Prévention du VIH
La prévention primaire de l’infection à VIH vise à réduire la transmission du virus d’une personne infectée à un individu non infecté et donc à éviter de nouvelles infections.
La réduction des nouvelles infections est essentielle pour espérer atteindre le contrôle de l’épidémie. En quatre décennies, les moyens de prévention à notre disposition ont fortement évolué.
Ils concernent les différentes voies de transmission du virus :
transmission par voie sanguine ;
transmission de la mère à l’enfant ;
transmission par voie sexuelle.
Prévention de la transmission sanguine
La transmission sanguine a été fortement réduite grâce (i) aux procédures sécuritaires mises en place dans le cadre du don du sang et, en particulier, le repérage préalable des donneurs à risque et le dépistage biologique systématique des échantillons prélevés ; (ii) au recours à du matériel d’injection à usage unique dans le milieu médical ; (iii) aux programmes de réduction des risques visant les consommateurs de drogue par voie injectable, dont les programmes d’échange de seringues et l’accès à la méthadone.
Prévention de la transmission de la mère à l’enfant
Concernant la prévention de la transmission de la mère à l’enfant, qui peut avoir lieu pendant la grossesse, l’accouchement et/ou l’allaitement, les antirétroviraux ont permis de réduire le taux de transmission, qui est de plus de 25 % en l’absence de toute intervention, à moins de 1% lorsque les combinaisons d’ARV sont utilisées le plus longtemps possible pendant ces trois périodes à risque.
En Europe, on parle même déjà d’une « élimination virtuelle » de la transmission mère-enfant, comme en Grande-Bretagne où ce taux était inférieur à 0,5 % à l’échelle nationale dès 2010-2011. Cependant, si les outils sont connus et disponibles, leur mise en œuvre dans les pays à ressources limitées reste difficile : bon nombre de mères et d’enfants ne bénéficient pas d’une prise en charge.
Prévention de la transmission sexuelle
Pendant longtemps, la prévention sexuelle a été envisagée principalement sous l’angle des politiques dites ‘ABC’ : Abstinence ; fidélité (Be faithful en anglais) et Condom (préservatif). Il s’agissait donc avant tout de modifier les comportements individuels, et ce de manière durable.
Les programmes centrés principalement, voire exclusivement, sur l’abstinence, en particulier sous l’impulsion du programme gouvernemental américain Pepfar, ont fait l’objet de nombreuses critiques. Leur efficacité n’a pas été démontrée scientifiquement et ils se sont avérés inadaptés aux besoins des populations. Le financement de ces programmes était avant tout motivé par des enjeux moraux et non de santé publique. Au mieux, l’abstinence peut constituer une stratégie à court terme dans certaines circonstances individuelles, mais n’est pas un moyen de prévention à moyen ou long terme pour la très grande majorité de la population en âge d’activité sexuelle et reproductive.
La fidélité, comme stratégie de prévention, ne s’avère quant à elle efficace que dans le cadre d’une relation stable et à condition qu’elle soit appliquée par les deux partenaires. Or, plusieurs travaux ont montré dans différents contextes des contaminations intracouples liées au fait que l’un des partenaires s’était infecté en dehors du couple. Des travaux en Zambie et au Rwanda ont estimé que la majorité des contaminations hétérosexuelles avaient lieu au sein d’un couple marié. Une monogamie unilatérale est inefficiente quand il n’y a pas prise en compte de l’existence de relations concomitantes dans un contexte de réseaux sexuels interconnectés.
Le préservatif, utilisé systématiquement et de manière adéquate, constitue un outil de prévention efficace, comme cela a été démontré très tôt dans l’épidémie. Cependant, son utilisation est rarement parfaite. Une observance de 100% pour le préservatif pour tous les actes sexuels tout au long d’une vie est un enjeu quasi impossible à l’échelle de la planète pour les deux sexes. Les femmes ont rarement l’opportunité de négocier l’usage d’un préservatif.
Outre une acceptabilité limitée dans plusieurs contextes, en particulier quand il s’oppose à un désir d’enfant, la fiabilité du préservatif n’est pas parfaite. Une méta-analyse a estimé que l’efficacité du préservatif était de l’ordre de 80% en comparant, dans différentes cohortes, les taux d’infection observés entre les personnes déclarant utiliser systématiquement le préservatif et celles déclarant ne jamais l’utiliser. Mais si le préservatif a été plutôt bien adopté par certaines populations, comme les travailleuses du sexe ou les jeunes au début de leur vie sexuelle, son utilisation dans les relations stables reste le plus souvent faible.
En théorie, le risque d’acquisition du VIH au sein d’un couple sérodifférent qui utiliserait systématiquement le préservatif serait de moins de 10% au bout de dix ans. Cependant, si l’on considère les taux d’utilisation tels que rapportés dans les enquêtes, ce risque serait de près de 70%.
Au cours des années 2000, la « boîte à outils » de la prévention s’est élargie progressivement, avec le développement de nouveaux outils comme la mise au point, l’évaluation et la diffusion du préservatif féminin, une importance plus grande accordée aux facteurs structurels (contexte légal, stigmatisation sociale, facteurs politiques, organisation du système de soins…) ainsi qu’au conseil et dépistage ou encore au contrôle des infections sexuellement transmissibles (IST).
Circoncision masculine
Dès les années 1990, un lien entre circoncision masculine et moindre transmission du VIH était suspecté. Il faudra attendre néanmoins 2005 pour que la dimension préventive de la circoncision masculine soit démontrée par des essais cliniques contrôlés et randomisés. Trois essais vont aboutir à la même conclusion : la circoncision masculine médicalisée réduit de 50 à 60% le risque de transmission hétérosexuelle du VIH de la femme vers l’homme. Ces résultats conduiront l’Onusida à recommander la mise en œuvre de programmes de circoncision volontaire et médicalisée dans les pays à haute prévalence, principalement en Afrique australe et de l’Est. Le gouvernement américain sera le principal effecteur de cette politique en soutenant très largement ces programmes sous l’égide du Pepfar.
Mais si la circoncision masculine médicalisée peut être acceptable et avoir un impact populationnel démontré sur le moyen et long terme, elle a été l’objet à ses débuts de nombreux débats. En effet, si elle peut constituer un outil de santé publique à l’échelle populationnelle, elle ne représente pas pour les hommes un outil de contrôle des prises de risque au quotidien, à l’échelle de chaque rapport sexuel comme peut l’être le préservatif. Quant aux femmes, elles ne bénéficient du rôle protecteur de la circoncision que par effet « boomerang ».
Antirétroviraux et transmission sexuelle du VIH
Les quinze dernières années ont permis la mise au point d’interventions biomédicales d’une très grande efficacité.
- Le traitement post-exposition (TPE) encore appelé « traitement d’urgence ». Il consiste, dans les 48 heures suivant une prise de risque, à prendre un traitement antirétroviral (le plus souvent une trithérapie) pendant un mois. Toutes les structures de prise en charge et les services d’urgence sont à même de fournir cette prestation.
On sait également depuis une dizaine d’années que les personnes séropositives sous traitement antirétroviral et dont la charge virale est indétectable ne transmettent pas le virus. C’est ce qu’on appelle le TasP (treatment as prevention, le traitement comme moyen de prévention en français). Cette stratégie préventive est présentée plus en détail dans le chapitre consacré à la fin du sida.
- La prophylaxie préexposition (PrEP) correspond, quant à elle, à l’utilisation d’antirétroviraux à titre préventif chez des personnes séronégatives pour le VIH. Elle est présentée plus en détail dans un chapitre dédié.
Figure 2. Synthèse de l’efficacité des différentes stratégies de prévention de la transmission sexuelle
Conclusion
On dispose aujourd’hui d’une palette diversifiée d’outils de prévention efficaces. Cependant, aucun d’entre eux ne constitue de solution miracle, adaptée à toutes et tous et à toutes les étapes de la vie.
La notion de prévention combinée, qui consiste à offrir un maximum de choix aux personnes les plus vulnérables, est essentielle si l’on veut espérer pouvoir, un jour, contrôler l’ épidémie de VIH, à condition de ne pas succomber aux sirènes d’un « tout biomédical » et de mesurer pleinement les enjeux programmatiques, opérationnels, sociaux, comportementaux et politiques qui nous font face.
Les préoccupations quotidiennes des personnes ne se limitent pas à la sphère de la santé. Des difficultés économiques, sociales, sentimentales, juridiques, environnementales peuvent faire obstacle au désir de prendre soin de sa santé. De même, les priorités sanitaires des unes et des autres ne se focalisent pas nécessairement sur la question du VIH.
Il est dès lors essentiel de penser la prévention du VIH dans une vision plus large de la santé, centrée sur les individus, notamment à travers des approches globales en santé sexuelle et reproductive. Une prévention efficace ne peut être atteinte par une réponse unique, mais en combinant des approches complémentaires, globales et intégrées.
Pour aller plus loin :
Section Prévention du livre AFRAVIH
Site web : prévention du VIH sur le site de Sida Info Service : https://www.sida-info-service.org/categorie/vihsida/prevention/
Site web : prévention sur le site de l’association AIDES : https://www.aides.org/prevention
Vidéo (re)penser la prévention des populations clés, plénière de Joseph Larmarange à l’AFRVIH 2020 : https://youtu.be/WgLLz8fpqGE
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