins de 40 pour cent des femmes qui subissent des violences demandent de l’aide sous une forme ou une autre. Dans la majorité des pays disposant de données sur ce sujet, parmi les femmes qui demandent de l’aide, la plupart se tournent vers leur famille ou leurs ami·e·s, et très peu vont vers des institutions officielles telles que la police et les services de santé. De fait, moins de 10 pour cent de celles qui demandent de l’aide font appel à la police.
Au moins 158 pays ont promulgué des lois sur la violence domestique et 141 disposent de lois sur le harcèlement sexuel au travail.
Cependant, même lorsque de telles lois existent, cela ne signifie pas forcément qu’elles se conforment aux normes et recommandations internationales, ni qu’elles sont appliquées. En 2020, le Koweït et Madagascar ont introduit pour la première fois une législation spécifique et complète sur la violence conjugale.
Une analyse régionale des enquêtes sur la santé des femmes menée dans cinq États membres de la CARICOM – Grenade, Guyana, Jamaïque, Suriname et Trinité-et-Tobago – de 2016 à 2019 a révélé que les femmes âgées de 15 à 64 ans qui étaient en couple et qui avaient des attitudes et des comportements qui renforcent la position dominante des hommes sur les femmes et perpétuent l’inégalité entre les sexes étaient plus susceptibles d’avoir été confrontées à la violence conjugale au moins une fois dans leur vie et au cours des douze derniers mois.
Les comportements destinés à contrôler le corps des femmes, leur autonomie et leurs contacts avec les autres sont également fortement corrélés à une expérience accrue de la violence conjugale.
Les violences faites aux femmes ont été déclarées grande cause du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, au cours duquel s’est tenu un « Grenelle des violences conjugales ».
Parmi les actions envisagées, on retrouve le soutien à la création de structures dédiées à la prise en charge médico-psycho-sociale des victimes, sur le modèle de la Maison des femmes de Saint-Denis. Un dépôt de plainte est organisé sur place avec la participation de policiers ou de gendarmes volontaires. Une offre de soins spécifique est dédiée aux viols et violences sexuelles de moins de 5 jours. En effet, durant cette période, on peut encore retrouver des éléments de preuve (sperme, peau, cheveux, et toute source d’ADN du violeur) et établir un certificat de coups et blessures argumenté, facilitant ainsi le dépôt de plainte et le travail de la justice.
L'Espagne fait figure de pionnière dans la lutte contre les violences conjugales, par l'arsenal législatif et les financements déployés.
Selon ONU Femmes, l’Espagne bénéficie d’une des lois les plus protectrices dans le monde. Une loi-cadre intitulée : « Mesure de protection intégrale contre les violences conjugales » a été votée en 2004. Elle a été complétée en 2017 par une loi « pacte d’État » contenant 290 mesures interministérielles.
Ce Pacte d'État sur les Violences faites aux femmes est doté d'un budget d'1 milliard d'euros supplémentaire en plus d’un budget déjà conséquent réparti entre l’État, communautés autonomes et les municipalités.
Le nombre de féminicides a baissé de 25 % depuis 2004 en Espagne. L’Espagne délivre également 17 fois plus d’ordonnances de protection que la France et dispose de 33 % d’hébergement spécialisé supplémentaire.
Quelques ressources :
3919 pour les victimes de violences conjugales
119 pour les violences faites aux enfants
114 par SMS pour les personnes malentendantes
Centres d’informations sur les droits des femmes et des familles : CIDFF
Fédération d’associations France Victimes
Association Du côté des femmes
Women for women France
Association Contre les violences faites aux mineurs :
Association Face à l’inceste
CIIVISE (Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants)
CPIV (Centre du Psychotrauma de l’Institut de Victimologie)
La vulve est un organe comprenant le mont du pubis, les grandes lèvres ou lèvres externes et les petites lèvres ou lèvres internes, le vestibule au sein duquel les orifices vaginal et urinaire se trouvent, le clitoris et les glandes vulvaires. Le clitoris est un organe de 10-12 cm au repos constitué de tissu tumescent, à cheval de l’urètre et du vagin. Il est l’homologue embryologique du pénis et se compose d’un gland, seule partie visible au niveau de la vulve, un corps, un coude (ou genou) et deux piliers (crura) au-dessous desquels se trouvent les bulbes, appelés par certains vestibulaires et d’autres clitoridiens. Le gland est recouvert par le prépuce.
Le clitoris est un organe sensitif, innervé par les nerfs dorsaux du clitoris. Plus de 10 000 terminaisons nerveuses ont été récemment comptées au niveau de cet organe, qui est constitué de tissus composés par plusieurs petites cavités capables de s’engorger de sang lors de l’excitation sexuelle : les corps spongieux (les bulbes) et les corps caverneux (les piliers), qui communiquent entre eux à travers des réseaux veineux.
Les mutilations génitales féminines ou excisions (MGF/E) sont définies par l’Organisation Mondiale de la Santé comme « toutes les interventions aboutissant à une ablation totale ou partielle » de la vulve ou « toute autre mutilation des organes génitaux féminins pratiquée à des fins non médicales ». Les autres mots utilisés pour appeler ces pratiques sont l’excision, « être coupée » ou encore circoncision féminine.
Il existe quatre types de MGF définis par l’OMS (images diffusées avec permission de l’OMS) :
Type 1: l’ablation du prépuce et/ou du gland clitoridien (Type 1a) et éventuellement du corps du clitoris (Type 1a)
Type 2, l’excision : l’excision des lèvres internes et du gland/corps clitoridien
Type 3, l’infibulation : la fermeture de la vulve à travers l’apposition après excision des lèvres internes et/ou externes, avec ou sans excision du clitoris
Type 4, toutes les autres MGF (piercing, piqure du clitoris, stretching des lèvres, incision du prépuce ou du gland du clitoris, etc.)
Si le type 3 (environ 15% des MGF/E) est assez facile à diagnostiquer, les types 1, 2 et 4 sont parfois difficiles à distinguer de variations anatomiques comme, par exemple, des lèvres internes de petite taille, ou d’autres conditions comme la synéchie des lèvres internes.
Un atlas photographique est disponible en accès libre sur ce lien :
Les MGF/E sont une pratique traditionnelle largement répandue dans le Monde puisqu’on estime à plus de 200 millions le nombre actuel de femmes et filles concernées. Elles concernent certains pays d’Afrique subsaharienne, du Moyen-Orient, d’Asie du Sud-Est, notamment l’Indonésie et l’Inde, et les pays d’immigration (Europe, Canada, Etats-Unis, Australie). Elles sont parfois médicalisées, c’est-à-dire effectuées par du personnel de santé ou en milieu sanitaire.
Aujourd’hui en France, les MGF/E touchent des personnes migrantes et des filles et des femmes nées en France de parent(s) originaire(s) de pays où les MGF/E sont pratiquées.
Il a été montré récemment que beaucoup de familles qui ont migré en Europe abandonnent la pratique et aussi que dans certains pays à haute prévalence, les taux de MGF/E diminuent avec le changement générationnel, les campagnes d’information et de prévention et les lois interdisant la pratique.
Cependant, les MGF/E peuvent être pratiquées lors d’un retour au pays pour les vacances notamment, même si les parents sont opposés à la pratique. Tous les pays du Monde sont donc concernés et doivent s’impliquer dans la prévention de la pratique et de ses conséquences.
Les MGF/E sont illégales dans plus de 38 pays d’Afrique. Au Sénégal par exemple, des programmes de lutte existent depuis les années 1970. En 1999, la loi a précisé que la pratique est punie de 6 mois à 5 ans de prison pour l’exciseuse ou les parents, toujours 5 ans si médicalisée et de travaux forcés à perpétuité en cas de décès de l’enfant. Malgré cela, entre 1999 et 2018, seules huit affaires ont été jugées. A ce jour, 23% des femmes et filles au Sénégal sont excisées, soit 2 millions de personnes. Les familles n’osent pas toujours avoir recours à la police de peur d’être jugées ou stigmatisées, ou bien qu’on ne les écoute pas.
En France, les MGF/E constituent un crime depuis 1983. La loi s’applique pour tous les enfants français, que la mutilation ait lieu en France ou à l’étranger. La sanction est de 15 ans de réclusion criminelle et 150 000 euros d’amende pour la personne pratiquant l’acte. Dans certaines situations, les parents peuvent être incriminés, notamment s’ils sont informés sur la Loi et qu’ils pratiquent une excision sur leurs enfants. Les professionnel.le.s de santé constatant une excision sont tenus de réaliser un signalement auprès du Procureur de la République. En pratique, très peu de signalements sont réalisés.
Malgré les lois, les MGF/E perdurent car cela est au-delà de la norme juridique : il s’agit d’une norme sociale, une pratique traditionnelle imposée aux familles et aux enfants. Cela peut-être garant d’un bon mariage pour certaines filles et familles, parfois signe de pureté, virginité prénuptiale, propreté, beauté et aptitude à la prière selon certains. Cependant, l’excision n’est prônée par aucun texte religieux et notamment pas par le Coran contrairement à ce qui est parfois dit. Seule la branche Dawoodi Bohra de l’islam chiite considère la MGF/E appelée khatna ainsi que la circoncision masculine comme religieuses.
Les conséquences psychologiques, physiques et sexuelles sont différentes selon le type, les modalités et l’âge auquel la MGF/E a été pratiquée.
Certaines personnes disent ne pas avoir de problème lié à la MGF/E, ont développé des stratégies efficaces pour surmonter l’ancien traumatisme et ne ressentent pas le besoin d’être accompagnées par des professionnel.les de santé. D’autres décrivent des complications ou souhaitent des informations sur ce qui leur est arrivé malgré l’absence de complications.
Chez l’enfant, il existe des complications aiguës au moment de l’excision (hémorragie, infection, douleur, traumatisme psychologique …) et des complications chroniques : dysuries, infections urinaires et gynécologiques, manque de confiance en soi, cauchemars où on revit son excision, anxiété. Les complications chez les adolescentes peuvent être des douleurs pendant les règles qui parfois entrainent des absences prolongées à l’école, des infections urinaires, la peur d’aborder les premières relations amoureuses, de premiers rapports sexuels difficiles voire impossibles en cas d’infibulation.
Chez l’adulte, les complications sont les douleurs au niveau de la cicatrice avec une sensation de picotement, de grattage, de frottement des vêtements sur la peau.
Il peut y avoir des infections urinaires ou vaginales, une difficulté à uriner, des complications à l’accouchement surtout pour les MGF/E de type 3.
Les MGF/E n’entrainent pas de problème d’infertilité mais la personne peut présenter des douleurs pendant les rapports sexuels, ce qui va entraver une sexualité épanouie, ou des infections génitales chroniques qui se compliquent d’une infertilité.
Des dysfonctions sexuelles du désir, plaisir, excitation et orgasme peuvent aussi exister ainsi que des complications psychologiques liées au traumatisme de l’excision (cauchemars, flash-backs, dépression, trouble anxieux).
Il est important de briser le tabou.
Beaucoup de femmes et filles sont concernées dans le Monde, et beaucoup d’hommes aussi ne souhaitent pas que leurs femmes et filles subissent une excision. Peu osent en parler avec leurs proches, leurs maris, leurs familles.
Les communautés, les politiques des pays, les soignants doivent être informés et pouvoir orienter et soutenir les familles.
Le Burkina Faso est un pays dans lequel la pratique a diminué fortement ces dernières années grâce aux efforts conjoints de l’État et de professionnel.le.s de santé.
Il est important pour les professionnel.le.s d’être formé.e.s sur cette question et notamment de travailler sur les outils de communication. Les MGF/E constituent un sujet sensible puisqu’il touche à l’intimité et sexualité, à la violence et aux traditions qui peuvent différer selon les communautés.
Comme pour d’autres sujets de santé sexuelle, le/la professionnel.le de santé doit pouvoir travailler sa posture et avoir suffisamment de connaissances théoriques pour se sentir lui/elle-même à l’aise pour aborder le sujet. Il/elle devra s’interroger avant tout sur ses propres représentations des MGF/E et sur ses croyances. Les mettre en lumière lui permettra de les mettre de côté et d’accompagner les familles avec professionnalisme.
Trop souvent, ce sont les professionnel.le.s qui n’osent pas en parler mais les femmes concernées sont demandeuses de briser le tabou, de poser des questions et d’avoir de l’information sur le sujet.
Il est important d’adopter une posture bienveillante, non jugeante et de demander le consentement de la personne pour aborder le sujet avec elle.
L’anamnèse sera adaptée à l’intention d’accompagnement de la personne : est-ce que je veux faire passer un message de prévention pour les enfants à l’occasion d’un voyage ? Est-ce que je veux savoir si la femme que j’ai en face de moi est excisée et si cela est un problème pour elle et si elle souhaite être orientée ? Est-ce que je voudrais l’informer des possibilités d’accompagnement ? Est-ce que je souhaite informer cette famille sur la Loi ? En fonction de cela, je mènerai mon anamnèse, éventuellement mon examen clinique si cela a un intérêt pour la femme, etc.
De nombreux outils peuvent être utilisés comme une carte de la répartition épidémiologique, des flyers d’information, des dessins de vulves et MGF/E, des vulves en silicone.
Pour réaliser un message de prévention, le/a professionnel.le peut évaluer le risque en posant la question directement aux parents et en demandant à la mère si elle-même est concernée et/ou au père si il est originaire d’un groupe ethnique qui pratique la MGF/E, en s’appuyant par exemple sur une carte de répartition épidémiologique comme celle présentée dans l’article.
Si la réponse est oui, il/elle pourra lui demander si c’est un problème pour elle et si elle est désireuse ou non d’un accompagnement. Toutes les femmes ne sont pas intéressées par un accompagnement car certaines n’ont pas de complications identifiées liées à la MGF/E.. Néanmoins, le/a professionnel.le ouvre le dialogue et transmet une information dont elle se saisira ou non.
Dans un second temps, il/elle pourra poser la question pour l’enfant et l’ensemble de la fratrie. Dans certains pays et notamment la France, si le/la professionnel.le estime qu’il existe un risque de MGF/E chez une enfant avant un départ en vacances par exemple, il/elle réalisera un signalement de l’enfant aux autorités de protection de l’enfance afin que les parents soient reçus, reçoivent un rappel à la loi et que l’enfant soit examinée avant le départ et au retour par les autorités compétentes.
L’accueil et l’information respectueux et professionnels sont le point de départ.
Les femmes et filles concernées, tout comme leurs partenaires et entourage sont souvent intéressé.es par des informations sur leur anatomie et leur santé. En fonction du type de MGF/E, des besoins et d’éventuelles complications, les personnes seront orientées pour leur prise en charge. Il est primordial de rester centré sur la demande et les besoins des personnes.
Les accompagnements proposés dans les structures spécialisées ont une démarche holistique c’est-à-dire pluriprofessionnelle, avec psychologues et psychiatres formés sur le traumatisme, sexologues, gynécologues, urologues, et chirurgien.ne.s.
La chirurgie de désinfibulation (ouverture de l’infibulation avec ré-exposition du vestibule et donc des orifices vaginal et urinaire) améliore et souvent résout les problèmes génito-urinaires, sexuels et obstétricaux. Elle peut être effectuée à tout moment de la vie de la personne sous anesthésie locale, loco-régionale ou générale, y compris pendant la grossesse et l’accouchement.
La chirurgie clitoridienne consiste à enlever la cicatrice sus-clitoridienne et exposer, régénérer et /ou réinnerver le corps du clitoris déjà présent sous la cicatrice. Elle est pratiquée sous anesthésie régionale ou générale, en ambulatoire le plus souvent. Un accompagnement psychosexuel est souvent systématiquement proposé pour améliorer la santé sexuelle et parce que le parcours chirurgical et la période post-opératoire peuvent rappeler le traumatisme de l’excision.
Voici deux films utilisés en pratique clinique et qui ont été élaboré par le GAMS Belgique (Groupe d’Abolition des Mutilations Sexuelles et mariage forcé) :
Celui-là présente l’accompagnement pluridisciplinaire proposé en France et en Belgique :
Celui-ci présente la désinfibulation :
En conclusion, les personnes qui ont vécu ou sont à risque d’une MGF/E sont présentes dans le monde entier. La MGF/E est une pratique traditionnelle qui s’inscrit dans le champ des violences faites aux femmes et aux enfants et fait partie d’une norme sociétale qui rend le combat pour certaines familles difficile. Les prfoessionnel.les de santé doivent être sensibilisé.es et formé.es pour aborder le sujet, accueillir les personnes concernées dans la bienveillance et la non-discrimination, prendre en charge les éventuelles complications et prévenir la pratique dans les générations futures.
Les messages clés
La lutte contre les MGF/E concerne tous les pays du Monde.
La pratique n’est pas limitée au continent africain.
Il peut exister des complications somatiques, sexologiques et psychologiques chez la femme et l’enfant et cela diffère d’une personne à l’autre.
Où trouver des outils ?
Planches anatomiques des organes génitaux externes
Organes génitaux externes en silicone
Carte épidémiologique, flyer patient, support de formation
Outils pour les professionnels et pour les familles
Ressources bibliographiques
A propos des complications
Sylla F, Moreau C, Andro A. A systematic review and meta-analysis of the consequences of female genital mutilation on maternal and perinatal health outcomes in European and African countries. BMJ Glob Health. 2020 Dec;5(12):e003307.
Binkova A, Uebelhart M, Dällenbach P, Boulvain M, Gayet-Ageron A, Abdulcadir J. Reprod Health. 2021 Feb 12;18(1):39.
O'Neill S, Pallitto C. The Consequences of Female Genital Mutilation on Psycho-Social Well-Being: A Systematic Review of Qualitative Research. Qual Health Res. 2021 Jul;31(9):1738-1750.
Concernant le signalement en France
A propos de focus groupes réalisés avec les femmes concernées
Azadi B, Tantet C, Sylla F, Andro A. Women who have undergone female genital mutilation/cutting's perceptions and experiences with healthcare providers in Paris. Cult Health Sex. 2022 Apr;24(4):583-596. doi: 10.1080/13691058.2021.1982010. Epub 2021 Nov 9. PMID: 34751634.
Conditions d’abandon de la pratique
Doucet MH, Delamou A, Manet H, Groleau D. Correction to: Au-delà de la volonté: les conditions d'empowerment nécessaires pour abandonner les mutilations génitales féminines à Conakry (Guinée), une ethnographie focalisée. Reprod Health. 2020 Jul 23;17(1):113.
Déconstruire les idées reçues
Reconnaitre les MGF : outils photo
Abdulcadir J, Catania L, Hindin MJ, Say L, Petignat P, Abdulcadir O. Female Genital Mutilation: A Visual Reference and Learning Tool for Health Care Professionals. Obstet Gynecol. 2016 Nov;128(5):958-963. doi: 10.1097/AOG.0000000000001686. PMID: 27741194.
Article guide sur la désinfibulation
Abdulcadir J, Marras S, Catania L, Abdulcadir O, Petignat P. Defibulation: A Visual Reference and Learning Tool. J Sex Med. 2018 Apr;15(4):601-611. doi: 10.1016/j.jsxm.2018.01.010. Epub 2018 Feb 17. PMID: 29463476.
Atlas sur les MGF/E chez l’enfant et adolescent
Plusieurs virus ont pour cible le foie. On distingue cinq virus responsables d’hépatites : virus A (VHA), virus B (VHB), virus C (VHC), virus D ou delta (VHD) et virus E (VHE).
L’hépatite est une inflammation du foie, aiguë ou chronique, source de problèmes de santé importants comme la cirrhose ou le cancer du foie.
Ces virus présentent des caractéristiques très différentes, notamment en ce qui concerne les modes de transmission, la gravité de la maladie, la répartition géographique et les méthodes de prévention.
Ainsi, seules les hépatites virales B, C et D contribuent au fardeau mondial des pathologies chroniques et des cancers du foie.
Les hépatites virales constituent un problème de santé publique international, comparable à celui posé par d’autres grandes maladies transmissibles comme le VIH, la tuberculose ou le paludisme.
L’accompagnement des personnes trans est aujourd’hui en pleine mutation. On passe d’un accompagnement très standardisé à un accompagnement s’adaptant au mieux à la demande de la personne trans. On aura donc une très grande diversité de parcours.
Certains vont réaliser un parcours essentiellement « social / juridique » avec une demande centrée sur le changement d’identité. D’autres souhaiteront un traitement hormonal et d’autres enfin demanderont des traitements chirurgicaux.
Cette grande diversité des demandes rend inadaptées les anciennes prises en charge très protocolisées. Le mouvement a été initié en 2009 et dans les années qui ont suivi, par la sortie de la transidentité des ALD (affection longue durée) psy. Ce mouvement de dé-psychiatrisation de l’accompagnement des personnes trans a été entériné par la nouvelle Classification Internationale des maladies CIM 12 en 2021.
La transidentité n’est plus classée dans les maladies mentales mais dans les troubles de la sexualité, et le terme incongruence de genre a remplacé dysphorie de genre.
Cela ne veut pas dire que les personnes trans ne sont pas demandeuses d’accompagnement psy mais simplement que cet accompagnement psy ne leur sera plus imposé systématiquement. De même, la chirurgie ne sera pas rendue obligatoire pour l’obtention d’un changement d’identité.





D’établir que le contrôle maximal de la réplication virale, c’est-à-dire l’indétectabilité de la charge virale, permet la non-transmission du virus à une autre personne, qu’il s’agisse d’un adulte par voie sexuelle ou d’un enfant au cours de la grossesse, de l’accouchement ou de l’allaitement : U=U.
De protéger les personnes non infectées par la prise d’un traitement préventif (prophylaxie préexposition ou PrEP).
En 2004, la barre des 350 CD4 pour initier le TARV est franchie. Entre 350/mm3 et 500/mm3, les ARV peuvent être initiés en fonction du niveau de charge virale.
À la fin des années 2000, plusieurs études vont démontrer le caractère délétère du VIH non traité. Dans le même temps, arrivent de nouvelles molécules permettant de reconsidérer l’idée d’un contrôle plus précoce de l’infection. Les barres de valeur de CD4 exigibles pour l’initiation vont remonter progressivement. Ainsi, en 2010, en moins de quatre ans, le seuil situé entre 200 et 350 CD4/mm3 est passé à 350 CD4/mm3, puis à 500 CD4/mm3.
Puis est venu le traitement universel, quel que soit le niveau de CD4. Pour statuer de façon rigoureuse, ont été mis en place deux larges essais afin de comparer, chez des PVVIH ayant plus de 500 CD4/mm3, le traitement immédiat versus le traitement différé à moins de 500 /mm3. Les deux essais - TEMPRANO (ANRS 12136) en Afrique de l’Ouest et START dans trente-cinq pays - montrent une réduction du risque de morbidité sévère de 44 % chez les patients débutant précocement le TARV. Sur la base de ces résultats, l’OMS recommandera en 2015 que le TARV soit instauré chez toutes les PVVIH, quel que soit leur niveau de CD4.
Depuis 2017, l’OMS comme toutes les sociétés savantes nationales, encourage les prescripteurs à initier le TARV rapidement, c’est-à-dire dans les sept jours maximum après le diagnostic de l’infection par le VIH (site internet OMS guidelines). Il est même possible de démarrer le traitement immédiatement après confirmation du diagnostic, le même jour, chez les patients qui se sentent prêts.
Allègement thérapeutique : réduction du nombre de doses de médicaments ARV (par exemple 4 jours de traitement par semaine).
ATV : atazanavir – COBI ou c : cobicistat – DRV : darunavir – LPV : lopinavir RTV ou r : ritonavir
INI : Inhibiteurs d’intégrase
BIC : bictégravir – CAB : cabotégravir – DTG : dolutégravir – EVG : elvitégravir – RAL : raltégravir
Inhibiteur du CCR5
MVC : maraviroc
Blip : se définit par une valeur au-dessus de la limite de détection de la CV, encadrée de deux valeurs de CV indétectable. Il ne s’agit donc pas d’un échec virologique.
Échec clinique : survenue de manifestations cliniques liées au VIH (infections opportunistes ou tumeurs), habituellement dans un contexte d’échec virologique et immunologique et souvent dans un contexte de rupture de soins.
Échec immunologique : absence d’ascension des lymphocytes CD4 malgré un TARV efficace depuis au moins 6 mois. Fréquent en cas d’immunité très basse avant traitement. La remontée des lymphocytes CD4 peut être lente, cependant sans sur-risque de manifestations opportunistes lorsque la CV est contrôlée.
Observance : prise régulière de traitement selon la prescription médicale
L’échec thérapeutique doit être prévenu et traqué pour éviter de perdre des options thérapeutiques avec le développement de la résistance.
Les conditions de prise en charge
Populations
Traitement de préférence
Traitement alternatif
Adultes et adolescents
TDF/3TC (ou FTC)/DTG
TDF/3TC/EFV 400 mg
Enfants
ABC/3TC/DTG
ABC/3TC/LPV/r TAF/3TC (ou FTC)/DTG
Nouveau-nés
AZT (ouABC)/3TC/ALh
AZT/3TC/NVP
Les viols et agressions sexuelles sont dus à des pulsions sexuelles que l’agresseur ne peut pas maîtriser.
Faux ! Ce sont des stéréotypes sexistes qui véhiculent l’idée que la sexualité masculine est nécessairement violente et que les hommes ont des besoins incontrôlables qu’ils ont le droit d’exercer sur la femme. Les viols et agressions sexuelles sont des manifestations de pouvoir et n’ont rien à voir avec la sexualité et encore moins l’amour.
La victime doit apprendre à tourner la page, prendre sur elle et oublier ce qu’elle a subi.
Faux ! Bien souvent, lors d’une agression sexuelle, la victime se trouve en état de choc, ce qui paralyse tout activité de son cerveau. Elle se trouve alors dans l’incapacité de réagir de façon réfléchie, reste pétrifiée ou agit de façon automatique. Cet état provoque une surproduction d’hormones de stress (adrénaline et cortisol), ce qui comporte des risques pour la victime (au niveau cardiologique et/ou neurologique). Pour éviter cela, le cerveau provoque une « disjonction », qu’on nomme dissociation traumatique. La victime se sent « déconnectée » et assiste de façon passive à l’événement, comme s’il n’était pas réel. C’est parce qu’elles subissent des dissociations traumatiques que certaines victimes ont l’air très calmes et détachées, comme si rien ne s’était passé. Cela peut être déstabilisant pour les personnes qui les entourent (témoins, personnes à qui elles se seraient confiées, ou services de police si elles déposent plainte), et cela rend très difficile la détection de ces situations.
Dans tous les cas, il est fondamental :
que la victime soit aidée par des professionnels,
que la justice ait une part dans cette aide, même si son objet n’est pas tant le soutien aux victimes que la préservation de l’ordre public et la punition des auteurs.
Il est important de dire que correctement prise en charge, la victime peut surmonter son traumatisme et vivre une vie épanouie.
Et même si le corps n’oublie rien (titre d’un livre fondamental sur le trauma) on n’est pas forcément une victime pour la vie…
Si la victime parle de ce qui lui est arrivé, sa situation empirera.
Faux ! Pour réussir à surmonter un tel traumatisme, il est important d’en parler, que ce soit à un·e proche (ami·e, membre de la famille) ou à une oreille externe (service d’aide et/ou d’accompagnement, groupes de parole, psychologue, médecin et bien d’autres). Bien sûr, il n’est pas facile de s’ouvrir et d’exprimer cela, car en parler rend ces événements concrets. Cette démarche est encore plus difficile quand l’auteur est un proche, car la victime culpabilise d’autant plus, en se disant que, si elle dépose plainte, ce sera sa faute si cette personne risque d’aller en prison. Si un auteur risque la prison, ce n’est pas parce que la victime le dénonce, mais bien parce qu’il a commis un·des acte·s puni·s par la loi.
Une tenue trop sexy justifie-t-elle le viol ?
27 % des Français affirment que l'auteur d'un viol est moins responsable si la femme porte une tenue trop aguichante. Explication et déconstruction de la culture du viol par des lycéens : https://www.journaldeslycees.fr/actualite-jeunes/finistere/lycee-paul-serusier/une-tenue-trop-sexy-justifie-t-elle-le-violnbsp--,1099.html
(Source : Planning familial de Belgique)
En 2018, une femme sur sept a subi des violences physiques et/ou sexuelles de la part de son partenaire intime ou de son mari au cours des douze derniers mois (13 pour cent des femmes âgées de 15 à 49 ans). Ces chiffres ne reflètent pas l’impact de la pandémie de COVID-19, qui a augmenté les facteurs de risque des violences faites aux femmes.
Dans le monde, les violences faites aux femmes touchent de manière disproportionnée les pays et régions à faibles et moyens revenus. Trente-sept pour cent des femmes âgées de 15 à 49 ans vivant dans des pays classés par les Objectifs de Développement Durable comme « les moins développés » ont été confrontées à la violence perpétrée par le partenaire intime au cours des douze derniers mois – un taux sensiblement plus élevé que la moyenne mondiale de 13 %.
Dans le monde, 81 000 femmes et filles ont été tuées en 2020, dont environ 47 000 (58 %) par un partenaire intime ou un membre de la famille, ce qui équivaut à une femme ou une fille tuée toutes les 11 minutes dans son foyer. Dans 58 % des meurtres perpétrés par des partenaires intimes ou d'autres membres de la famille, la victime était une femme ou une fille.




Créer un espace d’écoute est indispensable pour recueillir le récit des personnes concernées et briser le tabou autour de cette pratique.
Les accompagnements spécialisés doivent être holistiques et pluriprofessionnels, pour prendre en charge la personne et pas seulement ses organes génitaux.












Quelques chiffres
Dans le monde, on estime actuellement que plus de deux milliards d’individus ont été en contact avec le virus de l’hépatite B (VHB) au cours de leur vie.
Alors que l’infection dans sa phase aiguë passe presque toujours inaperçue chez les enfants, elle persiste souvent pour évoluer vers une forme chronique.
Chez l’adulte, c’est le contraire ; même si l’infection aiguë provoque plus souvent des symptômes (fatigue, douleurs abdominales, jaunissement des yeux, urines foncées), elle a plutôt tendance à guérir spontanément dans la majorité des cas.
Le caractère chronique de cette infection est défini par la persistance du virus dans l’organisme pendant au moins six mois, et on estime à plus de 300 millions le nombre de personnes porteuses d’une infection chronique à VHB.
Mais seulement 10% des cas d’infection chronique par le virus de l’hépatite B sont diagnostiqués et 22% d’entre eux sont traités.
Plus de 686 000 personnes meurent dans le monde chaque année des suites d’une infection par l’hépatite B (de cirrhose ou de cancer du foie).
Répartition géographique de l’hépatite B
L’hépatite B chronique est inégalement répartie dans le monde : elle touche principalement le continent africain et la région du Pacifique occidental où plus de 6% des individus en sont atteints, contre une prévalence (fréquence) d’environ 3 à 4% au niveau mondial (Figure 1).
Ainsi en Afrique subsaharienne, beaucoup de pays présentent une prévalence d’hépatite B chronique élevée, supérieure à cette prévalence mondiale, notamment en Afrique Australe et de l’Est. Mais c’est en Afrique de l’Ouest et du centre (Côte d’Ivoire, Sénégal, Mali, Mauritanie, Niger, Nigéria, Cameroun, Gabon, Ghana) que la prévalence est la plus élevée, dépassant parfois les 10% de la population générale.
Dans la région du Pacifique ouest, certaines zones présentent même des prévalences supérieures à 15%, notamment dans les îles du Pacifique (îles Salomon, Vanuatu, Papouasie Nouvelle-Guinée …).
Dans le Sud-Est asiatique, la Chine et la Corée du Sud présentent des prévalences intermédiaires (4 à 6%) tandis que certains pays tels que le Laos et le Vietnam ont des prévalences entre 8 et 10%.
En France métropolitaine, la prévalence de l’infection par l’hépatite B est faible, estimée à moins de 1% de la population (soit moins de 300 000 personnes porteuses du virus), avec trois principales populations particulièrement vulnérables : les hommes qui ont des rapports sexuels avec d'autres hommes (HSH), les usagers de drogues injectables et les personnes originaires des zones de haute prévalence telle que l’Afrique subsaharienne.
Pourquoi cette répartition géographique inégale de l’hépatite B chronique dans le monde ?
Plusieurs facteurs l’expliquent en partie.
Dans les pays à ressources élevées, le renforcement des campagnes de vaccination, l’amélioration de la sécurité des produits transfusionnels combinés à des actions de préventions auprès des populations vulnérables ont entraîné une baisse très importante du nombre d’infection à VHB.
Dans les pays à ressources limitées où l’infection par le VHB est généralisée, d’autres facteurs sont associés à un risque plus important de contracter cette infection chronique, tels que le fait d’être un homme ou de vivre en milieu rural.
On constate néanmoins depuis les années 2000 un déploiement important de la vaccination contre l’hépatite B, avec actuellement plus de 90% des pays ayant intégré cette vaccination dans leur calendrier vaccinal au niveau national. Cela se traduit par une diminution de la prévalence de l’infection chronique à VHB déjà observée dans certains pays parmi les populations les plus jeunes ayant eu accès à cette vaccination.
On estime à environ 60 millions le nombre de personnes atteintes d’hépatite virale chronique C, soit presque 1% de la population mondiale (1,5 million environ de nouvelles infections survenant chaque année).
3,2 millions d’enfants et d’adolescents sont atteints d’une infection chronique par le virus de l’hépatite C.
Environ 290 000 personnes sont mortes d’une hépatite C dans le monde en 2019.
9 400 000 personnes sont sous traitement contre une infection chronique par le virus de l’hépatite C.
La prévalence varie selon les régions du monde ; de moins de 1% en Europe à plus de 2% dans certains pays à l’Est méditerranéen (notamment en Egypte).
Au-delà de ces différences régionales, il existe une forte hétérogénéité de prévalence selon les pays. Ainsi, six pays (Chine, Pakistan, Inde, Égypte, Russie et États-Unis) concentrent plus de la moitié des personnes infectées dans le monde.
En Europe, deux pays (Roumanie et Lettonie) ont des prévalences supérieures à 2% et la moitié des infections chroniques se trouvent dans trois pays (Italie, Roumanie et Espagne).
Plusieurs facteurs expliquent en partie ces différences entre pays et régions du monde :
L’usage de drogues injectables avec partage de seringues usagées constitue l’une des principales voies de contamination par le VHC. Ainsi, l’importance de la consommation de drogues injectables explique une part importante des épidémies d’infection à VHC, notamment en Europe de l’Est. En Europe, la majorité des nouvelles contaminations est liée à l’injection de drogues.
La seconde principale voie de contamination par le VHC correspond à un défaut d’asepsie lors de soins médicaux, notamment lors des injections. Ainsi, en Europe du Sud comme dans plusieurs pays à ressources limitées, l’utilisation de dispositifs médicaux insuffisamment stérilisés en milieu de soins a été responsable d’une part importante de cette épidémie.
Seules 20% des personnes vivant avec une hépatite chronique C ont connaissance de leur infection, soit 14 millions de personnes, avec de fortes disparités selon les régions du monde (moins de 10% en Afrique à plus du tiers en Europe et en Amérique).
Le nombre de décès attribuables à l’hépatite C, essentiellement par cancer du foie ou cirrhose, est de l’ordre de 300 000 par an. Ce nombre est en augmentation, notamment parce que, dans les pays à ressources limitées, une part importante des contaminations est survenue à la fin du siècle dernier.
En France, la prévalence de l’hépatite chronique C est estimée à environ 0,3% des adultes (soit à peu près 150 000 personnes) et tend à diminuer depuis une vingtaine d’années. Cette baisse du nombre de personnes infectées peut s’expliquer par plusieurs facteurs :
la guérison des personnes infectées, notamment grâce aux nouveaux traitements,
le décès d’un nombre n’important de personnes contaminées il y a plusieurs décennies, majoritairement par transfusion sanguine,
l’amélioration de la sécurité transfusionnelle et des mesures d’hygiène en milieu de soins,
le déploiement de mesures de prévention (distribution de seringues à usage unique) auprès des populations à risque (usagers de drogues injectables)
Ces deux virus se transmettent principalement :
par voie oro-fécale, par ingestion d’eau ou d’aliments contaminés par les matières fécales d’un sujet infecté. La maladie est courante dans les pays à revenu faible ou intermédiaire n’ayant qu’un accès limité aux services essentiels d’approvisionnement en eau, d’assainissement, d’hygiène et de santé ;
par contact physique étroit avec une personne infectée (par exemple, lors de rapports sexuels oro-anaux).
La transmission du VHB se produit par exposition au sang ou à d’autres liquides corporels (exsudat d’une plaie, sperme, secrétions vaginales ou salive) d’une personne infectée (Figure 2).
Les principaux modes de transmission incluent :
la transmission périnatale de la mère à l'enfant (TME) ;
la transmission horizontale du jeune enfant à l'enfant ;
la transmission sexuelle ;
l’infection iatrogène par exposition à des aiguilles, des seringues ou des produits sanguins contaminés.
Les principaux modes de transmission diffèrent géographiquement :
dans les zones où la prévalence de l’infection chronique à VHB est élevée, la plupart des transmissions se produisent au cours de la période périnatale ou durant la petite enfance (de 0 à 5 ans).
dans les régions de faible prévalence (< 2%), la transmission du VHB se produit principalement chez les adolescents et les adultes, souvent dans un contexte de comportements et pratiques à risque (partenaires sexuels multiples, usage de drogues par voie intraveineuse).
Le VHC se transmet par le sang :
par exposition au sang lors de pratiques d’injection à risque, de soins de santé à risque,
au cours de la transfusion de sang et de produits sanguins n’ayant pas fait l’objet d’un dépistage,
de la consommation de drogues par injection,
ou lors de pratiques sexuelles entraînant une exposition au sang.
Le virus de l’hépatite D a besoin de celui de l’hépatite B pour pouvoir se multiplier. Les voies de transmission du VHD sont très proches de celles du VHB. Il s’agit :
d’une co-infection : l’infection par le VHD se produit lorsqu’une personne est infectée simultanément par le VHB et le VHD,
d’une surinfection lorsque qu’une personne contracte le VHD après avoir été infectée au préalable par le VHB.
Dans les pays à forte prévalence, il semble que le mode de transmission soit majoritairement intrafamilial, mais les facteurs de transmission du VHD dans certaines régions endémiques, surtout en Afrique subsaharienne, restent méconnus.
La co-infection VHB-VHD est considérée comme la forme la plus grave d’hépatite virale chronique en raison de son évolution rapide vers la mort.
L’hépatite demeure une menace importante pour la santé publique en Afrique. Les progrès en matière de prévention, de diagnostic et de traitement ont été entravés entre 2019 et 2021, lors de la pandémie de COVID-19, en raison d’une mise en œuvre insuffisante des interventions relatives à l'hépatite.
L’hépatite virale est un problème de santé publique hautement endémique dans la région africaine, comparable à celui posé par d’autres grandes maladies transmissibles telles que l’infection à VIH, la tuberculose et le paludisme.
Les cinq virus de l’hépatite peuvent tous provoquer des maladies aiguës, mais le plus grand nombre de décès est imputable aux cancers et à la cirrhose du foie qui surviennent après des décennies chez les sujets atteints d’hépatite B ou d’hépatite C chronique.
Il n’existe pas actuellement de vaccin efficace contre l’hépatite C, mais un traitement médical qui aboutit à une guérison. Ces traitements sont encore trop peu utilisés en raison de leurs coûts.
Un vaccin permettant de prévenir l’hépatite E a été mis au point et homologué en Chine, mais il n’est pas encore disponible ailleurs. La prévention de l’hépatite D passe par la vaccination contre l’hépatite B, mais les taux de guérison sont faibles.
Hépatite
Transmission
Mode évolutif
Traitement
Vaccin
Zones de forte prévalence
A
Oro-fécale
Sang
Aiguë
Non nécessaire
Oui
Afrique subsaharienne (corrélation au niveau socio-économique)
B
Sang
Sexe
Mère-enfant
Organisation mondiale de la Santé (OMS). Journée mondiale contre l’hépatite 2022 https://www.who.int/fr/campaigns/world-hepatitis-day/2022
Organisation mondiale de la Santé (OMS). 91 millions d’Africains infectés par l’hépatite B ou C. https://www.afro.who.int/fr/news/91-millions-dafricains-infectes-par-lhepatite-b-ou-c
Organisation mondiale de la Santé (OMS). Principaux repères sur l’hépatite E https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-e
Organisation mondiale de la Santé (OMS). Principaux repères sur l’hépatite A https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-a
Organisation mondiale de la Santé (OMS). Principaux repères sur l’hépatite C https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-c
Organisation mondiale de la Santé (OMS). Principaux repères sur l’hépatite D https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-d
SOS Hépatites. Les modes de transmission des virus des hépatites. 2021. https://soshepatites.org/modes-de-contaminations

Mais on accompagne aussi des démarches non-binaires, où la demande n’est pas d’un accompagnement d’un genre à l’autre mais le souhait de vivre avec des caractéristiques appartenant aux deux genres. Dans ce chapitre ne seront traitées que les demandes binaires. A noter que les études récentes retrouvent entre 0,2 et 0,4% de la population se déclarant trans.
Il consiste en la mise en place d’une hormonothérapie permettant des modifications corporelles rapprochant la personne de son genre ressenti/souhaité. Nous aborderons les traitements masculinisants et féminisants.
Ce traitement comprend dans la majorité des cas la seule prescription de testostérone, qui aura deux effets : la suppression de la production d’oestrogènes et de certains de ses effets féminisants, ainsi qu’une androgénisation/masculinisation du corps.
Suppression des hormones du sexe d’origine
Surtout utilisée chez les mineurs, elle consiste à freiner la production d’estradiol (hormone féminine) et permet de supprimer les règles.
Les médicaments les plus utilisés sont les agonistes du GnRH qui s’administrent par voie injectable intramusculaire. Les formes « retard » permettent une injection/mois ou une injection/3 mois. Ils ne nécessitent pas de surveillance particulière.
Administration des hormones du sexe désiré
Il s’agit de l’administration de testostérone. La voie injectable intramusculaire est la plus utilisée, à la fréquence d’une injection toutes les 2 ou 3 semaines. Des doses réduites mais hebdomadaires permettent d’éviter des concentrations sanguines trop élevées pouvant être responsables de fluctuation de l’humeur et de poussées d’acné ou d’un excès de globules rouges.
Il existe une forme retard de testostérone en injection intramusculaire tous les 3 mois, mais elle n’est pas remboursée par l’assurance maladie en France. L’undécanoate de testostérone par voie orale nécessite des prises pluriquotidiennes et assure une androgénisation difficile à monitorer. Les voies transcutanées d’apport de testostérone en gels ou patchs sont aussi possibles pour éviter les injection,s mais ne sont pas prises en charge par l’assurance maladie.
Effets des traitements
La suppression de la sécrétion des oestrogènes permet l’arrêt des règles, ce qui a un effet très positif sur le plan psychologique pour les personnes FtM. Dans un certain nombre de cas on observe aussi une diminution du volume mammaire, ce qui facilitera la chirurgie.
La testostérone va permettre une masculinisation progressive du corps. Une pilosité de type masculin se développe, notamment sur le visage et le torse. Cependant, les effets de la testostérone sur la pilosité ne seront pas les mêmes chez tout le monde, comme chez les hommes cisgenre. Un développement musculaire va arriver progressivement ainsi qu’une hypertrophie clitoridienne (le clitoris hypertrophié est alors souvent appelé Dicklit, mot venant de la contraction des mots anglais dick : verge et clit : clitoris). La voix va devenir souvent plus rauque et une augmentation de la libido est souvent observée.
Surveillance du traitement hormonal
Elle sera adaptée aux modalités du traitement hormonal, comportant en général un bilan hormonal (LH, FSH, testostérone, estradiol, SHBG, prolactine), un bilan hépatique si besoin (transaminases, GGT, phosphatases alcalines), un bilan métabolique (glycémie, exploration d’une anomalie lipidique) et une numération globulaire.
Rythme de surveillance : tous les 3 mois dans la période de mise en place de l’hormonothérapie jusqu’à la fin du traitement chirurgical, puis tous les ans, le renouvellement semestriel du traitement hormonal pouvant alors être réalisé par le médecin traitant.
Suppression des hormones du sexe d’origine
Il s’agit de la suppression de la production de testostérone associée on non au blocage du récepteur aux androgènes. Les médicaments les plus utilisés sont aujourd’hui les agonistes du GnRH.
Les agonistes du GnRH sont antigonadotropes mais non antiandrogènes. Ils s’admininstrent par voie injectable intramusculaire, les formes « retard » permettant une injection/mois ou une injection/3 mois. Ils ne nécessitent pas de surveillance particulière.
L’acétate de cyprotérone est à la fois antigonadotrope et antiandrogène. Il s’administre par voie orale. Il comporte un risque d’intolérance hépatique nécessitant une surveillance du bilan hépatique. Il comporte en outre un risque de prise de poids, de phlébite et de méningiome surtout s’il est donné à une dose de plus de 25 mg par jour et pendant plus de 6 mois (le risque étant multiplié par plus de 20 au-delà d’une dose cumulée de 60 g, soit environ 5 ans de traitement à 50 mg/j).
On peut éventuellement prescrire seule ou en association de la spironolactone pour son rôle antiandrogène. Son effet anti-minéralo-corticoïde rend nécessaire la surveillance du potassium. On peut aussi prescrire du finasteride, inhibiteur de la conversion de la testostérone en dihydrotestostérone, son effet antiandrogénique étant plus spécifique sur la pilosité androgénodépendante et l’alopécie.
Administration des hormones du sexe désiré
Il s’agit de l’administration d’oestrogènes. L’estradiol 17-bêta est l’hormone naturelle. Il peut être administré par voie transcutanée sous forme de gel ou de patch. Cette voie, qui évite le passage hépatique, est plus physiologique. La voie orale est aussi utilisable. L’utilisation par voie musculaire est encore en cours d’évaluation mais pourrait être intéressante pour éviter la contrainte de la prise quotidienne. Un risque accru de thrombose veineuse est encore discuté mais semble faible.
L’éthinyl-estradiol est l’oestrogène artificiel des contraceptifs oraux, il est contre-indiqué en cas de tabagisme et de thrombophilie.
Effets des traitements
Parmi les effets très positifs mais souvent variables d’une femme trans à une autre, on observe le ralentissement de la pousse pilaire et un ralentissement de l’alopécie androgénique. Sur le plan psychique, certaines décrivent un apaisement qui est bienvenu et parfois une diminution de la libido qui peut gêner la reprise d’une sexualité et qui nécessite un temps d’adaptation durant lequel un accompagnement sexologique peut être intéressant. La diminution des érections est souvent bien acceptée. Sur le plan anatomique, on observe aussi une diminution de la consistance et du volume testiculaire ainsi qu’un développement mammaire (la croissance mammaire permet le plus souvent d’atteindre un bonnet A et parfois B).
Surveillance du traitement hormonal
Elle sera adaptée aux modalités du traitement hormonal, comportant en général un bilan hormonal (LH, FSH, testostérone, estradiol, SHBG, prolactine), un bilan hépatique (transaminases, GGT, phosphatases alcalines) et un bilan métabolique (glycémie, exploration d’une anomalie lipidique).
Une surveillance à long terme de la mammographie parait prudente chez le sujet avançant en âge. Le dosage du taux de PSA (antigène prostatique) peut être proposé mais l’interprétation du résultat chez une personne sans androgènes reste compliquée.
Il est important de donner une information la plus exhaustive possible et certains points doivent être bien compris comme tels : l’irréversibilité de certaines opérations, l’infertilité liée à l’ablation des gonades, l’impact sur la vie quotidienne en post-opératoire, les soins post-opératoires exigeants, le manque de données de suivi à long terme.
On s’assurera que ces points ont été bien intégrés par la personne demandeuse. Il faut aussi être vigilant sur les idées et connaissances acquises par ailleurs (internet…). Ces informations sont souvent pertinentes mais parfois inexactes et il faudra prendre le temps de donner des informations les plus contrôlées et objectives possibles.
On abordera les différentes étapes des chirurgies d’affirmation de genre selon l’ordre chronologique le plus souvent suivi par les personnes trans.
On rappellera que tous ces temps sont facultatifs et que la chirurgie doit répondre à la demande de la personne demandeuse.
L’augmentation mammaire peut être réalisée de deux façons :
par mise en place de prothèses. Il faut savoir toutefois que le traitement hormonal développe parfois les seins de manière presque suffisante et il est donc recommandé d’attendre 18 mois après le début de l’hormonothérapie avant de prendre une décision chirurgicale. Le taux de satisfaction est entre 75 et 95% avec un taux de complication entre 0 et 25%.
une nouvelle technique comme la greffe d’adipocytes (injection de graisse prélevée par liposuccion ailleurs sur le corps) est aujourd’hui en cours d’évaluation.
La vaginoplastie est un temps plus complexe. L’intervention comprend :
une orchidectomie bilatérale, une résection des corps caverneux au ras du pubis sur le bord desquels sera fixé le néo-clitoris (réalisé avec une partie du gland). L’innervation par les bandelettes vasculo-nerveuses dorsales de la verge est conservée pour permettre l’obtention de plaisir et d’orgasmes.
un néo-vagin et une vulve sont créés avec la peau du scrotum et de la verge. Le néo-vagin sera positionné dans l’espace inter recto-prostatique avec une section partielle des releveurs de l’anus pour avoir une largeur et une profondeur permettant les pénétrations vaginales.
Les soins post-opératoires (auto-dilatations vaginales …) sont très prenants et nécessitent un gros investissement de la part de l’opérée. Le taux de complication chirurgicale varie entre 5 et 15 % avec parfois des saignements, des sténoses vaginales… Le taux de satisfaction global varie de 80 à 100%.
D’autres techniques sont aujourd’hui proposées comme la création d’un néo-vagin avec de l’intestin (surtout le sigmoïde) ou des techniques mixtes peau + péritoine.
La féminisation du visage est une chirurgie importante qui permet d’améliorer le passing, c’est-à-dire la capacité à être identifiée au premier coup d’oeil comme femme. Il peut s’agir de la réduction de l’angle mandibulaire et autres chirurgies de modification des contours du visage afin d’en réduire le caractère saillant, d’une intervention sur les paupières (blépharoplastie), sur le nez (rhinoplastie), d’une épilation définitive ou d’une chondroplastie thyroïdienne pour estomper la pomme d’Adam. On préviendra bien les patientes des risques d’une forme d’addiction à ces chirurgies du visage dans un souci de perfection qui peut altérer à la fin la qualité du résultat.
On abordera différentes étapes de ces chirurgies d’affirmation de genre en insistant sur les procédures les plus utilisées sans être exhaustifs sur les autres techniques, tant elles sont nombreuses aujourd’hui. Encore une fois, il est acquis qu’aucune de ces chirurgies n’est obligatoire et qu’elles doivent être proposées aux personnes trans avec une information la plus complète possible. En effet, que ce soit les chirurgies du thorax ou les phalloplasties, ces techniques sont complexes et les taux de complications élevés, ce qui peut altérer la qualité de vie des patients.
La mastectomie bilatérale est une chirurgie très demandée qui apporte un bien-être et améliore l’insertion sociale de façon majeure. Cette chirurgie pourra être proposée aux mineurs à partir de 15 ans avec l’accord parental et après accompagnement multidisciplinaire, car elle évite l’isolement social de ces jeunes et soulage la souffrance psychique et physique (port de contention mammaire type binder…) induite par la croissance mammaire.
La technique ayant la rançon cicatricielle la moins importante est la mastectomie péri-aréolaire (schéma 1), qui sera proposée aux personnes ayant un petit volume mammaire. Elle consiste en l’ablation de la glande mammaire, une exérèse de tissus cutanées et la réduction de la taille de la plaque mammelonaire. En cas de volume mammaire trop important, une technique de mastectomie avec incision transverse (schéma 2) dans le sillon pectoral + greffe aréolaire sera proposée. Le taux de complication est élevé, de 20 à 50% et jusqu’à 50% des patients souhaiteront une chirurgie complémentaire pour raisons esthétiques. De façon surprenante, le taux de satisfaction est très élevé (>85%), ce qui confirme l’importance de cette opération pour améliorer la qualité de vie de ces patients.
L’ablation des organes génitaux internes : ovariectomie, hystérectomie et vaginectomie par voie coelioscopique et/ou par voie vaginale. L’important est d’éviter les cicatrices abdominales qui pourraient gêner la réalisation d’une phalloplastie en créant des adhérences. Il est indispensable d’informer ces patients de la possibilité de conservation d’ovocytes avant de réaliser cette intervention car la stérilité sera définitive.
Les reconstructions génitales sont de deux types :
La métaioidioplastie consiste en l’utilisation des tissus génitaux hypertrophiés par l’action de la testostérone pour créer un équivalent de mini-verge avec reconstruction urétrale et création de scrotum possible. Les taux de satisfaction sont très élevés (>85%) avec de bons résultats fonctionnels excepté sur la longueur de la néo-verge, ce qui est un enjeu majeur notamment pour permettre des relations sexuelles avec pénétration. 12 à 50% des patients demanderont plus tard une phalloplastie.
Les phalloplasties : elles permettent d’obtenir une néo-verge de bonne taille permettant la pénétration, mais il s’agit d’une technique moins sûre, plus longue de réalisation et avec davantage de complications et de séquelles. Il existe plusieurs techniques, non détaillées ici.
Le rôle des soignants sera d’accompagner le patient dans son choix en l’informant le mieux possible. Le riche tissu associatif existant peut être un atout pour l’accompagnement dans cette phase de décision.
Même si le taux de complications est relativement élevé, les taux de satisfaction sont très élevés également et les regrets rares.
La mise en place des prothèses de verge afin d’obtenir une rigidité est réalisée 9 à 12 mois après la phalloplastie pour diminuer le risque infectieux. Les principales complications sont les surinfections de la prothèse (7 à 20% des cas) nécessitant le plus souvent une explantation, et les problèmes mécaniques (30 à 50 %) avec un dysfonctionnement de la prothèse (rupture de prothèse…), en partie du à l’absence de tissus anatomique protecteur des prothèses comme l’albuginée.
La place des psychiatres et psychologues a évolué au cours des dernières années. Après une période de médicalisation et psychiatrisation systématique apparait aujourd’hui une période d’accompagnement selon les besoins de la personne.
Le besoin en accompagnement psychologique est important, les personnes trans étant victimes de nombreuses discriminations générant du stress, de la dépression. Une étude réalisée au sein d’une structure de soins n’imposant pas la consultation psychiatre avant accompagnement a montré que 60% des personnes trans avaient ou souhaitaient un accompagnement psy.
Le positionnement des psys se fait davantage autour d’une démarche trans-affirmative qui a pour but de réduire les souffrances psychiques si elles existent, mais aussi d’aider à lutter contre les effets des discriminations.
Les professionnels de santé de santé qui accompagnent les personnes trans devront être particulièrement vigilants au dépistage des troubles anxieux qui peuvent être présents chez 30 à 60% de la population trans (3 à 4 fois plus que dans la population cis). Cette anxiété peut être réactionnelle aux situations de discriminations affrontées par la personne, mais aussi parfois due aux effets des traitements hormonaux ou chirurgicaux. Les troubles dépressifs sont aussi surreprésentés dans les mêmes proportions et devront être pris en charge pour faciliter la transition. Le risque suicidaire devra aussi être surveillé (7 à 28% des cas avec une prévalence pouvant aller jusqu’à 20%). On retrouve aussi des troubles du comportement alimentaire dans 15 à 20 % des cas. Enfin une méta-analyse a retrouvé des troubles du spectre autistique dans 11% des cas.
La préservation des gamètes devra être proposée systématiquement aux personnes trans lors de leur parcours. On retiendra deux moments clés : avant la prise d’une hormonothérapie et avant de réaliser la gonadectomie.
De nombreuses questions persistent aujourd’hui sur les possibilités d’utilisation des gamètes, la loi de bioéthique française actuelle ne permettant pas l’utilisation de celles-ci dans de nombreux cas. Par ailleurs, au plan juridique et sociétal, de nombreuses questions restent non résolues concernant la filiation.
Les modifications corporelles induites par les hormones et la chirurgie peuvent avoir un grand impact sur la sexualité, soit en modifiant la libido soit en modifiant l’anatomie. Il y a aujourd’hui trop peu d’études sur la sexualité des personnes trans et les méthodologies ne sont pas toujours appropriées car elles utilisent des questionnaires créés pour les hommes ou femmes cis. Pourtant, s’il est vrai que la transidentité engage avant tout le genre, la sexualité ne doit pas être oubliée. En effet, elle est au centre de nombreuses interactions sociales et un facteur d’épanouissement certain. Aujourd’hui on peut surtout conseiller aux personnes trans de consulter des sexologues « généralistes » qui ont de solides connaissances concernant la sexualité et les relations de couple, mais moins sur les spécificités liées aux personnes trans.
Certaines études ont montré une surexposition au risque de contamination par le VIH chez les femmes trans et il parait indispensable de proposer, outre la prévention classique, la PrEP contre le VIH.
Chez les hommes trans le traitement par testostérone peut être responsable d’acnés sévères qui pourront nécessiter une adaptation des doses de testostérone en plus des traitements spécifiques de l’acné.
La dépilation laser ou autre tient un rôle majeur dans la féminisation faciale et nécessitera de nombreuses séances. Chez les hommes trans, la dépilation des sites donneurs pour la phalloplastie est aussi un point important pour éviter d’avoir une verge avec des poils.
Un parcours de transition entraîne de nombreuses interactions délicates avec la société civile. Pouvoir accompagner les personnes trans lors de leurs démarches est aussi un enjeu fort car les difficultés rencontrées lors de celles-ci peuvent générer beaucoup de stress et de souffrance.
On citera l’accompagnement lors des démarches de changement d’état-civil. Les démarches de changement de prénom et d’identité ont été simplifiées depuis la loi de 2016. L’acceptation d’une transition par l’employeur ne sera pas toujours simple et des associations comme l’Autre Cercle (https://www.autrecercle.org) peuvent être d’une très grande aide. Faire sa transition au niveau de l’école peut aussi être complexe, même si les choses ont été simplifiées récemment : un certain nombre d’exemples dramatiques de suicides suite à des discriminations confirme le besoin d’accompagnement lors de ces moments de plus grande fragilité.
Il existe aujourd’hui un tissu associatif très riche qui permet aux personnes trans d’avoir accès à un savoir expérientiel très important. Ces associations ont su développer au cours du temps de nombreux outils d’aide, que ce soit par des brochures, des temps d’échanges, des propositions de formation...
Arriver à articuler ces différents acteurs est un enjeu important pour pouvoir offrir une aide la plus diverse et pertinente aux personnes trans.
Pour en savoir plus
Recommandations de la World Physician Association for Transgender Health WPATH : Standards of care 8. https://www.wpath.org/soc8
Rapport relatif à la santé et aux parcours de soins des personnes trans réalisé par H Piccard et S Jutant avec l’aide de l’IGAS à la demande du Ministère de la Santé 2022
European Society of Sexual Medecine ESSM : ESSM position statement on transgender health (hormonotherapy, surgery…) https://www.essm.org/publications/essm-position-statements/
Médecine sexuelle, fondements et pratiques. Frédérique Courtois, Mireille Bonierbale. Edition Lavoisier, 2023.
Dans le monde, une personne sur cinq serait affectée par une maladie chronique (ou un handicap).
Les maladies chroniques peuvent être réparties en plusieurs groupes : les maladies cardiovasculaires, le diabète, les cancers et les affections psychiatriques de longue durée en représentent 75%. Un cinquième groupe est composé des affections respiratoires, des insuffisances rénales, des maladies neurodégénératives et des autres maladies.
Toutes ces maladies peuvent avoir des répercussions, directes ou indirectes, sur la santé sexuelle.
Par leur atteinte sur la fonction sexuelle, qu’elle soit biologique, psychologique ou sociale, les maladies chroniques peuvent altérer les relations affectives et la satisfaction sexuelle des patients et de leurs partenaires. Ainsi, les troubles sexuels sont en moyenne 2 à 6 fois plus fréquents en cas de maladie chronique que dans la population générale.
Une règle à retenir :
Il n’existe pas d’exception, toute maladie chronique peut impacter négativement la santé sexuelle. Le simple fait de prendre conscience du caractère faillible et fragile de son corps peut entrainer des troubles du désir, de l’excitation, du plaisir. Ainsi, chez un homme, un excès de cholestérol traité par un comprimé quotidien peut sembler anodin, mais parfois, le doute qu’il installe sur la « performance » du corps et la prise tous les jours du traitement qui rappelle cette vulnérabilité suffisent à installer une dysfonction érectile. A laquelle peut s’ajouter l’effet « mécanique » de la maladie athéromateuse si le cholestérol n’est pas bien équilibré.
Les maladies agissent de multiples manières sur la santé sexuelle :
sur la sphère génitale directement en cas d’atteinte du système hormonal, vasculaire, neurologique...,
sur le désir/ le plaisir en cas d’atteinte du système nerveux central,
sur les fonctions corporelles permettant la sexualité (par exemple, altération de la fonction respiratoire ou trouble de la motricité rendant l’activité sexuelle plus difficile à réaliser),
Ces effets peuvent être liés à la maladie même, aux médicaments et soins reçus, à l’environnement médical imposé par la maladie.
Il s’agit véritablement d’une double peine pour les personnes malades : à la difficulté de vivre avec une condition chronique s’ajoutent des difficultés intimes et/ou affectives, alors même que la sexualité devrait être la zone de liberté de ces personnes, leur terrain de jeu donnant l’opportunité de jouir d’un corps malmené par la maladie et, parfois, les traitements.
Il faut briser le cercle vicieux
de la maladie entrainant des problèmes sexuels qui entrainent une perte d’estime de soi entrainant une moindre motivation pour se soigner et donc une détérioration de la santé,
et instaurer un cercle vertueux avec une écoute et une prise en charge des problèmes sexuels pour augmenter l’estime de soi elle-même augmentant l’envie de bien se soigner pour augmenter la santé générale, dont la santé sexuelle.
Le diabète, quel que soit son type, peut affecter la sexualité de différentes manières. S’il est possible d’avoir une vie sexuelle tout à fait satisfaisante en vivant avec un diabète, il est fréquent, au cours de l’évolution de la maladie, de devoir surmonter certains obstacles pour maintenir une bonne santé sexuelle.
Voici quelques conséquences possibles de la maladie diabétique sur la vie sexuelle et affective :
- Dysfonction érectile : les hommes atteints de diabète peuvent être plus susceptibles de développer une dysfonction érectile en raison des dommages causés aux vaisseaux sanguins et aux nerfs.
L’existence d’un diabète, en particulier s’il est mal équilibré, orientera davantage vers une cause organique pour expliquer une dysfonction érectile. A l’inverse, la dysfonction érectile est parfois le symptôme qui permet de découvrir un diabète qui n’était pas connu jusqu’à présent, agissant en véritable signe précurseur ou « sentinelle » de cette maladie (voir chapitre « Dysfonctions sexuelles »).
La prise en charge d’une dysfonction érectile chez une personne diabétique est comparable à celle de la population générale, mais il existe des études cliniques évaluant des médicaments facilitateurs d’érection spécifiquement dans cette population, ce qui peut conforter le prescripteur (et le patient) dans son choix.
- Ejaculation rétrograde : le diabète peut entraîner chez l'homme une éjaculation rétrograde. Au moment de l'éjaculation, le sperme, au lieu de sortir par l'urètre, remonte dans la vessie. L’absence de sperme visible au moment de l’orgasme peut être très perturbante pour certains patients. Il faut insister sur le fait que cette éjaculation rétrograde ne pose aucun problème physiologique et n’altère en rien le désir et le plaisir.
- Problèmes de lubrification vaginale : les femmes atteintes de diabète peuvent avoir des problèmes de lubrification vaginale, ce qui peut rendre les rapports sexuels inconfortables voire douloureux. L'utilisation de lubrifiants ou de traitements de fond gynécologiques (selon le contexte) peut aider à résoudre ce problème.
- Infections génitales : les personnes atteintes de diabète sont plus susceptibles de développer des infections génitales, telles que les mycoses.
- Diminution du désir : certaines personnes atteintes de diabète peuvent éprouver une diminution de la libido, probablement due à des facteurs psychologiques tels que le stress, la fatigue ou la dépression liés à la gestion de la maladie. Cette conséquence des maladies chroniques sur la sexualité est classique et doit être recherchée dans l’entretien avec le patient.
- Difficultés au sein du couple : parfois, le conjoint ou la conjointe d’une personne diabétique peut être lassé.e des traitements, des restrictions diététiques ou de l’intrusion de la maladie dans l’intimité du couple. De manière générale, les partenaires de personnes vivant avec une maladie chronique doivent pouvoir exprimer leurs difficultés auprès d’un thérapeute ou d’un sexologue, afin d’être également accompagnés si besoin.
Au-delà de la prise en charge spécifique de la dysfonction sexuelle, le bon équilibre du diabète et le traitement adapté de cette maladie sont les meilleurs remparts contre une altération de la santé sexuelle. Les dysfonctions sexuelles motivent parfois les personnes pour mieux se prendre en charge globalement : ainsi, une dysfonction érectile peut conduire un homme à respecter scrupuleusement les conseils d’hygiène de vie car la préservation de cette fonction est particulièrement motivante pour lui.
Les maladies cardiovasculaires type hypertension artérielle, maladie athéromateuse et événements vasculaires (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, artériopathie des membres inférieurs...) peuvent également avoir des conséquences sur la santé sexuelle, et être associées à un diabète. Dans tous les cas, le parfait contrôle de ces maladies est nécessaire pour préserver la fonction sexuelle.
Si, parce qu’ils touchent des organes importants dans la sexualité, le cancer du sein et le cancer de la prostate vont affecter, à un moment du parcours de soin, la sexualité d’une grande majorité de personnes, il ne sont pas les seuls : tous les cancers peuvent avoir un impact, direct ou par leur traitement, sur la sexualité.
D’une part, le cancer véhicule encore une image mortifère malgré les immenses progrès faits dans les traitements et les chances de guérison. Cette image est aux antipodes de la pulsion de vie qui sous-tend la sexualité.
D’autre part, les traitements prescrits ont souvent des effets directs sur les organes génitaux (notamment sécheresse voire atrophie vaginale, ou dysfonction érectile suite à une chimiothérapie ou une radiothérapie). Des référentiels ont été publiés par l’Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Supports (AFSOS – lien en bas de ce chapitre) et soulignent que tous les patients, tous les cancers, tous les traitements sont potentiellement concernés quand il s’agit de fonction sexuelle.
Souvent, les personnes touchées par le cancer n’osent pas évoquer avec leur oncologue les dysfonctions sexuelles qui sont apparues. Elles craignent son jugement sur des préoccupations qui pourraient sembler futiles - ce qui est infondé, les oncologues étant de plus en plus conscients de l’importance de préserver le mieux possible une bonne santé sexuelle.
Un accompagnement sexologique devrait, en théorie, pouvoir être proposé à ces patients, afin de préserver une bonne estime de soi et mieux tolérer les traitements et leurs effets indésirables potentiels sur les organes génitaux.
Les maladies mentales ont souvent de lourdes répercussions sur la sexualité.
Le développement de la sexualité chez les patients atteints de schizophrénie, particulièrement lorsqu’il y a prédominance de symptômes négatifs, de troubles du contact et de retrait social, peut être entravé. Dans le cadre des symptômes positifs de la schizophrénie, on peut observer des délires érotomaniaques ou des délires liés à l’identité sexuelle, ainsi que des hallucinations cénesthésiques (sens du toucher) de nature sexuelle. Les antipsychotiques engendrent des troubles sexuels à travers plusieurs mécanismes, tels que l’hyperprolactinémie et leur effet antidopaminergique, mais également par leur effet antiadrénergique, antihistaminique, et antimuscarinique. Les hommes relatent surtout des troubles érectiles ou une éjaculation retardée, mais aussi une diminution du désir. Les femmes rapportent surtout des troubles du désir et de l’orgasme, mais aussi des dyspareunies (douleurs lors de la pénétration).
Les épisodes dépressifs sont caractérisés notamment par une réduction du désir sexuel. Les antidépresseurs peuvent présenter des effets secondaires sur la sexualité, dont les plus connus sont l’éjaculation retardée, l’anorgasmie, le trouble érectile et la diminution du désir sexuel. Dans les épisodes maniaques, une désinhibition sexuelle peut mettre la personne en danger, physiquement et psychiquement.
L’anxiété concernant la performance sexuelle ou les enjeux relationnels associés, tels que l’intimité ou le rejet de la part du partenaire, peut induire des troubles sexuels et l’évitement de la sexualité.
Enfin, pour citer un dernier exemple, les troubles des conduites alimentaires s’accompagnent souvent de dysfonctions sexuelles : par exemple, une absence de désir voire un dégoût pour la sexualité chez les personnes souffrant d’anorexie.
Ainsi, les conséquences des maladies mentales sur la sexualité présentent plusieurs caractéristiques :
elles sont très fréquentes,
elles sont souvent autant liées à la maladie qu’au traitement prescrit,
elles couvrent tout le champ des dysfonctions sexuelles,
elles posent parfois la question de la sexualité en institution, chez les personnes hospitalisées à répétition en service psychiatrique ou lieux de soins pour la santé mentale.
Les effets délétères de la vie avec le VIH sur la santé sexuelle sont connus depuis plusieurs décennies, mais l’urgence vitale de contrôler le virus avait fait passer cette dimension au second plan. Avec les traitements efficaces disponibles aujourd’hui et une espérance de vie non-entravée par l’infection lorsqu’elle est parfaitement contrôlée, les soignants intègrent de plus en plus la dimension « santé sexuelle » dans leur prise en soin globale.
Ainsi, la perte d’estime de soi parfois consécutive à la découverte d’une séropositivité pour le VIH peut s’accompagner de troubles du désir, de dysfonction érectile ou d’absence de plaisir. Il est important de pouvoir rassurer les personnes sur leur avenir, notamment intime, affectif et sexuel. Le fait de pouvoir leur expliquer qu’une personne vivant avec le VIH correctement traitée ne peut en aucun cas transmettre le virus (résumé en I = I, soit une charge virale Indétectable rend le virus Intransmissible) aide souvent à lever des blocages et des craintes dans les rapports amoureux.
L’une des caractéristiques du VIH étant sa transmission sexuelle, il est compréhensible de voir des liens s’établir implicitement dans l’esprit des personnes vivant avec ce virus (et notamment chez celles l’ayant contracté par voie sexuelle) entre sexualité, maladie et danger. Ces questions doivent pouvoir être discutées pour rétablir une vision optimiste de la sexualité.
Enfin, des craintes sur les effets indésirables des traitements antirétroviraux sur la sexualité sont parfois exprimées. Il faut donner de l’information, savoir écouter et déceler une « perte de confiance » envers le traitement, même si celui-ci n’a pas d’effet néfaste, car cette croyance peut entrainer des défauts d’observance du traitement, avec pour conséquence une mise en danger de la personne et de ses partenaires ?.
Dans les chapitres précédents ont été donnés des exemples de médicaments dont les effets indésirables potentiels sur la fonction sexuelle sont clairement identifiés.
Voici quelques « classiques » dans ce domaine :
- Médicaments cardiovasculaires : certains médicaments utilisés pour traiter l'hypertension artérielle, tels que les bêta-bloquants et les diurétiques, peuvent causer des problèmes d'érection chez les hommes et réduire la libido chez les hommes et les femmes.
- Hormones : les contraceptifs oraux, les traitements hormonaux substitutifs et les médicaments contre le cancer de la prostate ou du sein peuvent affecter la libido, la lubrification vaginale et la fonction érectile.
- Médicaments psychotropes : voir le paragraphe « Exemple des maladies mentales ».
Certains antidépresseurs, en particulier ceux de la classe des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), peuvent entraîner une diminution de la libido, des difficultés à atteindre l'orgasme ou des problèmes d'érection chez les hommes.
Cependant, il existe d'autres classes d'antidépresseurs qui peuvent avoir moins d'effets indésirables sexuels, et il est souvent possible de trouver un médicament qui convient mieux sur le plan sexuel. Certains antipsychotiques utilisés dans la schizophrénie peuvent causer des problèmes sexuels tels qu’une diminution de la libido, des problèmes d'érection et des troubles de l'éjaculation.
- Médicaments contre le cancer : les chimiothérapies et l'hormonothérapie peuvent entraîner des effets indésirables sexuels tels que la diminution de la libido, la sécheresse vaginale, des problèmes d'érection.
N’oublions pas qu’un effet indésirable qui semble anodin peut gravement nuire à la qualité de vie sexuelle de la personne : ainsi, l’éjaculation rétrograde induite par certains médicaments (prescrits par exemple dans l’hypertrophie bénigne de la prostate) est parfois très mal vécue par les patients.
Il faut évidemment distinguer maladie chronique et handicap, l’une pouvant entrainer l’autre, mais une personne handicapée n’est évidemment pas malade du fait de son handicap.
Commençons par nous poser la question : qu’est-ce qu’un handicap ? En France, la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 définit le handicap de la façon suivante :
« Constitue un Handicap, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. »
On distingue différents types de handicaps : physiques, moteurs, liés aux sens (visuel, auditif), mentaux, psychiques... et certains handicaps sont dits invisibles : le handicap invisible est un handicap non détectable, qui ne peut pas être remarqué si la personne concernée n'en parle pas. Le trouble dont elle souffre impacte pourtant sa qualité de vie. Le handicap invisible est un concept complexe et s'applique dans bien des situations de handicap (sensoriel, psychique, cognitif).
On retient donc dans le handicap la notion de limitation ou restriction d’activité, et la santé sexuelle peut évidemment en être impactée, de multiples manières.
Dans le cadre d’une paraplégie (paralysie des membres inférieurs et supérieurs si l’on parle de tétraplégie) liée à une atteinte de la moëlle épinière, le niveau lésionnel conditionnera les conséquences physiologiques sur la sexualité. Erections et lubrifications vaginales sont plus facilement obtenues lors de lésions médullaires incomplètes et/ou hautes, supérieures à D10-L2 avec un centre sacré préservé. Tous niveaux lésionnels confondus, on estime qu’un homme sur deux peut avoir une érection sans aide médicale. Il faut dans tous les cas que le sujet soit abordé, que tous les détails pratiques soient envisagés (peur de ne pas retenir ses urines ou ses selles pendant un coït, pose du préservatif chez une personne tétraplégique par exemple).
Il faut aider la personne à se réapproprier son corps, à se sentir désirable, à parler ouvertement de ses craintes avec son conjoint ou sa conjointe. Rencontrer un.e partenaire pour les personnes handicapées célibataires est parfois compliqué : la reprise d’une vie sociale, des annonces sur internet ou des associations sérieuses, comme Handiclub, peuvent aider.
En fonction du corps de la personne handicapée, de son handicap spécifique, un sexologue peut l’informer sur les possibilités d’excitation, de plaisir et lui donner conseils et « astuces » bien utiles dans l’intimité.
Dans le cadre des handicaps dits invisibles, l’abord des sujets liés à la vie sexuelle et affective est important, pour lever les tabous. Comment faire comprendre à un.e partenaire potentiel.le ce handicap, qu’il s’agisse par exemple de fatigue, de douleurs, de troubles cognitifs rendant la sexualité compliquée ?
Il y a aussi beaucoup à apprendre de la part des personnes handicapées elles-mêmes, qui développent des stratégies et des habiletés sexuelles souvent originales et inspirantes pour les personnes dites « valides » : il existe mille et une façons d’avoir des rapports sexuels, et le dialogue entre personnes handicapées et valides peut permettre d’ouvrir des horizons sur le désir, le plaisir et le jeu avec le corps.
Pour en savoir plus :
Référentiels cancer et sexualité disponibles sur
Sexualité et séropositivité :
Cancer du sein et sexualité :
Médecine sexuelle, fondements et pratiques. Frédérique Courtois, Mireille Bonierbale. Edition Lavoisier, 2016.
Manuel de sexologie. Elsevier édition. Patrice Lopès, François-Xavier Poudat. 4ème édition, 2021. Notamment les chapitres sur Handicap et sexualité.
Ressources disponibles sur
Au cours de la vie, de nombreuses personnes éprouvent des difficultés dans leur vie sexuelle. La manière d’exprimer cette difficulté variera d’un individu à l’autre, d’une société à l’autre, mais se pose souvent en filigrane une question angoissante pour les femmes et les hommes de tous âges : « Suis-je normal ? ».
Être dans la norme, conforme à la représentation d’une sexualité « saine » peut préoccuper nombre d’individus qui viennent chercher chez un soignant une réassurance, une validation (de leur sexualité... ou de leurs craintes d’être anormaux). De fait, la difficulté sexuelle pose en creux la question de la norme en sexualité.
Attention, terrain dangereux : il est très difficile de définir des normes en sexualité, contrairement à de nombreux domaines de la médecine. Autant un nombre de cellules CD4, une fraction d’éjection cardiaque ou une température sont faciles à « normer », autant la sexualité humaine ne peut être enfermée dans des chiffres et des jalons, sous peine de porter des jugements inspirés non par la science, mais par la culture, les religions, la société à un instant donné, ou ses propres représentations.
La santé sexuelle et reproductive masculine concerne le fonctionnement et les dysfonctionnements sexuels et reproductifs, ainsi que les préoccupations sexuelles spécifiques à la population masculine. La définition de la santé sexuelle proposée par l’OMS (encadré 1) insiste sur la notion de possibilité à vivre des expériences sexuelles.
Ce chapitre vise à fournir aux lecteurs une meilleure compréhension de la santé sexuelle et reproductive masculine, en mettant l'accent sur les meilleures pratiques cliniques.
Aiguë (90%)
Chronique (10%)
Oui
Oui
Continent africain
Région du Pacifique occidental
C
Sexe
Sang
Mère-enfant
Aiguë 20%
Chronique 80%
Oui
Elimination possible
Non
Six pays = 50 % des sujets : Chine (9,8 millions), Pakistan (7,2 millions), Inde (6,2 millions), Egypte (5,6 millions), Russie (4,7 millions), Etats-Unis (2,9 millions)
D
Sang
Sexe
Aiguë Chronique
Oui
Satellite du VHB
Oui
Superposables aux zones de l’hépatite B
E
Oro-fécale
Aiguë
Non nécessaire
Non
Asie de l’Est
Asie du Sud



sur l’estime de soi avec la perte de la capacité à avoir confiance en soi et se considérer comme désirable,
sur l’intimité avec un corps « à disposition des soignants », notamment en contexte d’hospitalisation ou de séjour en établissements médicalisés,
sur la disponibilité mentale et émotionnelle compte tenu des nombreux rendez-vous médicaux empêchant la personne de se détendre et d’être en situation de désirer,
sur la relation avec la/le partenaire avec une lassitude du partenaire aidant, peur face à la maladie du conjoint, réflexe de fuite...
chercher et donner en toute transparence l’information disponible sur l’impact, direct ou indirect, du traitement sur la fonction sexuelle,
si la personne reste convaincue d’un lien direct entre le médicament et ses difficultés sexuelles malgré l’absence de preuve formelle sur un plan scientifique, s’efforcer d’adapter le traitement pour en favoriser l’observance.




La fréquence, la répétition, l’intensité́ ou la nature des comportements sexuels ne définit pas, à elle-seule, une dysfonction sexuelle. Ainsi, un « nombre de rapports sexuels par semaine ou par mois », « être attiré par telle partie du corps » ou encore « ne pas avoir de rapports sexuels depuis un an » ne sont pas, en eux-mêmes, des dysfonctions sexuelles.
Il faut se méfier des raccourcis cognitifs en sexualité humaine : parfois, le «bon sens » guide vers l’idée qu’il s’agit d’une dysfonction sexuelle, parce que vous vous fiez implicitement à vos propres représentations de la sexualité. Et vous allez trouver un comportement « trop » ou « pas assez » (fréquent/ intense/ bizarre...).
Le socle d’une dysfonction sexuelle est une souffrance, psychique et/ou physique, exprimée par la personne, associée à un comportement sexuel. De même, si la personne ne souffre pas mais génère une souffrance chez d’autres individus, si son comportement sexuel a des conséquences interpersonnelles importantes, il faut s’orienter vers une entité pathologique, donc une dysfonction sexuelle.
Ainsi, la dysfonction sexuelle est une difficulté rapportée par un individu qui l’éloigne de la santé sexuelle, par la souffrance ressentie (par lui) ou infligée (aux autres), par la limitation, parfois, de son champ d’activités ou de son libre-arbitre. Un comportement sexuel envahissant, se substituant à d’autres interactions interpersonnelles, rentrera, par exemple, dans le champ des dysfonctions.
Soulignons enfin la grande fréquence des dysfonctions sexuelles : les études donnent des chiffres variables, notamment d’un pays à l’autre, mais, en résumé, jusqu’à 1 personne sur 2 présente une dysfonction sexuelle au cours de sa vie.
Quelques dysfonctions sexuelles parmi les plus fréquentes* :
les troubles de l’érection : dysfonction érectile chez les personnes ayant un pénis
les troubles de l’éjaculation : éjaculation précoce donc jugée trop rapide par la personne en souffrant ; et, moins fréquent, retard à l'éjaculation ou absence d'éjaculation (anéjaculation)
les dyspareunies : douleur ressentie lors de la pénétration
le vaginisme : contraction réflexe involontaire des muscles de l’orifice vaginal
les troubles du désir sexuel : absence ou baisse de désir sexuel, manque d’intérêt sexuel
les troubles du plaisir sexuel : anorgasmie = absence d’orgasme, totale ou au moment du coït par exemple
les troubles de l’excitation : altération de la lubrification vaginale
* nous faisons le choix de ne pas les aborder sous l’angle « féminin/masculin » généralement présenté ; en effet, des hommes possédant un vagin peuvent présenter un vaginisme et des femmes possédant un pénis peuvent, par exemple, présenter une dysfonction érectile. Nous adopterons donc une présentation « neutre », plus inclusive et qui n’altère nullement les informations données.
Définie comme l’incapacité d’obtenir et/ou de maintenir une érection, c’est à dire une rigidité du pénis suffisante pour une pénétration et le déroulement de l’acte sexuel, elle constitue l’un des troubles les plus fréquents, pouvant concerner une personne sur deux au cours de la vie.
Il faut s’assurer qu’elle est persistante dans le temps, des « pannes » occasionnelles ne définissant pas une dysfonction érectile (oui, il peut être normal de ne pas avoir d’érection si vous vous êtes disputé avec votre patron le jour même. Du reste, il est possible que votre patron ait aussi une panne pour cette raison. Ce qui peut être réconfortant).
Documenter précisément ce trouble (voir encadré partie 1) est essentiel car ces renseignements peuvent orienter vers une cause. Par exemple, le contexte médical peut indiquer un terrain vasculaire (diabète, hypertension artérielle...) qui orientera vers une cause organique, ou le contexte de vie (licenciement ou deuil récent) orientera davantage vers une cause dite « psychogène ».
La majorité des dysfonctions érectiles sont d’origine psychogène, c’est à dire qu’elles ne relèvent pas d’une cause organique identifiée. Certaines sont dites d’origine mixte, à la fois organique et psychogène.
Comme dans toute dysfonction sexuelle, il ne faut jamais oublier d’interroger sur la vie affective, sur le couple le cas échéant, voire recevoir la/le partenaire qui peut vous donner des informations précieuses pour mieux prendre en charge le trouble.
L’examen clinique comprend généralement l’étude des caractères sexuels secondaires (pour vérifier l’imprégnation en testostérone), l’examen cardiovasculaire avec recherche des pouls périphériques, mesure de la pression artérielle, l’examen des organes génitaux externes à la recherche de maladies pouvant favoriser ce trouble, voire un toucher rectal après 50 ans.
Les examens paracliniques sont assez limités, avec dosage, parfois, de la testostérone, ou, par exemple, vérification de la glycémie (taux de sucre dans le sang) s’il n’y a pas de bilan sanguin récent.
Les traitements sont à la fois médicamenteux et non-médicamenteux.
Des comprimés peuvent permettre de faciliter l’érection « à la demande » (au moment des rapports sexuels), notamment la famille des IPDE-5 (inhibiteurs de la phosphodiestérase 5). Des prostaglandines peuvent être administrées par gel dans l’urètre ou en injection dans le pénis. Il existe dans les formes plus sévères des prothèses gonflables qui peuvent être mises en place chirurgicalement.
Dans tous les cas, des informations et des conseils doivent être donnés. En effet, une dysfonction érectile peut être l’occasion de revoir son hygiène de vie, ou de se questionner sur ses choix affectifs par exemple. En complément ou à la place de ces approches médicamenteuses, une approche par sexothérapie ou psychothérapie de soutien peut être proposée.
Appelée aussi « éjaculation précoce » ou « éjaculation rapide », elle est définie par la survenue d’une éjaculation jugée trop rapide par la personne, incontrôlable et empêchant la/le partenaire d’avoir du plaisir.
Cette difficulté pose bien le problème de la norme car il est très difficile de donner une durée « optimale » de rapport sexuel pour objectiver une éjaculation « trop » rapide. C’est donc l’écoute du récit de la personne, et du degré de souffrance ressenti, qui guidera le soignant. S’il est souvent donné le chiffre d’une minute (éjaculation survenant moins d’une minute après le début de la pénétration), ce jalon écartera des personnes qui dépassent la minute mais sont en réelle souffrance avec leurs partenaires.
La fréquence de cette plainte est souvent sous-estimée dans nos sociétés, la durée du rapport sexuel semblant être devenue le mètre-étalon (sans mauvais jeu de mot) de la performance sexuelle. Les enquêtes montrent que ce trouble pourrait être plus fréquent encore que la dysfonction érectile, mais davantage passé sous silence. Il est dans tous les cas important de rassurer la personne sur la banalité de cette difficulté en expliquant que l’organisme est programmé pour éjaculer rapidement (le coït étant une situation vulnérable pendant laquelle un ennemi ou un prédateur peut vous attaquer) et que l’allongement du temps jusqu’à l’éjaculation est un apprentissage lié à nos habitudes culturelles et sociales, qui peut se travailler.
Dans le cadre d’une éjaculation prématurée, la documentation est également clé car elle permettra de transmettre des connaissances. Beaucoup de personnes manquent d’informations sur le réflexe éjaculatoire, les moyens de mieux le contrôler, en apprivoisant, par exemple, les muscles du périnée ou en développant sa culture sexuelle (positions, pratiques, jouer avec le temps etc...). On n’omettra pas de penser aux causes organiques, car une balanite (inflammation du gland), liée par exemple à une infection sexuellement transmissible, peut être l’origine d’une éjaculation prématurée.
Les traitements médicamenteux sont peu nombreux, essentiellement un inhibiteur de recapture de la sérotonine ayant l’indication dans ce trouble. Sont souvent privilégiés les explications données en consultation, les approches cognitives et comportementales, les exercices à faire seul (masturbation pour mieux identifier les sensations d’imminence de l’éjaculation), une sexothérapie brève ou un travail analytique plus approfondi chez un psychologue donnant souvent de bons résultats.
Le vaginisme correspond à l’ensemble des réactions musculaires qui ferment l’orifice vaginal lors du coït. Il s’agit de réactions réflexes involontaires. Il peut être complet ou incomplet, si un certain degré de pénétration est possible. Il peut survenir uniquement dans le cadre d’une activité sexuelle avec partenaire, ou être constant à toute tentative d’introduction d’un tampon ou d’un speculum par exemple.
La dyspareunie est une douleur persistante et récurrente lors du coït, ou d’une activité sexuelle. Selon le cas, la douleur apparaît dès le début du coït ou lors de son déroulement, elle peut être brève ou prolongée, et se localiser à l’entrée du vagin (on parle alors de dyspareunies superficielles) ou plus profondément (dyspareunies profondes).
Vaginisme et dyspareunie peuvent se recouper, le vaginisme pouvant être une réaction « réflexe » liée à une douleur à la pénétration, encore appelée dyspareunie d’intromission.
Qu’il s’agisse de vaginisme, de dyspareunie ou des deux, la documentation du trouble est essentielle car des causes organiques peuvent être présentes : par exemple, anomalie de l’hymen, utérus rétroversé, cicatrice liée à un accouchement (notamment épisiotomie) ou à une mutilation génitale (infibulation par exemple), infections aiguës ou chroniques, sécheresse vaginale (liée à la ménopause ou à un traitement par exemple), vestibulodynie (forme d’inflammation du vestibule vulvaire, voir le chapitre « Connaître son corps » pour localiser le vestibule), endométriose...
Cependant, même traitées, ces causes peuvent laisser une empreinte douloureuse, et la difficulté sexuelle peut ne pas se résoudre immédiatement et nécessiter un travail psychothérapeutique.
Dans les causes non-organiques, il est souvent retrouvé dans le vaginisme une méconnaissance de l’anatomie du vagin. Différents travaux ont montré que les personnes souffrant de vaginisme ont tendance à se représenter un vagin très petit, incapable d’accueillir un pénis, et de l’information sur la physiologie du vagin et ses capacités d’adaptation à son contenu (voir « Connaître son corps ») peuvent aider à lever l’appréhension de la pénétration.
Beaucoup d’idées reçues existent à propos du vaginisme : par exemple, qu’il serait souvent consécutif à une agression sexuelle, ce qui n’est pas vraiment retrouvé dans les études. De même, il est parfois dit que les personnes souffrant de vaginisme n’ont ni désir ni plaisir, ce qui est faux. Souvent, le désir sexuel est présent, et la sexualité hors-pénétration est riche, ludique et tout à fait satisfaisante.
Dyspareunie et/ou vaginisme doivent donc amener à bien traiter (ou écarter) toute cause organique, à donner de l’information, à mettre la personne en confiance.
Une approche par sexothérapie et/ou psychothérapie sera généralement proposée, en associant le couple notamment dans les cas de vaginisme. Dans ce même cas, et seulement si une pénétration est absolument souhaitée, un apprentissage progressif par la personne elle-même (avec un doigt, ou des sex-toys de taille croissante) pourra être proposée, en amenant petit à petit le vagin à « accueillir » un contenu accepté et désiré.
Le trouble du désir sexuel, ou désir sexuel hypoactif (= peu intense), est défini comme une déficience persistante ou répétée de s’engager dans une activité sexuelle, ou une absence de pensée ou fantasme érotique. Sont donc concernés les processus cognitifs qui précèdent l’excitation... « l’envie d’avoir envie » comme chanterait Johnny Halliday.
Dans le DSM V (classification américaine des troubles psychiatriques), il est mentionné pour les femmes « le trouble de l’intérêt sexuel / de l’excitation sexuelle ».
Dans ces dysfonctions, les répercussions en termes de souffrance personnelle ou interpersonnelle sont essentielles à évaluer, car une personne peut être en « bonne santé sexuelle » sans avoir envie de rapports sexuels (attention à la normativité !)
Des causes organiques peuvent être retrouvées, certaines maladies chroniques ou certains médicaments pouvant diminuer le désir comme une maladie chronique du foie ou des reins, alcoolisme ou consommation de drogues, médication par antidépresseurs (voir chapitre « Sexualité et maladies chroniques »), mais les causes psychologiques et relationnelles sont les plus fréquentes : détresse psychologique plus générale, manque d’éducation sexuelle, diminution du sentiment amoureux envers le partenaire, influence de la religion, traumatismes passés, ou doute sur son identité de genre. Parfois l’arrivée d’un bébé (ou des beaux-parents) dans le foyer suffit à expliquer cette difficulté.
Dans tous les cas, il ne faut jamais minimiser la souffrance exprimée dans ce trouble : l’estime de soi, la confiance en soi pâtissent souvent de cette difficulté et c’est un véritable cercle vicieux, car il devient difficile de désirer quand on estime n’être pas désirable. Une approche psychothérapeutique ou une sexothérapie permettront souvent de dépasser ce cap.
L’absence d’orgasme après une phase d’excitation considérée comme « normale » peut être primaire ou secondaire (selon qu’elle a toujours existé ou qu’elle est apparue secondairement dans la vie sexuelle de la personne), constante, situationnelle (dans certaines circonstances) ou coïtale, certaines personnes atteignant parfaitement l’orgasme sauf par le coït.
Une grande variété de causes potentielles permet d’expliquer l’anorgasmie. Parmi celles-ci, une maladie chronique, une mauvaise santé générale, la fatigue, la prise de certains médicaments ou une lésion de la moelle épinière. Mais les causes psychologiques sont le plus souvent en cause. La connaissance et le contexte d’apprentissage de la sexualité sont des facteurs susceptibles d’être associés à cette difficulté : connaissance de son corps, message reçus dans l’enfance/l’adolescence sur la sexualité, contexte socio-culturel et religieux, capacité d’érotiser son corps et celui de l’autre, et, bien évidemment, sexualités non-consenties doivent être recherchés dans l’entretien avec la personne se plaignant d’une absence d’orgasme.
Attention aux « pièges classiques » d’une absence d’orgasme liée à une dysfonction sexuelle du partenaire : par exemple, une éjaculation prématurée de l’homme induisant une anorgasmie chez la femme qui n’a « pas le temps » d’atteindre l’orgasme.
Pour prendre en charge cette difficulté, une combinaison de thérapies est souvent nécessaire, dont des approches sexothérapeutiques type « sensate focus ».
Pour en savoir plus :
Parlez-moi d’amour. Patrick Papazian. 2016. Editions de l’Opportun.
Prostate, l’organe mystérieux qui vous veut du bien. Patrick Papazian, Edouard Klein, 2018. Editions de l’Opportun.
Chouchoutez votre vagin ! Patrick Papazian, Caroline Michel. Larousse. 2020.
Médecine sexuelle, fondements et pratiques. Frédérique Courtois, Mireille Bonierbale. Edition Lavoisier, 2016.
Manuel de sexologie. Elsevier édition. Patrice Lopès, François-Xavier Poudat. 4e édition, 2021.
DSM V en ligne (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) : https://psyclinicfes.files.wordpress.com/2020/03/dsm-5-manuel-diagnostique-et-statistique-des-troubles-mentaux.pdf
Ressources disponibles sur https://sexoblogue.fr/

Dysfonction érectile : Également connue sous le nom « d'impuissance » (terme à ne plus utiliser), la dysfonction érectile se caractérise par l'incapacité à obtenir ou à maintenir une érection suffisante pour une activité sexuelle satisfaisante.
Éjaculation précoce ou rapide : Il s'agit d'une situation dans laquelle l'éjaculation survient de manière persistante et répétée avant ou peu de temps après la pénétration sexuelle, entraînant une insatisfaction pour le patient et sa ou son partenaire. Elle a été abordée dans le chapitre Dysfonctions sexuelles.
Diminution de la « libido » ou « appétit sexuel » : Une diminution de la libido ou du désir sexuel peut entraîner une baisse de l'intérêt pour l'activité sexuelle et une diminution de la fréquence des rapports sexuels (voir le chapitre Dysfonctions sexuelles).
Troubles de l'orgasme : Cela peut inclure l'incapacité à atteindre l'orgasme malgré une stimulation sexuelle adéquate (anorgasmie), ou l'orgasme douloureux (dysorgasmie) (voir le chapitre Dysfonctions sexuelles).
Enfin, deux situations rares :
Priapisme : Il s'agit d'une érection prolongée et douloureuse qui survient sans stimulation sexuelle et peut durer plusieurs heures. C’est une urgence médicale.
Courbure du pénis : La maladie de La Peyronie ou les courbures congénitales de la verge sont deux situations dans lesquelles le pénis se courbe de manière anormale lors de l'érection en raison de la formation de plaques fibreuses dans les tissus du pénis ou suite à un mauvais développement de la verge.
Enfin il existe de nombreuses autres dysfonctions sexuelles, beaucoup plus rares, qui ne seront pas abordées ici par souci de clarté.
Chaque dysfonction sexuelle peut avoir des causes et des traitements spécifiques, et il est recommandé de consulter un professionnel de la santé qualifié pour un diagnostic précis et un plan de traitement approprié.
La dysfonction érectile (DE) est un problème courant qui affecte la santé sexuelle des hommes, entraînant des difficultés à obtenir ou à maintenir une érection suffisante pour des rapports sexuels satisfaisants.
Les mécanismes physiologiques de l'érection sont complexes et impliquent une interaction entre le système nerveux, le système vasculaire et les structures anatomiques du pénis.
Lorsqu'un homme est stimulé sexuellement (stimulus visuel, auditif, olfactif, tactile, fantasme…), des signaux nerveux sont transmis de la région génitale au cerveau, entraînant la libération de neurotransmetteurs tels que l'oxyde nitrique (NO) au niveau du pénis. Ceci déclenche alors une cascade de réactions biochimiques qui permettent la relaxation des muscles lisses des vaisseaux sanguins et des corps caverneux du pénis.
Tout dysfonctionnement dans ce processus complexe peut entraîner une dysfonction érectile.
Ce dysfonctionnement préoccupant pour nombre d’hommes doit faire l’objet par le praticien expert d’une histoire détaillée, étape fondamentale pour résoudre au mieux le problème :
Quelle est la fréquence de ?
Quelle capacité à maintenir une érection ?
Y-a-t-il douleur ou inconfort lors des rapports sexuels ?
Bien sûr, il faudra recueillir les antécédents médicaux, les maladies chroniques, les traumatismes pelviens ou les interventions chirurgicales antérieures, documenter les traitements en cours car certains médicaments peuvent influencer la fonction érectile (antihypertenseurs …)
Quelles sont les habitudes de vie ? Tabac, alcool, prise de drogues
Contexte psychologique, cadre de vie, stress ?
L'examen physique approfondi permet d’identifier d'éventuelles anomalies anatomiques, des problèmes vasculaires, neurologiques ou hormonaux, en particulier au niveau des organes génitaux externes.
Il existe des traitements médicaux qui permettent d’améliorer la DE. Ce sont des médicaments administrés par voie orale tels que le sildénafil, le tadalafil et le vardénafil, qui agissent en augmentant le flux sanguin vers le pénis, favorisant ainsi une érection. La différence entre ces molécules réside surtout dans leur délai d’action et dans la durée de leur action.
Ils doivent être pris avant l'activité sexuelle et sont le plus souvent efficaces. Attention à ne pas combiner ces médicaments avec des drogues ou des poppers en raison d’une potentialisation dangereuse.
En cas de contre-indication ou d'échec des médicaments oraux, d'autres options médicales peuvent être envisagées. Les injections intra-caverneuses de médicaments tels que l'alprostadil directement dans le pénis entraînent une dilatation des vaisseaux sanguins et une érection. Cette méthode peut être efficace chez les patients qui ne répondent pas aux médicaments oraux.
Les dispositifs à vide, également appelés pompes à vide ou vacuum créent une dépression autour du pénis, ce qui permet l'afflux de sang et la formation d'une érection. Ils peuvent être utilisés en combinaison avec des anneaux de constriction pour maintenir l'érection pendant une trentaine de minutes.
Lorsque les options médicales ne sont pas efficaces ou appropriées, la chirurgie peut être envisagée pour traiter la dysfonction érectile. L'implantation de prothèses péniennes est une option chirurgicale.
Il existe deux types de prothèses péniennes : les prothèses gonflables et les prothèses semi-rigides.
Les prothèses gonflables sont composées de cylindres implantés dans les corps caverneux du pénis, ainsi que d'une pompe placée dans le scrotum et d'un réservoir de fluide placés dans l’espace prévésical. Lorsqu'un homme souhaite obtenir une érection, il actionne la pompe pour remplir les cylindres de fluide, créant ainsi une érection.
Les prothèses semi-rigides sont des tiges flexibles implantées dans les corps caverneux, ce qui permet au pénis d'être positionné vers le haut ou vers le bas selon les besoins. La littérature rapporte une satisfaction moins grande avec ce dernier dispositif.
La DE comporte de nombreux aspects psychologiques et relationnels, et une approche sexologique complète permet de prendre en compte ces éléments importants.
L'évaluation sexologique de la DE implique une compréhension approfondie de la dynamique relationnelle du patient, de ses antécédents sexuels, de son expérience émotionnelle et de son bien-être psychologique. Le sexologue aide à identifier les éventuels facteurs psychologiques, tels que le stress, l'anxiété de performance, les traumatismes passés ou les conflits relationnels, qui peuvent contribuer à la DE.
Le sexologue peut recommander une thérapie sexuelle, individuelle ou de couple, pour aider le patient à explorer les pensées, les émotions et les comportements liés à la DE. Cette thérapie vise à améliorer la communication entre les partenaires, à réduire l'anxiété de performance et à identifier les schémas de pensée négatifs qui peuvent contribuer au maintien de la DE.
En plus de la thérapie sexuelle, le sexologue peut également recommander des techniques de gestion du stress, de relaxation ou de méditation pour réduire l'anxiété et favoriser un état d'esprit plus « positif » et « détendu ». Il peut également fournir des informations et des conseils sur l'éducation sexuelle, l'exploration de la sensualité et de l'intimité, et l'adaptation des pratiques sexuelles en fonction des besoins spécifiques du patient.
La dysfonction érectile est un problème courant qui nécessite une compréhension approfondie et une approche personnalisée. En adoptant une approche holistique et multidisciplinaire, nous sommes mieux équipés pour répondre aux besoins de nos patients et les accompagner dans leur parcours vers une santé sexuelle satisfaisante.
Cette maladie se caractérise par la formation de plaques fibreuses dans les tissus du pénis, entraînant une courbure anormale de la verge en érection. On ne sait pas très bien ce qui engendre ce phénomène. Il pourrait s’agir de traumatismes répétés ou de micro-lésions du tissu pénien responsables d’une inflammation entrainant de la fibrose qui durcit les tissus, provoquant une courbure du pénis lors de l'érection.
La maladie évolue classiquement en deux phases pendant 12 à 18 mois. Une phase inflammatoire (douleurs à l’érection, déformation qui se fait assez rapidement…) de 3 à 12 mois, puis une stabilisation, avec parfois une calcification de la plaque et arrêt de la déformation.
Elle comporte :
Un temps d’évaluation :
histoire médicale détaillée,
examen physique pour déterminer l'étendue de la courbure du pénis, la présence de plaques fibreuses palpables,
recherche de complications telles que la dysfonction érectile, la perte de longueur du pénis, déformations complexes.
Le temps du traitement :
La prise en charge de la maladie de La Peyronie doit être individualisée en fonction des besoins spécifiques de chaque patient. La prise en charge globale peut inclure des conseils sur la communication avec la/le partenaire, l'adaptation des pratiques sexuelles et des thérapies psychologiques pour surmonter les difficultés émotionnelles associées.
Dans les premiers stades de la maladie, lorsque les symptômes sont légers, on peut avoir recours aux médicaments oraux déjà cités (sildenafil ...) et au stretching de verge (vacuum ou extenseur de verge). Les ondes de choc de basse intensité peuvent aider à diminuer la douleur.
Plusieurs options chirurgicales existent pour traiter la maladie de La Peyronie, dont le choix dépendra de la gravité de la courbure, de la présence de plaques fibrotiques, des symptômes du patient et des préférences individuelles.
Il s’agit d’une érection prolongée et douloureuse qui survient en l'absence de stimulation sexuelle et qui dure plus de 4 heures. Cette situation est une urgence médicale car elle peut entraîner des complications graves si elle n'est pas traitée rapidement. Nous aborderons ici le priapisme en général, en faisant un focus sur son lien avec une maladie génétique du sang, la drépanocytose, qui provoque une hémoglobine anormale responsable d’une obturation des petits vaisseaux, dont ceux du pénis.
Le priapisme peut être classé en deux catégories principales :
le priapisme veineux, également appelé priapisme à bas débit, est le type le plus courant. Il est généralement dû à une accumulation de sang « piégé » dans les corps caverneux du pénis, créant une privation d'oxygène.
le priapisme artériel, quant à lui, n’est généralement pas douloureux et est souvent associé à des traumatismes pelviens ou iatrogènes.
Il est important d'identifier la cause sous-jacente du priapisme si elle existe, qu'elle soit liée à la drépanocytose ou à d'autres facteurs (prise de cocaïne, de neuroleptiques…)
Le traitement du priapisme dépend du type et de la durée de l'épisode.
Devant un priapisme veineux ischémique, le plus fréquent, les premières mesures de traitement consistent généralement en l'application de glace (ou douche froide), la réalisation d’un effort physique ou l’obtention d’une éjaculation. Si ces mesures ne sont pas efficaces, une aspiration du sang « piégé » dans les corps caverneux peut être réalisée. En cas d’échec, un lavage des corps caverneux avec du sérum physiologique peut être réalisé.
Dans certains cas graves ou récurrents, une intervention chirurgicale peut être nécessaire.
Il est essentiel de prendre en compte les aspects psychologiques et émotionnels du priapisme, en offrant un soutien adéquat aux patients et à leurs partenaires…
Un priapisme qui a duré longtemps (24h) expose à une séquelle grave : la fibrose complète des corps caverneux avec comme conséquence une dysfonction érectile majeure, requérant le plus souvent la pose de prothèse.
En conclusion, le priapisme est une urgence.
Dans le cas de la drépanocytose, il est important de sensibiliser les patients à leur risque accru de priapisme, notamment les enfants et les jeunes adultes chez qui parfois la sexualité et le sexe sont tabous, et de mettre en place des stratégies de prévention et de traitement adaptées.
En France, environ un couple sur huit consulte en raison de difficultés à concevoir un enfant. Pour les trois quarts d’entre eux, l’infertilité est d’origine masculine, féminine, ou elle associe les deux sexes. Dans 10 à 25% des cas, elle n’est pas attribuable à un défaut spécifique d’un des deux partenaires. Une prise en charge médicale peut résoudre un certain nombre de cas d’infertilité et la procréation médicalement assistée permet de contourner la plupart des difficultés. Mieux comprendre les facteurs génétiques et environnementaux sous-jacents est un enjeu majeur pour prévenir les problèmes d’infertilité (perturbateurs endocriniens…).
Plusieurs étapes sont nécessaires :
Préciser l’histoire médicale complète : antécédents médicaux et chirurgicaux, médicaments pris, habitudes de vie, facteurs de risque pour l'infertilité, vie sexuelle, pratiques contraceptives éventuelles précédentes et les tentatives antérieures de conception seront abordées.
Examen physique : caractéristiques sexuelles secondaires, recherche de varicocèle (dilatation des veines du scrotum), d’anomalies testiculaires ou génitales…
L’analyse du sperme (spermogramme), est une évaluation essentielle de la fertilité masculine. Des échantillons de sperme seront recueillis et examinés en laboratoire pour déterminer la qualité et la quantité des spermatozoïdes, leur morphologie, leur mobilité.
En complément peuvent s’avérer nécessaires : dosages hormonaux, analyses génétiques pour détecter d'éventuelles anomalies chromosomiques, échographies pour visualiser les organes génitaux, ou d'autres tests spécifiques en fonction des cas.
Quelques unes des approches médicales couramment utilisées :
Traitements hormonaux : certains déséquilibres hormonaux peuvent contribuer à l'infertilité masculine. Des traitements peuvent être proposés sous forme d’injections de substances stimulant la production d’hormones comme les gonadotrophines ou de testostérone.
Médicaments pour améliorer la qualité du sperme : ce peuvent être des antioxydants, la L-carnitine, des vitamines ou des minéraux (vitamine E, vitamine C, zinc ou sélénium), en particulier pour améliorer la mobilité des spermatozoïdes.
Techniques d'assistance à la reproduction : en cas d'infertilité sévère, des techniques d'assistance à la reproduction peuvent être envisagées. Celles-ci incluent la fécondation in vitro (FIV), l'injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI, où un spermatozoïde est directement injecté dans l'ovule pour faciliter la fécondation).
Lorsque des causes « anatomiques » spécifiques sont identifiées comme étant responsables de l'infertilité masculine, des interventions chirurgicales peuvent être envisagées pour traiter ces conditions.
Réparation de varicocèle : la varicocèle est une dilatation des veines (« varices ») situées dans le scrotum. Elle peut entraîner une augmentation de la température des testicules, un stress oxydatif et une altération de la production de spermatozoïdes. La réparation de la varicocèle consiste en la ligature chirurgicale ou l'embolisation des veines dilatées pour rétablir un flux sanguin normal, et donc améliorer la qualité du sperme et augmenter les chances de conception.
Chirurgie des voies spermatiques : dans certains cas, une obstruction des voies spermatiques (après vasectomie par exemple) peut empêcher le déplacement normal des spermatozoïdes. Une intervention chirurgicale, appelée vaso-vasostomie, peut être réalisée pour rétablir la continuité des voies spermatiques. Cela permet aux spermatozoïdes d'être éjaculés normalement pendant les rapports sexuels.
Biopsie testiculaire : dans les cas où il y a absence totale de spermatozoïdes dans le sperme (azoospermie), une biopsie testiculaire peut être réalisée pour prélever des échantillons de tissu testiculaire. Ces échantillons sont ensuite examinés en laboratoire pour récupérer les spermatozoïdes qui pourraient être utilisés dans des techniques d'assistance à la reproduction (FIV ou ICSI).
La prise en charge de l'infertilité masculine nécessite souvent une approche multidisciplinaire, impliquant des urologues, des endocrinologues, des gynécologues et des psychologues, voire sexologues. Nous soulignons l'importance de fournir un soutien psychologique aux couples confrontés à l'infertilité masculine.
En effet, l'infertilité peut entraîner de nombreux défis émotionnels pour les couples, allant de la détresse émotionnelle à l'impact sur l'estime de soi, la relation de couple et la pression sociale. Il est important de reconnaître ces défis et d'offrir un soutien psychologique adapté aux couples infertiles tout au long de leur parcours de fertilité.
La prise en charge de l'infertilité masculine est complexe et nécessite une évaluation approfondie, une connaissance des options de traitement et une approche multidisciplinaire. Elle doit être centrée sur le couple avant tout.
La prise en charge globale de l'infertilité masculine, combinant approches médicales, chirurgicales et psychologiques, est essentielle pour fournir des soins de qualité et soutenir les couples tout au long de leur parcours vers la parentalité.
La contraception est un aspect crucial de la santé reproductive et, traditionnellement, la responsabilité de la contraception repose principalement sur les femmes. Cependant, il existe également des options de contraception pour les hommes qui offrent une alternative efficace et pratique.
Préservatif masculin : le préservatif est largement utilisé et accessible aujourd’hui. Il est également efficaces pour prévenir les infections sexuellement transmissibles (MST/IST) (voir chapitre IST).
Coït interrompu : cette méthode, également connue sous le nom de "retrait", consiste à retirer le pénis de la partenaire avant l'éjaculation. Cependant, cette méthode est peu fiable et présente un risque de grossesse élevé, car des spermatozoïdes peuvent être présents dans les sécrétions pré-éjaculatoires. De plus, une impression de rapport sexuel inabouti est parfois ressentie.
Méthodes basées sur la chaleur : la modification de la température du scrotum va réduire la production de sperme (bain chaud régulier ou utilisation de sous-vêtements serrés, anneaux qui bloquent les testicules au niveau inguinal). Cependant, ces méthodes ne sont pas très fiables et ne doivent pas être considérées comme des méthodes de contraception principales.
La vasectomie : elle consiste à ligaturer les canaux déférents des testicules, bloquant la circulation des spermatozoïdes. Elle est davantage une « stérilisation » qu’une contraception. Elle est aujourd’hui la technique de « référence », avec plus de 98% d’efficacité.
Les domaines clés de recherche et de développement en matière de contraception masculine :
Contraception hormonale masculine : des études sont en cours pour évaluer leur efficacité, leur innocuité à long terme et leur acceptabilité auprès des hommes.
Contraception non hormonale : cela comprend des approches telles que les dispositifs intra-urétraux, les dispositifs de blocage des canaux déférents et les techniques de stérilisation réversible (notion « d’interrupteur déférentiel »). La finalité de ces méthodes est de bloquer physiquement le passage des spermatozoïdes
Vaccins contraceptifs : ces vaccins induisent une réponse immunitaire contre des protéines spécifiques présentes dans les spermatozoïdes, ce qui les rend incapables de fécondation.
Comprendre les attentes, les préoccupations et les besoins des utilisateurs potentiels est essentiel pour concevoir des méthodes contraceptives qui soient acceptables, pratiques et adaptées aux différentes populations, tout en intégrant la notion de coût.
La contraception masculine soulève des questions psychosociales distinctes qui nécessitent une approche de counseling/conseil appropriée et individuelle.
La contraception masculine offre aux hommes l’opportunité de participer activement à la planification et à la gestion de leur fertilité et celle du couple. En comprenant et se formant sur ces les différentes méthodes de contraception masculine, les soignants peuvent offrir à leurs patients des conseils efficaces et adaptés à leurs besoins.
En encourageant un dialogue ouvert et bienveillant, les médecins (et les soignants) jouent un rôle essentiel dans la pédagogie et le changement des mœurs.

























Les progrès spectaculaires en matière de thérapeutique antirétrovirale (ARV) au cours des dernières décennies ont permis de modifier profondément le cours de la maladie VIH, de la « normaliser » et d’allonger la survie. Cependant, les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) ont encore, par rapport à la population générale, un risque plus élevé de maladies que l’on nomme comorbidités, non infectieuses le plus souvent, en lien avec des facteurs de risque persistant chez les PVVIH, leurs traitements et une immunodépression non complètement restaurée.
Les maladies cardiovasculaires sont l’une des principales causes de morbidité et de mortalité chez les PVVIH. Leur risque d’évènement cardiovasculaire est supérieur à celui de la population générale, survenant à un âge plus précoce, avec une exposition plus importante aux facteurs de risque vasculaire connus, comme le tabac.
Des études récentes aux États-Unis, au Danemark et en Suisse suggèrent que le risque d’infarctus du myocarde (IDM) chez les PVVIH non-fumeurs est équivalent à celui de la population générale. Ceci pourrait être lié à une prise en charge plus précoce de l’infection par le VIH, à l’utilisation d’ARV moins toxiques pour le cœur au cours des dernières années, ainsi qu’à une meilleure reconnaissance et prise en charge du risque cardiovasculaire.
Ce qui augmente le risque cardiovasculaire, c’est la fréquence élevée du tabagisme et de la consommation d’autres substances : cannabis, cocaïne. Le tabagisme apparait comme le facteur de risque faisant perdre le plus d’années de vie chez les PVVIH sous ARV.
L’inflammation induite par le VIH aggrave le risque de maladie coronaire. Par contre, il est maintenant bien établi que la suppression virale obtenue avec le traitement ARV est associée à une diminution du risque d’évènement cardiovasculaire chez les PVVIH par rapport à des personnes non traitées ou insuffisamment traitées.
Un risque accru d’événements cardiovasculaires a été associé avec la prise d’IP de 1ère génération, sur la base notamment des données à grande échelle de l’étude observationnelle multi-cohorte D:A:D. Parmi les INTI, l’abacavir, pourrait augmenter, en cas d’exposition récente, le risque cardiovasculaire, encore que ceci n’ait pas été confirmé par d’autres études, françaises en particulier.
La prévention des maladies cardiovasculaires chez les PVVIH est une priorité compte tenu des risques accrus énoncés. Les PVVIH doivent évidemment bénéficier des mêmes approches thérapeutiques que le reste de la population, ce qui n’est pas toujours le cas. Il a été démontré une sous-utilisation des traitements hypolipémiants (anti-cholestérol), notamment des statines, des antihypertenseurs et de l’aspirine chez les PVVIH. En cas d’IDM, les PVVIH bénéficient moins souvent que les patients VIH- de procédure invasive ou de pontage coronarien. De même, les femmes bénéficient moins d’interventions cardiovasculaires, de procédures invasives, d’utilisation d’hypolipémiants et d’antihypertenseurs que les hommes.
Il faut s’assurer que les traitements ARV n’engendrent pas d’interactions médicamenteuses potentiellement délétères. Enfin le thérapeute VIH et l’équipe soignante doivent assurer une prise en charge ferme mais bienveillante des addictions comme le tabac, de la lutte contre la sédentarité ou les habitudes alimentaires néfastes.
Les anomalies lipidiques sont fréquentes au cours de l’infection par le VIH. Elles peuvent concerner une élévation du LDL-cholestérol (LDL-c) « le mauvais cholestérol », une élévation des triglycérides et une baisse du HDL-cholestérol (HDL-c). Les troubles lipidiques sont importants à dépister compte tenu de leur rôle dans l’athérosclérose.
Plusieurs facteurs favorisent ces troubles lipidiques : habitudes alimentaires et sédentarité, notamment.
L’infection par le VIH elle-même, sans traitement ARV, est responsable d’une hypertriglycéridémie et d’une hypocholestérolémie avec hypo-HDL-cholestérolémie qui peut être aggravée par l’utilisation de certains ARV :
les inhibiteurs de la protéase (IP) IP boostés par le ritonavir (lopinavir) ; à un moindre degré, atazanavir ou darunavir ;
les INTI actuellement utilisés (abacavir, tenofovir, TAF) sont neutres sur le statut lipidique, voire l’améliorent (TDF) ;
parmi les INNTI, l’éfavirenz est responsable d’une augmentation des triglycérides et du cholestérol total, alors que la névirapine a un profil lipidique favorable avec une augmentation du HDL-c. L’étravirine, la rilpivirine ou la doravirine présentent un profil lipidique neutre ;
Le bilan lipidique est réalisé après un jeûne de 12 h, en régime alimentaire stable. Il comporte un dosage du cholestérol total, du HDL-c, des triglycérides, et un calcul du LDL-c qui ne peut être effectué quand le taux de triglycérides est supérieur à 4 g/L (4,5 M/L). Il s’intègre dans le bilan initial pré-thérapeutique, puis 6 mois après l’initiation ou la modification d’un traitement ARV.
Avant tout, il faut insister sur l’hygiène de vie globale, avec une amélioration de la diététique, une incitation à l’exercice physique régulier et, le cas échéant, un sevrage tabagique.
Les marges d’amélioration par la personne sont grandes :
réduire absorption excessive d’alcool, de produits sucrés (associés au diabète et à une élévation des triglycérides) ou de graisses d’origine animale (responsables d’une élévation du LDL-c) ;
encourager la perte de poids en rééquilibrant le régime alimentaire. Le recours à une consultation diététique spécialisée permet d’établir un diagnostic personnalisé pour une meilleure prise en charge. La correction diététique peut suffire en quelques semaines à corriger le surpoids et les troubles métaboliques ;
inciter à la pratique d’un exercice physique régulier et soutenu (30 minutes par jour en continu si possible ou 1 heure 3 fois par semaine).
Modifier le traitement en utilisant les ARV les moins délétères pour le profil métabolique peut améliorer le profil lipidique du patient, comme par exemple remplacer un l’IP/r ou l’éfavirenz par un autre INNTI ou une anti-intégrase, moins délétère sur le profil lipidique.
Si les mesures énoncées ci-dessus ne permettent pas d’atteindre l’objectif fixé pour le LDL-c en 3 à 6 mois, l’introduction d’un agent hypolipémiant - comme une statine - est justifiée. Ces médicaments peuvent entrainer des interactions médicamenteuses avec les ARV (crampes musculaires et anomalies du foie).
Les statines sont le traitement de référence pour abaisser le taux de LDL-c, avec un rapport bénéfice/risque démontré sur des études en prévention primaire et secondaire dans la population générale. Seule l’utilisation de statines non métabolisées ou peu métabolisées par le foie (pravastatine, rosuvastatine) est recommandée avec le ritonavir ou le cobicistat.
Il s’agit du paramètre lipidique le plus sensible au régime (alcool, sucres rapides).
L’intervention d’un(e) diététicien(ne) et une adaptation du traitement ARV, en privilégiant les molécules les moins pourvoyeuses de dyslipidémie (cf. ci-dessus), suffisent le plus souvent.
En cas de taux de triglycérides > 5 g/L de façon prolongée, un traitement par fibrates est recommandé. En cas d’hypertriglycéridémie sévère (10 g/L) et persistante, compte tenu du risque de nécrose osseuse et de pancréatite aiguë, les mesures diététiques doivent être drastiques et un traitement par fibrates est justifié.
Le diabète de type 2 est une maladie complexe et multifactorielle, résultant à la fois d’une résistance à l’action de l’insuline et d’un défaut de sécrétion de cette hormone. La susceptibilité au diabète est modulée par des facteurs de prédisposition génétique, des facteurs environnementaux, modifiables ou non, dont certains sont liés à l’infection par le VIH et à son traitement. Le dépistage et le traitement du diabète doivent s’intégrer dans la prise en charge de routine des patients infectés par le VIH, en particulier pour limiter l’excès de risque cardiovasculaire associé à la maladie.
La majorité des études rapportent une fréquence/prévalence du diabète un peu augmentée chez les patients infectés par le VIH en comparaison avec la population générale, avec cependant une importante disparité géographique (19,1 cas pour 1000 personnes-années sur le continent américain, 15,9 cas en Afrique, 8 cas en Europe). D’autres données, issues d’une étude anglaise, rapportent une augmentation de la prévalence du diabète, passant de 6,8% à 15,1% entre 2005 et 2015, en parallèle de l’augmentation des facteurs de risque classiques du diabète, au premier plan desquels l’âge et l’index de masse corporelle (IMC). Ces chiffres préoccupants soulignent la nécessité d’un renforcement des mesures de prévention et de traitement du diabète associé à l’infection par le VIH.
Les facteurs de risque « classiques » du diabète sont au premier plan chez les PVVIH : âge, sexe masculin, antécédents familiaux de diabète, surpoids, obésité, sédentarité. S’y associent les éléments du syndrome métabolique avec la présence d’une hypertrophie adipeuse abdominale, une dyslipidémie métabolique caractérisée par un HDL-c bas et des triglycérides élevés, une hypertension artérielle, une stéatose hépatique (surcharge lipidique du foie = « foie gras »).
L’étude des grandes cohortes, en particulier européennes (D:A:D, Swiss cohort) a clairement montré que l’exposition aux ARV les plus anciens (stavudine, didanosine, zidovudine, et/ou premiers inhibiteurs de protéase) augmentait significativement le risque de développer un diabète, indépendamment des facteurs de risque classiques.
Les ARV plus récents sont moins susceptibles de favoriser la survenue d’un diabète.
L’initiation du traitement ARV est généralement associée à une prise de poids, qui s’intègre dans l’amélioration globale de l’état général des patients.
Le continent africain, où 2/3 des cas de diabète ne seraient pas diagnostiqués en population générale, paie un lourd tribut aux complications métaboliques associées au VIH, du fait de la conjonction de plusieurs de ces facteurs de risque, auxquels il faut ajouter la malnutrition lors de l’initiation des ARV, l’absence d’amélioration du statut nutritionnel sous traitement et les co-infections par le VHC ou la tuberculose.
D’autres facteurs liés au VIH, comme l’inflammation chronique à bas bruit, l’immunodéficience et les perturbations de l’environnement bactérien (microbiote) intestinal peuvent induire une baisse d’efficacité de l’insuline, et favoriser la survenue de diabète.
Le diabète est défini par une glycémie (dosage du sucre dans le sang) supérieure à 7 mmol/l à jeun, ou une hyperglycémie supérieure à 11,1 mmol/l mesurée de façon aléatoire ou 2 heures après la prise de 75 g de glucose à jeun.
Il est également important de dépister les états « pré-diabétiques » (hyperglycémie à jeun supérieure à 5,6 mmol/l) La mesure de la glycémie à jeun doit être surveillée de façon systématique chez tous les patients infectés par le VIH, au moins tous les 6 mois à 1 an.
La prise en charge du diabète chez les patients infectés par le VIH doit, comme en population générale, comporter :
en première intention des mesures hygiéno-diététiques, déterminées en consultation avec un/une professionnel/le de la diététique pour conseiller les patients qui sont, pour beaucoup, loin de connaître les principes d‘une alimentation équilibrée et adaptée à leur mode de vie et à leurs pathologies métaboliques. Une meilleure éducation à l’activité sportive, adaptée à chacun, est également nécessaire ;
une mesure régulière du tour de taille qui permet de surveiller l’évolution de l’adiposité centrale ;
un traitement antidiabétique : la metformine est l’antidiabétique oral de première intention. Il faut être prudent lorsque la metformine est co-administrée avec le dolutégravir, qui entraîne une augmentation des concentrations de la metformine. Les autres antidiabétiques sont utilisés chez les patients infectés par le VIH selon les mêmes recommandations qu’en population générale, et nécessitent un avis diabétologique ;
La prise en charge du diabète s’accompagnera de mesures de prévention et de dépistage du risque cardiovasculaire, du contrôle de la pression artérielle (objectif <130/80 mmHg) et d’un bilan lipidique. Les complications micro-vasculaires du diabète (rétinopathie, néphropathie, neuropathie) seront régulièrement dépistées par l’examen clinique, la recherche de microalbuminurie et la surveillance de la fonction rénale, ainsi que l’examen du fond d’œil.
Les plaintes cognitives sont fréquentes chez les PVVIH, avec une fréquence pouvant varier entre 5% et 36%. La détection et la prise en charge de ces troubles sont importantes du fait de leurs conséquences sociales, professionnelles mais aussi médicales, avec un risque d’échappement au suivi et au traitement. Actuellement, les troubles neuro-vasculaires sont la cause principale de troubles cognitifs chez les PPVIH de plus 50 ans.
Un TNC se définit comme une réduction acquise, significative et évolutive des capacités dans un ou plusieurs domaines cognitifs.
La première étape consiste à écouter attentivement les plaintes du patient et de son entourage, et l’utilisation d’un interrogatoire dirigé permettra une détection efficace. Il existe des questionnaires simples comme le questionnaire de Simioni (tableau 1) aisément réalisable par un auxiliaire paramédical préalablement à la consultation qui permettent d’évaluer le niveau de la plainte.
Certains patients pouvant nier leurs troubles, une attention particulière sera portée aux patients qui ratent régulièrement leurs rendez-vous, ne comprennent pas ou ne prennent pas leur traitement.
En cas de réponse « pathologique » à ces questionnaires ou de plainte avérée et répétée, il faut aller vers une évaluation en milieu spécialisé avec des tests neuropsychologiques plus détaillés.
Depuis l’avènement des ARV, la prévalence des troubles cognitifs sévères chez les PVVIH (démence associée au VIH) a énormément chuté. Cependant, même chez les patients dont la charge virale est indétectable depuis plusieurs années, ces troubles cognitifs semblent un peu plus fréquents que dans la population générale. Les causes de cette dégradation sont multiples. Le rôle des ARV ne peut être exclu (accumulation toxique ou insuffisance de pénétration avec réplication virale cérébrale). La ponction lombaire recherchera la présence de virus par PCR dans le liquide céphalo-rachidien (charge virale, comme dans le sang).
Chez les PPVIH de plus de 50 ans, la démence vasculaire est la cause principale de troubles cognitifs. La prévalence des affections vasculaires, comprenant les accidents vasculaires cérébraux, est anormalement élevée chez les PPVIH. Dans une large méta-analyse incluant près de 800 000 PVVIH, le risque relatif d’accident vasculaire cérébral était de 2,5 fois plus important que dans une population comparable. Outre la fréquence augmentée des facteurs de risque cardiovasculaire (en particulier surpoids, tabagisme et consommation de cannabis ou de cocaïne) et les troubles lipidiques favorisés par certains ARV, la séropositivité VIH est donc un facteur de risque vasculaire pour le cerveau indépendant.
Ce vocable regroupe un large spectre d’affections, dont la plus fréquente et la plus connue est la maladie d’Alzheimer. Un bilan cognitif complet permet d’orienter le diagnostic et de conduire à une prise en charge spécialisée.
Ils constituent une plainte fréquente de consultation. Leur origine est multifactorielle. Ils peuvent être provoqués par certains antirétroviraux comme les INNTI ou les inhibiteurs d’intégrase, des troubles anxieux ou dépressifs, ou une mauvaise hygiène du sommeil, enfin encore par un syndrome d’apnée du sommeil. L’interrogatoire du partenaire est souvent éclairant. Si aucune cause n’est trouvée aisément, une évaluation par enregistrement du sommeil est importante pour établir les différentes composantes des troubles et guider le traitement.
Les troubles anxieux et dépressifs mais aussi les troubles psychotiques sont associés à des troubles attentionnels et dysexécutifs. Les traitements psychotropes aggravent aussi les troubles cognitifs et il faudra trouver un difficile équilibre entre le contrôle des troubles psychiatriques et les effets néfastes des psychotropes sur la cognition. Cela nécessite une collaboration étroite entre les intervenants afin de privilégier les approches non médicamenteuses.
La consommation chronique, même très modérée, d’alcool ou de drogues psychotropes révèle ou aggrave les troubles cognitifs chez les patients dont les réserves cognitives sont entamées.
La toxicité cérébrale des ARV, en particulier ceux présentant une bonne pénétration cérébrale, reste débattue. Certains médicaments peuvent entrainer des troubles du sommeil (inhibiteurs d’intégrase, éfavirenz) mais aussi des troubles de type de sensation d’étrangeté, dépression. Les ARV peuvent aussi favoriser indirectement les troubles cognitifs, par exemple en altérant la qualité du sommeil.
Le bilan doit être réalisé en milieu spécialisé avec un examen neurologique complet avec des tests cognitifs, une imagerie cérébrale (IRM)
Le traitement des affections psychiatriques ou des troubles du sommeil peut nettement améliorer les troubles cognitifs et la qualité de vie des PPVIH. Si le virus VIH réplique au niveau du LCR, les ARV seront modifiés pour obtenir une meilleure pénétration cérébrale. Il est important de réduire les facteurs de risque cardiovasculaire, en optimisant l’utilisation des psychotropes, en arrêtant la consommation d’alcool ou de drogues.
Une approche préventive est importante : contrôle optimal du VIH, réduction des facteurs de risque cardiovasculaires. Une perte de poids et une activité physique régulière sont indiquées, ainsi que le maintien de contacts sociaux et intellectuels.
Une prise en charge optimale des troubles cognitifs avérés requiert une équipe multidisciplinaire composée de médecins, infirmiers, psychologues, neuropsychologues, assistants sociaux, diététiciens, kinésithérapeutes, ergothérapeutes au sein d’une unité thérapeutique spécialisée
Dès le début de l’épidémie de l’infection VIH, certains cancers tels que la maladie de Kaposi, les lymphomes non-hodgkiniens et le cancer du col utérin ont fait partie de la liste des pathologies classant sida, en raison de leur fréquence particulièrement élevée chez les patients infectés par le VIH et immunodéprimés. Si ces cancers ont diminué du fait de l’instauration de traitements ARV efficaces conduisant à l’amélioration de la survie, d’autres cancers sont apparus - appelés non classant sida - souvent plus fréquemment que dans la population générale (de l’ordre de 2 fois plus)
Plusieurs éléments favorisent la survenue de ces cancers :
le déficit immunitaire induit par le VIH ;
les virus oncogènes comme HHV8 (pour le sarcome de Kaposi), EBV (pour les lymphomes), HPV (pour le cancer du col utérin et le cancer anal), VHB et VHC (pour le cancer du foie) ;
le tabac dont la consommation est plus fréquente que dans la population générale.
Le tabagisme est primordial dans la survenue de nombreux cancers : larynx et cancer broncho-pulmonaire (plus de 80%), vessie (plus de 50%), mais aussi oropharynx, œsophage, cavité orale, foie, estomac, nasopharynx, colon, ovaires et rein (entre 8 et 50%). D’autre part, la consommation de cannabis, importante dans certaines sous-populations de PVVIH, est un facteur de risque possible de cancers.
Tableau 2 : Fréquence du cancer chez les PVVIH par rapport à population générale et facteurs associés
Tout doit être fait pour que les patients PVVIH soient traités dans les mêmes conditions que la population générale. La présence d’autres comorbidités, la prise de co-médications, la nécessité de maintenir une charge virale VIH indétectable durant le traitement carcinologique et le risque d’interactions entre les ARV et les molécules utilisées en chimiothérapie rendent nécessaire la mise en œuvre d’une organisation spécifique pour la prise en charge, avec une interaction entre l’équipe soignante VIH et l’équipe oncologique. Cette collaboration permet d’identifier les risques d’interactions médicamenteuses, d’optimiser le traitement ARV quand cela est nécessaire, de définir les chimioprophylaxies vis-à-vis de certaines infections opportunistes et d’établir un protocole de prise en charge de la douleur individualisé, prenant en compte l’exposition éventuelle à des opiacés.
En France existe une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) nationale ONCOVIH, qui permet de discuter des dossiers de patients PVVIH atteints de cancers et d’apporter des conseils thérapeutiques.
L’infection à Human Papilloma Virus (HPV) est une infection courante transmise lors des contacts sexuels, le plus souvent dès les premières relations sexuelles, et qui touche 80 % de la population générale. Il existe 40 génotypes d’HPV infectant la sphère muco-génitale humaine, classés selon leur potentiel carcinogène c’est-à-dire inducteur de cancer :
les génotypes à bas risque (HPV 6 et 11) sont responsables des condylomes (tumeurs bénignes) ;
les génotypes à haut risque (HR) (HPV 16, 18, 31, 33, 35, 39, 45, 51, 52, 56, 58, 59, 68) sont associés aux lésions cancéreuses.
La plupart des infections par HPV sont transitoires et asymptomatiques, mais les infections par HPV HR persistant plus de 12 à 18 mois peuvent conduire à l’apparition de cancers du col de l’utérus, du vagin, de la vulve, du pénis, de l’anus et de l’oropharynx (en particulier des amygdales et de la langue).
Le cancer du col est le cancer induit par HPV le plus fréquent dans le monde, avec 570 000 femmes atteintes en 2018 dont plus de 85 % vivant dans les pays à ressources limitées. Les pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique australe sont les plus touchés. Le nombre annuel de décès est de 311 000, souvent dus à un diagnostic tardif. L’Organisation mondiale de la santé a lancé́ en 2018 un appel à l’action mondiale, relayé par ONUSIDA, pour l’élimination du cancer du col via quatre types d’actions : l’éducation à la santé sexuelle, la vaccination contre HPV, le dépistage du cancer du col et l’accès aux soins curatifs et palliatifs.
Parmi tous les cancers observés dans la population générale, il est estimé que 4,5 % sont dus à HPV. Cette proportion atteint 15 % chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH) Dans le monde, 30 % des cancers dus à HPV touchent les hommes.
Rare dans la population générale (incidence de 1 à 2/100 000 patients-année), il touche beaucoup plus souvent les PVVIH, surtout les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH), mais aussi des femmes VIH+ ayant eu des lésions (pré)cancéreuses du col. D’autres cancers oropharyngés sont liés à HPV.
L’infection à HPV et les lésions cancéreuses associées sont responsables d’une lourde morbi-mortalité des PVVIH dans toutes les régions du monde. La prévention de ces affections hautement évitables passe par la vaccination dès la préadolescence jusqu’à l’âge adulte inclus et par le dépistage actif des cancers du col et de l’anus, soit dans des structures existantes soit en intégrant ces services au sein des consultations VIH. Ces interventions représentent une excellente opportunité́ de sensibiliser la population générale, les patients et les prestataires de soins de santé́ au risque des cancers liés au HPV.
Le vieillissement se définit comme une perte progressive de l’intégrité physiologique conduisant à des atteintes fonctionnelles hétérogènes selon les organes, à une augmentation de la vulnérabilité (en anglais frailty) ainsi qu’à une incapacité à réaliser des actes de la vie courante (en anglais disability). Il s’associe à une augmentation de la prévalence de maladies associées au vieillissement (comorbidités).
En France en 2018, l’espérance de vie était, pour la population générale, de 79,4 ans chez les hommes et de 85,3 ans chez les femmes. L’espérance de vie est très dépendante du niveau socio-économique : il y a 13 ans d’écart chez les hommes et 8 chez les femmes entre les catégories les plus modestes et les plus aisées.
On évalue également l’espérance de vie en bonne santé, dont les définitions sont nombreuses et utilisent souvent l’état de santé perçu par le sujet, très lié à la qualité de vie. En France, cette espérance n’est que de 64,1 ans chez les femmes et de 62,7 ans chez les hommes (Le Monde, 20/02/2019).
Dans les pays occidentaux, les PVVIH sont actuellement, en majorité, traitées et contrôlées. Donc ces personnes vivent plus longtemps.
Dans la cohorte hospitalière française, sur environ 100 000 PVVIH en 2017, 56% des hommes avaient plus de 50 ans et 20,5% plus de 60 ans. Ces chiffres sont respectivement de 41% et 13% chez les femmes.
Les données de la cohorte Suisse, sur 16 532 PVVIH suivies entre 1988 et 2013, montrent que l’espérance de vie à 20 ans a augmenté d’une durée initiale de 11,8 ans à la période des monothérapies à 54,9 ans avec les traitements récents.
Cette espérance de vie reste cependant inférieure à celle de la population générale : les facteurs associés à cette surmortalité sont un niveau d’éducation bas, le sexe masculin, le tabagisme et l’utilisation de drogues intraveineuses, ainsi qu’un taux bas de CD4 au moment de la prise en charge.
En outre, les PVVIH présentent davantage de comorbidités classiquement associées au vieillissement : atteintes cardiovasculaires dont hypertension artérielle, métaboliques, osseuses, neurologiques, rénales, hépatiques, mais également troubles mentaux (dépression, anxiété, consommation importante d’alcool et des drogues).
Dans les pays à ressources limitées, l’espérance de vie à 20 ans est plus faible. Cependant peu de données sont disponibles chez les PVVIH sur l’espérance de vie en bonne santé. Cet aspect est particulièrement important dans cette population vulnérable, accumulant les comorbidités et ayant souvent une qualité de vie dégradée.
Les études de cohortes européennes montrent que la prévalence des comorbidités cardiovasculaires, hypertension surtout, est augmentée chez les PVVIH par rapport à des populations témoins appariées - autrement dit comparables pour tous les facteurs de risque. De plus, la prévalence d’une multimorbidité est également supérieure, comme s’ils avaient dix ans de plus. Un état de fragilité est plus fréquent (10,6% versus 2,7%).
Le vieillissement est évidemment un phénomène complexe et multifactoriel qui implique :
des atteintes du génome de la cellule qui va vieillir (raccourcissement des télomères, qui sont des séquences d'ADN protégeant les chromosomes, instabilité génétique ;
un arrêt de la division des cellules avec un état de sénescence ;
un mauvais fonctionnement des mitochondries – la pompe énergétique des cellules - et une augmentation de la production de métabolites oxydatifs délétères (stress oxydant), des atteintes du métabolisme nutritionnel et du microbiote intestinal.
Tout cela aboutit à la mort progressive des cellules et contrairement à la jeunesse en devenir, celles-ci ne sont pas toujours remplacées. Plusieurs de ces atteintes entrainent un état d’inflammation systémique à bas bruit lié à production par les tissus de molécules de type cytokines pro-inflammatoires qui vont favoriser diabète, atteintes cardiovasculaires et neurodégénératives, cancers.
Chez les PVVIH, les mécanismes de vieillissement sont souvent amplifiés par d’autres facteurs, comme la présence du VIH dans les réservoirs, certains ARV (en particulier les analogues nucléosidiques de première génération, dont l’effet persiste à distance, et certaines anti-protéases). Les co-infections fréquentes, en particulier par le virus CMV, l’atteinte de la flore intestinale ou dysbiose, l’épuisement du système immunitaire sont également en cause dans ce vieillissement accentué.
Les facteurs personnels jouent toujours un rôle important : outre l’âge, le mode de vie à risque des sujets (tabagisme, consommation excessive de toxiques) ainsi que la sédentarité et une alimentation riche en calories et en lipides.
Le prise en charge des comorbidités est le plus souvent du ressort des spécialistes des organes concernés. En présence d’un patient avec plusieurs comorbidités, il est important de vérifier l’ensemble des traitements qu’il prend pour s’assurer de l’absence d’interactions médicamenteuses pouvant conduire à une toxicité, du fait d’une diminution des fonctions hépatiques et rénales chez les sujets âgés.
En cas de polymédication, il faut optimiser et alléger les traitements en prenant en compte le bénéfice clinique et les préférences du patient. Une coordination et une priorisation entre les spécialités permet de privilégier les pathologies à prendre en charge et revoir les seuils acceptables de la tension artérielle et des paramètres biologiques.
Le maintien de l’exercice physique est important et porte principalement sur la prévention des chutes. Cette dernière peut passer par la réduction ou l’arrêt des psychotropes, des antihypertenseurs, des statines. Une prise en charge par des kinésithérapeutes et des podologues peut être utile. Des modifications de l’organisation du domicile et une aide technique sont parfois nécessaires. Une alimentation appréciée et diversifiée est importante pour prévenir la dénutrition et l’atrophie de la masse musculaire.
Cette prise en charge peut parfois permettre de sortir le patient de l’état de fragilité.
Pour en savoir plus
Consultez le livre AFRAVIH, chapitre Comorbidités au cours de l’infection VIH (pp 542-642)
la modification du traitement ARV est discutée en tenant compte du risque métabolique de chaque molécule et de la situation immunovirologique.
Cancer cervical
x 2 à 5,8
+
HPV
Tabac
Lymphome de Hodgkin
x 7 à 26
++
EBV
Cancer de l’anus
x 14 à 80
+
HPV
Age
Pharynx et cavité orale
x 1,6 à 2,3
+
HPV
Alcool, tabac, âge
Cancer du foie
x 2,9 à 10,9
+/-
HBV,HVC
Alcool, âge
Fréquence cancer
PVVIH /population générale
Rôle de l’immunodépression
Virus en cause
Autres facteurs importants
Lymphome non-hodgkinien
x 3 à 76
++++
EBV
Age
Maladie de Kaposi
x 103 à 3640
+++
HHV-8
Age
La sexualité anale englobe toute pratique sexuelle de pénétration ou de stimulation de l’anus (sodomie, anulingus, massage prostatique, « pegging », fist-fucking, etc.).
Le sexe anal peut donc concerner tout être humain quel que soit son sexe biologique et la nature de ses organes génitaux. Il peut s’agir aussi bien d’une pratique hétérosexuelle qu’homosexuelle, d’une pratique solitaire comme de rapports sexuels à deux ou plus. A toutes celles et ceux qui douteraient de la dimension « naturelle » du sexe anal, notons que celui-ci, tout comme l’homosexualité, concerne également une partie du règne animal.
Sans surprise, la pratique anale la plus documentée dans les textes anciens et contemporains et la plus significativement associée au sexe anal est la sodomie. Si cette pratique a toujours existé dans les sociétés humaines, elle a souvent été pénalisée ce qui explique un certain nombre de tabous qui l’entourent aujourd’hui encore.
C’est également une de celles qui comporte le plus de risques infectieux, elle est donc la plus discutée dans le monde médical et scientifique. Pour toutes ces raisons cette pratique sera davantage évoquée ici que les autres pratiques sexuelles anales.
Selon l’OMS « la santé sexuelle s'entend comme une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que comme la possibilité de vivre des expériences sexuelles agréables et sûres, exemptes de coercition, de discrimination et de violence ». C’est la raison pour laquelle nous aborderons ici non seulement les risques du sexe anal et les façons de les prévenir ou de les réduire, mais aussi le plaisir et des clés pour l’atteindre en toute sécurité.
Pratique parfois considérée comme déviante puisque ne menant pas à la reproduction et entourée des tabous liés aux fonctions excrétrices, surtout dans les civilisations où ces fonctions naturelles sont jugées honteuses, la sodomie est perçue de manière très diverse selon les sociétés et les religions.
La sodomie entre hommes, si elle ne fut pas la pratique sexuelle privilégiée, fut pratiquée dans la Grèce antique comme dans la Rome antique, dans le cadre d'un rapport sexuel entre un homme plus âgé, le maître, actif, et son élève, passif, plus jeune. Elle était alors considérée comme une façon de transmettre le savoir.
En Occident, il faut attendre les 13e et surtout 14e et 15e siècles pour assister à une condamnation de la sodomie et des rapports homo-érotiques, en général par les Églises, en parallèle des débuts de la sacralisation du mariage. Cependant, cette condamnation essentiellement morale ne débouche que rarement sur une pénalisation active des pratiques, sauf dans les cas aggravés (viol, pédophilie, utilisation politique ou en cas de trouble avéré à l'ordre public). Une des premières lois la réprimant est la « loi de 1533 sur la Bougrerie » introduite par Henri VIII en Angleterre.
Sous l'Inquisition espagnole des 16e et 17e siècles, la sodomie est considérée comme un « péché abominable », qualifiée de « parfaite » si elle est le fait de deux hommes et « imparfaite » (donc moins grave) si elle est le fait d'un homme et d'une femme.
Le terme inclut secondairement d'autres pratiques sexuelles, telles que fellation, cunnilingus, masturbation, etc. La sodomie peut valoir à ses auteurs le bûcher, les galères, la prison à vie ou pour plusieurs années, le bannissement, des pénitences diverses ou simplement le fouet en public, selon la gravité de l'acte soigneusement pesée par les inquisiteurs. Cependant, dans ce domaine, la justice civile est encore plus sévère et plus expéditive.
En 1750, l'affaire « Diot-Lenoir » voit la dernière peine capitale appliquée contre des « sodomites » en France : Jean Diot et Bruno Lenoir, pris en flagrant délit de sodomie en pleine rue, sont étranglés et brûlés publiquement en place de Grève, à Paris. Cette affaire fait cependant figure d'exception, car dans les faits la plupart des procédures pour sodomie à l'époque se soldent par une simple remontrance et les procès aboutissant à une condamnation sont extrêmement rares et généralement le fait de circonstances aggravantes.
En 1791, en pleine Révolution, la France est le premier pays à décriminaliser l'homosexualité, l'Assemblée nationale législative ne retenant pas le « crime de sodomie » dans la loi.
Au Canada, la loi anti-sodomie est révoquée en 1969 par Pierre Elliott Trudeau ; elle demeure néanmoins régie par le code criminel (article 159) où il est stipulé que la sodomie est interdite entre personnes âgées de moins de 18 ans et que sa pratique doit avoir lieu dans l'intimité. Plusieurs états des États-Unis ont des lois prohibant la sodomie jusqu’à notre époque, tandis qu'en Inde elle est réprimée par la section 377 du Code pénal de 1860.
De nos jours, certains pays criminalisent toujours la sodomie entre adultes consentants, allant même jusqu’à requérir la peine de mort (un peu moins d'une dizaine de pays encore à ce jour). D'autre part, ces interdictions peuvent être remplacées par celle de l'homosexualité de manière générale.
En 2007, quinze ans après la deuxième enquête nationale sur le comportement sexuel des Français (ACSF, 1992), l'Inserm, l'ANRS et l'Ined ont réalisé une enquête « Contexte de la sexualité en France » auprès des 18-69 ans. Selon celle-ci, 37 % des femmes et 45 % des hommes avaient une expérience de la sodomie (contre respectivement 24 % et 30 % en 1992. Toutefois, la pratique restait marginale puisque 12 % des femmes de 25-49 ans disaient la pratiquer souvent ou parfois. L'analyse détaillée de l'enquête ACSF montrait que la sodomie n'était pratiquée qu'avec une fréquence de 1 à 3 % au cours d'un rapport sexuel.
Le principal déterminant de la pratique de la sodomie est la « précocité » sexuelle.
En France, l'enquête ACSF a montré que la sodomie est d’autant plus pratiquée que les rapports sexuels ont été plus précoces : parmi les femmes de 25 à 34 ans, 44 % des « précoces » ont expérimenté cette pratique, contre 25 % des « tardives ».
Aux États-Unis, la sodomie n'est pas non plus entrée dans les pratiques régulières des Américains : 9 % des personnes interrogées lors de l'enquête nationale National Health and Social Life Survey (NHSLS, conduite en 1992) disaient avoir eu un rapport anal au cours de l'année écoulée, et seulement 2 % des hommes et 1 % des femmes lors de leur dernier rapport sexuel. Des chiffres similaires à ceux de l'étude nationale australienne conduite en 2001-2002 : 0,9 % des hommes et 0,7 % des femmes âgés de 16 à 59 ans avaient pratiqué la sodomie lors de leur dernier rapport sexuel.
Dans l'enquête américaine NHSLS, parmi les 18-44 ans, 5 % des femmes trouvaient la sodomie (réceptive) attractive ; chez les hommes, 14 % étaient attirés par la sodomie insertive et 11 % par la sodomie réceptive. Toujours chez les 18-44 ans, 18 % des femmes (22 % des hommes) trouvaient attirant le fait d'avoir leur anus stimulé par le doigt de leur partenaire, cependant que 13 % des femmes et 26 % des hommes étaient attirés-es par le fait de stimuler l'anus de leur partenaire.
Au Royaume-Uni, selon l'étude National Survey of Sexual Attitudes and Lifestyles répétée en 1990, 2000 et 2010, la sodomie est une pratique en nette augmentation dans la population hétérosexuelle. La part des personnes interrogées ayant pratiqué la sodomie au cours de l'année écoulée était respectivement de 7,0 %, 12,2 % puis 17,0 % chez les hommes, et de 6,5 %, 11,3 % puis 15,1 % chez les femmes. Cette augmentation était plus importante chez les plus jeunes.
Contrairement à une idée reçue, la sodomie n'est pas une pratique banale ou systématique au sein de la population homosexuelle masculine. Dans une étude de 2011, menée par l'université de l'Indiana et la George Mason University aux Etats-Unis, seules 35 % des personnes homosexuelles interrogées affirmaient avoir pratiqué la sodomie au cours de leur dernier rapport sexuel. La fellation (pratiquée à 72,7 %) et la masturbation mutuelle (pratiquée à 68,4 %) seraient des pratiques nettement plus courantes.
La pratique du sexe anal comporte un certain nombre de risques infectieux et physiques qu’il importe de bien connaître pour les éviter au maximum ou y faire face lorsqu’on y est confronté.
Toutes les IST se transmettent par voie anale, qu’ils s’agissent de virus (VIH, VHB, VHC, HPV, herpès, Mpox) ou de bactéries (syphilis, gonocoque, chlamydia, LGV).
Ces agents infectieux ne sont pas spécifiquement lié au sexe anal, ils se transmettent aussi par voie vaginale, parfois même buccale.
En revanche, le risque d’infection au niveau anal est renforcé, surtout dans les relations anales réceptives (ou passives) comme indiqué ci-dessous pour le VIH
Pourquoi ce risque augmenté ? Parce que la muqueuse anale est beaucoup plus fine que la muqueuse vaginale, qu’elle est fortement vascularisée (présence de nombreux vaisseaux sanguins), elle est donc facilement sujette aux lésions et aux micro-coupures qui laissent passer les agents infectieux dans l’organisme.
Les infections au niveau anal, lorsqu’elles ne sont pas traitées rapidement, peuvent parfois se compliquer en fistule ou en abcès.
Il existe également des infections spécifiques à la sexualité anale : l’hépatite A (causée par le VHA) et la shigellose (causée par les bactéries shigella). Elles sont causées par des agents infectieux qui se transmettent généralement par voie fécale-orale, c’est-à-dire lorsqu’une personne non infectée ingère de l’eau ou des aliments contaminés par les matières fécales d’un sujet infecté. Ainsi, les pratiques oro-anales comme l’anulingus - même si l’anus est en apparence propre - peuvent être vectrices de transmission.
Dans la très grande majorité des cas, les symptômes de ces deux maladies sont comparables à une tourista ou à une gastro-entérite et passent en quelques jours. Pendant cette période, il est recommandé de bien s'hydrater, de manger des aliments qui ralentissent le transit comme le riz et, bien entendu, d’éviter les parties de jambes en l’air.
Les Papilloma Virus Humains (HPV) sont des virus très fréquents, il en existe plus de 150 types. Ils peuvent infecter la peau et les muqueuses et être responsables de lésions bénignes ou malignes. La transmission se fait quasiment exclusivement par contact sexuel.
La plupart des infections par les papillomavirus ne donnent aucune lésion. Dans 90 % des cas, l’infection est transitoire et s’élimine naturellement en une à deux années après la contamination sexuelle.
Dans 10 % des cas, l’infection persiste et peut entraîner des anomalies (lésions) au niveau de la muqueuse du col de l'utérus et de l’anus. On parle alors de lésions précancéreuses. Ces lésions peuvent évoluer vers un cancer 10 à 15 ans après l’infection par le virus.
Le HPV sont également responsables de condylomes. Les condylomes sont de petites excroissances qui ressemblent à des verrues sur les organes génitaux, le périnée et l’anus mais aussi la bouche, l’urètre, le vagin ou sur le col de l’utérus. Les condylomes se manifestent parfois plusieurs années après la contamination et ne sont pas toujours visibles à l'œil nu. Lorsqu'ils le sont, ils peuvent être plats, surélevés en forme de crêtes de coq (d’où le nom qu’on donnait à cette IST), de couleur rosée ou grisâtre. Ils entraînent parfois des démangeaisons ou des saignements lors des rapports sexuels.
Le principal risque physique d’une sexualité anale est la fissure anale.
Il s’agit d’une dégradation de la peau autour de l'anus. Une fissure peut apparaître à la suite de pratiques sexuelles réalisées trop rapidement, trop violemment et sans lubrifiant, par exemple. Dans certains cas, la fissure peut être hémorragique si elle touche le système hémorroïdaire, provoquant ainsi de grosses douleurs.
Les hémorroïdes ne sont pas provoquées par le sexe anal. Si on a une maladie hémorroïdaire un peu développée, la sexualité anale peut déclencher des symptômes (douleurs, saignements). Mais en l’absence de maladie hémorroïdaire, il n’y a aucun problème.
La prévention ou la réduction des risques dans la sexualité anale recoupe largement la prévention sexuelle générale. Ce chapitre se concentrera donc davantage sur les spécificités de la prévention dans le sexe anal.
Comme dans les rapports vaginaux ou oraux, l’utilisation de préservatifs externes ou internes pour les rapports anaux réduit de façon importante les risques de transmission des différentes IST. Le préservatif interne (parfois appelé « préservatif féminin ») peut en effet s’utiliser pour les pratiques anales. Il suffit pour cela d’enlever l’anneau intérieur.
En cas d’anulingus il est possible d’utiliser une digue dentaire ou un carré de latex, cela peut notamment réduire les risques de transmission de la syphilis ou de l’hépatite A.
Pour la pratique du fist, les gants en latex permettent d’éviter la transmission du VIH ou de l’hépatite C en cas de saignement. Dans cette pratique les gants ont également l’avantage de recouvrir les ongles. Là encore, l’utilisation de gel (spécial fist de préférence) est indispensable pour éviter douleur et saignement. Eviter l’utilisation de pots de gel collectif (préférer d’autres types de conditionnement ou avoir son propre lubrifiant).
Pour les mêmes raisons, il est préférable d’éviter le partage de jouets sexuels (ou d’y mettre un préservatif que l’on change à chaque changement d’utilisateur) et d’utiliser son propre embout de douche ou sa propre poire pour faire un lavement anal.
Le gel lubrifiant : l’anus ne se lubrifiant pas naturellement en cas d’excitation, il est particulièrement important d’utiliser du gel lubrifiant en cas de pénétration anale pour éviter toute rupture de préservatif mais aussi pour prendre plus de plaisir.
Sans préservatif, le gel permet également de réduire les risques de transmission en limitant les micro-saignements qui peuvent être à l’origine de la transmission d’IST.
Si la salive est communément utilisée, son efficacité réduite dans le temps n’en fait pas le lubrifiant idéal. Une attention particulière doit donc être portée au choix du produit. Gras, il aura l’inconvénient d’altérer l’étanchéité et la résistance des préservatifs ou, parfumé, celui d’irriter les muqueuses.
Les meilleurs produits sont les gels à base d'eau, incolores et inodores ou ceux à base de silicone. Sont déconseillées les crèmes lubrifiantes anesthésiantes. Il en existe plusieurs sur le marché. L'anesthésie de la zone, pour confortable qu’elle soit, interdit de percevoir les signaux d'alerte et fait courir des risques dont les conséquences fâcheuses ne se révèleront qu’une fois son action dissipée. Par ailleurs, ces crèmes sont conçues pour annihiler toutes sensations, ce qui dans le cadre d'une quête de plaisir est par principe contreproductif.
En tout état de cause, la douleur doit questionner le désir de sodomie et ou la qualité de sa préparation ou de sa réalisation.
S’observer et se toucher c’est important. Pour prendre du plaisir certes, mais aussi et surtout pour vérifier si tout va bien. On peut ainsi découvrir une excroissance, une tache, une douleur qui n’est pas habituelle et qui peut être le symptôme d’une maladie ou d’une infection.
Cela s’applique à de nombreuses parties du corps que nous avons l’habitude de voir tous les jours. L’emplacement de l’anus fait qu’on y pense moins et que c’est moins facile. Mais avec un miroir et un peu de souplesse c’est possible !
Certaines associations distribuent de petits miroirs portatifs appelés « Mat’Anus » qui permettent de se regarder l’orifice sans avoir à se tordre le cou. Ça marche aussi avec un petit miroir de retouche maquillage !
Au toucher on peut également se rendre compte que quelque chose cloche. Des petits boutons en nombre peuvent être synonymes de condylomes, une ulcération ferme et indolore évoquera plutôt le chancre d’une syphilis et une excroissance douloureuse plutôt une hémorroïde…
Bien sûr rien ne vaut le diagnostic d’un médecin mais cela peut vous mettre sur la piste et vous alerter pour prendre un rendez-vous médical et faire un check-up.
Pour éviter la transmission du VIH dans les rapports anaux, la PrEP et le TasP ont largement prouvé leur efficacité. ( RENVOYER
Il serait dommage de se priver des rares vaccins dont nous disposons dans le champ de la santé sexuelle !
Quand on a une sexualité très active et/ou qu’on fait partie des publics les plus exposés, il est recommandé de faire certains vaccins en plus de ceux déjà recommandés pour la population générale : VHA, VHB (désormais obligatoire pour les enfants), Mpox et HPV (voir ci-dessous).
Les préservatifs protègent imparfaitement contre l’infection à HPV car ils ne couvrent pas l’intégralité des parties génitales. Seule la vaccination des jeunes filles et garçons (idéalement avant l’âge du premier rapport sexuel) protège contre les HPV.
La vaccination HPV ne fait pas partie des 11 vaccinations obligatoires mais est fortement recommandée pour :
Toutes les jeunes filles (depuis 2007) et également tous les garçons (depuis 2021) âgés de 11 à 14 ans révolus. Le vaccin est d'autant plus efficace que les jeunes filles et les jeunes garçons n'ont pas encore été exposés au risque d'infection par les HPV.
En rattrapage, pour les personnes des deux sexes de 15 à 19 ans révolus non encore vaccinées.
Les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), jusqu’à l’âge de 26 ans révolus en prévention des lésions précancéreuses anales, des cancers anaux et des condylomes (petites verrues).
Deux vaccins sont utilisables :
un vaccin bivalent (qui protège contre les virus de types 16 et 18) : Cervarix® ;
un vaccin nonavalent : Gardasil 9®, qui protège contre les HPV de type 6, 11, 16, 18, 31, 33, 45, 52 et 58, en cause dans 90 % des cancers du col de l'utérus, 80 % des cancers de l’anus et 90 % des verrues anogénitales (condylomes).
Ces vaccins ne sont pas interchangeables et toute vaccination initiée avec l'un d'eux doit être achevée avec le même.
Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) recommande que toute nouvelle vaccination soit initiée avec le vaccin Gardasil® 9 pour les personnes non antérieurement vaccinées.
La prescription et la vaccination contre le HPV (papillomavirus) peuvent être réalisées par les pharmaciens, sages-femmes et infirmiers.
La France accuse un retard important en terme de vaccination des enfants mais aussi des jeunes adultes.
Lorsqu’on est régulièrement exposé aux risques sexuels (multi partenariat, appartenance à des publics fortement exposés) il est important de faire des dépistages réguliers des IST, même sans symptômes.
En effet beaucoup d’infections au niveau rectal sont asymptomatiques. En se faisant dépister régulièrement on accroit la probabilité de détecter des infections plus précocement, donc de pouvoir les traiter et ainsi éviter d’éventuelles complications pour les personnes concernées mais également leur transmission à d’autres personnes.
A titre d’exemple, pour le VIH, la Haute Autorité de Santé recommande un dépistage tous les 3 mois chez les HSH et tous les ans pour les personnes usagères de drogues ou nées dans des zones à forte prévalence comme l’Afrique sub-saharienne.
En plus de la régularité il est important que le dépistage soit complet : il ne doit pas se limiter à la prise de sang car celle-ci ne peut pas détecter certaines infections courantes comme la gonorrhée ou la chlamydiose.
Le dépistage doit donc également se faire par prélèvement ou auto-prélèvement local sur les 3 sites (gorge, anus, organes génitaux).
Pour anus et gorge il faut autant que possible favoriser l’auto-prélèvement. Pour les organes génitaux on sait désormais que l’analyse du premier jet d’urine suffit : pas besoin de prélèvement intra-urétraux douloureux et pénibles.
En cas d’infection, le prélèvement rectal est souvent révélateur chez les HSH, plus que le prélèvement pharyngé ou le premier jet d’urine. On peut ici citer le Pr Charles Cazanave (Smit CHU Bordeaux) « C’est l’anus qui parle le plus ».
La proctologie est une spécialité de la gastro-entérologie qui s’intéresse aux maladies de l’anus et du rectum.
La consultation de proctologie est recommandée chez les publics les plus exposés au risque de cancer lié au papillomavirus, même en l’absence de symptômes. Cette consultation préventive permet de détecter précocement la présence de souches d’HPV cancérogènes.
La consultation de proctologie peut être réalisée par un médecin généraliste formé à cette pratique (par exemple dans un Cegidd ou un centre de santé sexuelle).
Evidemment il est également possible d’avoir recours à un-e médecin spécialisé en proctologie ou « proctologue ».
Le sexe anal peut être aussi douloureux qu’intensément agréable. Le désir est un facteur primordial de réussite de cette expérience. En préambule de toutes recommandations devrait s'énoncer que l'on ne s'essaie pas à la sodomie dans la crainte et uniquement pour contenter un partenaire particulièrement demandeur, mais que l'on s'y livre sur la base d'une excitation pleine et entière ou d'une curiosité authentique.
Une publication, parue dans « The Journal of Sexual Medicine », a montré que les qualités de confiance, de connexion émotionnelle, d’intimité et de curiosité sont les principaux déterminants d'une perception positive de la sodomie.
Le sexe anal fait partie du registre des possibles, mais jamais des obligatoires. Il serait trompeur de prétendre que l’accomplissement érotique se joue à l’aune de cette pratique. La réussite du projet érotique est avant tout liée à la complicité et la capacité des amants-es à s'émouvoir. C’est à chacun de trouver en conscience la voie qui convient pour que les vécus érotiques soient équitablement porteurs de jouissance et de satisfaction émotionnelle.
Pour ressentir plus de plaisir et éviter les risques, il peut être utile de bien comprendre l’anatomie de l’anus.
L’anus est situé à l’extrémité du canal anal, dans le prolongement de l’intestin, et se compose de nombreuses couches de tissu extrêmement fin. L’intérêt majeur, c’est que ces couches sont remplies de terminaisons nerveuses et de vaisseaux sanguins. C’est d’ailleurs l’une des zones les plus riches en terminaisons nerveuses, dans le corps masculin comme dans le corps féminin, en dehors bien sûr du clitoris et du frein du pénis. L’anus est au moins aussi sensible que le vagin ou la hampe du pénis.
Deux muscles, les sphincters, contrôlent l’ouverture de l’anus. Le premier est situé à l’extérieur, permettant ainsi de contrôler l’ouverture et la fermeture de l’anus. Le second, le sphincter interne fonctionne de lui-même, de manière mécanique et en dehors de notre propre volonté. Les sphincters font partie du plancher pelvien, tout comme les muscles du périnée et les muscles PC (pubo-coccygiens). Les sphincters sollicitent donc ces derniers et vice-versa. Les muscles PC se contractent involontairement au moment de l’orgasme. Ce sont eux qui permettent de faire bouger son pénis lorsqu’il est en érection, ou encore de serrer son vagin. Le périnée, lui, améliore le niveau de plaisir et d’orgasme grâce au travail de ses muscles.
Concernant le canal anal, il est composé de ces mêmes tissus et se déploie sur 3 à 5 cm. On trouve ensuite le rectum qui prolonge le canal anal sur une quinzaine de centimètres. Le rectum est de forme courbée et ne sert que de canal pour faire transiter les selles. C’est le côlon sigmoïde qu’on trouve dans le prolongement du rectum qui se charge de retenir les selles.
Quand, malgré une bonne lubrification, un partenaire attentionné et un désir véritable, les sensations douloureuses font obstacle, il est conseillé de pratiquer quelques exercices de dilatation : quelle que soit la méthode choisie (doigté, godemichet, sextoy) la douleur ne doit jamais s’inviter. L’idée n’étant pas d’apprendre à la supporter, mais à trouver le relâchement psycho-physique qui conduit à la volupté. Pour ce faire, il est essentiel d'adopter une respiration lente et profonde. L’idéal est sans doute de s’exercer en solitaire, de manière à garder une totale maîtrise de l’approche et de la gestuelle. Il peut aussi être envisagé d’utiliser ses doigts ou un sextoy afin d’habituer l’anus à recevoir un corps étranger.
Les préliminaires à la sodomie ne doivent être ni négligés ni réalisés en mode porno. À défaut d'une mise en condition ad hoc, l'expérience a de fortes chances d'être traumatisante tant sur le plan physique (microfissures anales) que psychique. C'est à chaque personne/couple d'inventer le mode opératoire qui convient pour stimuler le désir et favoriser le relâchement. L’anulingus fait partie des possibles préparatifs à la sodomie. Les réactions du-de la partenaire sont des indicateurs précieux, il-elle ne doit pas hésiter à exprimer clairement ses ressentis, sauf à ce que son amant-e soit en mesure de déchiffrer sa communication implicite.
Le lavement fait partie des préparatifs pour la pratique de la sodomie. Les personnes dites « passives » le réalisent souvent. Pourtant, on trouve rarement d’indications techniques et pratiques pour optimiser cet aspect de votre hygiène intime.
Que vous soyez adepte de la sodomie ou que vous pratiquiez le fist-fucking, l’hygiène anale et rectale aide à se sentir à l’aise pendant l’acte et vous permet de vous concentrer sur votre plaisir et sur celui de votre partenaire.
Ce n’est cependant pas un passage obligé ni une méthode scientifique de réduction des risques sexuels : certaines personnes peuvent avoir d’autres envies et préfèreront une sexualité anale sans lavement.
Cette petite BD sur le lavement est libre de droit, elle a été créée par « Blindjaw » et traduite en français par @Sidasol et @David_Disparos
Dans le fist-fucking, ce n’est pas la douleur qui est recherchée. Les amateurs de « fist », selon le docteur Michel Ohayon, médecin sexologue, ne se situent pas dans la culture du
Celui qui est pénétré peut certes ressentir des douleurs, comme pour la sodomie, mais contrairement au BDSM, ce ne sont pas elles qui déclenchent le plaisir.
Voici quelques recommandations pour allier plaisir et prévention :
le fisteur doit avoir les ongles bien coupés ;
ce qui pénètre dans le rectum d’un fisté ne pénètre que dans le sien ;
lors d’une séance collective de fist, chaque fisteur porte un gant ;
lors d’une séance collective de fist, chaque fisté dispose de son propre pot de crème lubrifiante ;
La pénétration par la main demande patience et douceur.
« Le fist est un plaisir qui s’apprend, vient se chercher et peut être subtil, bien plus que la pénétration classique. La recherche n’est pas la dilatation, mais plutôt d’avoir quelque chose à l’intérieur de soi. » - Docteur Michel Ohayon, médecin sexologue
Sources :
Sexosafe.fr
Sida-info-service.org
Ameli.fr
Santé.fr
Les infections sexuellement transmissibles (IST) ont été identifiées depuis des siècles.
Certaines ont longtemps été graves, comme la syphilis pouvant aller jusqu’à mettre en jeu le pronostic vital. Elles ont de tous temps et dans toutes les sociétés été vécues comme « honteuses », mal diagnostiquées et mal traitées.
Les IST sont liées à des agents infectieux de différentes natures. Il peut s’agir de bactéries, de virus ou de parasites.
Mais avec les progrès médicaux et de la recherche, des traitements sont aujourd’hui disponibles pour chaque IST.
Très souvent, ces infections sont silencieuses, asymptomatiques, d’où l’importance de faire des dépistages réguliers pour le VIH et les IST.
Être infecté et ne pas le savoir vous fait prendre le risque de transmettre ces infections et d’entretenir la dynamique des épidémies d’IST. Gérer sa sexualité c’est aussi gérer les conséquences potentielles de partenaires occasionnels, multiples…
Selon le professeur Laurent Abramowitz (gastro-entérologue), un bon lavement est un lavement qui se fait en douceur. Le côlon est fragile. Inutile de forcer ou d’être violent : les conséquences peuvent être graves. Quelle que soit la méthode ou le type de lavement choisi, le bon lavement obéit à quelques règles :
prévoir de faire votre lavement deux heures avant le rapport. Il faut absolument éviter de le faire juste avant le début d’un acte sexuel ;
pour un lavement anal, introduisez le jet et comptez quelques secondes : l’organisme expulsera naturellement l’eau. Renouvelez l’opération jusqu’à ce que l’eau soit limpide ;
si vous utilisez une poire à lavement, une seule pulvérisation est suffisante ; l’eau ne doit être ni trop chaude ni trop froide. L’idéal est que la température soit proche de celle du corps, à savoir 37°C ;
le jet de la douche doit être à basse pression. Lorsque vous retournez le tuyau en hauteur, le jet doit être d’environ 10 centimètres ;
si vous utilisez une canule vissée sur le tuyau, il faut la lubrifier et, surtout, ne pas l’enfoncer entièrement dans le rectum ;
pour un lavement complet, introduisez le jet et comptez 30 secondes. Une partie de l’eau va se coincer dans les côlons. Il vous faudra alors expulser cette eau en poussant de l’intérieur et en prenant une position accroupie ou allongée dans votre baignoire (sur le côté gauche), de manière à faire descendre l’eau qui pourrait stagner dans le côlon. Il est important d’avoir en tête l’image de son appareil digestif pour faciliter l’évacuation de l’eau.
Quand sait-on que son lavement est terminé ? Les premiers signes de l’efficacité d’un lavement sont d’abord visibles à la fin de celui-ci :
l’eau expulsée doit être claire et limpide ;
vous ne devez sentir aucune odeur désagréable.
La présence dans les derniers jets d’expulsion de mucus intestinal est normale : elle est le signe de la fin du lavement. Il peut également arriver que vous ayez des flatulences après un lavement. Si une odeur de selles se dégage, c’est que le lavement n’est pas terminé.
Il est possible d’utiliser des suppositoires laxatifs pour évacuer ses selles, sans passer par un lavement aqueux. Ce médicament est efficace — il est d’ailleurs utilisé pour préparer les examens endoscopiques rectaux. Il convient de ne pas avoir recours à ce type de traitement pour chaque lavement afin de ne pas créer de dysfonctionnement dans l’expulsion normale des selles et ne pas irriter les muqueuses du rectum.
Si vous pratiquez souvent le lavement, favorisez une alimentation riche en fibres. Les fibres jouent un vrai rôle de « nettoyant » des intestins. Ce sont les légumes (lentilles, petits pois, soja…) et les fruits secs qui en contiennent le plus. Certains utilisent du psyllium (déconseillé si vous souffrez de diabète). Le psyllium est disponible en magasin bio ou en pharmacie.
une seule personne met les doigts dans le pot de crème lubrifiante.
Tetu.com
Wikipedia.org
Catie.ca



Comme dans tout phénomène de transmission, il est important d’interrompre les chaines de ces transmissions d’infections souvent silencieuses et « tabous» car sexuelles. D’où l’importance de la notification aux partenaires sexuels, afin qu’eux aussi se fassent dépister et soient traités s’ils en ont besoin. Des applications numériques ont été développées pour aider à la notification aux partenaires.
L’IST peut être symptomatique mais attention, certains symptômes peuvent parfois être trompeurs et une IST peut ainsi être confondue avec une autre maladie ou une banale allergie et ne pas être traitée correctement si un dépistage n’est pas fait.
La gravité des IST non traitées, c’est leur évolution à bas bruit, avec de l’inflammation des organes génitaux par exemple et des conséquences en particulier chez les femmes sur la fécondité.
Dès lors qu’une personne a une vie sexuelle active et plusieurs partenaires (dans l’année), il est nécessaire de faire des dépistages du VIH et des IST (avec prise de sang, prélèvements dans la gorge et dans l’anus, analyse d’urine) régulièrement.
Le rythme varie selon les recommandations nationales et/ou les moyens disponibles localement. Il s’agit de réaliser une prise de sang pour dépister la syphilis et une éventuelle infection par le virus de l’hépatite C, et des prélèvements au niveau de la gorge, de l’anus pour les HSH et du vagin pour les femmes, à l’aide d’un écouvillon, et un prélèvement d’urines de 1er jet pour les hommes.
« Urines de 1er jet » ne signifie pas forcément les premières urines émises le matin au réveil, il faut un minimum de deux heures sans avoir uriné pour qu’on puisse considérer qui ces urines sont de « 1er jet ». En fait, comme la bactérie se multiplie dans l’urètre, les urines, en passant dans l’urètre, vont chasser les bactéries présentes. Il faut donc laisser un minimum de temps (2 heures) pour pouvoir retrouver des bactéries en quantité suffisante pour être détectées par une technique d’amplification des acides nucléiques (TAAN, ou PCR).
Ces dépistages peuvent être faits dans un laboratoire de ville (avec une ordonnance de votre médecin traitant, et bientôt, en France, sans ordonnance) ou à l’hôpital pour les personnes suivies dans un centre de santé sexuelle (pour la PrEP par exemple), ou en CeGIDD (centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic du VIH et des IST).
En CeGIDD, les analyses (et le traitement au cas où il y aurait une infection) ne seront pas facturées.
Il faut inciter les partenaires à suivre cette même routine de dépistage : plus il y aura d’IST dépistées et traitées rapidement et moins elles se transmettent. Le dépistage régulier est le meilleur moyen de lutter contre ces épidémies.
En dehors des dépistages réguliers, en cas de symptômes évocateurs d’IST ou en cas de notification par un partenaire d’une éventuelle exposition à une IST, il faut rapidement consulter un médecin (médecin traitant, médecin en CeGIDD ou aux urgences hospitalières). Il est important pour les médecins de bien questionner l’individu afin de préciser s’il s’agit d’un homme ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes pour étendre le dépistage à la gorge et à l’anus.
Si une IST bactérienne est diagnostiquée, un traitement sera prescrit. Environ trois semaines à un mois après ce traitement, il faudra refaire un dépistage de contrôle pour s’assurer que l’IST est bien guérie. Pour la syphilis, le contrôle du test – qui ici mesure des anticorps et non pas l’agent pathogène directement - se fait 6 mois après le traitement.
Les IST bactériennes sont très contagieuses, ce qui explique qu’elles soient très répandues. Leur traitement repose sur des antibiotiques.
Par contre il n’est pas possible actuellement de se protéger contre ces IST bactériennes ni par un traitement préventif ni un vaccin. Mais la recherche est en cours pour en prévenir certaines.
L’usage du préservatif peut limiter le risque de transmission de la majorité de ces IST. Mais le préservatif n’étant en général pas utilisé pour la sexualité oro-génitale, il ne prévient pas de la transmission par cette voie-là.
Période d’incubation entre la contamination et l’apparition des symptomes : courte, 48-72 heures
Moment de la guérison : 7 jours après le traitement
Période contagieuse : entre la fin de l’incubation et la guérison
La période d’incubation d’une infection par un gonocoque est courte, et, pendant celle -ci, il n’est pas possible de dépister l’infection.
La période de contagioisité commence dès l’apparition des symptômes – s’ils apparaissent. En effet, après cette période d’incubation (délais entre l’infection et l’apparition des premiers symptômes), l’apparition de symptômes n’est pas systématique, d’autant si l’infection est localisée au niveau de la gorge par exemple.
Au niveau génital (dans la verge), le gonocoque entraîne une urétrite avec des brûlures urinaires très douloureuses, d’où l’appellation « chaude-pisse ». Habituellement, un écoulement purulent épais (de couleur blanche, jaune ou verte) est retrouvé. C'est d'ailleurs le motif de consultation.
Au niveau anal, le gonocoque peut provoquer des douleurs et des glaires purulentes dans les selles, mais est souvent asymptomatique.
Quand il est dans la gorge, le gonocoque est généralement asymptomatique.
Le gonocoque, lorsqu’il n’est pas dépisté, et donc pas traité, peut circuler par voie sanguine et infecter les articulations en provoquant des arthrites à gonocoque. Il peut également provoquer une épididymite. De plus, l’individu continue de le transmettre à ses partenaires sexuels.
Lorsqu’une infection à gonocoque est diagnostiquée, qu’elle soit symptomatique ou pas, un traitement antibiotique par une injection unique de ceftriaxone (céphalosprorine de 3ème génération, injectable par voie intra-musculaire) est recommandé, sauf en cas d’allergie à cet antibiotique, auquel cas les autres possibilités sont une forte dose d’azythromycine par voie orale (2 grammes en une prise unique) ou une injection intra-musculaire unique d’un antibiotique de la famille des aminosides.
Il ne faut plus utiliser les fluoroquinolones (ciprofloxacine) pour le traitement du gonocoque en raison de la forte résistance à cette famille d’antibiotique. Les céphalosporines de 3ème génération par voie orale (cefixime) pénètrent mal notamment le pharynx, et ne doivent donc pas être utilisées.
La guérison est obtenue 7 jours après le traitement, il faudra bien demander aux individus de ne pas avoir de rapports sexuels sans préservatif dans les 7 jours suivant le traitement.
Période d’incubation : 2 à 3 semaines
Période de guérison : 7 jours ou 3 semaines (LGV) après le traitement
Période contagieuse : entre la fin de l’incubation et la guérison
Après la période d’incubation, l’apparition de symptômes n’est pas systématique.
Lorsque la chlamydia au niveau anal est provoquée un sérovar du groupe L, la maladie est alors appelée LGV (lymphogranulomatose vénérienne). La symptomatologie peut être très bruyante, avec d’importantes douleurs anales, des spasmes.
Au niveau génital, l’infection à chlamydia peut provoquer une gêne ou des brûlures urinaires modérées. Il peut également y avoir un écoulement clair/transparent.
Au niveau anal, la chlamydia sérovar L peut provoquer une LGV, avec parfois des formes pseudo-tumorales au niveau de l’anus. Le sujet se plaint de ténesmes, de fausses envies, de douleurs lors des selles, de glaires dans les selles et de diarrhées.
Quand elle est dans la gorge, la chlamydia est généralement asymptomatique.
Outre les douleurs, une chlamydia non traitée peut provoquer des fistules anales.
De plus, tant qu’elle n’est pas traitée, il existe toujours un risque de transmission aux partenaires sexuels.
Lorsqu’une infection à chlamydia est diagnostiquée, un traitement antibiotique est recommandé, et on considère que l’individu est guéri 7 jours après la fin du traitement antibiotique. Longtemps, l’infection à chlamydia a été traitée par une dose unique d’azithromycine. L’avantage est la prise unique.
L’inconvénient de cette prescription est la pression de sélection exercée par les antibiotiques de la famille des macrolides sur Mycoplasma genitalium, avec une augmentation très importante de la résistance de M. genitaliumaux macrolides. C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui, il est préférable d’utiliser la doxycycline pour le traitement de chlamydia, mais l’inconvénient est que le traitement doit être poursuivi pendant 7 jours, ce qui peut compromettre l’observance. En cas de LGV, le traitement doit être de 3 semaines.
C’est une bactérie particulière. Il y a quatre type de mycoplames pouvant atteindre l’homme : Mycoplasma pneumoniae qui est responsable de pneumopathies atypiques, et trois autres : Mycoplasma genitalium, Mycoplasma hominis et Ureaplasma urealyticum. Mycoplasma genitalium est celui qui est responsable d’IST.
Période d’incubation : 2 à 3 semaines
Période de guérison : 7 jours après le traitement
Période contagieuse : entre la fin de l’incubation et la guérison
L’infection à M. genitalium est souvent asymptomatique. En raison des difficultés à traiter cette infection du fait d’un haut niveau de résistance de M. genitalium à plusieurs familles d’antibiotiques, il n’est pas recommandé de rechercher cette bactérie, ni lors d’un dépistage systématique, ni lors d’un dépistage en cas de symptômes évocateurs d’IST. Dans ces deux derniers cas, on recherchera uniquement le gonocoque et chlamydia. En cas de découverte fortuite d’une infection à M. genitalium chez un sujet asymptomatique, il ne faut pas traiter cette infection, et ce quel que soit le site prélevé. En cas d’urétrite ou de rectite symptomatique avec identification d’une infection à gonocoque et/ou à chlamydia, il faudra traiter l‘agent identifié de façon approprié selon les recommandations locales. En cas de persistance des symptômes après un traitement bien conduit, on est donc face à un échec de traitement, et dans ce cas-là, on pourra prescrire une recherche de M. genitalium. En cas d’une 1èreconsultation pour symptômes évocateurs d’IST mais avec des résultats de prélèvements négatifs pour gonocoque et chlamydia, on prescrira dans un 1er temps un traitement mixte qui couvrira et le gonocoque (une injection de ceftriaxone) et chlamydia (doxycycline par voie orale pendant 7 jours). En cas d’échec de ce double traitement probabiliste, on sera alors amené à prescrire une recherche de M. genitalium. Le traitement de M. genitalium repose sur les macrolides, ou les fluoroquinolones, et requiert l’obtention d’un avis spécialisé. La guérison n’étant pas systématiquement obtenue avec un 1er traitement antibiotique, il est nécessaire de faire un test de contrôle un mois après le traitement pour vérifier que le traitement a bien été efficace.
Le mycoplasme ne provoque généralement pas de symptôme lorsqu’il est présent dans la gorge ou dans l’anus.
S’il est présent au niveau génital, les symptômes peuvent ressemblent à ceux du gonocoque ou de la chlamydia.
Le mycoplasme est l’IST bactérienne que l’on a découverte le plus récemment. Les connaissances à son sujet sont encore incomplètes.
Petite histoire de la syphilis Appelée aussi vérole, la Syphilis serait originaire des Amériques et aurait contaminée l'Europe suite au retour des marins de Christophe Colomb. D'abord introduite en Italie (d'où son surnom de « mal de Naples »), elle gagne la France pendant les guerres d'Italie (1494-1559), puis tout le continent européen. Histoire du traitement de la syphilis
L’usage de la pénicilline, découverte par Flemming en 1928 et qui constitue le premier traitement réellement efficace (ainsi que dénué d’effets secondaires) de la maladie ne se généralise qu’à partir de 1943, soit plus de quatre cents ans après l’apparition des premiers cas de syphilis en Europe. Il est amusant, surtout si l’on tient compte des ravages exercés par la maladie dans le passé, de constater que, depuis les années 1940, le traitement de référence de la syphilis n’a jamais été modifié et qu’aucune résistance significative à la pénicilline n’a été rapportée.
Pour en savoir plus sur l'histoire de la syphilis : Revue médicale de Liège - Histoire de la syphilis
Stade primaire
3 semaines après l’infection : apparition d’un chancre (une ulcération) qui va cicatriser en 10 jours
Stade secondaire
2 à 3 mois après l’infection : roséole (boutons ou rougeurs sur le torse) pendant quelques jours
Puis éruptions sur les paumes des mains et les plantes des pieds et érosions sur la langue pendant quelques jours.
Période de guérison : 10 jours après le traitement
La syphilis est à la fois très contagieuse (elle se transmet par simple contact) et difficile à diagnostiquer parce que ses symptômes ne sont pas douloureux et ne durent pas longtemps.
Il est important de faire dépister la syphilis (par prise de sang) tous les 6 mois : si une infection par la syphilis a moins d’un an, le traitement consiste en une injection unique d’antibiotique de la famille de la pénicilline : la benzyl-benzathine pénicilline (en cas d’allergie à cet antibiotique il faudra prendre des comprimés de doxycycline pendant 15 jours).
Si l’infection par la syphilis a eu lieu il y a plus d’un an ou s’il est impossible de la dater (pas de précédent dépistage) il faudra faire 1 injection par semaine pendant 3 semaines. En cas d’allergie à cet antibiotique, seul un spécialiste pourra définir un traitement alternatif.
Seul l’usage du préservatif permet de limiter le risque de transmission de la syphilis.
Suite à une infection par la syphilis, un chancre unique, à fond propre, non douloureux, va apparaître au bout de 3 semaines sur le sexe ou dans l’anus ou dans la gorge. Ce chancre peut transmettre la syphilis par simple contact. Il va cicatriser en 10 jours. Comme il n’est pas douloureux, s’il est dans la gorge ou au fond de l’anus, il passera totalement inaperçu.
Quelques mois après l’infection, si elle n’a pas été traitée initialement, une roséole syphilitique va apparaître pendant quelques jours. Il s’agit de rougeurs légères ou de boutons sur le torse, c’est donc une éruption maculo-papuleuse (lésions légèrement en relief) qui a comme caractéristique de ne pas être prurigineuse. Cette roséole n’est pas douloureuse et ne démange pas. Elle n’est pas contagieuse et peut passer inaperçue. Un médecin peut facilement la confondre avec une allergie ou une irritation.
Après la roséole, des éruptions, les « syphilides », vont apparaître sur les paumes des mains et les plantes des pieds. Ces syphilides sont très caractéristiques de la syphilis à son stade secondaire. La langue peut également se parsemer d’érosions. Ces éruptions et crevasses sont contaminantes par simple contact et vont disparaître en quelques jours.
Les symptômes de la syphilis sont discrets et peuvent être confondus avec une allergie. En l’absence de dépistage, et donc en l’absence de traitement, la maladie peut évoluer pendant plusieurs années en passant inaperçue. Elle peut atteindre le système nerveux central, les yeux (uvéite). Elle peut provoquer des dégâts parfois irréparables.
Outre le VIH (qui ne sera pas abordé ici) les IST virales sont les différentes hépatites, l’herpès et les papillomavirus (HPV).
Contrairement aux IST bactériennes, il existe des vaccins pour prévenir la plupart des IST virales, sauf pour l’hépatite C, qu’il est impossible de prévenir par une vaccination, mais qui est la seule IST virale pour laquelle on dispose actuellement d’un traitement curatif efficace permettant d’en guérir.
Après guérison d’une hépatite A ou B, il n’est plus possible de l’attraper à nouveau.
L’hépatite A (VHA) n’est pas vraiment une IST, mais elle peut se transmettre suite à un contact oro-anal ou digito-anal. La contamination passe forcément par la bouche. Le virus est résistant à l’air et peut survivre sur les doigts le temps qu’on les porte à la bouche. Il peut également passer par de l’eau contaminée, par l’alimentation, le partage de couverts, etc.
Elle est très contagieuse.
Période d’incubation : 15 jours
Période de contamination : avant l’apparition des symptômes et 3 semaines après leur disparition
La plupart du temps, l’hépatite A guérit seule.
Les symptômes sont les mêmes pour toutes les hépatites : urines foncées, selles décolorées, teint de peau jaune, blanc des yeux jaune, grosse fatigue et possibilité de fièvre.
L’hépatite A est généralement bénigne et guérit toute seule. Dans certains cas, elle peut prendre une forme sévère entrainant une fatigue importante nécessitant un arrêt de travail. Et dans des cas extrêmement rares, elle peut être « fulminante », c’est-à-dire que l’infection et la réaction de l’hôte contre l’infection conduisent à la destruction du foie, il faut alors procéder à une greffe en urgence. Dans tous les cas, en cas de diagnostic d’hépatite virale aigue, il faut éviter tout médicament ou aliment hépatotoxiques, comme le paracétamol par exemple, ou la consommation d’alcool.
De véritables épidémie d’hépatite A ont été rapportées chez les HSH, notamment à Montréal dans la fin des années 1990. Ces épidémies ont été contrôlées grâce à la mise en place de campagnes de vaccination massives. Si vous n’avez pas déjà été infecté par l’hépatite A, et que vous n’êtes pas immunisé, il est recommandé de vous faire vacciner. La vaccination comprend deux doses, une 1ère puis une 2éme six mois plus tard.
L’hépatite B (VHB) est très contagieuse et se transmet par voie sexuelle, par la salive, par une eau contaminée, par le partage de couverts, etc.
Il est possible de guérir tout seul d’une hépatite B, vous êtes alors immunisé contre ce virus. La guérison est plus fréquente lorsqu’on est infecté dans l’enfance (80% de chance de guérir) par rapport à une infection attrapée à l’âge adulte (25% de chance de guérir).
Si l’hépatite B ne guérit pas, elle devient chronique. Malheureusement, les traitements actuellement disponibles ne permettent pas de se débarrasser du virus une fois que l’infection chronique est installée. Il faut donc prendre un traitement à vie pour contrôler la maladie, et l’avantage du traitement est (i) d’empêcher l’ évolution de la maladie vers la cirrhose et éventuellement vers le carcinome hépato-cellulaire et (ii) d’empêcher la transmission car lorsqu’elle est traitée, l’hépatite B n’est plus contagieuse.
Les symptômes sont les mêmes pour toutes les hépatites, mais ils sont plus rares pour l’hépatite B : urines foncées, selles décolorées, teint de peau jaune, blanc des yeux jaune, grosse fatigue et possibilité de fièvre. Dans tous les cas, en cas de diagnostic d’hépatite virale aigue, il faut éviter tout médicament ou aliment hépatotoxiques, comme le paracétamol par exemple, ou la consommation d’alcool.
Une hépatite B, lorsqu’elle est devenue chronique, ne peut pas guérir. Elle peut alors provoquer une insuffisance du foie, une cirrhose du foie, voire un cancer du foie si on laisse la maladie évoluer plusieurs années sans traitement. Le traitement stoppe la progression de l’infection et son évolution vers le cancer. Le traitement empêche également la transmission du virus.
Si vous n’êtes pas immunisé contre le virus de l’hépatite B et que vous n’êtes pas infecté, il est recommandé de vous faire vacciner. Le vaccin nécessite 3 injections et vous êtes protégé 10 jours après la seconde injection. Lorsqu’une personne est porteuse du virus de l’hépatite B de façon chronique, tout l’entourage doit se faire vacciner.
L’hépatite C (VHC) n’est pas une IST, elle se transmet par contact avec le sang, par exemple avec le partage de matériel de snif (paille) ou de slam (seringue, aiguille) et en cas de traumatisme de la muqueuse anale (fist, partouze, viol, pénétration sans lubrifiant, partage de sextoy…). Une micro lésion suffit pour permettre la contamination. Si vous avez ces pratiques, un dépistage de l’hépatite C est à faire tous les 3 mois.
Les autres IST, si elles provoquent des ulcérations (syphilis, herpès), sont également des portes d’entrée pouvant favorise l’infection par le virus de l’hépatite C.
Les symptômes sont les mêmes pour toutes les hépatites : urines foncées, selles décolorées, teint de peau jaune, blanc des yeux jaune, grosse fatigue et possibilité de fièvre. L’hépatite C ne présente des symptômes que dans la moitié des cas. Dans tous les cas, en cas de diagnostic d’hépatite virale aigue, il faut éviter tout médicament ou aliment hépatotoxiques, comme le paracétamol par exemple, ou la consommation d’alcool.
L’hépatite C peut guérir spontanément, mais vous pouvez vous faire à nouveau infecter, vous ne serez pas immunisé. Même après une guérison, vous serez séropositif à vie au test de dépistage de l’hépatite C. Pour vérifier que vous n’êtes pas recontaminé, il faudra faire un test de la charge virale de l’hépatite C. Si elle ne guérit pas, l’hépatite C devient chronique et peut, en l’absence de traitement et si on laisse la maladie évoluer, provoquer une cirrhose du foie, voire un carcinome hépato-cellulaire.
L’hépatite C se traite par la prise quotidienne de comprimés pendant 2 à 3 mois. Après le traitement vous êtes guéri, mais vous pouvez à nouveau être infecté par le virus de l’hépatite C.
L’hépatite E (VHE) n’est pas vraiment une IST, mais elle peut se transmettre par contact avec l’anus.
La contamination passe forcément par la bouche. Le virus est résistant à l’air et peut survivre sur les doigts le temps qu’on les porte à la bouche. Il se transmet le plus souvent par de l’eau contaminée, mais peut être dans l’alimentation et se transmettre par voie sanguine.
Période d’incubation : entre 2 et 8 semaines (le plus souvent, 40 jours)
La plupart du temps, l’hépatite E guérit seule en 3 à 5 semaines.
Les symptômes sont les mêmes pour toutes les hépatites : urines foncées, selles décolorées, teint de peau jaune, blanc des yeux jaune, grosse fatigue et possibilité de fièvre. L’hépatite E ressemble beaucoup à l’hépatite A.
Dans la majorité des cas, l’hépatite E n’a pas de symptômes. Elle passe donc inaperçue. Dans tous les cas, en cas de diagnostic d’hépatite virale aigue, il faut éviter tout médicament ou aliment hépatotoxiques, comme le paracétamol par exemple, ou la consommation d’alcool.
L’hépatite E est généralement bénigne et guérit toute seule. Dans certains cas, elle peut prendre une forme sévère (fulminante) entrainant une fatigue importante nécessitant un arrêt de travail. Et dans des cas extrêmement rares, elle peut détruire le foie, il faut alors procéder à une greffe en urgence. Il peut parfois y avoir des atteintes rénales et/ou neurologiques.
Elle peut également devenir chronique, notamment chez les personnes ayant un système immunitaire déficient. Dans ce cas, un traitement antiviral permet de réduire les effets de l’infection.
Un vaccin contre l’hépatite E existe en Chine, mais n’est pas encore homologué dans les autres pays.
L’herpès se transmet par simple contact. L’incubation, très variable, peut durer quelques jours comme quelques années. Le virus peut se trouver au niveau de la bouche, du sexe ou de l’anus. Lorsque l’on a été infecté par le virus de l’herpès, il n’est pas possible de s’en débarrasser et on peut avoir des poussées qui se répètent plus ou moins fréquemment. Il existe un traitement antiviral pour accélérer la cicatrisation des lésions lors d’une poussée, mais il n’est pas possible d’empêcher de nouvelles poussées de revenir au même endroit.
La période de contagion démarre avant les poussées et dure jusqu’à la cicatrisation des lésions.
Avant une poussée, il y a une sensation de picotement ou de démangeaison. Puis la poussée vient sous la forme d’une éruption de vésicules (également appelée bouquet, ce sont de toutes petites cloques regroupées au même endroit). L’éruption dure moins d’une semaine et peut revenir de manière totalement imprévisible au même endroit.
Le diagnostic se fait visuellement par le médecin, il n’y a pas de test de dépistage.
L’herpès ne guérit pas et est contaminant à chaque poussée (la contamination commence quelques jours avant une poussée).
Les éruptions sont inconfortables et peuvent démanger, elles sont parfois douloureuses quand l’atteinte est anale.
Le virus n’a pas d’effet direct sur la santé, mais les érosions engendrées sont de potentielles portes d’entrée pour le VIH et les autres IST.
Si vous sentez qu’une poussée va arriver, vous devez prendre rapidement le traitement pour accélérer la cicatrisation et limiter le temps pendant lequel vous êtes contagieux. Il est donc important, lorsque vous êtes porteur du virus de l’herpès, d’avoir toujours une boîte de traitement d’avance pour pouvoir commencer immédiatement, dès la sensation des 1er symptômes, var le traitement nécessite une prescription médicale et le traitement sera moins efficace si vous attendez d’obtenir un rendez-vous avec votre médecin pour pouvoir le commencer.
Il existe un traitement antiviral pour accélérer la cicatrisation des lésions lors d’une poussée. Mais aussi, s’il est pris dès le tout début des symptômes, le traitement peut raccourcir, voire freiner, la poussée. Lorsque les poussées sont très rapprochées, ces traitements peuvent aussi être utilisés en préventif de façon continue (un comprimé tous les jours)par les personnes déjà infectées par l’herpès pour limiter le rythme d’apparition des poussées, sans toutefois totalement les supprimer. Toujours en préventif, le médicament limite le risque de transmission. Mais, lors des poussées, l’usage du préservatif et le seul moyen de protéger ses partenaires.
Les papillomavirus (ou HPV) sont une grande famille de virus très contagieux qui se transmettent par simple contact sur la peau. Les papillomavirus créent des verrues.
Certains HPV donnent des verrues génitales que l’on appelle aussi « condylomes » ou « crêtes de coq ». On peut les avoir sur le sexe, les testicules, le pubis, sur la vulve, dans le vagin et sur le col de l’utérus, mais également autour ou dans l’anus.
La durée d’incubation du virus est très variable (de quelques semaines à quelques années) et le virus est très contagieux lorsque les verrues apparaissent.
Le diagnostic se fait visuellement par le médecin, il n’y a pas de test de dépistage.
Si on a déjà eu une infection par des HPV, il faut se faire dépister régulièrement pour contrôler qu’il n’y a pas de récidive.
Les HPV peuvent guérir tous seuls ou revenir. Lorsqu’on a des condylomes, il faut les faire enlever ou brûler par un médecin spécialiste (généralement un dermatologue lorsqu’ils sont localisés sur le sexe ou les testicules, et par un proctologue lorsqu’ils sont localisés au niveau anal, un gynécologue lorsqu’ils sont situés au niveau de la vulve ou du vagin ou du col de l’utérus) pour limiter le risque de transmission. Certains HPV peuvent évoluer vers un cancer s’ils ne sont pas traités. Mais la plupart des HPV ne sont pas cancérigènes.
Un vaccin permet d’être protégé contre les HPV les plus dangereux (ceux qui sont le plus à risque d’évoluer vers un cancer). Il est recommandé pour à partir de 11 ans pour les jeunes garçons et les jeunes filles, avec un rattrapage possible jusqu’à l’âge de 19 ans pour les femmes et les hommes hétérosexuels, et pour les HSH jusqu’à l’âge de 26 ans.
Les morpions et la gale sont des parasites externes qui se transmettent lors des rapports sexuels.
Il n’y a pas de traitement préventif, mais il existe des solutions pour s’en défaire et ne pas les transmettre.
Ces parasites ne sont pas sensibles au savon : être infecté par les morpions ou la gale n’est donc pas le signe d’une mauvaise hygiène.
Les morpions s’attrapent lors des rapports sexuels lorsque deux corps sont en contacts rapprochés et prolongés. Ils s’installent généralement dans les poils du pubis et aux alentours.
Les morpions provoquent des démangeaisons, surtout le soir. Les morpions se voient à l’oeil nu (ce sont des acariens proches des poux), il n’y a pas de test de dépistage.
Tant que les morpions ne sont pas éliminés, vous pouvez les transmettre à vos partenaires sexuels. Ils n’ont pas d’effet particulier sur la santé.
Comme pour les poux, un traitement avec un insecticide adapté est nécessaire pour éliminer les morpions. Raser ou tondre les poils de la zone infectée peut faciliter le traitement.
La gale se transmet lors des rapports sexuels lorsque deux corps sont en contacts rapprochés et prolongés. C’est un parasite minuscule, invisible à l’oeil nu, qui se reproduit sous la peau.
La période d’incubation dure 2 à 3 semaines. La personne contaminée est contagieuse dès que les symptômes apparaissent et jusqu’à 10 jours après le traitement.
La gale provoque des démangeaisons très fortes, principalement au niveau du sexe et des zones entre les doigts. Elle peut s’installer sur tout le corps, sauf le visage.
Les démangeaisons sont dues aux sillons que creuse le parasite dans la peau.
Il faut faire un prélèvement en laboratoire pour établir le diagnostic.
La gale est très contagieuse et vous risquez de la transmettre à vos partenaires sexuels si vous ne vous traitez pas. Outre les démangeaisons elle n’a pas de conséquence sur la santé, sauf dans de rares cas où il peut y avoir une surinfection bactérienne des lésions de grattage.
Il faut prendre 2 fois des comprimés à 15 jours d’intervalle. Tous les habitants de votre foyer doivent prendre le traitement en même temps, même s’ils n’ont pas de symptôme.
Il faut également décontaminer les vêtements, les draps et les serviettes de toilette en les lavant à 60° C, ou en les repassant après lavage si vous les lavez à une température plus faible. Des sprays contre la gale existent pour désinfecter les matelas, les coussins et tout ce que vous ne pouvez pas laver. Après le traitement, les symptômes peuvent durer encore 15 jours. Mais au bout de 10 jours vous ne serez plus contagieux. Si les symptômes durent plus de 15 jours, c’est que vous êtes toujours infecté. Il faut donc à nouveau consulter et éventuellement renouveler le traitement.

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Il s’agit ici d’aborder les enjeux de santé liés à l’association entre pratiques sexuelles et consommation de produits psychoactifs, à des fins notamment de recherche de sensations, de plaisirs, de désinhibition, d’endurance et de performances. Nous ne traiterons pas de consommation de drogues ou de sexualité en général, mais bien de l’articulation et l’interaction entre les deux, tout en rappelant certains grands concepts clés tels que la réduction des risque, dans l’objectif de donner à tout professionnel de santé les clés pour échanger avec une personne qui a des pratiques associant sexe et produits psychoactifs.
Produits psychoactifs (drogues, psychotropes) : selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), un produit psychoactif est “toute substance psychotrope ou psychoactive qui, en raison de leur nature chimique, perturbe le fonctionnement du système nerveux central (sensations, perceptions, humeurs, sentiments, motricité) ou qui modifie les états de conscience.” L’OMS ne fait pas de distinction entre produit licite et illicite. Ces produits peuvent être naturels, synthétiques, ou semi-synthétiques. Leurs effets peuvent être stimulants, dépresseurs, anxiolytiques, neuroleptiques, tranquillisants, empathiques, hallucinogènes ou encore relaxants.
Et si on utilisait les bons mots avec les personnes !
Nous disposons de données qui témoignent de l’usage de produits psychoactifs dès la préhistoire. Dans un article publié en 2014 et intitulé “The Origins of Inebriation” (Aux origines de l’ébriété, en français), Elisa Guerra-Doce indique que des traces relatives à l’usage de boissons fermentées ou alcoolisées et de plantes psychotropes sont retrouvées dans de nombreuses recherches archéologiques sur la période préhistorique. L’usage tant médicinal que récréatif ou encore de l’ordre du sacré (rituels) de produits psychoactifs peut être constaté à toutes les époques et dans toutes les civilisations. L’opium faisait l’objet d’un commerce dès l’Antiquité et on retrouve d’ailleurs des traces de son usage en Mésopotamie, en Egypte, dans la Grèce et la Rome antiques, d’abord pour un usage médical mais aussi avec des consommations récréatives et des situations d’abus. Au fil des siècles, l'utilisation médicale de l’opium fait référence pour alléger les souffrances des malades.
Or, la consommation de produits s’accompagne très souvent d’une désinhibition pouvant jouer un rôle précurseur dans l’activation du désir sexuel, voire être utilisée à cette fin même. De nombreux écrits de l’époque moderne mentionnent l’usage d’aphrodisiaques à base d’opium, de cocaïne ou de MDMA (ecstasy). L’usage des drogues est peu à peu associé aux “vices” dès le 19e siècle et l’avènement de l’hygiène publique et de la morale. On parle des “morphinomanes” ou des "morphinées" pour désigner ces femmes consommatrices de morphines “esclaves de leur corps”. Dans le conflit racial qui divise les Etats-Unis, l’usage de la cocaïne et de majijuana est associé dès le début du 20e siècle aux hommes noirs, accusés de consommer ces drogues et de les utiliser pour détourner et violer des femmes blanches, ou encore aux immigrés mexicains. Le mouvement contre-culturel hippie des années 1960-1970 est caractérisé par un désir de libération sexuelle et d’un usage récréatif des drogues, notamment les hallucinogènes tels que le LSD. La lutte contre les drogues devient alors un enjeu de lutte raciale et réactionnaire face à un modèle de société jugé décadent et dépravé. Une lutte qui alimente durablement les politiques de pénalisation et de répression des usagers.
Les discours réactionnaires font également une part belle à l’association entre drogues et homosexualité, entre autres, auxquels se rajoutera plus tard le sida. A partir des années 1990 les pratiques d’usages de drogues dans un cadre sexuel commencent à être documentées de manière plus scientifique. On retrouve ainsi des enquêtes auprès de travailleuses du sexe. A la fin des années 2000 émerge également le concept de “chemsex” (ou party’n’play en Amérique du Nord) pour caractériser l’usage de produits psychoactifs chez les gays dans un cadre sexuel, en groupe ou non, notamment du GHB/GBL ou des nouveaux produits de synthèse tels que la méphédrone ou encore le crystal meth. De nombreuses enquêtes témoignent de la diffusion, dans les années 2010, de leur usage en contexte sexuel, avec la description de pratiques de “slamming” (injection) de ces produits ou encore la multiplication des accidents liés aux overdoses de GHB/GBL - drogue parfois associée à des pratiques de viols et de soumission sexuelle.
Du rapport sexuel en état d'ébriété après une soirée arrosée à des pratiques de slam à plusieurs chez les gays, de l’usage d’opium en aphrodisiaque à la prise de Viagra pour stimuler l’érection, les produits psychoactifs sont aujourd’hui installés dans le paysage des pratiques sexuelles. Pour autant, comme en témoignent les nombreux articles, écrits et enquêtes, cela n’a rien de nouveau et on peut dire qu’il en a toujours été ainsi. Et bien que les acteurs de santé ont souvent fait une distinction entre sexe et produits, leur association est très fréquente.
Les usages et pratiques en matière de consommmation de produits évoluent très rapidement, avec notamment des effets de modes. Tout produit psychoactif peut à un moment donné être consommé dans un cadre sexuel. Cela va dépendre des personnes, de leur environnement et de leur histoire. Il est donc utile de rappeler toute la palette de produits psychoactifs qui existent. Le tableau ci-dessous tente de reprendre de manière exhaustive la liste des drogues connues, utilisées. Son intérêt est qu’il dresse également les interactions entre elles et leur niveau de dangerosité. En effet, un produit est rarement consommé seul et la polyconsommation et la multiplicité des modes d’administration sont fréquentes chez les consommateurs. C’est notamment ce que l’on constate dans un cadre festif ou sexuel.
Tableau 1. Guide des combinaisons de drogues
L’appellation NPS (pour « nouveaux produits de synthèse ») désigne depuis les années 2010 les produits dont la composition chimique évolue pour s’adapter aux restrictions de vente et ainsi contourner les législations répressives. On y retrouve notamment les cathinones (méphédrone, 3-MMC, 3-CMC, 4-MEC, 2-MMC) utilisés dans un contexte de chemsex. Avant d’être interdits, certains produits étaient appelés “Legal highs”.
Dans un cadre sexuel, les principaux modes de consommation sont :
par voie orale : généralement le produit liquide ou la poudre est mélangé avec une boisson et ingéré. Il est aussi parfois enrobé dans un papier fin de type feuille à rouler, avant d’être gobé,
par aspiration nasale (“sniff”) : à l’aide d’une paille (en métal, papier, carton, plastique), le produit est déposé sur une surface plane et aspiré par voie nasale,
par inhalation buccale : notamment à l’aide d’un dispositif artisanal ou non qui permet de chauffer le produit et d’inhaler la fumée qui s’en dégage,
Dans le tableau 2 ci-après nous détaillons les produits psychoactifs qui font à ce jour l’objet d‘un usage dans un contexte sexuel, ainsi que leurs modes de consommation les plus couramment identifiés.
Tableau 2. Principaux produits psychoactifs utilisés dans un cadre sexuel en 2023
Urgences vitales (overdoses) : elles surviennent notamment avec le GHB/GBL dont le dosage et la fréquence rendent difficile la maîtrise des effets. Les services médicaux d’urgence ou de réanimation toxicologique font régulièrement le constat d’un nombre élevé d’overdoses de GHB/GBL chez les chemsexeurs, avec des décès liés à une insuffisance respiratoire.
Complications somatiques (intoxications, dégradation du capital veineux, plaies, irritations, déchirures dans le cadre de pratiques sexuelles hard, etc.)
Complications psychosociales : au sein de populations souvent déjà fortement précarisées et avec une prévalence de problématiques de santé mentale élevée, la consommation de produits dans un contexte sexuel ou seule, peut être associée à une dégradation de la santé mentale, du bien-être ou encore du lien social, du niveau de vie et du parcours professionnel de la personne. L’inscription des personnes dans un parcours qui englobe les dimensions somatiques, sociales et mentales est donc essentielle.
Un concept général, une déclinaison individuelle
Dès les années 1980, face à l’incidence élevée d’overdoses liées aux opiacées et d’infections au VIH puis au virus de l’hépatite C, ont été pensés un ensemble de programmes, d’interventions et de pratiques de réduction des risques (RdR). Ils ont notamment permis de faire grandement chuter le nombre d'infections au VIH chez les usagers de drogues par voie intraveineuse, dans les pays qui ont mis en place des programmes d’échange de seringues (PES). Parmi les autres interventions de RdR, on peut également citer les traitements de substitution aux opiacés (TSO), les salles de consommation à moindre risque (SCMR) ou encore l’accompagnement et l’éducation aux risques liés à l’injection (AERLI).
La RdR repose sur le principe d’une réponse individualisée, bienveillante et non jugeante, avec l’adhésion pleine et entière de la personne et qui prend notamment en compte trois grandes dimensions, résumées dans le tableau ci-après :
La RdR laisse une large place au savoir expérientiel développé par les consommateurs et partagés au sein des communautés. Ce savoir est indispensable pour diffuser des pratiques de consommation adaptées aux personnes pour réduire les risques, notamment face à l’absence de données de pharmacovigilance et dans un contexte de politiques répressives qui limitent la communication sur les pratiques et les dosages.
Stratégies de réduction des risques de consommation dans un cadre sexuel
L’arrêt de la consommation fait partie de la palette de RdR. Cela doit cependant rester une décision libre et éclairée de la personne, sans quoi le risque d’échec ou de retour vers une consommation vécue comme problématique est élevé. Les politiques de répression ou d’injonction au soin n’ont pas prouvé leur efficacité à lutter contre la consommation.
L’usage de produits dans un cadre sexuel conduit à un surrisque de contracter le VIH, les hépatites ou d’autres IST, notamment parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes. La consommation de produits peut en effet rendre plus difficile l’application de mesures de prévention ou de RdR et elle est associée à une multiplication des partenaires et situations à risque pour ces infections.
L’information sur les modes de transmission combinée à des dépistages réguliers permet de réduire les risques, de diagnostiquer et traiter de manière précoce une éventuelle infection transmissible sexuellement ou par le sang.
Toute personne consommant des produits dans un cadre sexuel peut également se voir proposer une prophylaxie pré-exposition (PrEP), bithérapie antirétrovirale qui permet d’éviter une infection au VIH et d’inscrire les personnes dans un parcours de dépistages réguliers du VIH et des IST.
Toute personne séronégative n’étant pas sous PrEP et ayant été exposée à un risque de contracter le VIH peut bénéficier dans un délai de 48h (ou 72h dans certains pays) d’un traitement post-exposition, trithérapie antirétrovirale à prendre durant 28 jours. Ces traitements sont généralement disponibles dans les services hospitaliers de maladies infectieuses ou les centres de dépistages (Cegidd en France).
Les vaccins contre les virus de l’hépatite A, virus de l’hépatite B, papillomavirus, mpox, méningocoque C sont vivement recommandés, notamment pour les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes.
Enfin, de récentes études menées chez des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes ont également montré un intérêt, en termes de RdR, de l’utilisation de doxicycline en prophylaxie post-exposition contre les infections à chlamydiae, gonocoque et syphillis chez des personnes à haut risque de contracter des IST bactériennes.
Les conduites addictives ont une origine plurifactorielle. Elles sont le fruit de la rencontre :
d’un individu (parcours de vie, compétences psychosociales, traumas…),
d’une ou plusieurs substances psychoactives ou d’un comportement (potentiel addictif de chaque produit/comportement),
d’un environnement (accessibilité de la substance ; valorisation sociale, culturelle et/ou commerciale du produit/comportement ; exposition aux risques psychosociaux dans la sphère personnelle et professionnelle, cadre légal…).
L’addiction se distingue du simple usage par le fait qu’elle est caractérisée par la consommation compulsive d’une ou plusieurs substances psychoactives (ou la pratique excessive et non maîtrisée d’un comportement) afin de produire un plaisir et soulager une sensation de malaise interne, ceci malgré la connaissance des conséquences négatives induites par celle-ci et le désir d’arrêter :
perte de contrôle du volume et de la fréquence de consommation/pratique,
modification de l’équilibre émotionnel,
perturbations de gravité variable de la vie personnelle, professionnelle et sociale,
troubles et dommages médicaux additionnés à l’addiction elle-même.
L’installation d’une addiction implique trois stades successifs :
la recherche de plaisir : activation du circuit cérébral de la récompense par la substance consommée ou le comportement effectué mettant en jeu la dopamine, la sérotonine et les récepteurs aux endorphines, conditionnant progressivement la personne (répétition de la recherche de plaisir par cette substance/pratique),
la répétition du plaisir en réponse à un état émotionnel négatif : la dopamine libérée à chaque consommation diminue progressivement et, de façon concomitante, le fonctionnement cérébral se modifie, induisant stress et émotions plus négatives,
la perte de contrôle : altération des circuits de la récompense et des émotions influent sur les capacités à s’autoréguler, à prendre des décisions et à résister aux envies de consommer. Cette perte de contrôle, aussi nommée craving, explique les reprises de consommation répétées, même lorsque le désir d’arrêter est manifeste.
Le diagnostic de l’addiction repose sur des critères bien définis, fixés par des instances internationales de santé mentale. Ainsi, pour établir un diagnostic, le monde médical a recours à deux grandes classifications :
le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM 5) de l'American Psychiatric Association et la Classification internationale des maladies de l’OMS (CIM 10).
La combinaison de plusieurs de ces critères permet de caractériser le degré de sévérité de l'addiction :
Présence de 2 à 3 critères : addiction faible
Présence de 4 à 5 critères : addiction modérée
Présence de 6 critères ou plus : addiction sévère
La classification de l’OMS fait apparaître les concepts d’usage nocif et de dépendance. Parmi les 6 critères de la dépendance de la CIM 10, au moins 3 des manifestations suivantes doivent avoir été présentes en même temps au cours de la dernière année pour établir un diagnostic d’addiction :
Le désir puissant ou compulsif d’utiliser une substance psychoactive
Des difficultés à contrôler l’utilisation de la substance (début ou interruption de la consommation ou niveaux d’utilisation)
Un syndrome de sevrage physiologique quand le sujet diminue ou arrête la consommation d’une substance psychoactive, comme en témoignent la survenue d’un syndrome de sevrage caractéristique de la substance ou l’utilisation de la même substance (ou d’une substance apparentée) pour soulager ou éviter les symptômes de sevrage
Urgences vitales
Les situations d’urgence vitale peuvent se produire lors de consommations de produits dans un cadre sexuel. Les overdoses et décès liés à la consommation de GHB/GBL sont ainsi fréquemment rapportés par les professionnels d’urgence et de réanimation ainsi que les acteurs associatifs. Toute perte de conscience, endormissement soudain, d’une personne ayant consommé des produits dans un cadre sexuel, doit amener à appeler les secours () pour avis et intervention.
Addictologie et prise en charge psychiatrique
L'addictologie est un champ de la santé couvrant les addictions. L’addictologue peut être un praticien de médecine générale, psychiatre ou un autre professionnel de santé, qui est formé à l’accompagnement de patients ayant des conduites addictives. Le rendez-vous avec un addictologue permet de faire un bilan et de mettre en place un suivi adapté, avec notamment l’intervention d’autres professionnels de santé ou spécialistes. A ce titre, une orientation vers une prise en charge psychiatrique peut être proposée pour diagnostiquer d’éventuels troubles psychiatriques associés aux pratiques addictives et ainsi proposer des traitements psychiatriques. Certains psychiatres sont également addictologues. Des séjours en service d’addictologie ou psychiatriques (cures) peuvent être proposés. Certains de ces services sont ainsi spécialisés dans la prise en charge de conduites addictives associant sexe et produits psychoactifs ou sur le chemsex.
Le suivi en médecine générale
Toute pratique de consommation de produits dans un cadre sexuel doit amener à consulter régulièrement un médecin généraliste afin de réaliser les contrôles réguliers adaptés, comme un dépistage des IST. Le médecin généraliste peut également être amené à prendre en charge certaines complications liées à l’usage de produits (abcès, atteintes veineuses, troubles psychologiques, saignements, rectites), orienter vers d’autres professionnels de santé et ainsi coordonner un parcours de soin adapté.
Suivi psychologique
Le suivi psychologique permet de proposer un espace de parole aux personnes souhaitant travailler sur leur vécu, leurs usages, pratiques et consommations et ainsi mettre en place une thérapie sur la durée. Il peut aussi répondre à un besoin ciblé tels qu’un trouble post-traumatique, fréquent dans le cadre de l’usage de drogues dans un cadre sexuel chez les personnes ayant notamment vécu une overdose.
L’importance de l’accueil et de l’accès aux droits
Les situations problématiques de consommation de produit sont souvent associées à des contextes sociaux marqués par la précarité, l’exclusion, un parcours de migration difficile ou un rapport compliqué aux services publics et au système de santé. L’accès aux droits sociaux existants (Aide Médicale d’Etat, ALD, PASS, aides au logement, etc.) participe au parcours de santé des personnes. Il s’agit d’une composante essentielle de la prise en charge globale au même titre que la gratuité de l’ensemble des soins.
Les dispositifs d’outreach hors-les-murs (interventions dans des lieux communautaires notamment) permettent de faciliter l’inscription des personnes dans des parcours de santé et d’accès aux droits.
L’auto-support par les pairs, le témoignage, le partage d’expériences, les entretiens individuels entre pairs, les espaces collectifs de parole sont des interventions de santé qui peuvent entrer dans le parcours de santé des personnes souhaitant faire le point sur leurs pratiques ou les faire évoluer. Ces espaces collectifs ou individuels sont généralement facilités par des associations communautaires ou de santé dans leurs locaux ou hors-les-murs.
Que l’on soit un professionnel de santé, un partenaire ou un proche, on peut être amené-e à écouter et accompagner une personne ayant des pratiques de consommation de produits dans un cadre sexuel. L’écoute, la bienveillance, le non-jugement sont essentiels pour construire une relation d’aide avec une personne qui consomme des produits. Les parcours de vie, les trajectoires, sont propres à chaque personne. A pratiques et consommations égales, deux personnes ne vont pas réagir de la même manière, certaines vont rencontrer de lourdes difficultés, d’autres pas. Tout usage de produits psychoactifs n’amène pas forcément à une consommation addictive, mais l’addiction et ses complications sont cependant fréquentes chez les consommateurs de produits, que celle-ci soit consciente ou non. Par ailleurs, les terminologies associées à l’addiction recouvrent généralement de lourdes représentations dans lesquelles les personnes peuvent ne pas se reconnaître. Dans l’accompagnement des consommateurs, il est donc important de veiller à la distinction entre usage et addiction. Si toute pratique de consommation de produits dans un cadre sexuel nécessite une attention particulière à sa santé, toute pratique n’est cependant pas vécue comme étant problématique par les personnes ; il arrive que l’on cherche à soutenir ou sortir des personnes d’une situation qu’elles ne jugent pas problématique. Un accompagnement peut parfois être lourd ou sembler vain. Il est important de ne pas rester seul dans une relation d’aide ou l’accompagnement en santé d’une personne et de pouvoir passer le relais.
Synonymes : Party’n’Play (Amérique du Nord), Chill/Fiesta (pays hispanophones), chemsfun
Le chemsex est un terme décrivant le phénomène de consommation de produits dans un cadre sexuel au sein de la communauté gay. La spécificité de l’histoire communautaire et des trajectoires des personnes, associée à une consommation et des pratiques spécifiques ou encore des conséquences sans commune mesure avec ce que l’on constate dans le reste de la population, distingue le chemsex des autres situations de consommation dans un cadre sexuel.
Plusieurs enquêtes rapportent une diffusion et une prévalence forte des pratiques de chemsex depuis la fin des années 2000.
Bien qu’il n’existe pas de définition officielle du chemsex, on peut retenir qu’il s’agit d’un phénomène caractérisé par plusieurs dimensions :
Une communauté : on parle du chemsex spécifiquement pour désigner l’usage de produits dans un cadre sexuel chez les hommes et personnes trans ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes et personnes trans. S’il existe des pratiques de consommation de produits dans un cadre sexuel dans toute la société, le terme est né au sein de cette communauté et notamment par les acteurs qui se sont mobilisés pour répondre aux besoins spécifiques qui se posent dans cette communauté.
Des produits spécifiques : on parle de produits qui stimulent l’endurance, la performance et la désinhibition (voir tableau ci-dessus). Des produits tels que l’héroïne, les médicaments détournés de leurs usages, etc. ne sont pas utilisés sur la scène chemsex. Inversement on retrouve de manière forte le crystal meth, les catinones (mephedrone, 3-MMC, 3-CMC, 4-MEC, 2-MMC, α-PHiP), GHB/GBL, cocaïne, ketamine/MXE, Viagra, poppers. Bien qu’au départ ces produits étaient principalement achetés sur internet ou partagés entre consommateurs-revendeurs, ils sont aujourd’hui aussi disponibles dans les circuits plus classiques de distribution (dealers).
La diffusion du chemsex a mis en exsergue certaines pratiques de consommateurs-revendeurs s’exposant à de lourdes conséquences juridiques, des situations de précarité dévoilant le partage de produits comme monnaie d’échange contre le sexe ou encore de situations fréquentes de rupture du consentement ou de violences sexuelles.
L’accompagnement de personnes pratiquant le chemsex nécessite une écoute et une attention particulière au contexte communautaire spécifique et l’histoire de la personne, notamment le vécu de l’homosexualité. Il existe des lieux dédiés à l’accueil de personnes pratiquant le chemsex et des professionnels de santé formés aux spécificités du chemsex.
Slam : terme utilisé au sein de la communauté chemsex pour désigner l’injection de produits psychoactifs.
par injection intraveineuse : avec une seringue et une aiguille, directement dans une veine. Au sein de la communauté chemsex, le terme “slam” est communément utilisé pour désigner cette pratique. Il n’est pas rare que divers sites d’injection soient utilisés, notamment lorsque le capital veineux est fortement dégradé. Des tentatives d’injections intraveineuses peuvent aussi manquer la veine et amener à l’injection de produit psychoactif à côté, avec un risque d’abcès et d’infection.
par voie anale (ou “plug”) : le produit est déposé avec un doigt, un objet sexuel (dildo) ou le sexe pour être absorbé directement.
Violences sexuelles et rupture du consentement,
Infections transmissibles sexuellement ou par le sang,
Risques juridiques liés à l’usage, la détention, la revente ou la mise à disposition de produits illicites.
Beaucoup de temps consacré à la recherche de substances ou au jeu
Augmentation de la tolérance au produit addictif
Présence d’un syndrome de sevrage, c’est-à-dire de l’ensemble des symptômes provoqués par l’arrêt brutal de la consommation ou du jeu
Incapacité de remplir des obligations importantes
Usage même lorsqu'il y a un risque physique
Problèmes personnels ou sociaux
Désir ou efforts persistants pour diminuer les doses ou l’activité
Activités réduites au profit de la consommation ou du jeu
Poursuite de la consommation malgré les dégâts physiques ou psychologiques
L'abandon progressif d’autres sources de plaisir et d’intérêt au profit de l’utilisation de la substance psychoactive, et l’augmentation du temps passé à se procurer la substance, la consommer, ou récupérer de ses effets
La poursuite de la consommation de la substance malgré ces conséquences manifestement nocives. On doit s’efforcer de préciser si le sujet était au courant, ou s’il aurait dû être au courant, de la nature et de la gravité des conséquences nocives
Soirées “Chill-out Chemsex” du SPOT Beaumarchais à Paris https://www.facebook.com/LeSpotBeaumarchais
Les applications de rencontre sur smartphone : l’usage des applications de rencontre ou de discussion associées au développement et la diffusion des smartphones à la fin des années 2000 a joué un rôle dans la diffusion et l’organisation du phénomène chemsex. Les applications telles que Grindr, PlanetRomeo, Scruff, Recon, MachoBB sont en effet très largement utilisées par des personnes ayant une pratique du chemsex, de même que les messageries sur smartphone pour la facilitation des rencontres,
Des besoins de santé spécifiques : la pratique du chemsex, quel que soit le vécu de la personne, engendre des besoins de santé. Cela peut aller d’une plus forte fréquence d’IST nécessitant des dépistages plus fréquents à une prévalence élevée des overdoses liées au GHB/GBL ou encore des situations d’isolement et de précarisation ou des troubles de santé mentale qui se cumulent à des parcours de vie mêlant son vécu de l’homosexualité.
Groupe Facebook Info Chemsex by AIDES https://www.facebook.com/groups/364799467186268
Expressions à éviter
Expressions utilisées par les personnes
Stupéfiants, drogues, narcotiques
Produits (psychoactifs)
Prods’
Chems’ (dans le cadre du chemsex)
Se droguer
Consommer (un produit)
Drogué, délinquant
Consommateur
Usages et pratiques
Contexte de vie
Histoire individuelle
Types de produits consommés
Qualité du produit et produits de coupe
Fréquence et quantité consommée
Environnement de consommation (lieu, communauté, pratiques)
Législation en vigueur sur la consommation et répression des consommateurs
Appartenance à une communauté exposés au risque VIH et IST
Consentement, volonté et envies
Vécu, histoire personnelle
Niveau de revenu et précarité
Vécu avec le VIH et/ou une hépatite virale
Usage unique de matériel d’injection stérile ou de sniff
Usage individuel du petit matériel de consommation de produits (cuillère, filtre, etc.)
Usage individuel d’objets sexuels et ustensiles utilisés dans un cadre sexuel (bouteille de lubrifiant, etc.)
Testing et analyse des produits
Désinfection des surfaces ayant pu être en contact avec des muqueuses, du lubrifiant ou des liquides contaminants (sang, sperme, sécrétions sexuelles, etc.)
Dépistages réguliers du VIH, des hépatites et des IST
Préservatifs internes et externes
Espacement des prises, réduction de la fréquence et des dosages, arrêt de consommation
Les mélanges accentuent les risques. Certains mélanges peuvent être mortels.
Réduction du nombre de partenaires sexuels
A chacune et chacun sa RdR !

























